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Owen G. Leroy Publisher E-mail: owenleroy@gmail.com Tél: 312.593.8598 Karl Villanueva Managing Editor E-mail: viavision57@gmail.com Phone: 847-361-4864 Serge Papillon Managing Director Eimail: serpap2000@gmail.com Ketlie L. Acacia-Luckett Outreach Director E-mail: kekki56@aol.com Laurent Houphoué Digital Management E-mail: khoophx@gmail.com Sonia Lundy Information Director Email: jeannesonia22@icloud.com

Kinam Media Group 1341 Touhy Ave, Suite 1S Chicago, Illinois 60626 Tel: 312.788.8992 E-mail: kinamgroup@gmail.com

Koffi J. Erick Ahouansou African Correspondant E-mail: corefia52@gmail.com Tél: +229 61 55 67 56 Serge Fontaine Managing Editor Eimail: hero_2001@att.net Tél: 773-343-8225

June — July — August 2021 Volume 4, No. 8, 2021 —3—


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TABLE OF CONTENTS 6 .................................................................................... Just Another Day Par Owen G. Leroy 7 .............................................................. La Nation face à sa déchéance Par Max Dorismond 9 ....... Les hypothèses qui n’en finissent pas autour de l’assassinat du président Jovenel Moïse Par Hugues Saint-Fort 10 ..... Guy Sansaricq, Haitian-American bishop in Brooklyn, releases statement on Moïse assassination By Nate Tinner-Williams 11 ............................. Mgr Guy A. Sansaricq, premier Haïtien d’origine promu évêque aux États-Unis d’Amérique, n’est plus Par lenouvelliste.com 12 .................................. Dany Laferrière discusses his translated novels "I am a Japanese Writer" and "How to Make Love ..." Par The Toronto Quarterly Literary & Arts Journal 18 ....................................................................................................... Écolier Par Serge H. Moïse 19 .................................................... Le singulier destin de Jovenel moïse Par Max Dorismond 21 ................ M pèmèt yon moun vinn rakonte m radòt konsa, poum voyew anlè, m pa atrap ou ! Par Gérard Lahens FELIX 23 ................................................................... INTERGÉNÉRATIONNEL Par Anna Fayonna 24 ............ Martine Moïse, Wife Of Slain President, Returns To Haiti By The Associated Press 26 ....................... The Foreign Roots of Haiti’s “Constitutional Crisis” By Mark Schuller 30 .............................. LETTRE DE PAUL KAGAME AUX HAÏTIENS Le business de la haine... Par PAUL KAGAME 32 ........................... The Quit Report: The Silent Revolution in Labor By Karl E. Villanueva —4—


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35 ........................................................ Community of Love Celebration 38 ..................... La triste mésaventure des Haïtiens immigrés au Chili Par Jean SAINT-VIL 46 ........................ What Are The Major Natural Resources Of Haiti? By worldatlas.com 48 .................. Appel à participation aux intellectuels du pays en vue d’un effort combiné et assidu pour encadrer nos jeunes! Par Serge M. Fontaine 50 ............ Jacob Desvarieux, le père du Zouk, meurt des suites de la COVID-19 – Des tubes festifs chantés en créole Par Agence France-Presse 52 .............................................................. L’explosion du Palais national Par Charles Dupuy 55 ......... Au-delà de l’assassinat du président de facto Jovenel Moïse Par le Regroupement des Haïtiens de Montréal Contre l’Occupation d’Haïti 58 .................. Au Revoir, A Bittersweet Celebration of South Africa By Owen G. Leroy 62 ...................................................................................... La Belle Époque Par Serge H. Moïse 65 .......................................................................... Le lion de l’Artibonite Par Carl Fombrun 66 ..Il existe encore des hommes et des femmes honnêtes en Haiti !!! Par Cyrus Sibert 68 ..................................................................... L’ancre de la Santa Maria Par Charles Dupuy 70 .................................................... Je veux mourir au fond d’une jupe Par Jean SAINT-VIL

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A NEW DAY

Just Another Day... I spent this July 4th weekend relaxing on a vacation in New York City visiting my aunt of 93-year young and my former “compadre of cousins” of a long time ago. We used to play cowboy and indian fighting each other. On that “famous day,” I was starting breakfast with my aunt when my cousin entered the residence with two boxes of Haitian patés: One had poultry meat and the other fish. After serving us black coffee, he placed both boxes in front of my aunt and I. Calmy, he said, “I don’t know what your political position is, but I am sorry to announce to you that the President is dead.” I fell into an instant state of shock. Did I hear right? The president is dead! Which president? Trump or Biden? Forgive me, please. But not for a moment did I ever imagine it could be President Jovenel Moïse. The brain is rather slow at times when dealing with tumult. In my mind, I heard a replay of the news broadcast of the attempted assassination of President Ronald Reagan. I remember clearly that when I arrived at the Skokie El Station the conductor came out to the platform in tears while announcing that the President had been shot. Another dead president? Immediately I tried to locate my phone. At my aunt’s house, especially in her dining room absolutely no TV is allowed. WhatsApp was my only recourse. On my phone, I saw the gruesome pictures of Jovenel Moise. Butchered like an animal into pieces in his own bedroom. I cried out, “My Lord, does Haiti need more problems like this?” That was then. Now, today it is another situation at the border between Mexico and the US with a cohort of Haitians looking for a better life. Who had the vaguest idea that Haitians could reach the borders of the US while avoiding the high seas? The bridge at Del Rio is now not just another border in Texas. But a new chapter in Haiti-US saga. This time, the only thing that I can say is: “May God bless Haiti.” Photo by Karl Villanueva

Owen G. LEROY https://issuu.com/theowenleroyreport/docs/2021-june-july-august-rev_3 —6—


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COVID-19

La Nation face à sa déchéance Par Max Dorismond mx20005@yahoo.ca

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arfois, c’est dans la noir ceur ou dans la tourmente des épreuves qu’on voit poindre la lumière sur nos erreurs. Le malheur et la souffrance sont là pour nous réveiller. Si on les reconnaît à temps, la chance de les éviter à l’avenir augmente. Ce qui est le gage d’un futur prometteur, chez l’homme sensé. C’est la situation dans laquelle trépigne notre terre natale en ces jours si sombres. Nous ne sommes pas prophètes, mais nous devons penser que chaque Haïtien, en ce moment lugubre, s’interroge sur la fin tragique de tous les concitoyens, connus ou inconnus, dont la disparition, sous les assauts de la Covid-19, nous assomme, à chaque ouverture d’un courriel. Où se dirige Haïti? Est-ce une hécatombe?

Dans la 1ère semaine de juin 2021, la valse des morts nous interpelle et fait frissonner. Entre-temps, la liste de certains riches personnages, tels des éléments de l’élite politique, des affaires ou du protestantisme, contaminés, qui attendent, en vain, un avion providentiel privé de l’étranger, pour un transfert dans un hôpital outre-mer, nous laisse songeurs et suscite des interrogations. Pourquoi n’avons-nous pas hérité d’une institution sanitaire viable —7—

dans le pays? L’île de Cuba, croulant sous un sauvage embargo depuis 60 ans, à quelques encablures de nos côtes, nous fait la leçon avec ses hôpitaux avant-gardistes et la découverte surprenante de deux vaccins antiCovid au nom surréaliste : Abdala et Soberana (souverain). Nous, notre devise, c’est de voler, piller, ruiner, jouer aux fanfarons, toujours agrippés à la remorque de l’obole internationale. Souhaitons simplement que les vaccins à recevoir à titre de dons ne s’écoulent au marché noir.


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Néanmoins, cette pandémie, sans trompette, appelle à la raison. Les pays limitrophes ont tendance à fermer leurs frontières, même pour leurs ressortissants surpris ailleurs. Le virus est insaisissable. Ce n’est pas de l’égoïsme crasse, mais la loi du bon sens qui impose aujourd’hui sa rigueur et s’applique sans aucune commisération. Tous ont l’obligation de protéger leur territoire contre l’assaut du fléau. À titre d’exemple, « Tous les voyageurs âgés de plus de 5 ans qui désirent rentrer au Canada, quelle que soit sa citoyenneté, doivent fournir un résultat négatif à un test moléculaire de la Covid-19 ». C’est la loi! Or, c’est aussi dans l’épreuve qu’on regarde défiler, sur l’écran noir de la réflexion, la liste de nos stupidités qui faisaient hier la fierté de nos frivolités dans l’illusion qui sécurise. Une culture de diversion pour scinder la nation en deux catégories a été appliquée par certains clans : les instruits et les analphabètes, les riches et les pauvres. Cette division séculaire fut supportée dans son essence par une distanciation sociétale des plus saugrenues. Pour la perpétuer et la consolider, aucune école sérieuse, digne de ce nom, n’a été construite dans l’arrière-pays. Les paysans, la force vive de la nation, ont été exploités, trompés, discriminés sans vergogne et laissés à eux-mêmes. L’analphabétisme rébarbatif chez 95% de nos congénères en est une des conséquences délirantes, qui ont

plombé notre développement et toute conscience sociale. L’apartheid sectoriel entre frères de sang a engendré des écarts déroutants. Le pillage irrationnel du pays sous toutes les coutures ne souffre d’aucun complexe. Les coffres-forts personnels débordent de fric et l’absence de toutes infrastructures sanitaires pour des soins minimaux, sont deux autres corollaires de notre légèreté qui a pour résultat, citant Boucar Diouf, de créer «un empire qui vacille sous le poids des divisions, des réclusions identitaires et des haines croisées». La satisfaction dégoûtante et égoïste de se faire toujours soigner à l’étranger, via cette richesse occulte cumulée, s’avère être la norme. Le laisser-faire, le «laisser-grinnin» en raison de la vie de pacha déjà planifiée à se la couler douce en pays tiers, avait limité notre vision du futur, au point d’être surpris les culottes baissées par les aléas du destin, par ce virus à couronne, inattendu. Le refus de l’étranger de recevoir les riches contaminés, malgré leur fortune, leurs mirobolants placements sur son territoire, leur visa d’entrée, invite à une remise en question. Une interrogation sonore résonne au loin et vient « rebrasser» les cartes de l’incongruité en balayant d’un tour de main les fausses certitudes, les fallacieuses attentes, à savoir qu’étant riches à l’image du Blanc, nous serons acceptés chez eux, sans ambages, quoi qu’il advienne.

Le fruit du remords, même amer, doit nourrir le futur de la nation Nous ne souhaitons la mort de personne. Au contraire, nous prions le ciel pour leur prompt rétablissement, car l’homme blessé, ragaillardi, en se souvenant d’avoir frôlé l’inévitable, va s’arranger pour annuler la répétition du mal, surtout s’il avait erré par stupidité. Il se trouve dans l’obligation d’y remédier, sauf s’il est un cancre à lier. Même les animaux apprennent par l’exemple pour ne pas se heurter une autre fois au mur de la réalité. Ainsi naîtra la chance de la rédemption, de la résurrection d’Haïti, suite à un virage à 180 degrés de ces rêveurs impénitents qui vivaient dans le déni constant, dans la noirceur visqueuse de leur entêtement dans leur folie de grandeur, entraînant une nation entière dans la déchéance et dans la turpitude. Offrez-leur, surtout, l’occasion de se remettre à flot, de se reconstruire spirituellement, car l’homme est le forgeron de son destin. En ayant appris de leur légèreté, ils sont condamnés demain à conduire la société haïtienne vers l’union, la prospérité et le bien-être collectif, en étant frères avant toute chose. Quoiqu’on en dise, pour citer Anténor Firmin, «Un pays ne peut pas vivre définitivement sous l’empire de la misère et de la tyrannie».

Max Dorismond

« moïku » Chantons dansons et évitons de pleurer La vie est trop courte et il faut en profiter Pour avancer et ne jamais avoir à régresser Car le vrai bonheur est de savoir moissonner Par Serge H. Moïse / cabinet22moise@gmail.com —8—


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MON BOUILLON D’ACTUALITÉS

Les hypothèses qui n’en finissent pas autour de l’assassinat du président Jovenel Moïse

Hugues Saint-Fort

New York, juillet 2021

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en juger par la vigueur et l’intensité des spéculations sur l’assassinat du président Jovenel Moïse, le 7 juillet dernier, nous en avons encore pour longtemps. L’une des plus récentes révélations émane d’un journal colombien selon lequel ce serait le Premier Ministre haïtien par intérim, Claude Joseph, qui serait responsable de l’assassinat du président Jovenel Moïse. Apparemment, personne ne serait en mesure maintenant d’affirmer avec certitude qui aurait tué le président et mutilé son cadavre, tel qu’il a été révélé par les photos apparues sur le Net. Cela ne veut pas dire qu’on ne pourra jamais découvrir les auteurs de cet assassinat. Un vieux proverbe haïtien proclame que « Twou manti pa fon » (Un mensonge n’est jamais profond). Cela prendra peut-être quelque temps pour que soient révélés les auteurs de l’assassinat et les conditions précises dans lesquelles il s’est déroulé. Cependant, ceux qui suivent l’évolution de l’histoire et de la situation politique d’Haïti depuis plusieurs décennies ont déjà une claire idée des raisons pour lesquelles le président Moïse a été assassiné. Pour l’excellent analyste Dr. Jean Fils-Aimé, grand spécialiste de la culture et de la politique d’Haïti, le président Jovenel Moïse aurait été victime d’une conjugaison de feux nourris provenant de trois di-

rections différentes mais tendant au même but. Il y aurait d’abord le sceau de l’impérialisme américain et de ses intérêts géopolitiques, puis l’action directe et décisive des oligarques établis en Haïti, et finalement les luttes internes qui ont secoué le parti politique haïtien connu sous le nom de PHTK (Parti Haïtien Tèt Kale) auquel Jovenel Moïse lui-même appartenait. D’abord, l’impérialisme américain. C’est en juillet 1915, avec l’invasion et l’occupation d’Haïti par les « Marines » qu’Haïti tomba sous le joug de l’impérialisme américain. Jusque-là, malgré une présence américaine de plus en plus importante, plusieurs intérêts économiques européens (français et allemands surtout) s’affrontaient pour le contrôle de l’économie haïtienne. Le prétexte pour pénétrer sur le sol haïtien lui fut fourni par la grande instabilité politique et économique qui régnait en Haïti entre 1911 et 1915, « when six presidents succeeded one another in office, culminating with the lynching of the last one », (quand six présidents haïtiens se succédèrent au pouvoir, avec le lynchage du dernier, Vilbrun Guillaume Sam.) [ma traduction de Zéphir 2004 :45]. Signalons que vers la même époque, l’impérialisme américain occupa aussi Cuba, les Philippines et la République dominicaine. Pour comprendre la main—9—

mise totale de l’impérialisme américain sur Haiti, lire l’excellent article du politologue haitien Robert Fatton paru dans le magazine « Jacobin », 2021. Les Américains occupèrent Haïti pendant dix-neuf ans, de 1915 à 1934, rencontrèrent une certaine résistance, particulièrement de la part de plusieurs groupes de paysans haïtiens connus sous le nom de «cacos» sous les ordres d’un notable de l’époque, Charlemagne Péralte, qui fut malheureusement trahi et abattu par les forces américaines en octobre 1919. Depuis cette époque, l’impérialisme américain maintient un contrôle total de la politique et de l’économie haïtienne. A l’exception de Jean-Bertrand Aristide qui fut élu avec 67 pourcent du vote général en décembre 1990, aucun président haïtien n’a été élu sans la bénédiction des autorités américaines. Les oligarques qui opèrent en Haïti sont pour la plupart d’origine étrangère, surtout des Syro-Libanais. Cependant, un certain nombre a pris naissance en Haïti. Certains observateurs estiment que l’économie haïtienne est sous le contrôle presque absolu de ces oligarques qui sont milliardaires en dollars américains et sont représentés par une douzaine de Les hypothèses qui... en page 22


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Guy Sansaricq, Haitian-American Bishop in Brooklyn, releases statement on Moïse assassination By Nate Tinner-Williams - July 08, 2021 https://www.blackcatholicmessenger.com

America’s lone Haitian-American bishop, Bishop Guy Sansaricq, has released a statement on the crisis in Haiti, a little over a day after the president of Haiti, Jovenel Moïse, was assassinated at his home in Pétion-Ville following months of political turmoil and delayed elections. Sansaricq, founder and director of the National Haitian Apostolate and a retired auxiliary bishop of Brooklyn, was born in Jérémie, Haiti and has served in the US since 1971. He retired in 2009. His statement today was published with the Brooklyn ordinary, Bishop Nicholas DiMarzio.

“Today we unite in prayer with our brothers and sisters in Haiti. The assassination of President Jovenel Moïse has sent shockwaves throughout the world and threatens to further escalate the turmoil that has plagued Haiti for some time now.” “We join with the many Haitian American Catholics who call our Diocese in Brooklyn and Queens home in praying that calm and peace will win out during this distressing time. We know the uncertainty of what may happen in their ancestral homeland is weighing heavy on their hearts and minds. We ask the Lord to bring them comfort during this difficult time.” (Creole) “Pandan jou sa yo, nou ini nou nan lapriyè avek tout frè ak sè nou yo an Ayiti, e nap swete ki soley and a fanmi prezidansyel la, e a tout pep Ayisyen-an ki an dey. Asasina prezidan Jovenel Moise se yon gwo chok pou tout mond lan, epi li kapab ogmante pi plis soufrans pep Ayisyen an ki depi kek tan ap viv nan yon sitiyasyon malouk.” “Ansanm ak tout katolik Ayisyen-Ameriken ki nan dyosez Brooklyn ak Queens, mwen mete mwen nan lapriyè pou lapè ak sekirite rive tabli nan Peyi a.” “Nou konnen anpil Ayisyen ap viv nan kè sere epi yon genyen gwo kè sote sou sa ki kapab rive sou tè zanzet yo.” “Nou mande Bondye pou li ba yo rekonfò nan moman difisil sa yap viv la.”

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Mgr Guy A. Sansaricq, premier Haïtien d’origine promu évêque aux États-Unis d’Amérique, n’est plus Publié le 2021-09-02 | lenouvelliste.com — 11 —

es funérailles de monseig neur Guy A. Sansaricq, évêque de l’archidiocèse de Brooklyn, à New York ont eu lieu le jeudi 2 septembre dans la cathédrale Saint-Joseph à Brooklyn. Monseigneur Sansaricq, décédé le 21 août 2021, à l’âge de 86 ans, a donc rejoint sa dernière demeure quinze ans après son ministère comme évêque auxiliaire de Brooklyn. Les témoignages pleuvent sur le prélat originaire de Jérémie qui a voué toute sa vie au service de Dieu et de l'Église. « Il est jérémien comme moi, je le connais depuis l’école des frères. Tout jeune, il aimait Dieu, il aimait mais aussi la prière […] Il a grandi, été élevé dans l’amour de Dieu », a confié à Le Nouvelliste Mgr Alix Verrier, coreligionnaire et homologue du défunt, de deux ans son aîné. « Guy était proche de tout le monde. On n'avait rien à lui reprocher. Il cultivait une sensibilité pour les petites gens […] Partout où il était, il prenait toujours la défense des Haïtiens. On l’aimait bien, et il méritait d’être aimé aussi […] C’était vraiment une belle âme », s'est souvenu l’évêque émérite des Cayes qui, malgré son âge, n’a pas eu trop de mal à se remémorer les traits de caractère de son ami parti pour l’au-delà. Selon un communiqué de presse publié en date du 23 août 2021 sur le site web du diocèse de Brooklyn, l’évêque auxiliaire à la retraite, Mgr Guy A. Sansaricq, a rendu l’âme au presbytère à l'église Saint-Grégoire le Grand à Crown Heights, Brooklyn, le samedi 21 août 2021, après avoir exercé son ministère dans le diocèse de Brooklyn depuis 1977. Sur le chemin du retour des funérailles, le père Joseph Larose, prêtre faisant partie d’une communauté appelée les Montfortains, en route vers Brockton, a pris le temps de confier combien le choc, qu’il a ressenti en apprenant la nouvelle du

Voir Mgr Guy A. Sansaricq, en Page 56


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LITTERATURE

Dany Laferrière discusses his translated novels "I am a Japanese Writer" and "How to Make Love to a Negro Without Getting Tired"

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any Laferrière’s first novel, How to Make Love to a Negro without Getting Tired (Douglas & McIntyre, 2010), was first published back in 1985, and latter translated into English by David Homel. The novel is considered a cult classic and somewhat autobiographical as it

depicts a newly arrived young Haitian immigrant living and walking the streets of Montreal. He listens to jazz music (Coltrane mostly) and has sex with (usually blonde) white women he meets from the local university while writing a book intended to save his life. It is a raunchy and witty classic filled with the enormity of racial and sexual politics. Laferrière proves himself to be one of the finest North American literary provocateurs, citing the likes of Bukowski, Miller, Kerouac, and James Baldwin as being major influences on his writing. Dany Laferrière is the author of several acclaimed novels and the recipient of numerous awards, including the Prix RFO du Livre 2002 and Le Grand Prix du livre de Montréal 2009, and in 2009 he was named Québec Personality of the Year. We interviewed Laferrière, who speaks very little English, via email and translated his correspondence ourselves. We hope Dany will be pleased. I Am a Japanese Writer

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block by lounging (Douglas & McIntyre, in a hot tub, re-reading the works of Japanese poet Basho. The 2010) has novel seesa Laferriere strong odour of nationalistic pride to it as well, relentlessly pushing challenge the boundaries his readers of unwarranted in a celebrity and manufactured cult phenomena to way that can best unimaginable and be absurd degrees of sarcasm. There are plenty of references to, described and encounters as partwith streams of Japanese girls, and the sexual tension throughKafkaesque out flows likenightmare the smoothness of our hero’s scythe. andTTQWoody The Allen critics acidhave compared your writing style to that of Charles test. The story Bukowski, Henry is rife Miller, Jack Kerouac, and James Baldwin. Would you say with strangeness those comparisons andare warranted and tell us about some of the writers who awkward have influenced moments, youasinthe the early days of your writing career, and who's writing narrator you inspires nurses today? his lengthy battle Dany- My first book was written during the time when I was with working in a factory. I read a lot back then, and I still read a writer’s but many more authors than the ones you mentioned. lot, I would get home from work, slip into the bathtub with a book by Miller or Baldwin. Bukowski would come later. I read Kerouac around the time I was living in New York. I loved the writers who were always writing about the hum of the city in their books. They all often viewed life and writing the same way I did. I enjoyed reading Miller mainly because he often spoke of other writers, and I would always hurry to read the ones he mentioned. When I read like a writer, and the particular writers Miller cites in his books, I generally do not read the book necessarily for the purposes of reading the book, but I read them instead to better examine and understand the person behind the writing of the book. It's simply a way I try to get to know the author. It was Whitman, another of my favourite writers from that era who said "he who touches this book touches a man." I can not say that any of these writers have influenced me back then or today. I simply noticed that many of them viewed life the same way I did. My world became more complicated when I began writing of my Haitian experiences in my books. At that point, I was far from writing like Bukowski or Kerouac. Or even Baldwin. However, with Baldwin I walked alongside him the longest. TTQ- What was it about James Baldwin's writing that you so closely identified with and which of his books did you like best? Dany- The first book I read by Baldwin was a collection of essays — 13 —


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called No One Knows My Name: More Notes of a Native Son (1961) and I was immediately won over. His style of writing is so clear and precise, but at the same time, irrigated with a powerful lyricism. Baldwin lived in Harlem where he often heard the local pastors quote the Bible, calling for the Apocalypse. We find a similar tone in many of his books and particularly in his second collection of essay’s The Fire Next Time (1963). But at the same time he’s an intellectual who fearlessly analyzes the U.S., like nobody else had done before him. He tried to reflect on the crucial issue: racism. And against all those who proclaim a bloody sunset, he dared to believe along with his friend Martin Luther King in a radiant morning. And with all of this his vision never loses its clarity. The audacity of his thoughts left stunned an America accustomed to the separation of the races. TTQ- You mentioned working in a factory while you were writing your first book. What kind of factory job was it and at what point in your life were you able to write full time? Dany- I worked in several places. I started with a cleaning job at the Dorval airport. I worked there at night. Then I worked in a factory where they made carpets. It was cold and we worked in this open barn most of the time. I came close but failed on several occasions to cut my arm and hands with the machinery, as I had at that time just started writing and tended to daydream a lot while I was supposed to be working. Seeing that I was so careless, the other workers arranged for me to work in a safer

part of the factory. They felt obligated to protect me as soon as they found out that I was a writer. TTQ- What was it like for you growing up in Haiti and tell us about the circumstances of how you eventually immigrated to Montréal? Dany- After high school in Port-auPrince, I started working as a journalist. I wrote for a weekly political-cultural newspaper and I was also reporting on the radio. I was part of a large group of media who were against the Duvalier dictatorship. On June 1, 1976 one of my closest journalist friends, Gasner Raymond, was brutally murdered in broad daylight. I left Haiti a few days later after learning that I was also on a list of people Duvalier’s henchmen were preparing to assassinate. Was it true? I did not want to run the risk of staying to find out. I told no one but my mother that I was leaving Haiti because I did not want to risk putting my friends in any kind of danger. It was a political system at that time that drove people to paranoia. People would often suspect their neighbours of wrongdoing. That’s how dictatorships manipulate minds. I arrived in Montréal during the youth Olympics of 1976. Although, I did spend 12 years in Miami to write in peace, I moved back in Montréal again in 2002. I am here because of a generous gift, a plane ticket and a — 14 —

letter of invitation to Canada that was issued on my behalf, saving me from certain death or imprisonment. Despite the winters that frightened me so much during my early years living here in Montréal, I now look forward to winter. I’m a man from the south who now loves the north. TTQ- What was the experience like for you living in New York City and did those experiences affect your writing in a positive way? Dany- Yes, I loved living in New York. My eldest daughter was born in Manhattan in August 1980. It was so hot that day that the Daily News had announced that New York City was being boiled at 108 degrees Fahrenheit. The subway system impressed me a lot. I thought the people living there seemed absorbed by this ever-present feeling of loneliness


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and yet at the same time one would get the impression that all New Yorkers are a confident bunch. But New York and Paris are cities one does not come easily to mention in a novel. Once they are mentioned, they absorb the spotlight, and in a word they steal the show. I like living in Montréal and writing about Montréal best. TTQ- Your novel How to Make Love to a Negro Without Getting Tired is a satirical look at both racial and sexual politics encountered by a young Haitian man who has recently immigrated to North America, living in the slums of Montréal. Was your primary premise with the book to upset both blacks and whites, and do you think society

is still equally as fascinated with the modern black man? Dany- I think that it’s a mistake for readers to think factually, that the author of How to Make Love to a Negro Without Getting Tired was a young Haitian writer. I've said it a thousand times: I am a Haitian and I am a writer, but that does not make me a Haitian writer. The country of a writer is his first library. If you want to know where it comes from just look at the books he reads. It is a universe of the mind even if the place has importance. Especially in the beginning when one seeks to find a tribe in the jungle of the alphabet. The second point is that I lived in the heart of Montréal. I've never looked at myself as a minority. I was a laborer, lived in

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the Latin Quarter, I was reading Montaigne and Miller, I wrote, I drank wine, I was happy and I knew it. I chose the theme of my first book to be about the relationship of race and class because I like writing about explosive subjects. I looked around me in Montréal and life seemed too quiet. And these subjects did not exist in the literature in Québec where we pretended that there were no issues of class or race. I like to play the spoilsport. But instead my readers in Québec have received How to Make Love to a Negro Without Getting Tired with enthusiasm. Haitians have been more reluctant. Did I push my theme of class and race too far? I am not a sociologist. I write novels and my first concern is


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style. In any case the subject of Homer is far more outdated than mine, and yet we still read Homer. Literature is not sociology and more often than not it is the rhythm of the text that prevails over fact. TTQ- Were the events depicted in How to Make Love to a Negro Without Getting Tired an apt description of your early days living in Montréal, and were you in reality a prolific womanizer during that period?

the book is the absolute truth. This book is actually a logbook. At that time the girls would cross the staircase (the one who left looked up and down the other one who was arriving) and they were mostly students from McGill University and most were blond and rich. I was poor and talented. You choose which version to believe depending on your inclination. What is certain is that if you want the entire truth I may need to speak to you in the pres-

novel. However, looking back now, I am totally confused by him in many ways. All writers want the world at the beginning before taking the place assigned to them by their work. Books tend to make their own way alone, a way that is independent of the author, and even the reader. The book is a living being, sometimes more alive than its author. TTQ- It has been said that your novel I am a Japanese Writer is your personal take on

L’Académie française and its newest “immortal” Dany Laferrière greeted by Michaëlle Jean

Dany- You know, writers will often write about the things they lack and I’m no exception to that rule. I had no money for wine, so I soaked my [writing] book in wine. I did not manage to eat my fill, so I put food in my book. I lived alone. So, therefore, many girls appeared in my first book. There is a second version that states everything that happened in

ence of my lawyer. TTQ- How has your book How to How to Make Love to a Negro Without Getting Tired been received across Canada and in the United States? Do you have aspirations of becoming a famous writer worldwide? Dany- Do I still want to be a world famous writer? It was the dream of the narrator of my first — 16 —

nationalism, the identity politics especially in the cultural sector in Québec. Would that be a fair statement, and talk a bit about the title of the book, how did you come up with it? Dany- I found the title lurking somewhere, I suppose it was waiting for me in the recesses of my brain. For me a good title has always been an important thing.


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The title, well it's the head of the book, and if the title works well, it’s my opinion, the rest of the body [story] will fall into place. The book is entirely written about the issues of nationalism and identity. You see, nationalism is the plague of our time, and all times before us. These are subjects without charm; a writer’s job is to seduce his reader in such a way that easily defines the crux of the problem. In fact, I mean, you can write about all of these issues that are directly around us, but they will not resonate with my readers living elsewhere in the world. So, it is up to [me] the writer to intertwine the [hot] topics of the day with the classic themes: love, death, travel, coming home, and the sadness of everyday things in life that will hopefully be met with squinting eyes. TTQ- Do you read a lot of poetry and does poetry inspire you at all in writing your novels? Dany- I read poetry mostly at night in bed. I fall asleep with the book still open on my chest. I wake up and read a bit more, and it puts me back to sleep again. I cannot say the poets that I read inspire me all that much, because it is, to me, the secret world in

which nobody has access. TTQ- You happened to be in Haiti at the time of the devastating earthquake. Where were you when the earthquake hit and talk about the devastation you witnessed? Was your family there safe and what are your impressions of what’s going on today in the rebuilding of your homeland? Dany- I was there. I wrote a book that tells of what I saw and experienced during those tragic times. The book is called Everything is Moving Around Me. I went to see my mother the next day. She was fine. She is 89years-old and slept out in the yard with her younger sister (who died recently) and said to me that she had forgotten how magical it was to sleep outside under the stars. We are a resilient family. For the rest, I will keep my feelings to myself. TTQ- Does it sadden you that the media have stopped reporting as much about the plight of Haiti and the struggles of the Haitian people trying to rebuild their communities and lives? What more needs to be done? Dany- I think it’s an incorrect analysis to state that Haiti is no longer in the minds of people

simply because the media has stopped reporting on the events there. There are many media outlets still reporting the facts to the public. Once the public has been informed it’s up to people to act. And they do act. In reality, the process is a lot slower than when you look at things on TV, but people around the world are involved in Haiti. The elections have delayed things a bit, but at the same time it is fundamental that any State should eventually take things back into their own hands. Otherwise Haiti will lose everything. A country cannot be run by NGO’s alone, and the act of charity should not come with a political agenda. So, we must continue to be involved, calmly, and without upsetting the people of Haiti, and without any expectations that just because we are kind to another man we in turn hold all rights to him. I salute all those who are genuinely concerned about the plight of people they have never seen nor met before. They are all a credit to the human race.

Published on November 2, 2010 by The Toronto Quarterly Literary & Arts Journal

Personne ne sait de quoi est fait l’amour Personne ne sait De quoi est fait l’amour Personne ne sait Comment fonctionne l’amour Personne ne sait Rien de l’avenir de l’amour Personne ne sait Comment faire durer l’amour

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Personne ne sait Comment ressusciter l’amour Personne ne sait Déjouer les pièges terribles Que tend toujours l’amour Jean SAINT-VIL le 29 août 2016


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« Écolier » Un beau matin tu iras à l'école Et avec beaucoup de protocole Tu escaladeras alors les pentes Pour parler de choses savantes II Souviens-toi que le savoir Demeure source de pouvoir Hélas et ne pas en avoir Te condamnera au lavoir III Méfie-toi de ces formules Rédigées pour les mules Les répéter sans arrêt Fait de toi un perroquet Et pour bien faire la fête Sers-toi d’abord de ta tête IV Un beau jour tu seras professeur Guidant des esprits et des cœurs Tu deviendras peut-être avocat T’occupant de cas très délicats V Probablement le médecin Qui offre les meilleurs soins Ou encore un grand écrivain Et pourquoi pas un politicien VI Tu choisiras ce que tu voudras Dans la vie les premiers pas Se font à l'école maternelle Et pour que ta vie soit belle À tes bons livres accroche-toi Et fièrement avance à petits pas

Par Serge H. Moïse — 18 —


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OPINION

Le singulier destin de

Jovenel moïse Par Max Dorismond mx20005@yahoo.ca

C

e qui est arrivé à cette fa mille, je ne le souhaite pas à mes pires ennemis. C’est très dur, c’est très humiliant et pour le peuple et pour l’image d’Haïti. Quand le hasard du destin avait introduit Jovenel, malgré lui, dans la jungle des Ali Baba de la capitale haïtienne, j’avais rédigé un texte subliminal et prémonitoire, en 2017, « De Zéro à Héros... Le dilemme d'un président ». J’avais interpellé le côté humain du nouveau chef d’État, pour l’inviter à comprendre le jeu des coquins qui lui avaient confié le pouvoir, avec une arrière-pensée bien arrêtée. Il s’est retrouvé coincé dans les couloirs de la corruption. Dans mon livre, « Des mots pour conjurer nos maux », vous verrez ce texte à la page 218. J’avais exposé le scénario du film, avec deux conclusions possibles : soit qu’il finisse en ZÉRO ou qu’il meure en HÉROS. Il a opté pour le second. Que le ciel ait pitié de son âme et que son nom soit honoré aux frontispices de l’Histoire. Arrivé au timon des affaires, le jeune président se croyait dans une cour de récréation où jouaient des enfants de chœur. Oh non! Son constat fut effarant. Le lac immense de la dilapidation était infesté de crocodi-

les affamés qui gobent tout sur leur passage. Sa première pensée fut pour ses parents et la masse silencieuse du peuple exploité sans vergogne, comme de véritables esclaves s’échinant pour remplir les coffres des prédateurs. Il s’est alors mis en tête de réparer le sacrilège du temps .5 nettoyant Haïti, de la cave au grenier. Faisant acte de désobéissance, et pour désarçonner ses commanditaires, il monta au créneau en dénonçant les cinq plaies d’Égypte, soit la corruption, la corruption… Il reçut des avertissements. Certains des oligarques prirent le large, le tapis se rapetissant sous leurs pas. Et les réactions ne se firent point attendre. Les sabotages se multiplièrent sur les chantiers. Les médias complices l’attaquèrent de tous bords. La camarilla de l’opposition fit flèche de tout bois pour le décourager. Les invitations à la prudence ne cessèrent de pleuvoir. Jovenel, tête droite, fonça dans le tas. Il voulait en finir avec ce marché de dupes. Néophyte dans cette guerre d’usure, il a commis l’erreur de simplement menacer les renards au lieu de les coincer, en exprimant ses émotions sans faire l’économie de ses avertissements. Ainsi, a-t-il signé son — 19 —

arrêt de mort ! Étant riches à millions, ses adversaires, tel que décrit dans le texte témoin, étaient en mesure d’acheter le pays en son entier pour lui fermer le caquet. En réalité, c’est ce qui arriva. Des exécutants se présentèrent chez Jojo avec leur clé, sans invitation, ouvrirent la porte, pénétrèrent dans la demeure comme dans un moulin, et placèrent 12 balles dans le corps du 1ercitoyen de la cité. Le job signé, terminé, ils rentrèrent au bercail pour boire une bonne tasse de café chaud. Le message des signataires s’adresse aux futurs présidents d’Haïti Sans ambages, ce meurtre, signé du sceau de la mafia, laisse une note claire et indiscutable aux éventuels candidats au fauteuil présidentiel et aux postes de ministres, à savoir que lorsque vous êtes choisis par les maîtres du sérail, vous n’aurez droit à aucune fanfaronnade. Keep it quiet ! Tu t’exécutes ou tu crèves ! Tel sera le contrat du futur. Sinon, comme Jovenel, vous passerez au « Blender1». Et voilà, la table est mise. Pensezvous que la clientèle sera au rendezvous de demain ? Suivez mon regard,


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chers lecteurs. Entre le pouvoir et l’avoir, en Haïti, il n’y a qu’un trait d’union à titre de chemin. Cette piste est et sera toujours encombrée de prospects, de p’tits vicieux qui se voient déjà au nirvana, qui rêvent de la grande vie. Ils seront tous prosternés, les fesses à l'air, au pied des marionnettistes pour être les heureux élus. La mafia locale le sait bien. L’International qui tire toutes les ficelles à son avantage ne l’ignore pas,

non plus. D’ailleurs, ces faiseurs de rois ont pour habitude de choisir les cabochons les plus bêtes, les plus cancres, les plus dévergondés pour conduire la nation. Et l’élite en général les accepte sans broncher. Cependant, en 2016, pour perpétuer l’impunité, ils ont erré en embauchant, à titre de gardien, Jovenel Moïse, un p’tit gars du Nord qui serait trop heureux, dans leur optique, de franchir le mur de verre. Mais, ils se sont fourré le doigt dans l’œil. Ce fut un colis surprenant. Par conséquent, il leur a fallu tracer un exemple mortifère, une fois pour toutes, pour éviter ce type de dérive. Car, quand on jouit de certains privilèges, on doit être prêt à — 20 —

tuer pour les conserver, sinon, la fin est proche. C’est leur loi. À partir de cet échec, ils ont juré de remplir le vide avec un nouveau poulain en vertu de l’habituelle tradition. C’est une formule connue, au point que Erno Renoncourt, un journaliste vedette du blog Médiapart (France) eut à écrire : « Haïti a atteint un tel niveau d’insignifiance, par le déracinement culturel et la déshumanisation des élites qui s’y sont constituées, que la communauté internationale peut, délibérément à sa guise, mettre un chien à la tête de ce pays, qu’il n’y aura aucune indignation collective. Et même qu’il y aura des universitaires, des hommes d’affaires, des journalistes, des professionnels, des ONG pour continuer de vaquer à leur aubaine et à leur petite réussite en se mettant à disposition du nouveau pouvoir pour se rendre utile ». (Mediapart).(09-0721). Le monde entier a déjà lu notre romance. Rien de chez nous ne lui est étranger.


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OPINION

M pèmèt yon moun vinn rakonte m radòt konsa, poum voyew anlè, m pa atrap ou ! Par Gérard Lahens FELIX 11 Juillet 2021

S

ur les réseaux sociaux, au cours des 48 dernières heures, j’ai re marqué, de réelles tentatives de réhabilitation et même de béatification de l’ex-Président de facto d’Haïti Jovenel Moïse. M pèmèt yon moun vinn rakonte m radòt konsa, poum voyew anlè, m pa atrap ou ! Dites-moi, il ne s’agirait pas du même individu qui : - Avait pris frauduleusement le pouvoir en Haïti en 2016/2017 ? - Avait refusé de se retirer au terme de son mandat constitutionnel, le 7 février 2021 ? - A détruit en 5 ans toutes les institutions de ce pays ? - A volé et détourné tout l’argent de l’Etat avec ses acolytes ? - A organisé au moins une douzaine de massacres de populations civiles ? - A affiché son incom-

pétence et son antina-tionalisme à tous les vents? - A fédéré les gangs pour pourchasser de paisibles citoyens dans les quartiers populaires, a travers tout le pays ? - A mis en marche un projet de référendum constitutionnel pour couvrir toutes ses saletés, tous

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ses crimes, tous ses vols, toutes ses dérives ? - A pris un décret pour absoudre tous les voleurs de PetroCaribe ? J’ai remarqué deux ou trois saoulards sur les réseaux (textes et vidéos à la fois) qui ont essayé de justifier tous les forfaits qui ont été com-


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mis aux cours des dernières années. A les entendre, Jovenel a refusé de signer sa démission dans la nuit du 6/7 juillet et serait donc devenu un martyr pour la cause de ce pays. Comment, quelle cause et quel pays? Selon d’autres salauds/imbéciles, il a toujours défendu la cause des démunis, c’est pour cela qu’on l’aurait assassiné. Vraiment ? Pour d’autres enfin, sous son régime, le pays a fait des bonds énormes. Dans quels domaines, s’il vous plait ? FOUTAISES, que tous ces racontars. Je n’étais pas ailleurs qu’en Haïti, au cours des 5 dernières années. Et même plus. Le PHTK a tout dénaturé, en l’espace de 10 ans, d’un pays qui était, jusqu’en 2010/2011, encore un pays plus moins respectable, malgré de nombreuses faiblesses et visibles défaillances. Martelly et Jovenel ont tout bousillé, tout salopé, tout

détruit. Même l’espoir légitime de tout un peuple d’accéder à des conditions de vie meilleures. On ne peut pas jubiler après l’assassinat d’un individu, Président de facto en plus, si méprisable fut-il. De mon point de vue cependant, il n’y a

aucun regret avoir relativement au souvenir de certains spécimens aux échelons les plus élevés de la hiérarchie nationale.

Les hypothèses... suite de la page 9 familles. Selon l’hebdomadaire haitiano-américain, the Haitian Times, « these families control 90% of Haiti’s wealth…they allow the political class to exist to protect their narrow personal interests…They hold honorary diplomatic titles to their country of origin. That means they pay no taxes because, after all, they are diplomats…They own private ports with little oversight from the government…These people have had their knees on the necks of the Haitian masses for more than a century… » (ces familles contrôlent 90% de la richesse d’Haiti…elles permettent à la classe politique d’exister afin de protéger leurs étroits intérêts personnels….Elles détiennent des titres diplomatiques honoraires de leurs pays d’origine. Cela veut dire qu’elles ne payent pas d’impôts parce que, après tout, ce sont des diplomates…Elles possèdent des ports privés sur lesquels le gouvernement n’a aucun droit de regard. Ces gens ont leurs genoux sur le cou

des masses haïtiennes depuis plus d’un siècle…). [ma traduction]. Finalement, toujours selon l’analyse du Dr. Jean Fils-Aimé (JFA), le président Jovenel Moïse aurait été victime des luttes internes au sein du parti PHTK. Il n’est un secret pour personne que Michel Martelly envisage de se présenter à la prochaine élection présidentielle en septembre prochain, tout comme Laurent Lamothe, son ancien premier ministre, devenu entretemps son mortel ennemi. Apparemment, Jovenel Moïse semblerait favoriser Lamothe et Martelly ne lui aurait pas pardonné un tel revirement dans la mesure où ce serait Martelly qui aurait été l’artisan de la victoire de Moïse à l’élection présidentielle de 2016. Ce serait donc la combinaison de ces trois forces qui seraient responsables de l’assassinat du président Moïse. Elles sont extrêmement puissantes et disposent de moyens d’actions contre lesquels le président Moïse serait tout à fait impuissant. La partie était donc inégale. Plus que

jamais, les Américains restent les maitres du jeu et possèdent toutes les cartes en main. Cependant, je me permets d’attirer l’attention sur un autre article, celui d’Erno Renoncourt, paru sur Mediapart, en date du 17 juillet 2021. La démarche est différente de celle de JFA car elle vise d’autres pistes. Voici ce que M. Renoncourt écrit : « Comme disait Confucius, ce ne sont pas les réponses qui importent, mais la pertinence des questions. Car c’est à travers elles que l’on peut voir ce que personne n’ose voir. Surtout, celles que l’on refuse de se poser par paresse mentale, par corruption, par lâcheté et par soumission. D’où ma question finale : pensez-vous que la France, les USA, le Canada, l’ONU et l’UE ont intérêt à élucider un meurtre qui permettrait de remonter aux connexions mafieuses entre gangs locaux, mercenaires internationaux, capitaux étrangers, banques locales et trafic de toutes sortes ? »

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Gérard Lahens FELIX

Par Hugues Saint-Fort


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OPINION

INTERGÉNÉRATIONNEL Par Anna Fayonna

E

lle avait été douloureuse cette gifle! Surprenant et douloureux, ce surnom de « Boomer remover » affecté à la Covid-19 par les milléniaux! Était-ce là l’expression d’une haine implacable vouée aux babyboumeurs? Ou étaitce simplement la formulation d’un état de pensées, en accord avec la propension de ces nouvelles générations à extraire de toutes situations un élément risible? Alors que des milliers et des milliers de personnes âgées tombaient sous le coup de la pandémie, comme ça, tout naturellement, le terme « Boomer remover » avait fait son chemin sur le web et dans nos téléviseurs. Pourtant, ces babyboumeurs qui mouraient étaient avant tout les parents ou les grand-parents des milléniaux. Cette rancune -ou cette impertinence- à l’égard des prédécesseurs, comment avait-elle pu atteindre de tels niveaux? Il est vrai qu’on reproche aux babyboumeurs d’avoir connu l’abondance de l’après-guerre. Il est vrai qu’ils avaient souhaité avoir une vie plus aisée que celle de leurs parents de la génération silencieuse. Ces derniers avaient vécu la Grande Dépression, ainsi que les deux guerres mondiales; ils avaient tout supporté sans se plaindre, toujours travaillant dur, espérant qu’un jour une vie meilleure viendrait. Puis, entre 1945 et 1964, se sont pointés ceux qui allaient effectivement bénéficier d’une existence plus facile : les babyboumeurs.

On reproche alors à la génération baby-boom d’avoir été des profiteurs; d’avoir gaspillé les ressources, et d’être responsable des actuels problèmes environnementaux. Serait-ce qu’ils avaient cru bien faire, et qu’en un sens ils avaient peut-être bien fait. Car tous ces éléments du confort actuel, qu’ils ont su développer, avaient quand même apporté une grande amélioration dans les conditions de vie -aussi bien la leur que celle de ceux qui sont venus plus tard. Et leur soif de bien-être, de liberté ou de plaisir, n’était-elle pas légitime? Étaient-ils seulement au courant, en ce temps-là, des impacts futurs liés à la propagation des véhicules automobiles, à l’essor de certaines technologies, à l’utilisation du pétrole, à la surconsommation, etc.? Et maintenant, on ne fait que leur poser l’obsédante question : mais quel monde allez-vous laisser aux générations subséquentes? Avait donc suivi la génération X, entre 1966 et 1976. Celle-ci, au moins, aurait-elle dû prendre connaissance des effets du comportement humain sur l’état des ressources et sur l’état de la planète? Rien de moins sûr. Car une telle conversation n’avait probablement même — 23 —

pas encore eu lieu à leur époque. Ou, peut-être bien qu’elle se tenait, mais qu’elle n’était qu’un balbutiement, un chuchotement inaudible pour la multitude. Et puis, voilà, sont arrivés les milléniaux : la génération Y (1984 1996), talonnée par la génération Z (1997 - 2010). Nés sous l’emprise du numérique; ils ont grandi en familiers de l’Internet et des réseaux sociaux, avec une forte intuition pour ce qui est des manipulations informatiques. Du téléphone cellulaire, ils ont su faire un prolongement d’euxmêmes; une extension à ces trois sens que sont la vue, le toucher et l’ouïe, en plus d’un troisième œil photographiant ou filmant tout sur leur passage. N’oublions surtout pas leur possibilité de communication illimitée, de contact permanent avec leurs proches et le reste du monde. C’est ainsi que, par leur assiduité sur les réseaux sociaux, ces générations sont actuellement en train de prendre d’assaut l’humanité.

Suite en page 54


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POLITIQUE

Martine Moïse, Wife Of Slain President, Returns To Haiti THE ASSOCIATED PRESS Updated July 17, 2021 – Originally published July 17, 2021 — 24 —


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PORT-AU-PRINCE, Haiti — Martine Moïse, the wife of Haiti's assassinated president who was injured in the July 7 attack at their private home, returned to the Caribbean nation on Saturday following her release from a Miami hospital. Her arrival was unannounced and surprised many in the country of more than 11 million people still reeling from the assassination of Jovenel Moïse in a raid authorities say involved Haitians, Haitian-

Americans and former Colombian soldiers. Martine Moïse disembarked the flight at the Port-au-Prince airport wearing a black dress, a black bulletproof jacket, a black face mask, and her right arm in a black sling as she slowly walked down the steps of what appeared to be a private plan one by one. She was greeted by Interim Prime Minister Claude Joseph and other officials. Earlier this week, she tweeted from the Miami hospital that she could not believe her husband, Jovenel Moïse, was gone "without saying a last word," she wrote. "This pain will never pass." On Friday, government officials had announced that Jovenel Moïse's funeral would be held on July 23 in the northern Haitian city of CapHaitien and that his wife is expected to attend. She arrived hours after a key group of international diplomats on Saturday appeared to snub the man currently running Haiti by urging another politician, the designated prime minister, to form a government following Moïse's killing. Joseph has been leading Haiti with the backing of police and the military despite the fact that Moïse had announced his replacement a day before the president was killed. Joseph and his allies argue that the designated successor, Ariel Henry, was never sworn in, though he pledged to work with him and with Joseph Lambert, the head of Haiti's inactive Senate. The statement was issued by the Core Group, which is composed of ambassadors from Germany, Brazil, Canada, Spain, the U.S., France, the European Union and representatives from the United Nations and the Organization of American States. The group called for the creation of "a consensual and inclusive government." "To this end, it strongly encourages the designated Prime Minister Ariel Henry to continue the mission — 25 —

entrusted to him to form such a government," the group said. U.S. officials could not be immediately reached for comment. A U.N. spokesman declined comment except to say that the U.N. is part of the group that issued the statement. Meanwhile, an OAS spokesman only said the following: "For the moment, there is nothing further to say other than what the statement says." Henry and spokespeople for Joseph did not immediately return messages for comment. The group also asked that "all political, economic and civil society actors in the country fully support authorities in their efforts to restore security." Robert Fatton, a Haitian politics expert at the University of Virginia, said the statement is very confusing especially after the U.N. representative had said that Joseph was in charge. "More confusion in a very confusing and bewildering situation," he said. The question of who should take over has been complicated by the fact Haiti's parliament has not been functioning because a lack of elections meant most members' terms had expired. And the head of the Supreme Court recently died of COVID-19. A day after the assassination, U.S. State Department spokesman Ned Price noted that Joseph was the incumbent in the position and was serving as acting prime minister before the assassination: "We continue to work with Claude Joseph as such," he said. On July 11, a delegation of representatives from the U.S. Department of Justice, Department of Homeland Security, Department of State, and National Security Council traveled to Haiti. They reviewed critical infrastructure, talked with Haitian National Police and met with Joseph, Henry and Lambert in a joint meeting.


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OPINION Par Mark Schuller February 6, 2021

The Foreign Roots of Haiti’s “Constitutional Crisis”

A

s per usual, news on Haiti in the United States remains lim ited, except for during periods of “crisis.” As if on cue, U.S. media began reporting on Haiti’s “constitutional crisis” this week. Sunday, February 7 is the end of Haitian President Jovenel Moïse’s term, according to the constitution. He refuses to step down. This week, the opposition called for a two-day general strike, uniting around a transition with the head of Haiti’s Supreme Court stepping in. Most reporting failed to note the international role, and particularly that of the United States, in creating this “crisis.” And nearly all focused only on one segment of the opposition: leaders of Haiti’s political parties. Predictably, foreign media led their stories with violence. True, the security situation is deteriorating: Nou Pap Dòmi denounced 944 killings in the first eight months of 2020. But leaving the discussion at “gang violence” whitewashes its po-

litical dimensions: on January 22, leaders of the so-called “G9” (the group of 9), a federation of gangs led by former police officer Jimmy Chérisier, alias “Barbecue,” held a march in defense of the Haitian president. National Network for the Defence of Human Rights (RNDDH) reported in August 2020 that the government federated the gangs in the first place. This “gangsterization” occurred

On January 13, 2020— a day after the 10th anniversary of Haiti’s devastating earthquake—parliament’s terms ended, leaving President Moïse to rule by decree.

Jovenel Moïse speaks at his inauguration ceremony after taking the oath of office, Port-au-Prince, February 7, 2017. (UN Photo / Igor Rugwiza / Flickr) — 26 —


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without parliamentary sanction. On January 13, 2020—a day after the 10th anniversary of Haiti’s devastating earthquake—parliament’s terms ended, leaving President Moïse to rule by decree. One such decree came in November as the wave of kidnapping increased: the president out-

Haiti’s ruling Tèt Kale party got its start in 2011, when bawdy carnival singer Michel Martelly was muscled into the election’s second round by Secretary of State Hillary Clinton and the United Nations Special Envoy and co-chair of the Interim Haiti Reconstruction Commis-

international pressure, the final round was held weeks after Hurricane Matthew ravaged large segments of the country. It was the lowest voter turnout in the country’s history. Why would so-called “democratic” countries continue to support

Demonstrators demand accountability for the administration of the PetroCaribe funds. (Medyalokal / Wikimedia)

lawed some forms of protest, calling it “terrorism.” Readers in the United States should not need to be reminded of white supremacists’ violent attack on Congress and the U.S. Constitution on January 6 that killed at least six people, on the heels of coup attempts in Michigan and other vigilante attacks. In the United States, police killed 226 Black people last year. The irony of U.S. officials opining on violence, democracy, or the rule of law is apparently invisible to some readers. In addition to parallels of state violence against Black people in the United States and Haiti, missing from most stories is context about the specific roles played by previous U.S. administrations—from both parties—in fomenting and increasing that violence.

sion (IHRC) Bill Clinton. This support from the Clintons, the United States, and the so-called Core Group (including France, Canada, Brazil, the European Union, and the Organization of American States), never wavered, despite the increasingly clear slide toward authoritarianism. In 2012, Martelly installed allied mayors in all but a handful of towns. Then parliament’s terms expired in 2015, the five-year anniversary of the earthquake, with promises of holding elections never materializing. The vote that did finally lead to the election of Martelly’s hand-picked successor, Jovenel Moïse, was fraudulent. Yet the United States and the Core Group continued to play along—and offer financial support—until finally the electoral commission formally called for its annulment. Because of — 27 —

the Tèt Kale state? What was in it for Empire? Having to thank his friends in high places, Martelly’s reconstruction effort focused on providing opportunities for foreign capitalist interests to invest in tourism, agribusiness, sweatshops, and mining. Not surprisingly, donors to the Clinton Global Initiative made out like (legal) bandits.* Ironically, $4 billion available to help fund this disaster capitalism was from Venezuela’s PetroCaribe program, which offered low-cost oil and lowinterest loans. With the Haitian state safely under the Clintons’ watch, the transformative potential of this alternative to neoliberal globalization and example of South-South solidarity was squandered. Cue foreign mainstream media’s focus solely on “corruption” of this complex movement


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President Jovenel Moïse (left) of Haiti and first lady Martine Moïse (right) pose with Donald and Melania Trump in New York City, September 28, 2018. (U.S. Embassy, Port-au-Prince / Wikimedia)

demanding #KòtKòbPetwoKaribe? Where are the PetroCaribe funds? This popular movement was an extension of the uprising against International Monetary Fund-imposed austerity. On July 6, 2018, during the World Cup, the Haitian government announced a price hike for petroleum products. Right after Brazil lost the match, the people took to the streets all across the country and shut it down. In Kreyòl, this was the first peyi lòk—a lockdown or general strike. It was the first time in my 20 years working in Haiti that a mobilization brought together people from every socioeconomic status, at one point reaching two million people across the country (out of a population of 11 million). Faced with this popular swell of dissent, the government increasingly turned to violence, including a massacre in Lasalin, a low-income neighborhood near the port and a stronghold for the party of

former president Jean-Bertrand Aristide. Thinking back to my time in Haiti during the 2003-2004 coup against Aristide and comparing the people on the streets then and now, it seemed likely that Moïse would be forced out by November 2018. Certainly he would be gone by February 7, 2019—two years ago. So why is he still in office? Like his predecessor “Sweet Micky,” Martelly’s stage name, the “Banana Man” as Moïse was known during the campaign, had friends in high places. President Donald Trump met with Moïse and other right-of-center hemispheric heads of state at his Mar-a-Lago resort in March 2019. Haiti was crucial in the U.S.-led effort in the OAS to not recognize Nicolás Maduro as the legitimate president of Venezuela. Despite the billions in aid Haiti received from Venezuela through PetroCar— 28 —

ibe, and bilateral cooperation that began in 1815 when Haitian president Alexandre Pétion provided crucial arms and support for Simón Bolívar, President Moïse sided with Trump. In 1962, Haitian president “Papa Doc” Duvalier—whom history and solidarity movements judged as a dictator—did the same thing to Cuba, and the United States generously rewarded him. Given the new White House occupant, and campaign promises to the key battleground state of Florida, one might think that President Joe Biden would reverse course vis-à-vis Haiti. Why, then, would Immigration and Customs Enforcement continue to deport 1,800 people, some not even born in Haiti, sending not one but two deportation flights on February 4 alone? Making the connections, the Florida-based Family Advocacy Network Movement (FANM) sent an open letter denouncing state violence


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and violations of human rights. The voices within Haiti that foreign corporate media amplify are those of political parties. The Kolektif Anakawona outlined at least two other much larger opposition segments connected to grassroots organizing. On November 29, the popular organization coalition Konbit issued a five-language call for solidarity. The workers’ movement Batay Ouvriye outlined popular demands for whomever takes office. A group of professionals, Fowòm Politik Sosyopwofesyonèl Pwogresis Ayisyen (FPSPA), denounced the United Nations for rushing elections and its support for what FPSPA qualifies as a dictatorship. David Oxygène, with the popular organization MOLEGHAF, critiqued the political party consensus as olye yon lit de klas, se yon lit de plas—rather than a class struggle, it’s a struggle for position (power). Both he and activist Nixon Boumba underscore that the opposition plan is a shortterm solution, when Haitian movements are asking for long-term solutions and changing the system.

Activist-journalist Jean Claudy Aristil and others point out the fundamental hypocrisy and limits of “Western democracy.” Moneyed interests, including imperial powers, who dominate the political process in Haiti are by no accident part of the same transnational capitalist class that has rigged the system in the United States—the model for other political systems in the Americas. These Haitian activists and scholars are not asking for U.S. intervention in support of what Oxygène called 2 zèl yon menm malfini—two wings of the same vulture. They are asking for us to dismantle imperial interference and to join them in transforming our institutions so that people-to-people solidarity and a democratic global economy can then be possible. * Under his stage name Sweet Micky, Martelly released an album in 2008 called “Bandi Legal” (Legal Bandits). See Sabine Lamour’s essay in the forthcoming Spring 2021 issue of the NACLA Report.

La raison peut perdre la raison C'est beaucoup si ça va Jusqu'au bout de la raison de vivre De sentir qu'on est de trop Sur la jungle de la Terre Et de croire qu'on n'est au final Qu'un cheveu sur la soupe De la vie

Jean SAINT-VIL le 21 juillet 2021 — 29 —

Mark Schuller Anthropologist, NGO studies professor, Haiti solidarity activist Mark Schuller is Professor of anthropology and nonprofit and NGO studies at Northern Illinois University and affiliate at the Faculté d’Ethnologie, l’Université d’État d’Haïti. Schuller’s research has been published in over forty scholarly publications. Schuller is the author or co-editor of eight books—including Humanity’s Last Stand: Confronting Global Catastrophe—and codirector/co-producer of the documentary Poto Mitan: Haitian Women, Pillars of the Global Economy. Recipient of the Margaret Mead Award, Schuller is President of the Haitian Studies Association and active in several solidarity efforts. The North American Congress on Latin America (NACLA) is an independent, nonprofit organization founded in 1966 that works toward a world in which the nations and peoples of Latin America and the Caribbean are free from oppression and injustice, and enjoy a relationship with the United States based on mutual respect, free from economic and political subordination. To that end, our mission is to provide information and analysis on the region, and on its complex and changing relationship with the United States, as tools for education and advocacy - to foster knowledge beyond borders.


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OPINION

LETTRE DE PAUL KAGAME AUX HAÏTIENS Le business de la haine...

J

e me suis toujours demandé, en lisant les rapports de guerre communautaires sous d'autres cieux, comment des gens qui vivaient en bonne intelligence, en étaient arrivés à se massacrer comme des animaux. Comment les Bété et les Dioula en Côte d'ivoire ou les Tutsi et les Hutu chez moi au Rwanda avaient pu aller aussi loin. Comment des gens en arrivaient à tuer suite à un mot d'ordre de personnes qu'ils n'avaient jamais vues, avec qui ils n'avaient eu aucune relation, et dont l'unique chose qu'ils avaient en commun était la tribu... En regardant la scène haïtienne, je crois que je commence à comprendre avant qu’elle ne prenne le chemin emprunté hier par mon peuple. Alors je t'écris aujourd'hui, jeune haïtien, pour te dire ce que tu sais peut-être déjà. La haine est un business, et aussi un formidable ascenseur pour les politiciens professionnels pour accéder aux privilèges qu'ils — 30 —


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convoitent. Ce business repose sur qu'il commence à 3000 morts. un postulat simple: «Tu n'es pas Un matin, du fond de ton lit ce que tu devrais être ou là où tu d'infortune, tu l'entendras dans le devrais être parce qu'un autre s'est journal officiel: Création de la mis entre toi et ton destin. Il faut commission de réconciliation. Et donc l'éliminer.» C'est ainsi que les qui sera nommé à la tête de cette entrepreneurs de la haine réussis- commission? Le même type qui sent à embarquer les gens dans leur t'avait dit que c'est l'autre qui est entreprise. responsable de ton malheur. Tu le Alors toi qui me lis, et qui as verras, tout sourire, promettre au déjà limé ta machette, prêt à en JT de 20h, oeuvrer pour la récondécoudre, toi qui attends impa- ciliation et t'appeler à pardonner. tiemment le Jour J pour en finir La commission sera créée avec un avec ceux qui sont responsables de budget de 25 milliards qu'ils vont ta situation, je vais te dire dès se répartir entre eux au travers des maintenant ce qui t'attend au pas arnaques appelées consultations. de la porte: Tu seras là, au fond de ton lit de Tu vas rencontrer en face, fortune, le regard noir, la jambe d'autres jeunes, braves comme toi amputée, perdu dans tes pensées, et encore plus vicieux, eux aussi avec une longue liste de comptes à nourris à la mamelle de la haine regler. Mais là dehors la donne a comme toi et ne reculant devant changé. Tu ne peux plus massarien. Tu en tueras un grand nom- crer impunément. Et même si tu bre, mais tu perdras aussi un grand le voulais encore, tu n'en as plus nombre de frères, de soeurs, de pa- les moyens ni la force. rents, d'amis, de connaissances, de C'est là que tu te rappelleras relations... Ton avenir t'attendra que, comme par magie, aucun de sagement au coin d'une rue en ceux qui t'ont mené là où tu es n'as terre, dans une tombe, quand tu été tué, ni eux, ni leurs familles. tomberas dans une embuscade, ou, si tu es chanceux, dans un hôpital de fortune, Génocide au Rwanda où tu seras pris en charge par un médecin de la croix rouge. Tu auras le visage défiguré, les marques de la guerre bien visibles sur ton corps déchiqueté. Tous les jours RFi se chargera de faire le décompte des morts, en attendant qu'il atteigne le seuil qui déclenchera l'indignation de la «communauté internationale». Certaines mauvais langues disent — 31 —

Mon frère, sache que dans ce business, tu ne seras qu'un pion. Demande aux dioula et bété de côté d'ivoire, aux Hutu et Tutsi de chez moi qui sont obligés aujourd'hui de se tolérer, de vivre ensemble par les mêmes qui leur avaient dit que ce n'était plus possible. Pense à ces gens qui sont obligés de vivre aujourd'hui avec les séquelles d'une guerre qui n'aurait jamais dû vivre, et qui sont obligés de garder leur frustration en sourdine, la rancoeur plein le coeur, et l'avenir en pointillés... C'est ça que tu veux pour toi et ton pays ? C'est ce genre d'avenir que tu veux pour toi et tes enfants? “Sache donc que dans une guerre civile, il n'y a que des perdants. Et que, quelle que soit la force de ton clan, à la fin, on vous imposera la #réconciliation. Voilà, tu ne diras pas que je ne t'avais pas prévenu. En limant ta machette ce matin, relis bien mes paroles, elles sont celles d'un type qui a vu ce qui s'est passé dans son pays.


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OPINION

The Quit Report:

The Silent Revolution By Karl Villanueva

Thirty-nine years ago a British national suffering from a middle-age crisis pulled up stakes in his UK enclave and headed south to the hinterlands — 32 —


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of a small Central American country. Overnight, he constructed a convenience store with the dimensions of a lemonade stand. In fact, it had no walls. At first glance, it did appear to be a lemonade stand. He reclined on a comfy lawn chair in khaki shorts behind a counter and waited patiently for the day's business. Soon, his radical transition from cutting-edge First World squalor to impoverished Third-World subsistence caught the attention of the press. Why was he such a picture of contentment and displayed little or no sign of stress. Blessed with time on his hand, the laid-back Brit indulged a reporter with an eye-opening interview. In a nutshell, he confessed he had figured out a way to escape, "the rat race." As you may know, since the Industrial Revolution mankind paces on a man-made treadmill keeping abreast of the production of goods and services on a global scale at a maddening click. While his fellow Britons considered Belize a backwater haven fit only for mosquitoes, this misfit found an utopia he would abandon only in a body bag. He had adjusted well. He enjoyed his new lifestyle as a minimalist. Today, the on-going fallout of COVID-19 has exposed some serious faultlines in the capitalist world. The weakest pressure points appear to be at the very bottom of the food-

chain where essential workers eek out a living straddling the poverty line. Just under four millions workers failed to return to work in April. Hardest hit by the aftershocks are the hospitality, restaurant, and retail sectors. Those fissures have opened up wide wounds in an economy that have characterized a deepening divide between rich and poor. It is too early to tell if the proliferation of US Government unemployment checks is the real culprit for truant workers. But it is becoming increasingly clear that workers have lost interest in the exploitative job market. No mas. This week, some surveys blame burn-out. Workers felt they were grossly overworked, underpaid and under appreciated. Indicators also point to a lack of incentives. That is, the absence of basic benefits like healthcare. The rising cost of daycare which has exceeded an average mortgage payment is another cause-celebre for the noshows. Daycare cost an average $250.00 per week and painfully $2,300.00 per month. Even when a few companies introduced 401K programs to entice

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employees, there has been no mad rush to fill vacancies. The continuing success of the Affordable Care Act introduced by the Obama administration has enabled many workers to forgo work. Whereas, previously a sizeable percentage of workers stayed on the grind particularly as a safety net for heathcare benefits, Obamacare has eliminated that concern. Detractors to Obama's legacy have battled his signature achievement by staging 71 court challenges and three Supreme Court hearings. Some employees, especially immigrants long considered unskilled workers, have started their own business. Apparently, they are skilled enough to provide services for a business. In Chicago, Hispanics are the fastest growing entrepreneurs in the city. In Ohio, unprotected Hispanic workers at a meat-processing plant were unnecessarily exposed to COVID-19. Some management personnel even wagered on how many were likely to fall ill to the infection. Thousands of essential workers in the retail industry succumbed to the pandemic receiving no compensation for its deadly exposure. Only


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nurses working in direct contact with COVID-19 victims were able to scrounge for additional pay and bonuses. Meanwhile, huge corporations like Amazon racked up billions in record earnings. No profit sharing was offered to employees who faced the brunt of the pandemic. To add insult to injury, huge corporations continue to dodge taxes.They actively lobby against President Biden's infrastructure policy that seek to appropriate higher taxes on the wealthy. Instead, they are pushing for additional taxes to consumers on gas usage and higher sales tax on electric cars. Despite the fact that corporations are more likely to benefit from infrastructure development, they are the least likely to agree to increased taxation targeting their pocketbooks. Biden has pledged that taxpayers declaring less than $400,000 annually will not be on the hook for his spending ways. Today, there are more posted vacancies than eager job applicants. Hence, market forces have finally caught up with cocky employers. Workers now enjoy leverage, a phenomenon unheard of for decades. President Biden recognized this new bargaining chip when he suggested recently to, "pay them more." The balance of power is now in the hands of employees. At last, workers have the power to reverse low, stagnated wages, demand flex hours to enjoy a better quality of life and press for humane working conditions to safeguard better health. Not too long ago, corporations dodged the 'benefits bullet' by contracting workers through employment agencies that acted like middlemen. These designated

hitters wielded a huge bat turning away undocumented workers, and conducting background checks to bar felons and undesirables. Both the Obama and Trump administration were very unfriendly to illegal immigration. The number of undocumented workers crossing the Southern border slowed to a trickle. ICE raids on factories and workplaces were commonplace. Obama eventually earned the moniker 'Deporter in Chief.' A third of employers raised salaries in May. Some have gingerly introduced sign-on bonuses hoping it is hopefully just a temporary fix. Almost 800,000 jobs were added in May. In that same period, 9.2 million job listings remained open even though companies offering $15.00 an hour have doubled. By August, job openings rose to 10.1 million. Inventory of new homes dipped nationwide triggered by a scarcity of building materials and massive labor shortages. To keep up with growing demand for new homes, the housing industry and construction trades need one million new workers.

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Just hoping people will go back to work will not cut it. Some companies are offering training to new people across the country including younger employees that cannot afford to pay for college. Some are offering a second chance in life to convicted felons. Others like Jerry Howard, CEO of National Association of Home Builders, are depending on President Biden to fix the immigration system bringing new legal immigrants into the job market. More than two dozen states have discontinued unemployment payments to prod workers back into the workforce. Since COVID-19 ravaged the country, 22 million jobs were lost. So far, 70% of jobs were recaptured. But today, 11 million Americans are unable to pay their rent. Nowadays, it takes two minimum wage full time jobs to pay rent. The US added 943,000 new jobs in July. Over the summer, teens entering the work force and seasonal

The Silent Revolution... on Page 73


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The Community of Love Organization International is celebrating A gala honoring four prominent local Haitian leaders was well attended by well-wishers, friends and family despite pandemic fears. They came together to celebrate the achievements of these leaders who excelled in sports, business and

All photos by Karl Villanueva — 36 —


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philanthropy. It was a moving experience for relatives who learned just how important the purposeful lives of the awardees were. On this 4th Anniversary of Community of Love International, they toasted the heroic efforts of those who have made their communities better and also the lives of loved ones who have passed on during COVID-19 .

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ETUDES

La triste mésaventure des Haïtiens immigrés au Chili

T

Par Jean SAINT-VIL

oute la presse internatio nale parle depuis la se maine dernière des misères des Haïtiens venant de plusieurs pays d’Amérique du Sud et d’Amérique Centrale qui, après être arrivés en masse au cours des dernières semaines à Tapachula au Mexique se sont agglutinés aux portes — 38 —

des États-Unis, sous le pont Del Rio dans le Texas, dans l’espoir de pouvoir arracher le droit d’entrer au pays de l’Oncle Sam. Une situation qui n’est pas sans rapport avec l’immigration de nos compatriotes immigrés en Amérique du Sud depuis le lendemain du tremblement de terre du 12 janvier 2010 et en parti-


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culier au Chili où leurs conditions de séjour se sont gravement détériorées depuis 2018. En effet, cette communauté forte de 185 865 personnes en 2019 qui reste solidaire des siens en Haïti est confrontée à des difficultés accrues depuis trois années, exposée partiellement au risque d’expulsion alors qu’elle considérait le Chili comme un Eldorado où elle croyait pouvoir vivre de manière nettement plus confortable que dans son pays d’origine. Tous les ingrédients sont réunis pour que l’on puisse qualifier de triste mésaventure la situation de nos compatriotes qui vivaient et qui vivent encore au Chili où la réalité est de toute évidence très cruelle pour eux dans beaucoup de domaines. Le texte qui suit fera état de la démographie de la minorité haïtienne dans ce pays d’accueil, des conditions de son implantation ainsi que des immenses difficultés auxquelles ses membres sont confrontés sur cette terre de l’hémisphère sud.

1. La démographie des Haïtiens du Chili

risme du Chili indiquent que le nombre d’entrées des Haïtiens au Chili est passé de 392 en 2008 à 477 en 2009 et à 820 en 2010 et que 669 Haïtiens sont arrivés dans ce pays entre le 1er janvier et le 30 juin 2011. À la faveur de la générosité de Michelle Bachelet, Présidente du Chili entre 2014 et 2018, les arrivées de nos compatriotes qui ont suivi le début de la vague de l’immigration massive au Chili après le tremblement de terre du 12 janvier 2010 ont commencé à s’accélérer depuis l’année 2016. En effet, cette année avait vu débarquer 43 898 Haïtiens, à un rythme d’environ

1.1. Une émigration très récente L’émigration des Haïtiens au Chili est très récente puisqu’on ne comptait que 4 000 Haïtiens installés dans ce pays avant 2013. Si l’on remonte plus loin, on se rend compte que l’effectif de la communauté haïtienne ne s’établissait en 2002 qu’à une cinquantaine d’habitants. Des données plus précises fournies par le Service national du tou— 39 —

3 660 par mois. Ce qui avait alors porté l’effectif de la communauté haïtienne dans ce pays aux environs de 50 000 individus. Les données statistiques officielles du Chili ont révélé que de 2010 à 2016 où l’accès à la résidence définitive était facile, 42 293 avaient pu bénéficier de ce changement de leur statut dans le pays. On peut considérer l’année 2017 comme l’âge d’or de la migration des Haïtiens au Chili avec 104 000 arrivées, à un rythme de 6 660 par mois qui était presque le double de celui de 2016. En même temps, 44 269


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d’entre eux ont pu acquérir le droit de résider définitivement au Chili. D’après la Policia de Investigaciones Chilenas (PDI), on avait observé entre janvier et juillet 2017 une première flambée de l’émigration des Haïtiens au Chili, matérialisée par l’en-

trée de 43 289 de nos compatriotes. Les cinq mois suivants avaient vu l’apogée de cette immigration avec un contingent de plus de 60 711 Haïtiens. La Policia de Investigaciones Chilenas avait fait état de 179 338 Haïtiens vivant dans ce pays en 2018 et de 185 865 en 2019. Ce qui montre que le différentiel entre les deux années ne dépassait pas 6 527 personnes, soit le plus faible accroissement depuis l’année 2015. C’était le pic de l’effectif de la communauté haïtienne dans ce pays qui, depuis a commencé à décliner pour plusieurs raisons. Selon les données de l’INE, l’Instituto Nacional de Estadisticas du Chili, publiées en 2021, la diaspora haïtienne dans ce pays pèse encore d’un poids important puisqu’elle arrive en troisième position parmi les communautés étrangères vivant dans

ce pays, soit 12,5%, après les Vénézuéliens (30,5%) et les Péruviens (15,8%).

1.2 Les grandes caractéristiques démographiques de l’immigration haïtienne au Chili Nous nous en tiendrons à trois grandes caractéristiques démographiques de l’immigration haïtienne au Chili. La première caractéristique démographique de cette immigration est une grande prédominance des hommes, qui représentent 64,1 % de la communauté contre 35,9% de femmes, soit à peu près deux hommes pour une femme. Cela se comprend puisque l’immense majorité des migrants sont venus en éclaireurs dans l’espoir de faire entrer par la suite leurs femmes et/ ou leurs familles. La deuxième caractéristique démographique de cette immigration est l’écrasante domination des jeunes puisque plus de — 40 —

60% des immigrés ont un âge compris entre 20 et 34 ans, dont 26% pour les 25 à 29 ans. Il faut souligner une amélioration du sex-ratio au fil des années avec l’arrivée de nombreuses femmes depuis 2016. Car, vers 2015, on trouvait 68% d’hommes contre 21 % de femmes dans la population haïtienne immigrée au Chili. Enfin, la dernière caractéristique de cette immigration était une origine de prédominance rurale, marquée par le fait que de nombreux paysans n’hésitaient pas à vendre leurs terres pour émigrer au Chili, tandis que parallèlement certains citadins avaient emprunté de l’argent à leurs parents ou proches pour payer leurs billets d’avion et le montant nécessaire à leur installation dans le pays.

2. Les changements de la politique migratoire chilienne depuis 2018 Le Chili a longtemps figuré parmi les rares pays n'ayant pas instauré une politique pour refouler les migrants haïtiens qui arrivaient pratiquement sans contrôle jusqu’en 2017, et ce, à raison de plusieurs vols hebdomadaires depuis l’aéroport de Port-au-Prince et de deux avions entièrement remplis par jour de la compagnie Latin American Wings (LAW). Ces arrivées massives étaient attisées par une série de complicités, notamment de compagnies aériennes et d’entreprises haïtiennes qui ont profité de la naïveté de plusieurs de nos compatriotes. Il faut ajouter que ce pays de 17,7 millions d’habitants, 38e puissance économique mondiale, était confronté en même temps à une vague sans précédent d’entrées de migrants qui arrivaient annuelle-


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était une décision arbitraire, car la loi chilienne exige seulement que la personne qui arrive comme touriste « présente son passeport et prouve qu’elle a les moyens de séjourner sur place ». Le Ministère 2.1 Pourquoi le coup public du Chili avait même accusé d’arrêt à l’immigration des la compagnie de trafic de migrants, Haïtiens au Chili en 2018 ? car certains passagers arrivaient au Il faut rappeler que face à cette Chili avec de fausses lettres d'invipolitique de porte ouverte qui a duré tation ainsi que de faux contrats de jusqu’à 2018, de nombreuses voix travail pour obtenir un permis de s’étaient élevées depuis quelque séjour. Tout ceci était préparé par temps pour que soient instaurées des entreprises haïtiennes qui escrodes mesures pour limiter les arri- quaient les émigrants haïtiens parvées d’étrangers dans le pays, en fois obligés en contrepartie de leur particulier des Haïtiens, dont 80 % vendre leurs maisons. était en situation régulière. Tous les prétextes étaient bons pour arriver 2.1.2 Le coup d’arrêt à cette fin, y compris la découverte brutal du gouvernement en 2017 de quelques cas de lèpre chez des Haïtiens résidant dans ce de Sebastian Piñera Le vrai coup d’arrêt a été porté pays. À ces voix s’étaient jointes cel- à la migration étrangère et surtout les de nombreux xénophobes qui haïtienne en 2018 par le gouvernedigéraient mal l’invasion des afro- ment de droite de Sebastian Piñera descendants haïtiens. En plus, le qui avait mis fin le 8 avril de la gouvernement de Sebastián Pinera même année au système qui perassumait clairement une position mettait de passer du statut de toud'immigration sélective défavorable riste à celui de résident une fois que à l'immigration haïtienne qui se l’étranger était détenteur d’un convoyait placée dans une situation de trat de travail. Ce qui les habilitait concurrence avec l'immigration vé- en plus à faire venir les membres nézuélienne qui a l'avantage de par- de leurs familles. Le but de Sebastian Piñera était tager la même langue que le Chili. de freiner l’immigration dans un pays où les étrangers s’élevaient à 2.1.1 Quid du trafic des presque 6 % de sa population totamigrants haïtiens ? le. En conséquence, il a été décidé Le gouvernement chilien avait par les autorités chiliennes qu’à ouvert en août 2016 une enquête sur partir du 16 avril 2018, les Haïtiens l'éventuelle participation de la com- qui désirent entrer au Chili doivent pagnie aérienne Latin American obtenir un visa de tourisme de 30 Wings dans un cas de trafic de mi- jours au consulat chilien de Portgrants, à la suite de l'arrivée de 160 au-Prince, prorogeable jusqu’à 90 Haïtiens qui ont été refoulés vers jours maximum et non convertible leur pays d'origine parce qu'ils pré- en visa de résident permanent. tendaient entrer au Chili en tant que Notons qu’à l’opposé, la même touristes, mais ne pouvaient justi- loi accorde aux Vénézuéliens arrifier, selon la Police chilienne, d'une vés au Chili un visa dit démocratiréservation d'hôtel valide. Ce qui que d’une durée d’une année. ment par centaines de milliers du Venezuela, du Pérou, d’Haïti, de la Colombie, d’Argentine et de la Bolivie.

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Le gouvernement de Sebastian Piñera avait prévu également un programme de retour volontaire des ressortissants qui est entré en vigueur le 17 octobre 2018 et qui s’était matérialisé par l'expulsion de 1 300 Haïtiens pendant l'année 2019. Les candidats à ce retour volontaire s’étaient vu présenter un document les engageant à ne pas revenir au Chili pendant neuf ans. Par ailleurs, dans le cadre d’une politique de regroupement familial, le gouvernement chilien avait institué un visa humanitaire de 12 mois, qui pouvait être obtenu auprès du consulat chilien à Port-au-Prince, à partir du 2 juillet 2018. Ce visa renouvelable une seule fois habilite les intéressés « à solliciter la résidence définitive et devait permettre d’accueillir annuellement jusqu’à 10 000 personnes bénéficiant du regroupement familial ». Enfin, l’une des mesures prises dans le cadre de la nouvelle loi sur l’immigration de Sebastian Piñera était le droit à la régularisation des migrants y compris les Haïtiens qui étaient arrivés au Chili avant le 8 avril 2018.

2.1.2.1 Les conditions du programme de régularisation des étrangers Pour bénéficier de ce processus de régularisation, l’intéressé devait avoir un passeport valide et un certificat de police émis par la Direction centrale de la police judiciaire en Haïti, mais aussi un contrat de travail côté chilien. Face à l’incapacité de la DCPJ d’émettre un grand nombre de certificats, un accord a été trouvé entre la police chilienne et celle d’Haïti pour permettre aux Haïtiens inscrits au programme de bénéficier d’un sursis. La première date limite fixée


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pour la fin de la régularisation était le 22 juillet 2019. De nombreux Haïtiens ont pu être régularisés depuis 2018, soit 100 298 selon les statistiques fournies par la Police internationale de l’Office national des migrations du Chili. Cependant, deux obstacles majeurs entravaient l’accession à cette régularisation des Haïtiens. D’une part, la lenteur de production des extraits de casier judiciaire par la Direction de la Police judiciaire haïtienne et le manque de suivi du processus par l’ambassade d’Haïti à Santiago. Ce qui fait qu’un assez grand nombre de demandes n’a pas pu être satisfait à temps, exposant plusieurs de nos compatriotes au risque d’expulsion. Après des démarches d’ONG et des demandes d’Haïtiens en difficulté au Chili, la date butoir pour l’expulsion des retardataires a été re-

poussée plusieurs fois. D’abord, jusqu’au 22 octobre 2019, puis en octobre 2021. Notons que pour calmer les esprits, l’ambassadeur du Chili en Haïti, Patricio Utreras avait promis en 2019 que la déportation ne s’appliquerait qu’aux cas extrêmes. Un autre plan de régularisation avait été mis en place en 2020 dont les Haïtiens en situation irrégulière au Chili pourraient profiter pour ceux qui sont arrivés avant le 18 mars 2020 sur la base d’une période de 180 jours d’inscription à partir du 20 avril 2021 et qui doit devait expirer en octobre 2021. Le grand problème demeure toujours l’obtention du certificat de casier judiciaire fourni par les services compétents haïtiens. Mais, le résultat risque d’être le même que pour le programme de 2018 en raison de la capacité limitée de la DCPJ de — 42 —

fournir dans les délais impartis un grand nombre de documents. En conséquence, les Haïtiens désemparés ont pris en août dernier l’initiative d’écrire une lettre au Président chilien pour lui demander de flexibiliser les critères migratoires en guise de geste d’aide humanitaire à la suite du tremblement de terre du 14 août 2021 et de leur accorder un nouveau sursis pour l’obtention des documents de régularisation de leur situation. L’argument invoqué étant que leur renvoi pénaliserait également les membres de leurs familles vivant en Haïti qui attendent d’eux de l’argent pour leur subsistance. Notons que cette démarche qui a obtenu l’appui de nombreux Chiliens en particulier des universitaires pourrait porter fruit à très court terme.


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Pour ce qui concerne le contrat de travail, c’était un vrai parco urs du combattant. Car, depuis la loi migratoire prise par Sebastian Piñera en avril 2018, ce précieux document est devenu de plus en plus difficile à obtenir. Des Haïtiens qui ont quitté le Chili et qui ont été rapatriés le 19 et 20 septembre derniers se sont fait écho de leurs déboires pour arracher un contrat de travail do nt l’obt ention co ndit ionne leur présence dans le pays. Cependant, selon les données de l’Office national des migrations du Chili, il semble qu’il faille quand même relativiser, car malgré les obstacles que nous avons signalés, 100 298 Haïtiens étaient régularisés en l’année 2018 contre 45 780 en 2017. En conséquence, on peut estimer qu’à l’heure actuelle un maximum 150 000 à 160 000 Haïtiens ont pu acquérir la résidence définitive au Chili sur un effectif de plus de 185 000.

extrait de casier judiciaire délivré par la DCPJ. On parle le plus souvent de l’extrait de casier judiciaire dont 15 000 certificats auraient été envoyés à l’ambassade d’Haïti au Chili depuis l’année 2018, selon Patrice Dumont qui avait donné l’assurance aux Haïtiens lors de son passage à Santiago en novembre de la même année que le dossier était entièrement bouclé avant son voyage dans ce pays. Mais, s’il faut en croire les déclarations et les plaintes de nos compatriotes en attente de leur régularisation au Chili, c’est environ 45 000 Haïtiens qui espéraient toujours recevoir en 2018 leurs certificats d’antécédents judiciaires. Ce qui les pénalisait doublement, car non seulement ils se trouvaient sous la menace d’expulsion, mais également il leur est interdit de travailler dans ce pays en l’absence de documents légaux. La question de l’obtention des certificats de casier judiciaire se pose encore en 2021. À preuve, la lettre envoyée par des Haïtiens résidant au Chili au Président Sebastian Piñera après le séisme du 14 août dernier pour solliciter sa clémence envers leur situation.

3 La situation difficile des migrants haïtiens au Chili

À tous les points de vue, la situation des Haïtiens a toujours été difficile au Chili. 2.1.2.2 Les péripéties de la 3.1 La question de l’obtention régularisation de la situation d’un permis de résidence permades Haïtiens nente La grande difficulté à laquelle ils On sait que depuis la loi prise à ont été souvent confrontés est l’arrivée de Sebastian Piñera au l’obtention d’un permis de résipouvoir au Chili, il a toujours été dence permanente, puisqu’au difficile pour nos compatriotes départ ils avaient pris l’habitud’obtenir les papiers les plus imporde de débarquer en touristes sans tants demandés par les autorités l’idée de revenir dans leur pays. chiliennes pour leur régularisation À la prise de pouvoir de Sebasà savoir un passeport valide et un — 43 —

tian Piñera, ils se sont trouvés rapidement en situation illégale par rapport aux lois d’immigration du Chili. Et puis, c’est vite devenu la croix et la bannière pour y prolonger leur séjour. En effet, jusqu’en 2015, ils devaient dans la limite de trois mois de présence dans le pays demander à l’État chilien un visa dit « visa sujet à contrat de travail » qui les faisait dépendre d’un employeur unique. Mais, peu d’employeurs avaient accepté de leur donner du travail et les avaient engagés le plus souvent de manière informelle afin de se soustraire au respect des droits des travailleurs. Aussi, les Haïtiens qui travaillaient dans le secteur agricole comme travailleurs « saisonniers » étaient souvent traités comme «des esclaves» sans contrat de travail et en plus victimes de racisme, bien plus que d’autres immigrés comme les Vénézuéliens, les Péruviens, les Boliviens et les Colombiens. La situation des Haïtiens au Chili avait été sensiblement modifiée pour la première fois en 2015 sous le gouvernement de Michelle Bachelet qui avait institué le « visa pour motif de travail ». Ce type de visa, facilitait en théorie leur mobilité professionnelle sans remettre en cause l’obligation d’avoir un emploi formel pour résider légalement sur le territoire chilien. Il s’était trouvé très tôt que des délinquants avaient profité de la détresse de ces migrants pour leur offrir de faux contrats. Une fois que les migrants avaient soumis ces faux contrats de travail pour leur demande de résidence, ils avaient souvent reçu l’ordre de quitter le pays dans un délai de 15 jours. Certains d’en-


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tre eux avaient alors quitté le Chili le plus rapidement possible pour se rendre au Brésil ou en Guyane afin d’éviter le rapatriement sur Haïti. D’autres encore, dans leur quête d’un pays d’accueil, avaient échoué en Amérique centrale et même jusqu’au Mexique d’où ils sont allés tenter leur chance pour les États-Unis. Mais, ces déplacements ne se sont jamais faits sans peine, en raison des difficultés insurmontables auxquelles ont fait face de nombreux Haïtiens dans leur tentative pour intégrer les caravanes de migrants qui se destinent vers l’Amérique du Nord. Par exemple, la Bolivie qui leur

a fermé depuis 2012 sa frontière qu’ils traversaient pour transiter de l’Équateur vers le Chili, le Brésil ou la Guyane. Il en est de même depuis pour la plupart des autres pays d’Amérique du Sud comme le Pérou, la Colombie et l’Équateur qui mettent souvent en prison les migrants haïtiens illégaux de passage sur le territoire.

autorités chiliennes, l'arrivée massive des Haïtiens « a produit des situations de violation des droits chez les migrants eux-mêmes, des problématiques de cohabitation locale, ainsi que des situations délicates de traite de personnes et de trafic illicite de migrants ». D’ailleurs, tout au long de leur séjour, ils sont victimes de racisme et de xénophobie de la part des Chiliens, non seulement pour la couleur de leur peau et leur culture, mais également pour 3.2 Les autres difficultés le fait qu’ils ne parlent pas la même auxquelles sont confrontés langue qu’eux. On se souvient que les Haïtiens immigrés au la réforme de 2018 ne permet aux Chili touristes de nationalité haïtienne Les Haïtiens immigrés au Chili que de séjourner 90 jours au maxiont toujours fait face à d’innombra- mum avec l’impossibilité de le conbles difficultés. En effet, selon les vertir en visa de résident permanent — 44 —


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contre une année pour les Vénézuéliens. On sait aussi qu’à la suite de l'apparition d'un cluster de Covid19 dans un foyer de travailleurs haïtiens à Santiago en avril 2020, les résidents avaient subi des comportements de harcèlement très désagréables. Et ceci, du fait que le ministère de la Santé chilien n’avait pas fourni d'informations en créole sur les mesures face à la pandémie. Sur le marché du travail, ils ont aussi été plusieurs fois victimes de la part d’employeurs malhonnêtes de faux contrats de travail qui les avaient été exposés au risque d’expulsion du territoire chilien. De même, en raison de leur faible qualification et de la nonreconnaissance de leurs diplômes, ils sont condamnés à des emplois subalternes, précaires et dévalorisés économiquement et socialement. Aussi, les retrouve-t-on dans les secteurs de la construction (18,7%), le pet it commerce (15,7%), l’industrie (14,2%), la restauration, en plus dans des emplois de pompistes et de saisonniers dans l’agriculture. Inutile de dire qu’ils ne perçoivent que de très bas salaires pour la plupart, environ 500 dollars par mois. De quoi payer leur logement, assurer leur subsistance, épargner quelque peu, envoyer des fonds à leurs familles et payer leurs dettes en Haïti. Malgré tout, les Haïtiens vivant

au Chili avaient pu envoyer en 2019 un montant de 109,3 millions de dollars au pays, ce qui faisait d’eux la seconde source de devises fournies par la diaspora (7 %), loin derrière les États-Unis d’où partaient 1,485 milliard de dollars à destination d’Haïti.

Conclusion Avec une population de 185 865 personnes en 2019, la communauté haïtienne contribue annuellement à hauteur de plus de 100 millions des dollars à l’entrée de devises en Haïti. C’est une communauté malheureusement victime de racisme, de mauvais traitements et de multiples discriminations et qui est sans doute en proie à plus de difficultés que les autres minorités étrangères généralement mieux accueillies que nos compatriotes. En effet, non seulement leurs diplômes et leurs qualifications ne sont pas reconnus au Chili, mais également ils perçoivent souvent des salaires très bas de la part de leurs employeurs qui ne respectent pas les droits des travailleurs. En plus, depuis 2018, un bon nombre d’entre eux sont menacés d’expulsion parce qu’ils ne peuvent pas fournir à temps les documents nécessaires à leur régularisation, conformément à la loi d’immigration instituée par le gouvernement de Sebastian Piñera. Il serait important que le gouvernement haïtien en plus d’être attentif à leurs demandes de documents pour faciliter leur régularisation, s’attelle aussi à intervenir auprès du gouvernement chilien pour l’homologation de leurs titres dans la perspective d’une amélioration de leur situation générale. Il reste que malgré les souffrances subies par nos compatriotes au Chili, l’avenir appartient à leur progéniture, car les enfants d’Haïtiens nés au Chili bé— 45 —

néficient de la nationalité chilienne conformément au droit du sol de ce pays, ainsi que de l’accès à une éducation de base à l’égal des enfants chiliens. 

Jean SAINT-VIL jeanssaint_vil@yahoo.fr


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What Are The Major Natural Resources Of Haiti? https://www.worldatlas.com/articles/what-are-the-major-natural-resources-of-haiti.html

Oil And Natural Gas

H

aiti is a Caribbean na tion located in the Greater Antilles archipelago. The nation shares the island of Hispaniola with a counterpart Caribbean nation of the Dominican Republic. The country occupies an area of 10,714 square miles and has a population of 10.8 million inhabitants. The country is regarded as a free market economy and has a preferential trade agreement with the US which allows for tariff-free access to its exports to its larger northern neighbor. The country has a GDP of $19.93 billion (PPP) and a GDP per capita of $1,800. The services sector contributes an overwhelming 57.3% to the total GDP while agriculture and industry contribute 21.9% and 20.8% respectively. The nation mainly exports essential oils, apparel, coffee, cocoa, bitter oranges, and mangoes. The mining sector remains largely untapped.

A recent finding has shown that the nation of Haiti might have some of the largest oil reserves in the world. The oil reserves are estimated that they could be larger than those of Venezuela. Nations that are found close to the Greater Antilles such as Puerto Rico, Cuba, Dominican Republic, and Haiti are estimated to be sitting on natural gas of about 159 billion cubic feet and oil of about 142 million barrels. It is also estimated that undiscovered reserves could hold as much as 941 million barrel of crude oil and natural gas thought to be about 1.2 trillion cubic feet. Areas thought to be rich in oil include the Central Plateau, the bay of Port-Au -Prince, Thomond, and the Cul-de-sac plain. Daniel Mathurin, a French scientist has compared Haiti's oil reserves to a swimming pool compared to those of Venezuela which he likened to a glass of water. Twenty oil sites have been already identified for potential drilling with — 46 —

5 of them being considered crucial. Scientists have supported the likely hood of massive oil reserves in Haiti since it has been found that areas where tectonic plates meet in the ocean often hold huge amounts of hydrocarbons ready for exploitation. It is thought that the earthquake that shook the nation recently could have allowed oil to seep into the fault lines. Scientists from various companies are currently studying the fault line from Port-au-Prince onwards to try and find areas with unexploited deposits that are ripe for drilling. At least 3 million barrels have been discovered in what is regarded as shallow formations just off the nation's shores. The Oil Trade Journal of 1919, however, suggests that oil was discovered in the nation of Haiti long before the current oil rush in the nation. The journal indicates that oil seepages were noticed coupled with natural gas seepages that often amazed lo-


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cal natives. The oil deposits are expected to boost the nation's economy and improve the living standards of the nation's population which still has to suffer through poverty.

Gold The nation of Haiti is thought to have gold deposits worth about $20 billion. Companies such as Majescor Resources from Canada have already bought rights to prospect 173 square miles of the island for gold. Initial sample results have shown that there are areas with high gold concentrations. The nation's vulnerability to geological events such as earthquakes also means that the nation and its neighbors in the region where massive tectonic plates fault lines form deposits for gold veins which are presumably pushed up from the earth inner layers during geological events. This theory is supported by finding in Chile where massive copper deposits are found. Geologists have also observed borders covered with an oxidized blue-green copper coating which indicates that there might be deposits of precious metals such as copper held in deeper layers. At a site in Trou du Nord, samples taken from 160 feet below the sur-

face shows that the rocks are peppered with gold. Gold was initially mined on the island in the 1500s by the Spanish following its discovery of the rare metal on the island by Christopher Columbus. Later the Spanish moved to richer deposits in Mexico. The United Nations had also indicated that the nation had significant gold deposits in 1970, but foreign investors were wary of investing in exploration due to an unfavorable political climate and corruption in the nation. Following foreign donation, the government has been put on the global spotlight, therefore, allowing investors to invest in gold mining. Reports from two sites have revealed at least 1 million ounces of gold. So far only SOMINE Company has full concessions to exploit the resources.

Copper The Meme copper mine was exploited in the 1960s and produced at least 2 million metric tons of 2% copper. Studies in 1987 by the Eurasian Minerals company in the areas near the Meme mine indicated that the area had 1.5 million metric tons of 2% copper. Areas in the northwest trending zone of the formation are also considered to have substantial

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copper deposits from three small intrusions. The Grand Bois property also returned results indicating significant 0.44% copper deposits. A 2.3 mile wide and 6.2 mile long northwest trending copper corridor was also discovered by the Canadian Majescor company. The corridor lies in areas that have the Blondin and Douvray gold and copper deposits as well as the Faille B gold prospect. Other copper deposits have also been found on the South West extension. Samples from the Dos Rada indicate deposits with 18% copper. The Titoro copper bearing which measures 1,148 feet wide and 1,968 feet long was also discovered by the same company. Other deposits that have been discovered include the Grosse Viene which has deposits with 5.8% copper. Concerns About The Impending Mining Boom Haiti has considerable deposits of limestone and marble. The nation is home to the Cervicos limestone formation which dates back to the Paleogene period. These resources, however, are not fully tapped as the nation still imports building material such as cement for domestic use. Various stakeholders have voiced their concern over the impending displacement of locals from their land to pave way for mining activities by foreign companies. Other concerns that have been raised include environmental degradation as a result of mining activities. Experts are also concerned that the nation’s weak mining laws will allow exploitation of resources with little benefit to the nation's population.


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Appel à participation aux intellectuels du pays en vue d’un effort combiné et assidu pour encadrer nos jeunes! Pour maintenir la bonne marche d’une effervescente civilisation, les adultes ont la responsabilité de continuellement veiller à ce que les jeunes qui grandissent soient bien éduqués. Car, c’est de là que l’on peut s’assurer, sans aucun doute, qu’une civilisation donnée connaisse un futur certain. La théorie qui soutient qu’une civilisation n’est détruite que de l’extérieur, prise dans le contexte délétère que nous connaissons actuellement en Haïti, ne nous parrait pas tout à fait acceptable. La destruction qui fait rage à l’intérieur du pays, si cela bat son plein, permettra, à coup sûr, à nos ennemis de l’extérieur de nous invader par tous les fronts et de nous conquérir très facilement. Les faits saillants comme la fuite de nos jeunes, le déclin intellectuel, la faiblesse de notre système éducatif, les rapports dégradés qui règnent entre les gens de nos sociétés, la faillite de l’État, la mauvaise gouvernence, la faim qui tenaille la majorité de notre population, l’impunité flagrante qui stupéfie et paralyse les gens, et les faits liés à l’insécurité, représentent les fissures qui minent le pays de l’intérieur, d’où sa destruction s’en suivra aisément, si nous nous complaisons encore à simplement regarder cette déchéance dans la peur, avec un esprit de gens vaincus, sans nous décider à réagir pour contrecarrer cette descente vers une disparition certaine. C’est une certitude que tout ce qui naît est appelé à disparaître tôt ou tard. En nous référant aux civilisations dites extinctes telles, la Mésopotamie, Egypt, Indus Valley, Shang and Mesoamerica and Andean America Sud, avec réservation nous disons, pour les peuples de ces cités effondrées, cela remonte à des millénaires, rien ne semblait augurer des suites aussi fâcheuses, du temps de leur existence, qui en résulteraient à la disparition de leur ville et de leur population. Mais pour une raison quelconque, c’en était fait d’eux. C’est dans cet esprit que nous disons que tout comme ces villes mentionnées, Haïti est bel et bien vulnérable de pareille catastrophe si nous ne nous évertuons pas à nous ressaisir pour l’éviter, en réparant les erreurs passées, pour nous assurer un futur prometteur dans la stabilité. À cela, l’éducation de nos jeunes est d’une vitale importance, car sur eux, en tant que leaders à venir, pèsent de lourdes responsabilités à accomplir. Comme la Première Nation Nègre du monde, Haïti est damnée par ceux-là qui croient encore, avec ferveur, que cette arrogance, de conquérir notre indépendance par les armes, doit être payée chèrement. Mais, loin de vouloir perdre notre temps à caresser l’histoire, qu’on le veuille ou non, Haïti est la mère de la Liberté. Son cas restera indéniablement unique dans les annales de l’histoire du monde. Depiuis notre indépendance jusqu’à date, les décennies et centenaires accumulés entre les Haïtiens d’hier et ceux d’aujourd’hui n’altèrent cependant en rien le sentiment patriotique qui nous est commun. À notre terre et à notre indépendance nous y tenons encore fermement et sommes convaincus que la lute doit être poursuivie pour notre survie, pour la réhabilitation de notre race et du Continent Africain La responsabilité d’une pareille mission nous a été imposée, par un des nôtres, Anténor Firmin, quand il nous dit dans son essaie, De L’égalité des Races Humaines: “Haïti doit servir à la — 48 —


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réhabilitation de l’Afrique.” Cette confiance aveugle dans la capacité de ce peuple, dans l’objectif, comme un leader, de mener et servir, est imputable aux prouesses de nos vaillants et résilients combattants, pendant la guerre de l’indépendance, pour se faire valoir comme des êtres humains à part entière, des gens responsables et souscieux, tant du côté morale que physique. Ainsi, le voeux de Firmin est un devoir à ne pas ignorer, c’est une tâche qui doit être poursuivie, maintenue et appliquée avec une âme fervente. Dès lors, il nous incombe à tous la tâche de nous y appliquer avec enthousiasme et amour afin de nous assurer que nos jeunes soient bien préparés et avisés de leur responsabilité. Alors, aidons-les, de sorte qu’ils puissent assumer cette tâche avec brio, dans le dessein de rendre hommages à l’architecte de notre indépendance, Toussaint Louverture, et aussi à notre intrépide défenseur des droits de l’homme Noir du monde à l’égalité, Anténor Firmin. À tous les intellectuels Haïtiens répendus à travers le monde, dans ce combat, vous avez votre role à jouer et il est crucial. Nous vous lançons ce cri de support de sorte que vous fassiez usage de votre verve pour faire appel à nos jeunes qui s’évadent, autant qu’à leur conscience, en les encourageant, aussi souvent que possible, où qu’ils puissent être, de sorte qu’ils soient convaincus de leur pouvoir dans l’action commune. En nous soumettant à la réalité que l’aide dont nous avons besoin pour changer Haïti ne nous viendra jamais de l’exterieur, cette claire vision suffit amplement pour provoqurer notre mobilisation dans le sens de conjurer les problèmes. La sévérité de la situation en Haïti nous exige de faire face à des cas majeurs, d’où la nécessité de nous unir pour planifier et créer une synergy d’équipe dans l’objtique de les résourdre. Il est apparent à nous tous que nous sommes à une phase de guerre intense pour notre survie et celle de notre nation. À cette phase cruciale, chaque bataille est vitale et aucune bataille ne peut être gagnée dans le découragement, l’esprit d’inpuissance ou de l’abandon. De supporter nos jeunes c’est supporter Haïti; et supporter Haiti est un devoir et une responsabilité dont on ne peut se soustraire. Haïti nous est utile et le sera toujours, particulièrement, comme cet autre alternatif vers lequel nous avons tous le droit d’y revenir à n’importe quel moment. Répétez-le sans trêve à nos jeunes, afin qu’ils parviennent à entendre vos voix et finissent par comprendre que le prestige de leur pays, comme un leader à respecter dans ce monde, repose sur nous tous et qu’ils ont, eux aussi, leur part à assumer. Nos Héros ont fait le sacrifice de leur vie pour nous léguer cette terre, c’est à nous qu’est décerné le besogne, aujourd’hui, de faire de notre mieux, de nous unir, en sorte que cette terre demeure Haïtienne. Il y faut le concours de tous! Que Haïti survive ou disparaisse, le choix est nôtre.  Serge M. Fontaine 3932 Folsom Avenue Saint Louis, Missouri 63110 Hero_2001@att.net

By Serge M. Fontaine — 49 —


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Agence France-Presse 2021-07-31

L

e guitariste guadeloupéen Jacob Desvarieux, mort des suites de la COVID— 50 —

19, était l'un des fondateurs du groupe Kassav', monument aux Antilles françaises qui a connu un énorme succès dans les années 80 en mélangeant des musiques locales pour créer un style, le zouk. Âgé de 65 ans, il avait été hospitalisé le 12 juillet après avoir été contaminé par le coronavirus. De santé fragile depuis une greffe rénale, il avait été placé en coma artificiel, selon ce qu'avait récemment indiqué la production du groupe Kassav' qui avait annulé tous les concerts prévus. Les hommages se succèdent depuis l'annonce de sa mort. «Monstre sacré du zouk. Guitariste hors pair. Voix emblématique des Antilles. Jacob Desvarieux était tout cela à la fois», a écrit le président français Emmanuel Macron sur Twitter. Compositeur de talent, leader du groupe Kassav', il était l'un des pères de la musique afro-antillaise, qu'il a permis de faire rayonner dans le monde entier, a écrit la ministre française de la Culture, Roselyne Bachelot. «Les Antilles, l'Afrique et la musique viennent de perdre l'un de leurs plus grands ambassadeurs. Jacob, grâce à ton art, tu as rapproché les Antilles à l'Afrique. Dakar où tu as vécu te pleure. Adieu l'ami», a écrit le chanteur sénégalais Youssou N'Dour vendredi soir sur Twitter. Des tubes festifs chantés en créole «Au départ, c'était un laboratoire: nous cherchions à trouver une bande-son qui fasse la synthèse de toutes les traditions et sons antérieurs, mais qui soit exportable partout», avait raconté le musicien au journal français Libération en 2016. Ces efforts ont donné naissance à des tubes festifs et dansants chantés en créole, comme Zouk la sé sel médikaman nou ni (1984) ou Syé bwa (1987). «À travers notre musique, nous interrogions nos origines. Qu'est-ce qu'on faisait là, nous qui étions noirs et parlions français? expliquait à Libération l'homme à la voix douce et voilée et aux cheveux blanchis par les années. Comme


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TRIBUTE

Jacob Desvarieux, le père du Zouk, meurt des suites de la COVID-19 Des tubes festifs chantés en créole les Afro-Américains des États-Unis, nous cherchions des réponses pour reprendre le fil d'une histoire qui nous avait été confisquée». Kassav' a explosé en même temps que les musiques du monde: au milieu des années 80, le public avait soif de musiques lointaines et métissées. «Notre musique se devait d'être antillaise, c'est-à-dire reconnue par les Antillais, contrairement à ce qu'il se passait alors avec la world music : il s'agissait d'une musique anglo-saxonne avec un chanteur du tiers-monde, chantant parfois dans sa langue», expliquait Jacob Desvarieux. Des ingrédients venus de toutes les Caraïbes Kassav' (en référence à la cassave, une galette de manioc) est fondé en 1979 par des artistes guadeloupéens Pierre-Edouard Decimus (du groupe Les Vikings de la Guadeloupe) et Freddy Marshall. Ils recrutent d'autres musiciens, dont Desvarieux, né en 1955 à Paris et qui, comme guitariste, revendique des influences rock, de Chuck Berry à Jimi Hendrix. La base du style du groupe est le gwoka, musique guadeloupéenne marquée par les tambours. Il y ajoute

d'autres ingrédients venus de toutes les Caraïbes – compas haïtien, biguine... – et un emballage moderne, avec de la basse, des cuivres et des claviers. Le premier album de Kassav', Love and Ka dance, sort en 1979. L'année suivante marque la première apparition dans le groupe de celle qui en deviendra l'emblème : la chan-

teuse martiniquaise Béroard.

Jocelyne

Encensé par Miles Davis Kassav' atteint le pic de sa popularité à la fin des années 80. Il signe un contrat avec la multinationale du — 51 —

disque CBS, sort l'album Vini Pou en 1987 (disque de platine) et reçoit un Victoire de la musique en 1988. Encensé par le musicien de jazz américain Miles Davis, le groupe enchaîne les concerts dans le monde entier. Et parallèlement aux nombreux albums de Kassav', ses membres sortent des disques solo. Depuis, la mode du zouk est retombée, mais Kassav' a continué d'attirer un public nombreux en concert. Monument aux Antilles, le groupe est également très connu en Afrique. Le clip de Syé bwa a d'ailleurs été tourné à Kinshasa, en République démocratique du Congo, qui s'appelait encore à l’époque le Zaïre. L'Afrique s'est ouverte à nous avant même la France, indiquait Jocelyne Béroard en 2019 au magazine Jeune Afrique. «[Les gens en Afrique] ne comprenaient pas le créole, mais ils répétaient plus ou moins phonétiquement, ou ils créaient leurs propres versions, disait-elle. Zouk la sé sel médikaman nou ni («le zouk est le seul médicament que nous avons») est, par exemple, devenu «Zouk la, j'ai mangé un demi-kilo de riz»!


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HISTOIRE

L’explosion du Palais national Par Charles Dupuy Le jeudi 8 août 1912, vers les trois heures trente du matin, le Palais national sautait dans un fracas qui réveilla la ville de Port-au-Prince. Cette explosion qui causa plusieurs centaines de morts parmi les soldats de la garde, n’épargna pas non plus, hélas, le président Leconte. En effet, après l’incendie ponctué de violentes déflagrations, on ne retrouva du président et du petit Maurice Laroche, son petit-fils adoptif de quatre ans, que les restes tordus du lit de fer où ils dormaient et quelques débris d’ossements carbonisés que l’on plaça dans un cercueil pour les funérailles. Dans les caves du Palais on avait entassé d’énormes quantités d’explosifs. Peu avant le drame, Leconte était allé inspecter l’entrepôt et s’était si bien inquiété en voyant ces amoncellements de barils de poudre qu’il en avait ordonné leur déménagement au Fort-National. Après la mort tragique de Leconte, le peuple se lamenta amèrement sur cette étrange fatalité qui semblait s’acharner sur le pays. On chercha les conspirateurs partout, parmi les arabes sur lesquels le président faisait peser les règlements tatillons de la loi sur le commerce

de détail; parmi les arrogants chefs cacos; parmi les grands négociants français ou anglais, puisque Leconte, un germanophile avéré, favorisait les Allemands; parmi les Dominicains, du fait que les relations entre les deux pays tenaient à l’époque de la crise permanente. On apprendra plus tard qu’à proximité des corps méconnaissables du président et du petit Maurice, on avait trouvé, près de leur lit, le cadavre d’un inconnu que personne ne put identifier. Une autre donnée étrange sur laquelle on s’arrêta longuement, ce fut le témoignage de certaines personnes qui affirmaient avoir entendu dans les moments précédant la déflagration, une forte détonation venant de la section nord-est du — 52 —

Palais, autrement dit, des appartements privés du président. Malgré la thèse officielle qui voulait que l’explosion du Palais fût le produit malencontreux d’un accident à peu près inévitable, les circonstances exactes n’en seront cependant jamais tout à fait éclaircies, et, bien après le drame, les amis de Leconte persisteront à considérer la catastrophe comme le résultat d’un acte malveillant et chercheront la main criminelle responsable de l’attentat. Frédéric Marcelin soutient que «le général Leconte a fini très tragiquement dans l’explosion de son palais, causée par la formidable accumulation de poudres déflagrantes, et de munitions de tous genres


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qu’il y avait entassées durant notre désaccord de frontières avec la République dominicaine, notre voisine, soit qu’il eût dessein de prendre une vigoureuse offensive, soit qu’il ne songeât qu’à se garer contre une attaque possible de ce côté». (Au gré du souvenir, p.144) Plus tard, Dantès Bellegarde écrira: «la malignité publique se donna à cette occasion libre cours contre certains individus ou certains groupes et trouva des échos complaisants même dans la presse». (Histoire du peuple haïtien, p.237) On accusera pêle-mêle les espions dominicains, les négociants étrangers et les commerçants syriens. La rumeur publique colportait les plus folles théories sur les circonstances entourant la disparition du président. On parla d’une caisse provenant de la Compagnie électrique qui avait été déposée au Palais le soir de l’explosion, fait confirmé par des employés qui se rappelaient avoir vu

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un technicien procéder à la réparation de quelques lampes dans les salons de l’édifice. Certains parlaient d’un évadé de Cayenne qui aurait fabriqué l’engin infernal à Bizoton, d’autres suggéraient que Leconte avait été enlevé par des criminels, conduit à la Croix-desBouquets où il aurait été assassiné par le curé de l’endroit, un certain père Lecu, lequel aurait fait exploser le Palais dans le but de détruire les traces de son forfait. Notons que ce pénible événement reviendra de temps à autre dans l'actualité politique en Haïti. C'est ainsi que le 3 mai 1930, le président Louis Borno, afin de contrer ses adversaires politiques qui l'accusaient d'être l'organisateur de la série d'incendies qui désolaient

alors la capitale, ira lire à la radio une retentissante proclamation dans laquelle, avec une verve lapidaire, il invectiva «les agitateurs impénitents, les bénéficiaires de tous les désordre de notre passé, dilapidateurs des douanes, dilapidateurs des emprunts en tous genres, assassins du président Leconte et de ses pauvres soldats paysans, fils d'incendiaires et incendiaires eux-mêmes [...] Je les dénonce à la nation». Les funérailles de Leconte furent célébrées à Port-au-Prince au milieu d’émouvantes démonstrations de douleur. Leconte était unanimement considéré comme le meilleur chef d’État depuis des générations par les Haïtiens qui n’acceptèrent pas sans regret ni non moins de colère sa tragique disparition. En fai-

sant appel à des collaborateurs honnêtes et compétents, Leconte sera parvenu, pendant les cinquante et une semaines qu’aura duré son gouvernement, à assainir les finances de l’État, à contrôler suffisamment l’administration des affaires pour être en mesure d’annoncer un des rares budgets excédentaires de l’histoire des comptes publics en Haïti. Leconte aura dirigé le pays avec un souci du bien commun et un dynamisme administratif exceptionnels. Par son esprit de renouveau, ses entreprises de réforme et son libéralisme politique, Leconte sera parvenu à donner aux Haïtiens l’un de leurs meilleurs moments d’espoir et de confiance.

Charles Dupuy

INTERGÉNÉRATIONNEL... suite de la page 23 Ce sont eux, les membres de ces générations subséquentes, qui sont en train d’acclamer l’avènement d’un boomer remover. Et pourtant, c’est à eux, descendances des babyboumeurs, que ces derniers lèguent le monde d’aujourd’hui, un monde aux développements époustouflants, mais un monde en plein tumulte et menacé d’extinction. Il est vrai que le monde a toujours été en tumulte, mais la menace d’extinction de notre espèce n’a jamais été aussi imminente. Alors, parallèlement, l’humanité se livre à une recherche frénétique d’un autre pied-à-terre hors de notre planète. Déjà, les puissances de la terre se lancent à la conquête d’autres lieux. Sur Mars, par exemple, elles comptent chacune établir là-bas une base, comme elles établiraient leur propre consulat dans un pays étranger. Y amèneront-elles leurs conflits, afin que les générations nouvelles aillent y pérenniser les mêmes vieilles guerres? Ou, est-

ce que ces jeunes d’aujourd’hui réussiront à pacifier le genre humain? Que feront-ils, ces milléniaux qui ont vécu à l’heure de la réalité virtuelle, du partage des idées -vraies ou fausses- à travers les réseaux sociaux, des manifestations visant à changer les esprits et les comportements. Que feront ces tenants de la mentalité FOMO, YOLO (Fear of missing out; You only live once)? Que feront ces amateurs de jeux vidéo, adeptes de TikTok, ces fidèles de la série Euphoria? Que feront-ils, ces subjugués de la saga de Daenerys qu’on a tous regardée chevaucher ses dragons et vaincre des fauteurs de troubles? Que feront-ils? Car ce sont eux qui vont façonner la planète, selon leur vision, leurs propres inclinations. Daenerys n’est qu’une légende; mais nous, des générations antérieures, nous sommes encore ancrés dans le réel, et nous voyons très bien que la belle saison se termine. Déjà le vent se lève, froid et cruel; nous pouvons, — 54 —

sans risquer nous tromper, prédire que « l’hiver vient! ». Peuples de la terre, l’hiver vient! Et le monde appartient désormais à ces générations nouvelles. Mais que vont-ils en faire? À nos descendants X, Y, Z : que ferez-vous de la planète, lorsque nous, les babyboumeurs, aurons été tous effacés? Qu’est-ce que vous ferez de ce monde? Ferez-vous mieux que nous?

Anna Fayonna (Août 2020)


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Au-delà de l’assassinat du président de facto Jovenel Moïse, la lutte pour un pays souverain est plus que jamais à l’ordre du jour Par le Regroupement des Haïtiens de Montréal Contre l’Occupation d’Haïti (REHMONCO)

Le REHMONCO a appris avec consternation l’assassinat du président de facto et autocrate Jovenel Moise à son domicile le 07 juillet 2021, six mois après l’expiration de son mandat présidentiel. Cet acte crapuleux et odieux doit être condamné avec force sans pour autant oublier le contexte dans lequel il eut lieu, celui de massacres et d’assassinats en série dans les quartiers populaires de Port-au-Prince. Du 26 au 30 juin, plus de 60 personnes, dont la militante féministe Antoinette Duclair et le journaliste de Vision 2000 Diégo Charles, sont assassinées dans les quartiers de Cité Soleil, Croix Des Bouquets, Delmas 32 et Christ-Roi sans qu’aucune enquête n’ait eu lieu. Depuis plusieurs années, l’instrumentalisation de la violence des gangs fédérés et de la police nationale a constitué une stratégie du gouvernement de Jovenel Moise pour imposer son agenda envers et contre tous. Alors que la mobilisation populaire réclamait sa démission et son jugement pour la mise à sac des institutions étatiques, les crimes de sang et les crimes financiers perpétrés depuis plusieurs années, son ancien premier ministre de facto, M. Claude Joseph, a annoncé le 7 juillet 2021 la nouvelle de son assassinat comme s’il était un simple citoyen sans protection. Son assassinat qui, d’après le discours officiel, semble avoir été perpétré par un commando étranger, n’a pas été élucidé jusqu’à cette date. Toutefois, il semble de plus en plus évident que ce meurtre planifié et organisé est le résultat de conflits internes du régime PHTK, un véritable coup d’État opéré par certaines factions du pouvoir. Le premier ministre intérimaire Claude Joseph, révoqué deux jours avant l’élimination physique du président autocrate Jovenel Moise, s’accapare promptement de la direction politique du pays. Il s’autoproclame président du « conseil des ministres » et publiant des « décrets » alors qu’il n’a aucune autorité légale et constitutionnelle pour jouer un tel rôle. Par ailleurs, les tuteurs internationaux, dont l’administration américaine actuelle et le BINUH, s’empressent de le reconnaitre comme le seul dirigeant du pays sans qu’il y ait la moindre explication des autorités policières haïtiennes sur les raisons de la mystérieuse attaque contre la résidence du président de facto Jovenel Moise et de son assassinat. Comme c’est le cas chaque fois qu’il existe une crise politique majeure ou un vide de pouvoir, l’impérialisme met tout en œuvre pour organiser des élections de façade, choisit lui-même l’homme de paille qui doit être porté au pouvoir, constitue un gouvernement fantoche et, ainsi, garantit ses intérêts.

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C’est cette logique politique implacable que le gouvernement Biden entend continuer en exigeant que les élections doivent avoir lieu en septembre de cette année. Et peu importe qu’elles se fassent sous l’égide de l’ex-premier ministre de facto Claude Joseph. Ces élections-mascarades, auxquelles le peuple haïtien ne croit plus, ont été depuis 1986 le principal outil de mystification de l’impérialisme et de l’oligarchie. Aujourd’hui la crise structurelle éclate au grand jour et, depuis plusieurs années, le peuple réclame un changement de système, la construction d’une nouvelle société. Et il sait que ce changement est possible, non pas par des élections, mais au prix d’une lutte acharnée contre la domination étrangère, l’oligarchie antinationale et l’État néocolonial. Voilà pourquoi les travailleurs-e-s, les organisations paysannes, étudiantes, progressistes revendiquent la pleine souveraineté du peuple de décider de son avenir, de dénoncer toutes implications et diktats du Core group dans les affaires internes du pays. C’est pourquoi il est urgent de dénoncer ce jeu macabre de la « communauté internationale » solidaire du régime PHTK et de l’oligarchie visant à garder la situation d’apartheid et de terreur en Haïti. Le décès tragique de Jovenel Moise ne constitue pas la fin du régime PHTK. Ce régime continuera d’exister aussi longtemps qu’il pourra desservir les intérêts de l’impérialisme et de l’oligarchie. La lutte du peuple organisé peut seul y mettre fin. De ce fait, le REHMONCO encourage les forces progressistes en Haïti et dans la diaspora à continuer la lutte, à résister à l’ingérence de l’ONU, dont la principale responsable en Haïti, Mme La Lime, agit comme une véritable gouverneure de colonie, à dire NON aux élections-mascarades. Luttons pour un Haïti souverain, maître de son avenir !

Pour authentification. Renel Exentus Ricardo Gustave Montréal, le 10 juillet 2021 Contact : rehmoncohaiti1915@gmail.com

Mgr Guy A. Sansaricq, Suite de la Page 11 décès, était grand. Pour lui, la nouvelle du décès de Mgr Sansaricq s’apparente à un second tremblement de terre, après celui du 14 août dernier survenu dans le grand Sud du pays. « On vient de rendre un très bel hommage au Monseigneur [Sansaricq] », a révélé le père Joseph Larose. « Je lui dois tellement […] Le peu de temps que je l’ai côtoyé, il m’a beaucoup impressionné par sa façon d’être, son attention », a témoigné le père Larose, vantant les qualités d’homme de « grande ouverture » du

défunt. « Il aimait beaucoup le clergé et a toujours souhaité l’unité au sein du clergé », a souligné le prêtre, qui a dit retenir du défunt ses côtés d’homme de proximité, d’accueil et de prière. « L'évêque Sansaricq a été le premier évêque américain d'origine haïtienne aux États-Unis. Il était un symbole du progrès du peuple haïtien ici et, en tant que personne qui a servi comme évêque, a donné à la communauté haïtienne une certaine reconnaissance et une stature en tant qu'immigrant, un ministère qu'il a très bien professé », a déclaré Mgr Nicholas DiMarzio, évêque de Brooklyn, dans des propos relayés — 56 —

par le communiqué susmentionné. Après avoir occupé de nombreux postes curiaux dans le diocèse de Brooklyn, Mgr Sansaricq fut nommé évêque auxiliaire de Brooklyn par le pape Benoît, avant d’être ordonné le 22 août 2006. Deux décennies plus tôt, soit en 1987, il avait été choisi par les évêques américains pour diriger l'Apostolat national haïtien, et a été nommé prélat d'honneur par le pape Jean-Paul II en 1999. Il demeure à ce jour le premier Haïtien d’origine promu évêque aux États-Unis d’Amérique. Mgr Sansaricq est resté à son poste jusqu’à l’âge de démission canonique prévu par le code de droit


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canon, soit 75 ans. Sa démission ayant été acceptée par le pape, le 6 octobre 2010, il est devenu à compter de ce jour évêque émérite. Le défunt était connu pour être un fervent défenseur du droit des immigrants haïtiens aux États-Unis d’Amérique. Cette passion lui a été inoculée durant les sept ans passés à travailler en tant qu’aumônier des immigrants haïtiens aux Bahamas. C’est en exerçant son ministère depuis le prieuré bénédictin de SaintFrançois à Nassau dans les années 60 qu’il aurait pris conscience du sort des immigrés, et en particulier des immigrés sans papiers. « Né à Jérémie, Haïti, le 6 octo-

du diocèse de Brooklyn où le portrait du feu homme d’Église peut être consulté. Jusqu’à l’annonce de son décès, Mgr Sansaricq a été très actif au sein de la communauté haïtienne, prenant en charge la publication d'un bulletin trimestriel sur les questions haïtiennes concernant l'Église, la direction d'un institut pastoral en créole qui attire 90 étudiants chaque année et l'organisation d'une Convention annuelle de l'apostolat haïtien, ainsi que la coordination d'une retraite annuelle pour les prêtres et d'un congrès annuel des jeunes. Il est également cofondateur de HaitianAmericans United for Progress, une

bre 1934, dans une famille catholique fervente, l'évêque auxiliaire Guy A. Sansaricq a révélé à l'âge de 13 ans qu'il voulait devenir prêtre. Il a fréquenté le séminaire du diocèse de Jérémie pendant cinq ans, après quoi il a reçu une bourse au Séminaire pontifical Saint-Paul à Ottawa, au Canada, où il a étudié la philosophie et la théologie pendant sept ans. En 1960, il a été ordonné prêtre dans la cathédrale de Port-au-Prince, en Haïti », peut-on lire sur le site Web

agence de services. Ce natif de la ville de Jérémie est l’un des rares rescapés du massacre communément appelé « Les Vêpres jérémiennes » perpétré sous le régime dictatorial de François Duvalier en 1964. « Guy avait un frère aîné, Carl, qui était prêtre aussi, et une sœur qui est encore religieuse chez les sœurs de la Sagesse. Au risque de me tromper, il est peut-être le benjamin de sa famille », a révélé Mgr Verrier qui, — 57 —

malgré le poids des ans, la distance et leurs lourdes charges respectives au sein du clergé, a su maintenir le contact avec son ami. « On se parlait de temps en temps », nous a-t-il confié.


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BITTERSWEET CELEBRATION

The ceremony was cancelled due to weather.

By Owen G. Leroy

T

he Consulate General of the Republic of South Africa in Chicago is closing its consular office in December. The iconic flagship and proud Jewel of the Continent of Africa, here in Chicago, will be swept into the wastebasket of history and will no longer serve our proud city. — 58 —


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What's going on? Why have you forsaken Chicago? Indeed, ever since its inception in 1987 at 200 S. Michigan Ave, it has been rumored that the Consulate was on the chopping block. This classic office space laden with polished mahogany is located on the 6th floor of the Borg Warner Building. It opened up its doors to the public with a staff of twenty-five employees. Now there are few diplomats and a bevy of locally-recruited personnel. Who can forget that extraordinary time when South Africa held its first democratic election? That day, the Chicago Consulate became a satellite polling station for South Africa.Voters lined up for blocks on Michigan Avenue to cast their precious vote. They came from as far away as the State of Washington. Just to cast a vote, to exercise for the first time in their lives, a right which many of us in this–so called democratic country–take for granted. Her Excellency, the Honorable Homaindiya Cathleem Mfeketo, Ambassador in Washington DC, was here to review the office and speak to the staff. Undoubtedly, the officers and the locally-recruited personnel (LRPs) will be sorely missed. We extend our Best Wishes as they move into their next venture. Let’s hope that the decision to close will once again be reversed.

The staff at the office of the South African Consulate General

A tender moment between CG H. Pumzile Mazibuko and the Ambassador of South Africa — 59 —

Invited Guests


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The Mistress of Ceremony

The Prayer

A Guest

AU 6th Regional Chair and South African C

Haitian Fashion an

— 60 — Mazibuko South Afrfcan Consul General Pumzile Praying (Vue from back)

Ms. Adrienne Tong Hon. C. G


rman Olivier Kamanzi CG Pumzile Mazibuko

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The Honorable Excellency Nomaindiya Cathleem Mfeketo

South African Consul General Pumzile Mazibuko

Hon. Consul General Charif Hachim, P. Louison and Chair Olivier Kamanzi

n Designer, Persida Louison, H. E. Nomaindiya Cathleem Mfeketo nd South African Consul General Pumzile Mazibuko

gate (City of Chicago), Guests, Hon. E. Nomaindiya Cathleem — 61Mfeketo — G. Charif Hachim and AU 6th Regional Chair Olivier Kamanzi

Hon. E. Nomaindiya Cathleem Mfeketo addressing the public


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POESIE

« La Belle Époque » À l'époque où Joe Trouillot Était le roi du grand Casino On y dansait bien Oro basso Avec Nono Lamy au piano

IX La talentueuse Lumane Casimir Qui allait hélas bientôt mourir Avant de connaître la gloire Ô quelle triste échappatoire

II X Marta Jean-Claude à Cuba Menait une autre guérilla En poésie et en chanson Pour libérer notre nation

Alors l'inimitable Ti-Roro Virtuose du ibo et du pétro Mettait tellement de fourmis Aux jambes de nos latiamimi III Et Guy Durosier faisait la une Avec l'inoubliable : Ma brune L'auditoire se remettait au pas Quand il enclenchait : Matilda

XI Ti Paris nous disait sans ambages « Dieu nous a créés à son image » « La femme pour notre dommage » Et cela déridait tous les visages

IV Jean Moïse et Alphonse Simon Trompettistes de grand renom Ainsi que notre Raymond Sicot Qu’on n’oubliera pas de si tôt

XII Alors les superbes danses d’Haïti Avec l'inégalable: Constant Jeanty Et aussi le très grand Pierre Blain Nous mettaient tous dans le bain

V Gary French et Jean Benjamin Rappelant le lilas et le jasmin Le duo : Ansy et Yole Dérose Jetaient des bouquets de roses

XIII Et lorsqu'il entonnait Shango Gérard Dorsainvil tout de go Nous faisait tellement vibrer Qu’on ne pouvait ne pas l’aimer

VI Joe Jacques joyeux troubadour Qui a su si bien chanter l'amour Séduisait les femmes de la terre Pour avoir tellement aimé sa mère

XIV Un clin d’œil pour Wébert Sicot Et notre inimitable Ti-Manno Antoine Rossini Jn-Baptiste Ainsi que Nemours Jn-Baptiste

VII Madame Wiener et sa troupe Nous emmenaient en chaloupe Au tréfonds de notre culture Dépouillée de toute frioriture

XV L’immortel Gérard Dupervil Au Djoumbalah à Pétion-Ville Peut-on oublier le grand Riché Qui chantait : Mwen paralysé!

VIII Le discret Herby Widmaier Avec sa voix forte et claire Et sa passion pour le jazz Qui nous mettait en extase

XVI Le super Jazz des Jeunes a osé Répertorier les beaux clichés Des rythmes yanvalou et pétro En nous faisant crier: Ayibobo — 62 —


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XVII Sans oublier Antalcidas Murat Trompettiste et brillant avocat Qui demeure certes inoubliable À cause de son talent inoubliable

XXVI Robert Martino nous fait vibrer Et nous commande de danser Au rythme de notre kompa Sans jamais baisser les bras

XVIII Au micro le fier Fritz Péreira Nous charmait de sa belle voix Accompagné de Kesner Hall Avec un talent plutôt colossal

XXVII Ralph Condé brillant chanteur Et aussi excellent compositeur Nous comble de tant de bonheur Qu'il sera toujours à l'honneur

XIX Et notre Manno Charlemagne Amoureux de nos montagnes Tout comme Eddy Prophète Et Yoyo superbes interprètes

XXVIII Le talentueux Dadou Pasquet Nous invite tous à faire la fête Sans pour autant perdre la tête Afin que rien ne nous arrête

XX Jacques Bélizaire la voix qui tonne Et Paulo Choisil au saxophone Une paire de grands virtuoses Alors en pleine apothéose

XXIX Et Choubou du Tabou Combo Nous fait oublier tous nos maux Le timbre de sa voix est si chaud Qu'il représente un précieux joyau

XXI Avec le kompa de Pépé Bayard On ruait fort dans les brancards Et le talent de Marc-Yves Volcy Avec sa voix si pleine de frénésie

XXX Rendons hommage à Herman Nau Le poteau mitan du Tabou Combo Et qui est la fierté des Pétionvillois Lesquels ne sont jamais des ingrats

XXII Et nous saluons Oswald Durand Jr Sa guitare son saxe et sa flûte en or Ont émerveillé tous les mélomanes Même au fond de leurs cabanes

XXXI Et quand notre James Germain chante Il n'y a pas de doute il nous enchante Sa superbe voix nous fait tant frémir Que nous sommes fiers de l'applaudir

XXIII André Déjean ce trompettiste légendaire Et Anderson Cameau son illustre confrère Ont fait vibrer notre nation tout entière Et des auditeurs au-delà de nos frontières

XXXII Tropicana a fêté son 350è anniversaire Et toute notre nation en est très fière Hommage soit rendu à nos frères Qui nous seront toujours si chers

XXIV Sweet Micky le président du kompa Nous empêche de baisser les bras Sa musique plus qu'entraînante Se révèle vraiment fulgurante

XXXIII L'incontournable Roger Colas L'icône du boléro et du konpa Demeurera toujours inoubliable Car ses chansons sont si agréables

XXV Alan Cavé au talent incontestable Nous offre une musique si agréable Qu'on ne peut vraiment pas se passer D'en être très fier et alors de l'admirer

XXXIV Rendons hommage à Gracia Delva La grande vedette de Mass Konpa Qui se passe de toute présentation Puisqu'il est l'idole de la population

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XXXV Et alors Toto Laraque l'inégalable Nous émerveille de façon si agréable Qu'il nous arrive de bien nous réjouir Chaque fois qu'il parvient à nous réunir

XXXIX L'Orchestre Septentrional la boule de feu Qui rend encore tant de gens heureux Par ses extraordinaires compositions Est vénéré par toute la population

XXXVI Peut-on oublier Amos Coulanges Qui prend plaisir quand il arrange La musique de notre paysannerie Et lui donne une nouvelle vie

XL Les autres ne sont pas ignorés Et ils seront toujours honorés Dans une véritable anthologie Qui les ramènera tous à la vie

XXXVII Farah Juste la belle et talentueuse Qui rend les foules très heureuses Car ses chansons si magnifiques Sont toujours d'une beauté typique

XLI Historiens poètes romanciers Archives et mémoire de la cité Rendons hommage à nos héros Qui méritent ce coup de chapeau

XXXVIII Faut-il rappeler que Dodof Legros Dans notre palmarès est très haut Avec ses excellentes compositions Qui font encor chanter toute la nation

Par Serge H. Moïse

« moïku » Le silence peut être une sorte de mépris Face aux stupidités d'un de ces abrutis Qui essaie donc d'imposer ses idioties À ceux qui lui seront hélas tout ouïe SHM av. Par Serge H. Moïse | cabinet22moise@gmail.com

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la république ou à un autre grand du jour, équivalait à son poids d’or pour le quémandeur ou la quémandeuse. Nous nous souvenons de l’un de ces dimanches, du grand Charles, affectueusement appellé, Ti-Charles, par quelques uns de ses collègues, allongé sur sa galerie en sa résidence montagneuse à Laboule , qui voyait s’amener une habituée à ces imposantes réunions familiales, et il nous confiait en pince-sansrire : « Que va t’elle nous demander cette fois? » Charles Fombrun, tout en étant un homme public, était sensible et délicat. Il ne laissa à aucun de ses sept fils son prénom. Il déclarait que c’était une charge pesante. Nous fûmes le dernier de ses héritiers qui faillit être nommé après lui, car il avait une réticence pour le nom José Maria que nous avait légué notre mère à notre naissance, honorant ainsi le nom de son frère Joseph et le sien... Le jour de notre bap-

SOUVENIRS

Par Carl Fombrun carlfombrun@yahoo.com 31 décembre 2009

Le 24 Mars 1957, sortant de l’ordinaire, notre père Charles Fombrun nous invitait à le rejoindre au Casino International à Port-au-Prince. Nous rejoignaient à cette table, le même soir, l’élégant officier Philippe Dominique de regréttée mémoire, qui perdrait la vie dans de tristes circonstances quelques années après, dans une invasion contre François Duvalier au casernes Dessalines. Charles Fombrun n’était certainement pas comme l’un de ses fils votre cavalier servant, qui étale ses pensées et ses sentiments sur le Coin de Carl. Charles Fombrun, étant un homme politique de son temps, évitait toutes expressions de sentiments personnels en public ou parfois même en privé. Ce soir, au Casino International, il désirait nous faire preuve d’affection, le dernier de ses enfants qui était un nouveau marié

à la recherche d’un meilleur destin sur des rives étrangères. C’était réconfortant et un honneur pour nous de nous retrouver publiquement en compagnie de ce père excessivement réservé, avec un perpétuél et à l’occasion triste sourire au dessous d’une fine moustache et de gros yeux bleus. En patriarche, il avait l’habitude d’observer dans son salon au défilé de plusieurs membres immédiats de sa famille, parfois des alliés, à la recherche d’une faveur; une simple requête du prestigieux et tout puissant sénateur Charles Fombrun de ce temps, au bénéfice d’une tierce personne, à un président de — 65 —

Sénateur Charles Fombrun


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tême il suggéra un compromis pour les noms Carl, suivit de Henri, le batisseur de la Citadelle, et Christophe (Martin,) un ami de longue date. Les générations suivantes prirent la relève, et le nom Charles Fombrun est encore avantageusement présent à traver le monde. Il en fut témoin pour un temps et nous confiait avec son sourire taquin: « Quelle responsabilité! Au moins tu n’auras pas à t’en faire…»Il déclina d’écrire ses mémoires.

Humaniste par excellence, Charles Fombrun était respecté par ses pairs et même un François Duvalier a insisté à l’avoir en le choisissant comme son représentant pour une mission en Argentine en 1957 où Juan Domingo Peron était élu président, son épouse Evita, morte à la fleur de l’âge, était la voix des sans chemises, et notre mère, à qui elle accordât une chaude réception, en fit les louanges.

Papa Doc avait passé l’ordre à ses « tontons macoutes » de ne jamais se permettre de mettre les pieds en la résidence du sénateur Fombrun. « Le Lion de l’Artibonite », comme il était populairement connu, sera toujours dans nos pensées, un très cher père et ami, d’une noblesse d’âme, ayant de l’entregent à revendre.

Carl Fombrun

OPINION

Il existe encore des hommes et des femmes honnêtes en Haiti !!!

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L

e «brouillard de la guerre » l’oblige. Parfois, il faut se rendre sur le ter-

rain. En rentrant en Haïti par le poste frontalier de Ouanaminthe au mois de juillet 2021, j’ai vécu une scène impressionnante : Un humble agent d’immigration qui refuse de se laisser soudoyer par une dame. En effet, j’étais au bout de la file d’attente. Il ne m’a pas vu. La jeune dame lui avait présenté plusieurs passeports accompagnés de quelques billets de 500 gourdes. L’Agent de l'immigration a pris le passeport de la jeune femme, il a vérifié son identité, puis a mis le

sceau d’entrée. Et pour les autres passeports, il lui a posé la question suivante : “Où sont les détenteurs de ces passeports? » Et, la dame de répondre : « Elles ne sont pas présentes. C'est la raison pour laquelle il y a ce cadeau à l’intérieur des livrets. » L’officier a ouvert les documents et a vu l’argent. Et sans hésiter, d’un ton mécontent, il haussa la voix et répliqua : « Pas question! Je suis ici pour appliquer les règlements. Je ne fais pas ce genre de choses. Et, je vous conseille de ne pas insister et de ne

plus recommencer! Car ce que vous faites là est illégal, cela peut vous causer des ennuis. » Je fus ému de vivre ce moment, incognito! Ce fut mon tour de me faire contrôler. Nom, prénom et je fus obligé d’enlever casquette, lunette pour qu’il puisse faire son travail. (En effet, depuis le 22 décembre 2002, ayant été victime d'agressions physiques et de menaces répétées, je mène une vie quasi-clandestine quand je suis en Haiti.) Avec un sourire discret, l’agent d’immigration me salua de la tête et je lui ai dit : « Mon cher, MERCI! Par cet acte courageux, vous venez de me remonter le moral. Car, je rentre au pays, découragé et désespéré. L’idée répandue au niveau international, c’est qu'Haïti est foutue, parce que tous les gens sont des corrompus; la société est pourrie. Et le pire, les médias haïtiens répètent ce cliché. Mais vous qui êtes un humble fonctionnaire de l’État, vous venez de prouver le contraire! Cela m’aide à espérer. » J’ai dû m'isoler pour cacher mes émotions. Et, à mon compagnon de route d’ajouter : « Cyrus, je vois que vous êtes vraiment touché par l'honnêteté de l’homme. Mais, franchement, il existe beaucoup de citoyens honnêtes dans le pays. Ceux qui veulent faire croire que nous sommes tous des corrompus ont leur agenda. » En réalité, ceux qui veulent nous décourager, ne cherchent pas ce genre d’histoires. Ils ne rapportent que la réalité de certains milieux en Haiti, leurs observations dans la capitale haïtienne. Car, leur cercle social quand ils sont en Haiti ce sont les hôtels, les restaurants de luxe, les plages privées que fréquentent les corrompus, les trafiquants de drogue, les oligarques et la bourgeoisie voleuse et malpropre. Donc, par paresse ou par méchanceté, ils les considèrent comme des échantillons représentatifs de la société haïtienne. Mais Haïti, c’est plus que l'État — 67 —

central, c’est plus que l’administration centrale. Haiti ne peut pas être réduite à la République de Port-auPrince, ni à Pétion-ville. Il y a dans ce pays des leaders communautaires, des fonctionnaires qui malgré leur isolement, malgré leur souffrance, la précarité et la vie chère, résistent. Afin de pouvoir toujours passer le « test du miroir »; à savoir se regarder et être en paix avec sa conscience, sa culture, son éducation familiale, avec le sens de sa vie. Dieu merci! La culture de l’ « argent facile » n’est pas encore généralisée en Haïti. Certes, elle est forte dans certains milieux influents. Toutefois, il y a encore des hommes et des femmes de caractère qui, malgré la vie difficile ou impossible, continuent de résister. Ces braves citoyens intègres et fiers attendent notre contribution pour pouvoir mobiliser la frange saine de la nation afin d'engager la renaissance nationale. Cet agent haïtien d’immigration, dont je me garde de citer le nom, m’a motivé. Pour moi, c’est un message de Dieu. D’autres diront que c’est un message de réconfort de nos ancêtres, en ce moment difficile de l’histoire nationale. Mais, pour ne pas compliquer les choses, disons simplement qu’il cadre avec la déclaration célèbre de Toussaint Louverture. A savoir, sur cette terre d'Haïti il existera toujours des « racines de l’arbre de la liberté des noirs », prêtes à assurer la renaissance. L’âme d’une nation ne peut se résumer à des futilités, comme l’argent (des dollars), des voitures de luxe, le sexe, le snobisme... Il y a aussi la dimension transcendantale des valeurs qui donne un sens à l’existence. La nouvelle Haïti, la renaissance de notre pays meurtri, viendra des hommes et des femmes honnêtes.

Cyrus Sibert #LeReCit @reseaucitadelle reseaucitadelle@yahoo.fr 10 Août 2021 WhatsApp : + 509 3686 9669


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HISTOIRE

L’ancre de la Santa Maria

Par Charles Dupuy — 68 —


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P

ar un beau d ima n c h e ensoleillé, je devais avoir dans les dix ans à l’époque, ma mère me demanda de l’accompagner au port où un riche américain exposait dans son yatch, l’ancre de la Santa Maria. Arrivés à bord du bateau, nous fûmes accueillis par un petit homme rond et au visage rubicond qui avait fièrement placé sa précieuse trouvaille sur le tapis de son salon, bien en vue au milieu de la pièce. Il s’agissait d’une ancre de bateau toute mouillée,

toute couverte de mollusques marins et de la forme la plus simple qui se puisse imaginer. Une tige de métal d’environ un mètre de long avec, à sa base, un arc de cercle tout à fait ordinaire, sans ornements ni fioritures. C’était l’ancre de la Santa Maria. Le millionnaire féru d’histoire maritime quitta le port quelques jours plus tard, laissa l’ancre aux autorités haïtiennes qui l’entreposèrent à l’Arsenal du Cap. Le National, le quotidien gouvernemental du temps, publia un reportage détaillé sur l’événement déclenchant par là même, une orageuse polémique sur l’authenticité de cette ancre trop vite attribuée à la célèbre caravelle. En effet, le conservateur du musée national, M. Séjour Laurent, fit paraître un article dans lequel il affirmait que la sorte d’ancre retirée des flots par l’explorateur américain ne correspondait ni par sa forme ni par sa taille au type d’ancre de l’époque de Colomb. L’ancre de la Santa Maria, affirmait-il, était bel et bien celle que gardait dans ses voûtes le Musée nat ional de Port-au-Prince et aucune autre. Il rappela comment cette ancre avait été trouvée à l’époque coloniale, en 1796, à un kilomètre à l’intérieur des terres et à deux mètres de profondeur sur l’habitation Fournier-Bellevue. Cette ancre, ajouta-t-il, figure parmi les plus précieux biens de la nation haïtienne et appartient à son inaliénable patrimoine culturel. Exposée au musée officiel d’État (Mupanah) depuis 1983, l’ancre de la Santa Maria demeure, avec ses quatre mètres de hauteur, l’une des plus belles pièces de la riche collection de l’institution. J’en profite ici pour rappeler qu’en 1933, lorsque Charles Lindbergh visita Haïti, les autorités de — 69 —

Port-au-Prince pensèrent que, pour marquer l’occasion, le plus beau souvenir que l’on pouvait offrir à cette célébrité mondialement connue ce serait quelques centimètres de l’ancre de la Santa Maria. Sans désemparer, en quelques coups de scie à métaux, on préleva un bout de la fameuse ancre que l’on remit fièrement à l’illustre pilote et explorateur des temps modernes. Je peux rassurer le lecteur, aucune autre personnalité de passage au pays n’aura eu droit à un pareil honneur par la suite. Entre-temps, la baie de Caracol ne cessera pas d’attirer les explorateurs et chasseurs de trésors archéologiques. Combien de ces chercheurs amateurs ou professionnels, à l’aide de photos satellites et autres moyens sophistiqués d’exploration sous-marine, se vanteront, à tort ou à raison, d’avoir trouvé l’épave du navire amiral de Christophe Colomb ou bien encore les vestiges du fort de la Nativité, ce premier établissement de l’homme blanc en terre d’Amérique. Si toutefois, cher ami lecteur, vous êtes curieux de savoir ce qu’il est advenu de la fameuse ancre que j’avais vue fraîchement sortie du fond de l’océan toute couverte d’algues vertes, de coquillages et de gastéropodes, sachez qu’elle a été remise quelques années plus tard en cadeau à la faculté d’océanographie de je ne sais plus quelle université de l’État de la Floride par le président d’Haïti de l’époque, le docteur François Duvalier. Et voilà venu, chers amis, le moment de dire: Acta est Fabula… 

Charles Dupuy coindelhistoire@gmail.com (514) 862-7185


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POESIE

Par Jean SAINT-VIL le 10 septembre 2016

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J

’ai des relations charnelles avec les jupes. Je connais tant de ju pes en chair et en os. Des jupes étroites aux jupes en éventail en passant par les jupes qui ne se ferment pas. Je connais tant de jupes sur le bout de mes doigts. Chaque jupe que j’ai connue a été une leçon pour moi. Chaque jupe que j’ai connue m’a laissé tant de souvenirs. Chaque jupe que j’ai connue est une raison de bonheur pour le grand bon vivant que jamais je ne cesserai d’être. Je ne peux un seul instant me passer d’une jupe, que ce soit du désir, que ce soit du regard, ou encore du toucher. Une jupe, c’est pour moi plus qu’une île au trésor, que ce soit dans la rue, que ce soit au travail, que ce soit au marché, ou encore à l’église, et aussi à l’école quand j’étais tout petit. Moi, j’ai tant abusé de ce qu’on tire des jupes que je veux en mourir sans le moindre chagrin. Vous comprendrez donc facilement que mon voeu le plus cher est de mourir au profond d’une jupe.

J’aime tant les jupes J’aime tant les jupes. Dans tous les sens Sous tous les angles. Dans tous les lits. Et à tous les étages. J’aime tant les jupes, quel que soit le milieu : sur terre, sur mer et même dans les airs, comme les oiseaux qui volent. Toute ma vie est une histoire de jupes, d’odeurs de jupes, de goûts de jupes, de couleurs de jupes et de fonds de jupes. Vous comprendrez donc comment, pourquoi je suis sans cesse au service des jupes 24 heures sur 24, tout en attendant les plus tendres faveurs. J’aime tant les jupes et celles qui les portent, les contenants et les contenus. J’aime tant les jupes et ce qu’elles

charrient dans leurs démarches et leurs appels du pied. J’aime les jupes à en mourir, moi qui me fie à la loi qui dit allègrement et sans un brin de gêne, encore moins de pudeur : une jupe de perdue, mille jupes de retrouvées. J’aime les jupes dans leurs cinq dimensions, dans leur longueur, dans leur largeur, dans leur hauteur, leur épaisseur et même leur profondeur. J’aime les jupes dans leur diversité : de celles qui s’ouvrent avec de beaux croisés de jambes avec en corollaire les sauts dans l’inconnu pour les hommes qui les voient à celles qui se ferment une fois que les creux qu’elles cachent n’annoncent plus les couleurs aux yeux des grands voyeurs. Il y a des jupes tellement affriolantes qu’on peut donner à leurs propriétaires le bon dieu sans confession. Il y a aussi des jupes aux fentes insolentes qui n’ont rien à cacher et qui d’entrée de jeu nous font sauter de joie, comme on saute dans l’orgasme. Apparemment inoffensives, les jupes ont fait tant de dégâts du pôle nord au pôle sud. Que de gens sont morts, avec ou sans Viagra, plus qu’on ne croit, au service des jupes. Mourir au fond une jupe est une belle mort, souvent subite. Mon vœu de mort est très sincère : qu’une jupe me tue. Qu’une jupe me tue ! Ce sera un crime parfait dont je ne demanderai pas à mes proches de chercher à se venger et dont moi, même dans l’au-delà, je ne chercherai point jamais à me venger. Qu’une jupe me tue ! C’est le genre de mort dont je rêve sans cesse dans mes cauchemars nocturnes. Qu’une jupe — 71 —

me tue ! Ce sera une mort à mon honneur, parce que je sais que la vie des hommes n’est autre qu’une affaire de jupes qui ont toujours fait leur bonheur ou parfois leur malheur. De toute façon, nous savons tous que chacun d’entre nous doit le jour au fond d’une jupe qui, à un moment donné, avait perdu tout son latin. Qu’une jupe me tue ! Je lui vouerai ma reconnaissance, du fond de ma tombe d’où je lui posterai une flopée d’emails et des messages sur les réseaux sociaux pour qu’elle vienne allègrement à mes côtés, histoire de repiquer la joie sublime que sécrètent au compte-gouttes les fonds des jupes qui mouillent.

Conclusion Pensez aux jupes, à leurs bienfaits tant pour les hommes que pour les femmes qui sont à leur commande. Dévorez les jupes des yeux, de l’esprit et du toucher. Les jupes sont les plus beaux spectacles que le génie des hommes nous a dédiés parce que pour les faire s’envoler, il n’y a toujours qu’un petit pas . Si les jupes n’existaient pas, les hommes les plus coureurs les auraient inventées. Aimez les jupes plus que vous ne le faisiez jusque-là. Dites-vous ceci : Si Dieu avait inventé la jupe dès le paradis terrestre, Adam ne passerait son temps qu’à regarder Eve que dans les yeux. Et nous les humains, nous ne serions point sur cette Terre, pour peupler, croître et multiplier.


Kinam Magazine | June — July — August 2021

Juno François

From his Facebook page: Juno François with the musician “gangs” of Chicago (top) and with the Soccer team Pa Kole of Chicago (below) as well.

Juno François

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The Silent Revolution... (From Page 34) workers took up the slack. But continued COVID-19 fears have stymied regular employees from returning. The Delta variant is keeping small business owners up at night. The future for most seem uncertain. Maintaining the number of workers necessary has become tougher especially now that the supply side is now catching up. Finding people is tough. Unlike their big box counterparts, small businesses are not as nimble and cannot afford to pay higher wages at the flip of a coin. As bigger companies pluck employees from smaller businesses and teenagers return to school, it has become more difficult to attract and hire 25 to 30 people at a pop. Employees are now interested in jobs that can earn a living wage. Nowadays, $200 doesn't go too far in a grocery store. Wage growth is now feared lower than inflation. Nonetheless, the good news according to Secretary of Commerce Gina Riamondo is that unemployment is at its lowest rate since the beginning of the pandemic. Unemployment now stands at 5.4%. The economy is getting back on track as it grew 6.5% in a recent report. The supply chain is still out of whack but strangely the economy has grown at its fastest clip in the past 40 years. The workforce has lost 1.6 million women since the outbreak of the pandemic. Jobs held by women are slow coming back because of childcare costs which have skyrocketed. Affordable daycare is finally recognized as essential for the economy to rebound. The fact is working women cannot go back to work without child care. Amazon is hiring millions for warehouse jobs. Like other big companies, they too have come to grips with the reality that Americans need

liveable wages. American workers can no longer survive on $12 an hour. Fundamentally, to get past the COVID-19 pandemic, Americans need to get vaccinated. Last week, to brace the emergence of 150,000 new cases per day, President Biden introduced new restrictions on those who choose not to take shots. The Biden administration is now at loggerheads with Congress over long term legislation financing $5 trillion in investments in infrastructure. This massive influx of development capital will unleash millions of jobs affecting every industry in the US. Almost 2/3 of job lost during the pandemic have returned. It has been the best surge in hiring in 11 months. Wages have raised 9 1/2% in hospitality. The surging Delta virus has been the root cause of half of employees now looking for new jobs. 74% have disengaged from their jobs. 40% have hit burnout. Among those seeking new jobs 38% are interested in flexible working options. Lifestyle demands are at the top of their wishlist. Most would take a paycheck cut if they could work at home because it is 10 to 15% cheaper not to commute. Lately, Americans are filing fewer unemployment claims. On the flip side, the quit rate resulted in one half job openings being unfilled; historically the quit rate hovers around 22%. In August, an unexpected shortfall of 200,000 farm jobs alarmed economic analysts who had projected 700,000 jobs to be filled. The effects of workers quitting their jobs is felt throughout the economy. According to Sen. Angus King (I) (Maine) half of school districts in the US have bus driver shortages. In Massachusetts this week, 200 national guardsmen were co-opted as drivers to fill in for school bus drivers. In Philadelphia, parents were offered $300.00 a month to drive their kids to school. A sign-up bo— 73 —

nus introduced in Connecticut gave $7,000.00 to South Windsor school bus drivers. Reasons for the no-shows include newly retired drivers, availabilty of lucrative unemployment benefits, fear of elderly drivers of health risks dealing with unvaccinated students, and better-paying alternative jobs. Nationwide, the bus driver situation is regarded as a national emergency since kids need to get to school on time. In California, school administrators are packing students’ backpacks with notices of job openings for teachers. They are hoping parents can assist in their job search following an acute shortage of teachers. In the meantime, administrators are back in the classroom covering as substitute teachers. We are treading water. The silent revolution in labor has no leader, can hardly be considered an organized movement or has any manifesto. It is only a side-effect of a mismanaged pandemic that has exposed the shortcomings of a capitalist society that has devalued labor for centuries. Ultimately, as this revolution runs its course like the pandemic that exposed its symptoms, the winners will be the under-appreciated workers who make production possible on a daily basis. Perhaps more dignity can be given to those who toil for humanity's comfort and more agency given to those who reboot our sustainability and ultimate survival on this planet.


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