T&S Juin 2012

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humeur Tendances

PAR IMANE AOUAD

PSS PSSS... Comme toute Casablancaise de souche, je sais que le Maârif est le lieu de prédilection de nos chers chromosomes XY pour chasser les gazelles et même celles avec des têtes de teckel (en fait, être de sexe féminin suffit). Et manque de bol, lʼagence dans laquelle je bosse se trouve justement au Maârif. Tous les jours, je dois faire des opérations ninja pour éviter de parler à des requins prêts à dévorer tout ce qui ressemble de près ou de loin à une fille (surtout que moi, je suis looooiiiinn de ressembler à Shakira). A 8h du matin, la testostérone de certains est déjà en ébullition. A 18h, cʼest pire car cʼest lʼheure où la friandise pointe son nez. Entre des dragueurs qui sont aussi virils que Vincent McDoom et dʼautres dotés dʼun cerveau aussi vide que lʼestomac dʼun petit Somalien, jʼai dû apprendre à courir vite pour les éviter. Et croyez moi, ce nʼest pas Hussein Bolt le premier à avoir couru 100m en moins dʼune minute. Pour éviter de vivre ce cauchemar tous les jours, je me suis dit que techniquement, je nʼai quʼà déposer ma démission et chercher un autre boulot dans une agence qui ne soit pas au Maârif. Mais divers prétextes fallacieux mʼen empêchent : 1) Cʼest la crise. 2) Ce nʼest pas comme si jʼavais des milliards dʼautres compétences en biochimie moléculaire ou en droit pénal international à rajouter en plus sur mon CV pour trouver un job rapidement. 3) Je mʼimagine sans boulot, condamnée à me sustenter de khobz o atay et refusant de me prostituer pour gagner de quoi payer ma connexion internet. 4) De toute façon, les dragueurs, sont partout à Casablanca, dans tout le Maroc dʼailleurs et même dans le monde entier. Avant, dès quʼon mʼabordait dans la rue, je paniquais, je bégayais et je baissais les yeux, subjuguée par la beauté du trottoir. Maintenant, quand un garçon mal intentionné se présente à moi, cʼest comme un noir qui oserait se présenter à un membre du ku klux klan, cʼest risqué. Parce quʼentre-temps, jʼai pris des cours de karaté. Eh ouais. Ça fait 3 ans que je suis ceinture blanche. Ça vous étonne ? Cʼest normal. Ça fait peur. Ça

fait même très peur. Cʼest flippant. Cʼest dissuasif, une fille avec une ceinture blanche karaté. Mon prof mʼa même dit un jour : « Si je pouvais te donner une ceinture transparente, je lʼaurais fait car tu ne mérites pas encore la blanche ». Il ne mʼaime pas. Il ne mʼa jamais appréciée. Le premier jour, quand il mʼa dit : « Concentre-toi ou sinon dégage de mon cours » je me suis dit : « Surtout ne pleure pas. Sʼil a dit ça, cʼest parce quʼil te kiffe grave et quʼil ne veut pas se lʼavouer ». Ensuite il a dit : «King Kong, mets toi avec la débutante !». Le chauve ne sʼappelait pas vraiment King Kong mais jʼai oublié son prénom. Je ne voulais surtout pas le laisser mʼimpressionner avec ses 125 kilos et son 2m75. Je nʼai pas perdu de temps, dans ma tête, je me suis préparée psychologiquement à prévoir une opération maxillo-faciale avant de viser direct les bijoux de famille. Je vous laisse imaginer volontiers un tas de muscle tomber par terre en position foetus. Jʼen jubile encore. Cʼétait la première et dernière fois où mon prof de karaté a été fier de moi. Il mʼa dit : «Elle ne rigole pas la petite hein ? Tʼas déjà fait un sport de combat avant ?». Je lui ai répondu : « Non, jʼai fait de la danse classique, parce que je suis une fille…connard » Ce soir là, jʼai quitté la salle complètement excitée. Jʼai décidé de rentrer chez moi à pied. Je nʼai pris que les ruelles les plus sombres de mon quartier. Jʼai espéré que quelquʼun mʼagresse pour pouvoir lui crever les yeux. Personne ne mʼa agressé. Ni ce soir là, ni jamais dʼailleurs. Sinon pour ces histoires de drague, bien sûr, tous les chromosomes XY ne sont pas des dragueurs invétérés et certains sont même de véritables princes charmants. Je ne fais pas partie de ces féministes enragées qui sont toujours prêtes à brûler leur soutien-gorge pour protester contre le machisme et la perversité de ces messieurs (ma lingerie cʼest quand même 50% de mon salaire). Tout ça pour dire que : cʼest vrai, tous les garçons sont loin dʼêtres des anges et de rajouter une autre vérité : les filles sont loin dʼêtre innocentes aussi (voilà, je le reconnais, parce que jʼai une conscience intellectuelle MOI. Parfaitement !)

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