Le Patriote 2012 01

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Le journal de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal Volume 12 - No 1 Avril 2012

AU SERVICE DE LA NATION

Spectacle-marathon en hommage à la langue française

J’AIME MA LANGUE DANS TA BOUCHE p. 9, 10 et 11

Manon Leriche, conjointe de Pierre Falardeau. (Photo : Mathieu Breton)

Le prix Ludger-Duvernay à l’écrivain Yves Beauchemin

SOMMAIRE Les bénévoles à l’honneur à la réception du Nouvel An Le mot du président général Jubilé royal : se contenter d’être sujet quand on peut être souverain ? Tu es caquiste, ferme ton caquet Ma radio ne chante pas en français Le premier ministre du Québec ne doit pas oublier le Jour du Drapeau La SSJB célèbre le fleurdelisé, symbole de notre fierté nationale Lettre ouverte de Mario Beaulieu à Jean Charest Huer vers l’art Le prix Ludger-Duvernay à Yves Beauchemin On ne jubile pas, on s’en fout royalement ! La monarchie britannique en Amérique : 250 ans d’hostilité anti-francophone J’aime ma langue dans ta bouche Enquête auprès des enseignants d’histoire du secondaire L’insipidité des manuels d’histoire du secondaire Les patriotes dans les rues de Montréal Les anciens présidents : Auguste-Norbert Morin Tricolore, mais unilingue anglais 178e assemblée générale de la SSJB Les artistes ont leur place à la maison Ludger-Duvernay Le mot juste... Pour l’amour du français Mieux dire au téléphone Les timbres de la SSJB : Paul Chomedey de Maisonneuve Activités des sections Florilège culturel

p. 6

(Photo : Mathieu Breton)

La SSJB appuie les étudiants en grève (Photo : Manon Arsenault)

Envois publications — Publication mail 40009183

CONCOURS MULTIMÉDIA

On ne jubile pas, on s’en fout royalement ! Détails en page 3

Je n’ai jamais voyagé vers autre pays que toi, mon pays.

Gaston Miron

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La fête s’est déroulée tout en musique. (Photo : Mathieu Breton)

Chaque année, les membres profitent de la réception du Nouvel An pour se retrouver et discuter dans une ambiance festive. (Photo : Mathieu Breton)

Les bénévoles à l’honneur à la réception du Nouvel An

De gauche à droite : Mario Beaulieu, Agathe Boyer, présidente de la section Doris-Lussier; Gabriel Duchesneau, poète et militant, Pierre Pichette, vice-président du Mouvement Québec français, Jean Archambault, auteur des plaintes sur l’affichage, et Louis-Philippe Sauvé, militant à la SSJB, au MQF, et dans plusieurs autres instances politiques et indépendantistes (Photo : Mathieu Breton)

De gauche à droite : Manon Arsenault, présidente de la section Laval; Martin « Martimots » Rivest, Coralie Laperrière, Sylvain Bernier et Luce Cloutier, présidente du Mouvement Montérégie français. (Photo : Mathieu Breton) (Photo : Mathieu Breton)

CONVENTION DE LA POSTE — PUBLICATION 40009183

(Photo : Mathieu Breton)

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RETOURNER TOUTE CORRESPONDANCE NE POUVANT ÊTRE LIVRÉE AU CANADA AU SERVICE DES PUBLICATIONS 82 SHERBROOKE OUEST MONTRÉAL QC H2X 1X3 courriel : journal@ssjb.com


Le mot du président général

Réplique au maire d’Huntingdon

La loi 101 est un facteur d’inclusion et de rassemblement par Mario Beaulieu publique commune que tous les citoyens peuvent s’y intégrer et l’enrichir des apports de leur culture d’origine. C’est dans cet esprit inclusif que la Charte de la langue française a été établie. Voici ce qu’on pouvait lire en 1977, dans l’énoncé de politique qui précéda l’établissement de la Loi : Autant la pluralité des moyens d’expression est utile et féconde sur un même territoire, autant il est nécessaire que, comme un préalable, un réseau de signes communs rassemble les hommes. Sans quoi ne sauraient subsister la cohésion et le consensus indispensables au développement d’un peuple.

de plus normal. Cependant, lorsque des personnes de langues diverses se croisent au Québec, le français devrait être la langue normale et habituelle de leurs échanges. Le statut du français comme langue publique commune est la condition première afin d’assurer l’avenir du français au Québec, seul État majoritairement francophone de l’Amérique du Nord. C’est pourquoi la loi 101 visait à faire du français non pas une langue officielle, mais plutôt la seule langue officielle du Québec.

En s’attaquant à la loi 101, Stéphane Gendron reprend toute une série de clichés qui ont maintes fois servi à réprimer le débat linguistique. Pendant longtemps, tout mouvement de défense ou de promotion du français a été taxé d’alarmisme ou de xénophobie. Sous l’effet de telles accusations, la question linguistique est devenue un sujet tabou. Toute remise en question de la supposée paix linguistique était éludée promptement. Il fallait à tout prix éviter d’ouvrir « la marmite linguistique ». C’est ce qui a permis d’affaiblir la Charte de la langue française par plus de deux cents modifications sans susciter de réactions trop vives.

Les lois linguistiques existent partout dans le monde et, dans la plupart des États nationaux, l’éducation publique se fait exclusivement dans la langue de la majorité. Ce sont les mesures scolaires de la loi 101 qui ont permis aux enfants de toutes langues et de toutes origines de fréquenter les mêmes écoles au Québec. Ce sont précisément ces mesures qui ont le plus contribué à la fois à l’ouverture des écoliers francophones et à l’inclusion des nouveaux arrivants. Sans loi 101, il n’y aurait pas eu ces enfants de la loi 101 qui constituent sans doute le symbole le plus palpable de l’intégration des nouveaux citoyens à la société d’accueil québécoise.

La connaissance de plusieurs langues constitue un enrichissement personnel. Mais le bilinguisme anglais-français des institutions publiques crée un clivage qui nuit à l’intégration. René Lévesque affirmait qu’à sa manière, chaque affiche bilingue dit à l’immigrant : il y a deux langues ici, le français et l’anglais; on choisit celle qu’on veut. Elle dit à l’anglophone : pas besoin d’apprendre le français, tout est traduit. De même, si les services publics sont systématiquement offerts dans les deux langues, les nouveaux citoyens comprendront que la société d’accueil québécoise ne tient pas plus qu’il ne le faut à ce qu’ils apprennent le français. Dans le contexte canadien et nordaméricain, le français est alors forcément perçu comme une langue utile, mais non nécessaire.

En fait, avoir une langue commune est un facteur d’inclusion et non pas d’exclusion. Le français est le ciment qui lie tous les citoyens qui forment le peuple québécois. Défendre le français au Québec, c’est inclure les Québécois de toutes origines et de toutes langues maternelles. Pour former une société cohérente, il faut pouvoir se parler, il faut connaître une même langue. C’est en participant pleinement à une culture

La loi 101 n’a pas été conçue contre le bilinguisme individuel, mais contre le bilinguisme institutionnel. Elle devait faire du français non pas la langue des seuls francophones, mais la langue commune de tous les Québécois.

En fait, les déclarations provocatrices du maire Gendron et de tous ceux qui tentent de culpabiliser les Québécois et de dénigrer le Québec français doivent nous servir à relancer le débat sur le bilinguisme anglaisfrançais des services gouvernementaux.

Que les Anglo-Québécois parlent anglais entre eux; les Sino-Québécois, mandarin; les Maghrébo-Québécois, arabe, etc., rien

En 1993, la loi 86 venait enlever à l’OQLF le pouvoir de retirer le statut linguistique

Concours multimédia

de l’organisme ou de l’établissement qui ne satisfaisait plus à la condition qui lui avait permis d’obtenir la reconnaissance en vertu de l’article 29.1. Cet affaiblissement de la loi a donné lieu à une prolifération d’organismes à statut bilingue par différents processus comme par exemple en 2008, l’intégration du dernier hôpital francophone de l’Ouestde-l’Île de Montréal, l’Hôpital de Lachine, au McGill University Health Center (MUHC). Depuis, il n’y a aucun hôpital francophone dans tout l’Ouest de Montréal. Notamment, en Montérégie, quinze arrondissements, municipalités, offices municipaux d’habitation et villes ont le statut « bilingue » bien que quatorze d’entre eux ne répondent plus au critère de la Charte de la langue française. Même en invoquant les critères qui définissent le plus largement l’usage de l’anglais, notamment celui de la première langue officielle parlée, le territoire couvert par le MUHC de Montréal ne comprend pas une majorité de citoyens de langue anglaise. C’est pourquoi il faut redonner à l’OQLF le mandat d’appliquer la loi 101 dans l’attribution et la révocation du statut linguistique. De plus, le statut des organismes reconnus en vertu de l’article 29.1 de la Charte doit être modifié afin d’assurer que les communications internes se fassent en français et que tout membre du personnel connaisse le français. Il faut renverser le fardeau actuel de la demande. Pour inclure, il faut d’abord commencer par ne pas s’exclure. Il faut oser soulever le vrai débat de fond. Nous le ferons rationnellement et sereinement avec tous les citoyens. C’est une condition d’ouverture et de solidarité. •••

Qui veut devenir premier ministre à la place du premier ministre ?

On ne jubile pas, on s’en fout royalement ! Participez au concours multimédia sur le 60e anniversaire du couronnement de la reine Elizabeth II.

Salut Jean, tu te rappelles de moi?

Faites-nous parvenir votre œuvre illustrant le fond de la pensée québécoise sur la propagande monarchiste et militariste du gouvernement canadien (dessins, caricatures, photomontages, présentations PowerPoint, vidéoclips, etc.).

Vos documents doivent nous être soumis au plus tard le vendredi 18 mai 2012 à minuit, à info@ssjb.com, ou à 16 h 30 à la réception de la maison Ludger-Duvernay 82, rue Sherbrooke Ouest, Montréal.

Faisons sentir notre irrévérence alors que le prince Charles et sa femme seront en visite officielle au Canada et que battra son plein la propagande monarchiste fédérale en vue du Canada Day du 1er juillet.

Hâtez-vous!

Pierre Dagesse

Deux gagnants seront « couronnés », méritant chacun un prix de 253 $ représentant les 253 ans depuis lesquels les Québécois sont des sujets de Sa Majesté britannique. Les œuvres gagnantes seront diffusées auprès des grands médias, au cours des mois de mai, juin et juillet 2012.

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OPINION Jubilé royal

Se contenter d’être sujet quand on peut être souverain ? La monarchie n’est pas qu’un symbole au Canada, mais une véritable culture politique qui a su traverser toute l’histoire de ce pays et de ses institutions. Les pères fondateurs étaient des loyalistes convaincus, admirateurs du système anglais et héritiers d’une idéologie de seigneurs et de conquérants. Comme le relève le politologue Francis Dupuis-Déri dans un texte paru récemment, ceux-ci se disaient même fièrement et ouvertement contre la démocratie et répugnaient à l’idée que le Canada puisse être autre chose qu’un dominion néo-monarchique et néo-britannique. Et ce ne sont pas que les politiciens canadiens-anglais qui adhéraient à ce point de vue, comme en témoignent les propos révélateurs de Georges-Étienne Cartier en 1864 : Nous travaillons à notre tour à fonder ici une grande confédération […] mais notre objet n’est point de le faire par la création d’institutions démocratiques; non, c’est plutôt d’aider l’élément monarchique à prendre parmi nous de plus profondes racines. Bref, la Confédération a vu le jour dans la continuité du régime qui prévalait jusque-là, lequel fut imposé et maintenu par la force des armes, faut-il le rappeler. Elle consacre la domination du Lion anglais, de l’Empire et de la bourgeoisie coloniale et industrielle d’Amérique du Nord britannique. Dans cette vision des choses, propre à ceux qui ont fondé les institutions qui nous régissent encore aujourd’hui, le citoyen canadien n’a pas les attributs d’un véritable citoyen, mais ceux d’un simple sujet. Une telle chose comporte évidemment son lot de drames pour nous, Québécois, qui jamais n’avons consenti à cet état de fait à la population loyaliste et orangiste ayant peuplé cette terre. Car, en réalité, le statut du sujet québécois est encore moindre que celui d’un sujet « normal » de sa Majesté. En effet, ce régime, en nous annexant, en nous minorisant, pour finalement superposer éternellement à notre liberté celle de la majorité anglophone, nous interdit d’être considérés comme les égaux des « vrais » sujets, c’est-à-dire les sujets canadian, sous cette Couronne chimérique qui sert de masque à une élite gouvernante et une oligarchie elles-mêmes radicalement canadian. Ainsi, le Canada, dans toute sa canadianicité, a fait de nous… des sujets de sujets; aussi bien dire des sous-sujets, en ce royaume qui bien que grand comme un continent, ne nous ressemble en rien. Mais si l’on approfondit la réflexion, on s’aperçoit que les récentes visites princières, la revalorisation des vieux symboles royaux par Harper, et maintenant le Jubilé ne visent pas tant à célébrer la Reine ou la famille Windsor elle-même qu’à glorifier le régime qui, tout en nous réduisant au statut de sous-sujets, confère au premier ministre fédéral et à son entourage leurs enviables privilèges politiques. Toutes ces campagnes de propagande, qui capitalisent sur notre indifférence et sur notre immobilisme, ont pour seul objet de favoriser la conservation de ce régime en lui fabriquant à coups de millions de dollars, une image sympathique censée le légitimer. La royauté étant une question identitaire enracinée dans les récits féériques de ce pays postcolonial, l’occasion est belle pour renforcer l’unité canadienne, laquelle se moque bien, comme toujours, de la différence québécoise, en se moquant aussi de nos douleurs présentes et passées ainsi que de notre vieux fond républicain, par trop inoffensif pour ralentir nos dirigeants dans leurs ardeurs monarchistes… Comme l’écrivait le constitutionnaliste anglais Walter Bagehot en 1867, le motif derrière l’instauration d’une monarchie constitutionnelle consiste essentiellement à mystifier le peuple en lui injectant l’idée, le fantasme qu’il doit sa gouverne à un souverain bienveillant, à une famille dynastique prétendument admirable ou à quelque charmante princesse, alors qu’en

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réalité le pouvoir est exercé, par le biais de l’appareil gouvernemental, par une clique restreinte d’oligarques ou d’aristocrates bien attachés à leurs intérêts. Encore de nos jours, cette petite clique rassemble des gens puissants issus notamment du monde de la finance, du pétrole, des médias, voire du commerce des armes à feu, qui parviennent à exercer une influence majeure sur l’ordre du jour du gouvernement. Pour quiconque souhaite prendre les commandes du Canada, conquérir le bureau du premier ministre constitue toujours un objectif prioritaire, car c’est là, et non au Buckingham Palace ni à Rideau Hall, que nichent réellement la plupart des pouvoirs à caractère royal hérités des conventions constitutionnelles ou édictés par le British North America Act. En effet, le premier ministre fédéral, en tant que leader du parti gouvernemental et chef de facto de l’État, jouit de l’autorité d’un véritable monarque élu. Parmi ses prérogatives, on compte le pouvoir de nommer le gouverneur-général, les lieutenants-gouverneurs des provinces, les membres de son cabinet ministériel, les juges de toutes les cours supérieures du Canada, les généraux de l’armée ainsi que les dirigeants de toutes les sociétés de la Couronne (comme le président de RadioCanada)… Il détient aussi la capacité de désigner les sénateurs, les ambassadeurs du Canada à l’étranger, en plus de 3100 postes dans l’administration. Mentionnons également qu’il contrôle depuis son bureau, l’essentiel des communications du gouvernement. Le premier ministre canadien possède un très vaste droit de regard qui s’étend à l’ensemble du champ d’action de l’État central. À cet égard, rappelons que le palier fédéral se voit confier les plus importantes compétences législatives et exécutives prévues au titre du partage des pouvoirs constitutionnels, bénéficiant au surplus des compétences résiduaires. Quant aux pouvoirs extraordinaires, il y a le pouvoir de réserve et de désaveu, hérité de l’ère coloniale et typiquement monarchiste, le pouvoir de s’arroger certaines matières par le moyen d’une déclaration à l’effet qu’elles seraient « d’intérêt national canadien » et le droit d’intervention en ce qui concerne les droits à l’instruction des minorités linguistiques. N’oublions pas le pouvoir fédéral de dépenser, chose non négligeable dans le contexte où Ottawa n’a jamais été aussi centralisateur, ainsi que le pouvoir de réformer unilatéralement la composition du Sénat et de la Chambre des Communes… C’est la nature foncièrement monarchique de ce système qui donne à Harper toute la marge de manœuvre pour nous enfoncer dans la gorge ses politiques militaristes, répressives, réactionnaires, anti-environnementalistes, lesquelles se révèlent profondément incompatibles avec les intérêts et consensus nationaux des Québécois, qui transfèrent chaque année au gouvernement canadien plus de 50 milliards de dollars en impôts. Au final, on ne devrait donc pas se surprendre de l’orgie d’éloges et de célébrations royales mises en scène par le premier ministre ces derniers mois, car à travers la figure du monarque, c’est Harper qui se célèbre luimême, en célébrant par la même occasion la clique qui l’entoure ainsi qu’un nationalisme canadian qui se dévoile sous son vrai jour. Cela dit, il est encore temps de nous ressaisir et de montrer au monde que nous, le peuple du Québec, existons par-delà notre sujétion forcée à ce régime. La République et l’indépendance ne sont qu’une question de temps. ••• Maxime Laporte, LL. B., étudiant à la maîtrise en science politique Coordonnateur du réseau Cap sur l’Indépendance

Rébellion contre Rebello

Tu es caquiste, ferme ton caquet! par Christian Gagnon Jadis au Québec, les familles s’enorgueillissaient de compter en leur sein un fils ou une fille ayant « prononcé ses vœux », c’est-à-dire ayant décidé de consacrer sa vie à Dieu en entrant au monastère ou au couvent. Cette abnégation incluait évidemment le vœu de chasteté, une promesse qui n’était pas toujours facile à tenir. Lorsque François Rebello a décidé de se joindre à la Coalition avenir Québec de son bienaimé François Legault, avait-il conscience de ce que son adoré renonciataire allait exiger de lui? Le jour-même où il retourna sa veste, François a mis François dans l’embarras en affirmant que sous la diligente gouverne de son nouveau chef, la porte de la souveraineté demeurerait ouverte, et même qu’à long terme, un gouvernement caquiste rapprocherait le Québec de cet objectif. Adieu, électeurs fédéralistes! Le mentor aura sans doute rabroué sa recrue en coulisse puisque deux jours plus tard, M. Rebello corrigea le tir en disant que M. Legault ne ferait jamais la souveraineté car ce n’était pas le but de la CAQ. Et Mario Bertrand, ex-directeur de cabinet de Robert Bourassa devenu conseiller de François Legault, administra un camouflet au transfuge en estimant que François Rebello avait commis « une erreur de parcours » qui « aurait mérité un certain cadrage ». Une semaine de discussions en caucus à ce sujet ne sembla pas avoir apaisé les collègues de M. Rebello. Le 20 janvier, l’ex-adéquiste Sylvie Roy a senti le besoin d’y revenir publiquement en se disant « pas d’accord avec lui ». Et son collègue Janvier Grondin gronda le petit nouveau en disant que si lui s’était joint à la CAQ, c’était parce qu’il était persuadé que le nouveau parti ne parlerait pas de souveraineté. La rebuffade suivante n’est pas la moindre. Le 21 février, M. Grondin exposa au grand jour son exaspération devant les couacs de son cher collègue sur le Protocole de Kyoto et la réduction du nombre de voitures par famille. Le bouillant Beauceron invita carrément M. Rebello à se taire. Trop gauchiste pour être caquiste, ce Rebello? Essayant de nous faire croire que les ennuis du député de La Prairie venaient de l’extérieur de la CAQ, François Legault a pris la défense de son poulin en déclarant, depuis le début, il y a acharnement. On ne reconnaît pas le fait que M. Rebello, qui était souverainiste, puisse se retrouver dans un parti qui est nationaliste. On aura noté que c’est au passé que M. Legault a conjugué les allégeances souverainistes de M. Rebello. Et voilà qu’il faut considérer François Rebello comme un « nationaliste » de la même eau qu’un fédéraliste inconditionnel comme Gérard Deltell. Moindre mon espoir, plus grand mon amour, écrivait Térence. L’orgueilleux Rebello tolérera-til longtemps cette abstinence toute monastique? Si oui, il faudra en conclure que l’ambition transporte davantage les montagnes que la foi. •••

Ma radio ne chante pas en français Nous reproduisons ici une lettre d’opinion des membres de l’exécutif du Mouvement Montérégie français parue dans le journal L’Action régionale du 30 novembre dernier. Depuis deux ans, le Mouvement Montérégie français, organisme membre du Mouvement Québec français, s’efforce de promouvoir et de défendre la langue française en Montérégie. Nous tentons de multiplier les actions et de démontrer l’urgence d’agir. « Ma radio ne chante pas en français » est la réponse que nous avons reçue d’un bon Québécois francophone, propriétaire d’une cantine sur le boulevard Laurier lorsque nous lui avons demandé s’il était possible de mettre de la musique en français ! Lorsque nous avons fait campagne à Otterburn Park afin de franciser le statut linguistique de la ville et, ainsi, de se conformer à l’esprit et à la lettre de la loi 101 quant aux organismes publics reconnus bilingues, M. le Maire, appuyé par tous ses conseillers francophones, nous a répondu qu’on ne le ferait pas car c’était là un signe de respect pour cette population de conserver le statut bilingue de la ville. On ne mentionna évidemment pas l’importance de respecter la culture de 93,3 % de la population (de cette ville) ! Et que dire de la toponymie de ladite ville où plus de 85 % des noms de rue sont en anglais ! C’est à croire que les francophones d’Otterburn Park n’ont ni culture ni histoire ! Dans une étude sur la vitalité de la langue en Montérégie de M. Gérald Paquin, on observe un étalement géographique de l’anglicisation au sud et à l’ouest de la Montérégie. Comment appliquer la loi 101 en Montérégie quand l’État ne respecte pas ses propres règles? Il faut cesser de croire, tel que mentionné par l’IRFA, que l’anglicisation résulte des phénomènes que sont la mondialisation et l’immigration. ••• Luce Cloutier Présidente du Mouvement Montérégie français Michel Gagnon Vice-président du Mouvement Montérégie français Pierre Pichette Secrétaire du Mouvement Montérégie français


Le premier ministre du Québec ne doit pas oublier le Jour du Drapeau Dans une lettre adressée au premier-ministre du Québec, Jean Charest, le président de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, Mario Beaulieu, s’est fait un devoir de lui rappeler de ne pas oublier de souligner l’anniversaire du drapeau du Québec, le samedi 21 janvier. On se rappellera que cet important événement avait été complètement oublié l’an dernier, au grand dam du ministre de la Justice, JeanMarc Fournier. En 2010, la SSJB avait fait la même demande de souligner l’anniversaire du fleurdelisé au premier ministre. Quelques jours plus tard, un déplorable communiqué de presse du ministère de la Justice faisait du pavoisement : « un besoin de traçabilité des services ». Le président de la SSJB fait valoir que le drapeau québécois constitue le symbole de toutes les aspirations, de tous les échecs et de toutes les victoires qui ont façonné l’identité du peuple québécois et ses valeurs fondamentales. Au-delà des clivages idéologiques qui peuvent séparer les partis politiques et les citoyens, le drapeau demeure un symbole unificateur porteur d’espoir pour tous les Québécois. •••

La SSJB célèbre le fleurdelisé, symbole de notre fierté nationale

(Photo : Mathieu Breton)

Le drapeau québécois est le symbole de notre fierté nationale, a déclaré le président général de la Société Saint-Jean Baptiste de Montréal, Mario Beaulieu en annonçant les activités du Jour du Drapeau, le samedi 21 janvier 2012. Ces activités remplaçaient le traditionnel défilé d’automobiles qui avait lieu les années précédentes. Dès 10 heures, les militants de la SSJB ont distribué des drapeaux et des cartons d’information sur l’histoire du drapeau à différentes stations de métro, dont Berri-UQÀM. Puis, la Marche du Drapeau a débuté après l’heure du dîner. Les participants ont marché sur la rue SainteCatherine, du parc Émilie-Gamelin, près de la station Berri-UQÀM jusqu’au parc CamilleLaurin, situé en face de la maison Ludger-Dunvernay. Les militants y ont planté mille drapeaux du Québec.

Lettre ouverte de Mario Beaulieu, président du Mouvement Québec français Le Mouvement Québec français dénonce la désinformation faite par Jean Charest à Paris en préparation du Forum mondial de la langue française Montréal, le 14 mars 2012 - Alors que les signes du recul du français au Québec se multiplient, le premier ministre Jean Charest soutenait lundi dernier que le français progresse bien lors de sa rencontre à Paris avec le Secrétaire général de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF), monsieur Abdou Diouf. Contrairement à ce qu’affirme monsieur Charest, selon les données de Statistique Canada les plus récentes disponibles, soit celles de 2006, le pourcentage de francophones de langue maternelle à Montréal est passé sous la barre des 50 % et sous les 80 % dans l’ensemble du Québec. Entre 2001 et 2006, le poids des francophones au Québec a plongé de deux points. Du jamais vu dans l’histoire du recensement canadien. Par surcroît, alors que le français dégringole aussi en tant que langue d’usage à la maison, le poids de l’anglais, langue d’usage, a augmenté. Sur l’île de Montréal, la proportion des francophones selon la langue parlée à la maison est de 54,2 %, soit 7,6 points de pourcentage de moins qu’en 1986 (61,8 %). M. Charest prétend que de plus en plus de citoyens allophones choisissent le français comme langue d’usage au Québec. Il se réfère sans doute à l’augmentation apparente des transferts linguistiques bruts qui en 2006 étaient à égalité vers le français et vers l’anglais. Mais cette augmentation reflète la sélection d’immigrants déjà francisés avant leur arrivée au Québec et le fait que les allophones anglicisés ont davantage tendance à quitter le Québec. De plus, au prorata des populations de langues maternelles française et anglaise, le pourcentage à la faveur du français devrait être de 91 %. Sur l’île de Montréal, les taux de transferts bruts sont à 43 % vers la langue française et 57 % vers la langue anglaise. En 2006, la population de langue d’usage anglaise était de 29 % plus élevée que la population de langue maternelle anglaise, essentiellement parce qu’une proportion importante des allophones adopte l’anglais comme langue parlée à la maison. En comparaison, la population de langue d’usage française ne faisait qu’un gain de 3 % par rapport à la population de langue maternelle française. Lorsqu’on observe l’évolution de ces données depuis 1971, on voit que le pouvoir d’attraction de l’anglais sur les allophones au Québec augmente continuellement par rapport à celui du français.

Les citoyens et citoyennes étaient aussi invités à venir chercher un drapeau et du matériel thématique à la Maison Ludger-Duvernay afin de pavoiser à leur façon dans leur quartier. •••

Indice de vitalité linguistique - Québec 1971 à 2006

Mario Beaulieu à la tête de la Marche du Drapeau. (Photo : Mathieu Breton)

% Français Anglais

1971 1,00 1,12

1981 1,00 1,15

1986 1,00 1,18

1991 1,01 1,22

1996 1,02 1,23

2001 1,02 1,27

2006 1,03 1,29

Le MQF rappelle que le président du Comité de suivi de la situation linguistique à l’Office québécois de la langue française (OQLF), Marc Termote, prévoie un déclin rapide des locuteurs du français à Montréal (de 54 % en 2006 à 42 % en 2051), qui se répercutera dans l’ensemble des régions du Québec (82 % en 2006 à 72 % en 2051).

Les membres du comité Fleurdelisé ont participé en grand nombre aux festivités du Jour du Drapeau. (Photo : Mathieu Breton)

Le Mouvement Québec français (MQF) entend dénoncer d’ores et déjà l’opération de camouflage que le gouvernement libéral tentera d’effectuer au Forum mondial de la langue française, qui se tiendra à Québec du 2 au 6 juillet 2012. Le déclin du français à Montréal et au Québec résulte des affaiblissements systématiques qu’a subi la Charte de la langue française, notamment sous l’effet des jugements de la Cour suprême et de la Constitution de 1982 imposée par le Canada anglais contre la volonté du Québec. Le Forum mondial de la langue française sera l’occasion d’informer la francophonie internationale de la situation critique de la langue française au Québec, seul État encore majoritairement francophone en Amérique du Nord. Comme le disait Pierre Bourgault, quand nous défendons le français chez nous, ce sont toutes les langues du monde que nous défendons contre l’hégémonie d’une seule. ••• Mario Beaulieu

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Huer vers l’art Le Patriote vous présente un manifeste contre les coupures budgétaires dans la culture écrit dans le cadre du cours Dramaturgie IV, donné par Linda Wilscam à l’école de théâtre du cégep de Saint-Hyacinthe.

Le prix Ludger-Duvernay à Yves Beauchemin Un écrivain qui met des mots sur le pays

Rejetons d’une génération où le changement était de mise, où la nécessité avait l’importance de la gravité, où la passion brillait sur tous les fronts.

par Élaine Des Lauriers

Un peuple fier une seule journée par année. Trois cent soixante-quatre jours à se tapir sous la peur. Peuple à genoux, attends ta délivrance, annonce ta nouvelle croyance. Le veston cravate du bureaucrate a remplacé la soutane. Nous avons une nouvelle religion : celle du dieu Money, aussi contrôlante que la précédente. Étouffée par le nœud coulant, la peur persiste. L’histoire du pays est censurée, conséquence directe de la réforme. On choisit de qui on parle, on reformule pour mieux paraître. Qui se souvient ? Qu’est devenue la culture ? L’évolution régresse. C’est la forme sans le fond. C’est l’art sans fonds. C’est l’amour de la distorsion, l’embellissement mensonger de l’identité. « Ne tuons pas la beauté du monde. » Arrêtons d’embuer le miroir ! L’art comme moyen de communication.

Mario Beaulieu remettant le prix Ludger-Duvernay à l’écrivain Yves Beauchemin. (Photo : Mathieu Breton)

L’art n’a ni loi ni limite. Il nous enveloppe. L’art est une troisième personne. Il s’accorde au passé, au présent et au futur parce que nous le voulons, le sentons et le vivons nuit et jour. Aujourd’hui, l’art devient une simple marchandise diffusée à travers la planète. Un produit de consommation qu’on ne goûte plus, qu’on ne sent plus, qu’on ne voit plus, qu’on ne touche plus, qu’on n’entend plus. L’art est devenu un produit consumé. La réflexion manque. La nouveauté n’existe plus. L’art n’a plus de sens. Couper les subventions : couper l’amélioration. Changeons les orientations. La perception est devenue une chimère amère. C’est le rêve vicieux d’un monde meilleur. À bas les illusions oniriques ! Arrêtons de croire au monde utopique. C’est un aveuglement collectif. Il suffit! Sautons aux conclusions, amenons les changements. Cessons la cécité. Nous perdons de vue la réelle valeur de l’art au profit du capital. Décapitons la capitale, qui s’endort sur ses lauriers du passé. Nous avons maintenant nos propres combats à mener, nos propres slogans à scander. Activons nos témoignages et prenons un gage. Patriote à notre façon, dans notre maison, il est temps d’abolir la pendaison. Soyons notre libération! Abolissons la peur, oublions la rancœur, illuminons la noirceur. Soyons Québec, « morts ou vivants » ! Le temps n’est plus à la parole, mais à l’acte. Cessons de nous plaindre et levons-nous! ••• Auteures : Véronique GAGNÉ Joëlle PINARD Mélissa PROVOST

Avec la collaboration de : Gregory BEAUDIN-KERR Pierre-Alexandre DERASPE Hélène LAFOREST Maxim ST-AMAND Félix TREMBLAY-THERRIEN

C’est dans une salle comble le 15 décembre dernier que le président de la Société SaintJean-Baptiste, Mario Beaulieu, a remis avec fierté le prix Ludger-Duvernay à l’écrivain Yves Beauchemin. Créé en 1944 en l’honneur de Ludger Duvernay, imprimeur, éditeur, journaliste, politicien et patriote fondateur de la Société, ce prix est décerné à une personne qui s’illustre dans le domaine de la littérature qu’il soit auteur, écrivain ou journaliste. Avant de laisser la parole aux invités venus présenter l’homme et l’écrivain Yves Beauchemin, Mario Beaulieu a souligné quelques uns des prestigieux récipiendaires de ce prix au cours des dernières années. Parmi eux, on note Marie Laberge, MarieClaire Blais, Gérald Godin, Louis Caron, Victor-Lévy Beaulieu, Claude Jasmin, Michèle Lalonde, Jacques Brault, Gaston Miron, Jacques Brossard, Jacques Godbout, Jacques Ferron, Anne Hébert et Gabrielle Roy. Yves Beauchemin, qui a été admis à l’Académie des lettres du Québec en 1993, se trouve donc en très bonne compagnie. Yves Beauchemin, écrivain prolifique, a publié de nombreux romans depuis le tout premier, L’Enfirouapé, qui lui a valu le prix France-Québec en 1975. Depuis, il a publié Le Matou (1981), qui a été traduit en seize langues et porté à l’écran par Jean Beaudin en 1985 ; Juliette Pomerleau (1989), Le second violon (1996), Les émois d’un marchand de café (1999), Charles le téméraire (2004-2005-2006), Le renard bleu (2009) et le tout dernier, La serveuse du Café Cherrier (2011). C’est sans compter ses livres jeunesse, dont Antoine et Alfred et ses recueils, Du sommet d’un arbre (1991), Une nuit à l’hôtel (2001) et Le Calepin rouge (2007).

Michel Brûlé (Photo : M. Breton)

On ne peut passer sous silence les manifestations étudiantes et l’appui spectaculaire de la population le 22 mars dernier. (Photo : Mathieu Breton)

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Jean Dorion (Photo : M. Breton)

Lors de cette soirée de remise de prix, l’éditeur Michel Brûlé, a souligné combien le Québec a besoin d’écrivains comme Yves Beauchemin pour mettre des mots sur le pays. Un ami de longue date, Georges Aubin, a raconté de savoureux souvenirs qui ont bien fait rire l’assistance. Jean Dorion, ancien président de la SSJB et grand ami d’Yves Beauchemin, a quant à lui précisé combien son œuvre reflétait sa personnalité, son amour des enfants, des animaux, de la musique et de la bouffe. Yves Beauchemin, écrivain prolifique, est, selon Jean Dorion, un esprit qui ne se repose jamais, un esprit revendicateur. Yves Beauchemin fait partie des membres fondateurs du Mouvement Montréal français. Il a participé à de nombreuses manifestations au cours des dernières années, dont certaines à titre d’orateur. Écrivain à l’indéniable talent de conteur et citoyen engagé, défenseur du français et du patrimoine, il mérite pleinement cet honneur que lui fait la Société. Finalement, Édouard Cloutier a rendu hommage à Yves Beauchemin en chantant avec beaucoup d’émotion la très belle chanson de Gilles Vigneault Pendant que dont voici un extrait : Pendant que les bateaux / Font l’amour et la guerre / Avec l’eau qui les broie / Pendant que les ruisseaux / Dans les secrets des bois / Deviennent des rivières / Moi, moi, je t’aime / Moi, moi, je t’aime… Parions que parmi la foule venue assister à cette remise de prix, nombreux sont ceux qui auraient choisi ces mots pour exprimer toute l’admiration qu’ils ont pour l’écrivain, mais aussi pour l’homme engagé qu’est Yves Beauchemin. •••

Georges Aubin (Photo : M. Breton) Édouard Cloutier (Photo : M. Breton)

Renaud Beauchemin et Viviane Saint-Onge, fils et épouse d’Yves Beauchemin. (Photo : Mathieu Breton)


La SSJB lance sa propre campagne du jubilé de diamant et du bicentenaire de la guerre de 1812

On ne jubile pas, on s’en fout royalement !

Christian Gagnon

par Christian Gagnon

Le 6 février dernier, jour du 60e anniversaire d’accès au trône britannique de la reine Elizabeth II, le gouvernement canadien lançait ses fastueuses célébrations du jubilé de diamant de celle qui, malgré le rapatriement unilatéral de la constitution de 1982, demeure la chef de l’État canadien. À cette occasion, le premier ministre Stephen Harper a procédé à la première de nombreuses séances de remise de médailles du jubilé prévues tout au long de l’année 2012. Au même moment, le lieutenant-gouverneur du Québec, Pierre Duchesne, procédait à une discrète cérémonie au salon rouge de l’Assemblée nationale pour remettre 44 de ces médailles aux « loyaux » aides de camp bénévoles de son propre personnel. Ce même jour, le président de la Société SaintJean-Baptiste (SSJB) de Montréal, Mario Beaulieu, annonçait le lancement d’une campagne intitulée On ne jubile pas, on s’en fout royalement ayant pour but de riposter aux campagnes de propagande monarchiste et militariste du gouvernement canadien. En effet, comme l’a souligné la SSJB par communiqué, alors qu’une forte majorité de la population du Québec voudrait se défaire des symboles de la monarchie, le gouvernement canadien va consacrer près de 7,5 millions $ pour faire la promotion du jubilé partout au Canada, y compris au Québec. Cette campagne prendra notamment la forme de conférences avec des historiens et des spécialistes choisis, un concours multimédia (dessins, photomontages etc.), ainsi que la diffusion de matériel promotionnel. Elle vise à rappeler à la population qu’au nom de cette Couronne britannique ont été effectuées au cours des siècles passés des actions d’une rare violence qui seraient aujourd’hui considérés comme crimes graves en droit international. Encore de nos jours, les efforts de francisation du Québec sont menacés par la Constitution canadienne telle que modifiée par Pierre Elliot Trudeau et entérinée par la reine Elizabeth II contre la volonté explicite et constante du Québec. Patrimoine canadien vient de faire l’achat d’un demi-million de petits drapeaux ornés de la feuille d’érable et de la couronne britannique, emblème canadien du jubilé de diamant. C’est sans compter un nouveau portrait de la reine, un monument, un vitrail, 60 000 médailles et des pièces de monnaie à l’effigie de la souveraine. Cette opération ne manque pas de nous rappeler le programme des commandites qui a détourné l’argent issu des impôts prélevés

au Québec. Alors que ce gouvernement élu par d’autres est sur le point d’imposer des coupures sauvages et unilatérales dans les transferts aux provinces, ces folles dépenses de propagande identitaire montrent bien que les Québécois n’ont pas du tout les mêmes priorités que les Canadiens et n’appartiennent pas à la même nation, a estimé Mario Beaulieu. Le gouvernement Harper avait décrété que cette orgie de remise de médailles inclurait l’ensemble des députés fédéraux parmi ses récipiendaires. Mais le chef du Bloc Québécois, Daniel Paillé, a rapidement indiqué que chacun des membres de son caucus retournerait à l’expéditeur la médaille lui étant réservée d’office. Maria Mourani, députée bloquiste d’Ahuntsic et co-fondatrice du Mouvement Montréal français, est allée plus loin dans son boycott en annonçant qu’elle ne remettrait à personne dans sa circonscription les 30 médailles du jubilé de diamant que le gouvernement conservateur l’a chargée de distribuer. Je suis souverainiste, je suis républicaine, ce sont mes valeurs et les gens le savent. Alors je ne collaborerai pas pour donner ces médailles, a déclaré Madame Mourani. Et si des personnes méritent d’être honorées dans Ahuntsic, je leur offre de faire des demandes avec eux pour obtenir la médaille de l’Assemblée nationale. C’est une récompense nettement plus significative pour les Québécois, a-t-elle indiqué. En cette nouvelle année 2012, le gouvernement Harper a entrepris la même assommante démarche avec le bicentenaire de la guerre de 1812 entre les États-Unis et la Grande-Bretagne. Le gouvernement Harper nous servira ainsi une campagne télévisuelle de « sensibilisation », une série documentaire, des reconstitutions militaires et d’innombrables autres événements « commémoratifs ». On a même appris ce 23 janvier que les groupes organisant des activités pour la fête du Canada seraient privés de subvention s’ils n’intégraient pas à leur programmation la guerre de 1812 ou le jubilé de diamant. Et le plus choquant, c’est que Patrimoine canadien invite toutes les écoles à participer à son Défi de l’affiche de la fête du Canada, un grand concours de dessin en quatre groupes d’âge sur la guerre de 1812. Il est carrément indécent que le gouvernement se serve des enfants pour véhiculer sa propagande en vue de redéfinir le Canada selon sa vision britannique, coloniale et militariste de ce pays, a protesté Mario Beaulieu. Comme l’a bien expliqué dans Le Devoir du 12 octobre dernier l’historien Robert

Comeau, conseiller général de la SSJB, cette commémoration de la guerre de 1812 n’est rien d’autre qu’un détournement d’histoire pour développer l’unité canadienne. En effet, il est faux de prétendre comme le fait Patrimoine canadien que le pays n’existerait pas si l’invasion américaine de 1812-1814 avait réussi, car les Américains n’avaient aucunement pour but de conquérir le territoire de ce qui était alors la British North America. Ils avaient déclaré la guerre à l’Angleterre parce que cette dernière arraisonnait en mer les navires américains pour les empêcher de commercer avec la France de Napoléon. Les Américains reprochaient aussi aux Britanniques de fournir des armes aux Amérindiens sur leur territoire. Robert Comeau considère même que l’Angleterre a perdu cette guerre puisqu’en plus de s’être soldée par le statu quo territorial, les Américains ont ensuite pu commercer à leur guise avec la France, sans compter que la fin de cette guerre a consacré le début des pertes considérables des Amérindiens vivant en sol américain. Le Québec n’a rien à célébrer de cette guerre qui n’a pas à voir avec l’unité nationale, car il n’y a jamais eu, en 1812, de menace d’invasion du territoire par les États-Unis, conclut M. Comeau. Étonnamment, c’est de la plume d’une éditorialiste du très fédéraliste Groupe

GESCA qu’ont émergé les critiques les plus virulentes concernant cette commémoration de la guerre de 1812. Pierre Allard (Le Droit d’Ottawa, 12 octobre 2011) écrit qu’au Canada, et plus particulièrement au BasCanada (le Québec d’aujourd’hui), l’opposition à cette guerre était vive. Les Canadiens français n’étaient pas chauds à l’idée de prendre les armes pour le conquérant britannique. […] Quand les militaires britanniques ont arrêté des conscrits récalcitrants, des centaines de Canadiens français armés ont menacé de prendre d’assaut les prisons pour les libérer. Après un ultimatum des autorités britanniques, un campement de 1500 Canadiens français défiants était établi aux abords du MontRoyal. Il a fallu des affrontements violents et des victimes, ainsi qu’une propagande intense pour finalement réussir à imposer la conscription aux francophones. Puis M. Allard s’en prend à la récupération de la bataille de Châteauguay et de son héros, le lieutenant-colonel Michel de Salaberry. Le gouvernement utilise aujourd’hui cette victoire sur les Américains – voire cette guerre tout entière – pour donner l’impression d’une certaine unité entre francophones, anglophones et autochtones, une espèce de jalon vers la confédération de 1867. On pousse l’audace jusqu’à y voir une pierre d’assise de l’identité francophone du Québec contemporain, s’indigne Allard. Mais on ne rappellera pas trop souvent que Salaberry a dû recruter personnellement ses Voltigeurs canadiens, qu’il n’a reçu à peu près aucun soutien (on lui a même nui, à l’occasion) de l’état-major britannique, qu’on avait limité à 300 le nombre des miliciens faute de fonds, et que le gouverneur britannique a tenté par la suite de diminuer la gloire de Salaberry, écritil. Alors quand on vient nous parler d’identité francophone et quand le ministre James Moore affirme que « les efforts héroïques de ceux qui se sont battus pour notre pays (sic) durant la guerre de 1812 ont façonné l’histoire du Canada tel que nous le connaissons aujourd’hui : un pays libre et indépendant, doté d’une monarchie constitutionnelle et de son propre système parlementaire », c’est de la bouillie pour les chats. L’oppression britannique est demeurée aussi forte et il a fallu une rébellion en 18371838 pour mettre véritablement en branle un mouvement accéléré vers un gouvernement responsable. Pour ce qui est de l’identité francophone du Québec et du Canada, personne ne conteste que les Américains, eussent-ils été vainqueurs, auraient tenté par la suite d’assimiler les francophones. Ce que l’on escamote, c’est qu’à peu près tout a été mis en œuvre – par les Britanniques d’abord, puis par les gouvernements du Canada et des provinces à majorité anglaise – pour arriver au même résultat dans le siècle et demi qui a suivi la guerre de 1812. Rapport Durham, lois répressives, interdiction des écoles françaises et plus ! Alors qu’on arrête de nous casser les oreilles avec un faux discours patriotique fondé sur une interprétation pour le moins tendancieuse du passé. Qu’on souligne les grands événements historiques, y compris la guerre de 1812, soit. Mais pas en réécrivant les manuels d’histoire, lance Pierre Allard. Voilà qui donne une juste perspective sur ce qui n’est rien d’autre qu’un torrent de propagande. •••

À chacun ses priorités : en prévision du 6 février dernier, jour du jubilé de diamant, Ottawa avait demandé et obtenu une permission spéciale de Londres pour que, contrairement à ce qu’exige le protocole, le drapeau canadien de la reine puisse être hissé lors de cette seule journée malgré l’absence de Sa Majesté.

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La monarchie britannique en Amérique : 250 ans d’hostilité anti-francophone par Christian Gagnon En soulignant avec tant de faste le jubilé de diamant de la reine Elizabeth II, le gouvernement canadien veut faire célébrer par les Québécois un régime qui a tout mis en œuvre pour les faire disparaître. En voici quelques épisodes. La déportation des Acadiens : un crime contre l’Humanité

En 1755, les Acadiens de Nouvelle-Écosse ont le tort d’être francophones et de religion catholique. De plus, ils occupent les meilleures terres. Les armées du roi d’Angleterre et chef de l’Église anglicane déploieront donc leur « solution finale » : le nettoyage ethnique. On choisit de les déporter tous, sans exception, en petits groupes dans plusieurs villes et villages des colonies américaines afin d’éviter qu’ils ne puissent se regrouper à nouveau. On veut aussi les éparpiller là où la population leur sera hostile en prévoyant qu’ils y seront soumis aux travaux forcés. Le modus operandi est donc le suivant : les hommes sont convoqués au fort. On leur annonce qu’ils sont considérés rebelles, qu’on confisque leurs terres et cheptel et qu’ils sont désormais prisonniers. Des familles acadiennes prennent la fuite. Les militaires chargés de fouiller les forêts ramènent peu de prisonniers, mais brûlent tout sur leur passage: maisons et récoltes. De 1755 à 1763, plus de 12 000 hommes, femmes et enfants auront été dispersés comme du bétail aux quatre vents et à des milliers de kilomètres. La plupart mourront de faim ou de maladie. C’est sans compter les assassinats, les viols et bien sûr, les pillages massifs, car on n’avait pas permis aux déportés d’emporter leurs biens. L’Odyssée des Acadiens de l’île-du-Prince-Édouard : noyés dans l’océan comme des rats Une deuxième vague de déportation à la suite de la prise de la forteresse de Louisbourg par les armées des Sa Majesté. Les Britanniques s’en prennent alors aux Acadiens des dernières possessions françaises en Acadie : l’île Royale (ou du Cap Breton) et l’île Saint-Jean, devenue en 1799 l’île-du-Prince-Édouard. Le 25 novembre 1758, 3000 Acadiens sont massés de force sur onze navires et quittent Port-LaJoye en vue d’être déportés en France. Mais la tempête les disperse. Seulement huit atteindront la France. Deux navires sont en piètre état. Le Violet coule le 12 décembre, faisant 229 victimes. Le 13 décembre, le capitaine du Duke William, voyant que son navire va aussi couler, met deux embarcations à la mer, se sauvant ainsi que l’équipage, un curé et quatre Acadiens ; les 286 autres déportés périssent noyés. Le Ruby s’échoue aux Açores : 167 de ses 310 passagers meurent. Sur 3000 déportés, le bilan est de 891 morts de maladie au cours du voyage et de 627 noyés, soit un total de 1518 décès dont de nombreux enfants. La Conquête : des morts, et encore des morts

En septembre 1759, les armées britanniques de Sa Majesté attaquent Québec. C’est la bataille des Plaines d’Abraham. La prise de Québec, incluant près de trois mois de siège et de bombardements anglais, causa la mort de plus du tiers des 8000 habitants de la ville. Dans toute la vallée du Saint-Laurent, des dizaines de villages furent ensuite pillés, saccagés puis rasés par les flammes. La bataille des Plaines d’Abraham elle-même n’est que le point culminant nord-américain de la Guerre des Sept Ans, cette dernière ayant causé la mort de plus d’un habitant sur sept dans l’ensemble de la Nouvelle-France. Et c’est sans compter que beaucoup des survivants, dépourvus et sans abri, moururent des suites de l’hiver glacial. L’Angleterre instaurera dans sa nouvelle colonie un régime militaire. Ce sera l’équivalent de la première Loi des mesures de guerre que subiront les Québécois. Le rapport Durham : une politique officielle d’assimilation des francophones Depuis 1792, le Bas-Canada est doté d’un parlement élu. Mais ce n’est qu’un simulacre de démocratie. La Chambre basse ne possède aucun pouvoir réel puisque le Gouverneur général, nommé par Londres, a droit de veto sur tout et désigne les membres des Conseils législatif et exécutif, tous anglophones. Cette situation finit par exaspérer la population. En 1834, le Parti Patriote de Louis-Joseph Papineau, majoritaire à la Chambre, réclame des institutions véritablement démocratiques. Londres dit non. Les Patriotes multiplient les assemblées populaires. On y préconise le boycottage des produits anglais. La minorité britannique du Bas-Canada refuse d’être gouvernée « par des étrangers, des vaincus », et forme des groupes militaires comme le « Doric Club » et la « Montreal Volunteer Cavalry », pour régler le problème elle-même. Les Canadiens-français ripostent en fondant « Les Fils de la Liberté » et « Les Frères Chasseurs ». En 1837, « Les Fils de la Liberté » sont attaqués par le « Doric Club », et la chasse aux « rebelles » est ouverte. Londres proclame la Loi martiale et met à prix la tête des chefs patriotes. Sous le commandement de John Colborne, dit « le Brulôt », des armées de Sa Majesté viennent en renfort des Maritimes et du Haut-Canada. Ils sèmeront la terreur et

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la destruction, tuant les hommes, jetant femmes et enfants hors de leurs maisons en plein hiver et brûlant les villages. Un millier de patriotes seront emprisonnés ou exilés. Douze seront pendus. En 1839, Londres envoie Lord Durham faire rapport de la situation. Ce dernier recommande d’unir le Haut et le Bas-Canada dans le but explicite de minoriser les francophones et de les assimiler. En 1840, l’Acte d’Union est décrété. L’abolition des écoles françaises hors-Québec : digne du Ku Klux Klan L’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1867 protégeait les écoles anglo-protestantes du Québec, mais n’en faisait pas autant pour les écoles catholiques françaises hors-Québec. Les Orangistes des autres provinces, motivés par leur haine de ceux qu’ils appelaient avec mépris les papistes, étaient résolus à éradiquer le mal à la source. Se réclamant de la reine d’Angleterre chef de l’Église anglicane, ils ont d’abord aboli les écoles françaises en Nouvelle-Écosse en 1864 et au Nouveau-Brunswick en 1871, puis à l’Île-du-Prince-Édouard en 1877, au Manitoba en 1889, en Alberta et aux Territoires du Nord-Ouest en 1892, au Manitoba en 1896 et en Saskatchewan en 1902. En Ontario, la connaissance de l’anglais est devenue obligatoire pour tous les enseignants en 1885. Les manuels scolaires en français ont ensuite été interdits en 1889 et l’année suivante, l’anglais devenait la seule langue de communication légale dans les écoles de l’Ontario « sauf si l’élève ne comprend pas l’anglais ». Finalement, le Règlement 17 de 1912 donnait le coup de grâce en faisant de l’anglais la seule langue d’enseignement légale dans toutes les écoles ontariennes. Lorsque des décennies plus tard, les francophones auront été largement assimilés et marginalisés, les gouvernements provinciaux du Rest of Canada clameront leur générosité en levant ces lois répressives, et s’attendront à ce qu’on les remercie. La dépossession brutale des Métis de l’Ouest : du profilage racial avant l’heure Le gouvernement fédéral a récemment annoncé son désir de célébrer en 2012 les 150 ans de l’établissement de Selkirk, ce lord britannique qui convainquit une centaine de colons de s’installer en permanence sur les rives de la Rivière Rouge, dans ce qui deviendra le Manitoba. Or, c’est l’expansionnisme brutal et autoritaire de cette colonie anglo-protestante qui poussera les Métis, francophones et catholiques, spoliés des meilleures terres dont ils étaient chassés, à se révolter. Mais les soulèvements de 1870 et 1885 contre les Anglais de Selkirk se concluront par le massacre des insurgés métis et la condamnation à mort de leur chef, Louis Riel. Incidemment, le procès de Riel, qui scandalisa les Québécois à l’époque et qui est considéré aujourd’hui comme un honteux simulacre de justice, est l’œuvre du premier ministre conservateur John A. Macdonald, dont le gouvernement Harper veut célébrer le 200e anniversaire de naissance en 2015. [Riel] sera pendu même si tous les chiens au Québec aboient en sa faveur, trancha Macdonald. Ce qui fut fait. Le gouvernement canadien appliqua ensuite une politique très sélective de colonisation de l’Ouest canadien, distribuant terres et subventions et faisant une vaste campagne de promotion en Europe. Les Québécois, qui manquaient de terres à cultiver, furent systématiquement défavorisés. Encore dans les années 1920, il en coûtait 22 $ à l’immigrant étranger pour un billet le menant de Londres à Winnipeg, tandis que le Québécois devait payer 43 $ son billet de train Montréal-Winnipeg. Les Québécois en proie à la famine ont donc plutôt choisi massivement l’exil aux ÉtatsUnis, plutôt que vers l’Ouest canadien, si bien qu’il y a aujourd’hui davantage d’Américains d’origine québécoise que de francophones au Québec. Et de majoritairement francophones qu’ils étaient lorsqu’ils ont joint la « Confédération », les Manitobains sont aujourd’hui moins de 2 % à parler la langue de Riel à la maison. Le massacre de l’émeute anti-conscription de Québec : un crime impérialiste barbare Au printemps 1917, lors de la conférence impériale de Londres, le premier ministre canadien Robert Laird B o rd e n s u b i t d e lourdes pressions des Britanniques pour imposer la conscription afin de joindre les armées impériales de Sa Majesté. La conscription est adoptée au Parlement en juillet. Les Québécois sont furieux. Aux élections du 17 décembre, tous les députés conservateurs du Québec sont battus, sauf trois dans des circonscriptions très anglophones. À l’hiver 1918, Ottawa engage alors des policiers spéciaux, les « spotters », pour mettre la main sur les déserteurs. Différents affrontements ont lieu les 29, 30 et 31 mars entre ces policiers et la population de la ville de Québec. Borden y envoie des troupes venues d’Ontario et de Nouvelle-Écosse. Le 1er avril, des manifestants cherchent à se rassembler à la Place-Jacques-Cartier, mais la cavalerie charge la foule, qui se replie dans les rues avoisinantes. Le major Mitchell fait alors installer une mitrailleuse à l’angle des rues Saint-Vallier, SaintJoseph et Bagot où la foule a finalement abouti. Il crie en anglais aux gens de se disperser, mais comme ils n’obtempèrent pas, il donne l’ordre de tirer. Il y aura quatre morts et au moins 70 blessés. Les blessés ont sans doute été bien plus nombreux, mais ne sont pas allés à l’hôpital de peur d’y être arrêtés. Les quatre victimes étaient des hommes qui n’avaient pas participé aux manifestations. L’autopsie révèle qu’ils ont été tués avec des balles explosives. Le lendemain, les soldats patrouillent dans toute la ville et des ordres sévères (« Shoot to kill! ») ont été donnés. Pendant tout le mois d’avril, 200 arrestations seront effectuées. Les familles des victimes, bien qu’en ayant fait la demande, n’ont jamais été indemnisées. Aucun militaire impliqué n’a jamais été accusé de quoi que ce soit. Le rapatriement unilatéral de la Constitution : un coup de force Après le Non à 59 % du référendum de 1980, le gouvernement de René Lévesque s’engage dans les négociations constitutionnelles. Ces dernières ont été lancées par Pierre Elliot Trudeau pour remplir ses promesses de changements à la satisfaction du Québec advenant le rejet du projet de souveraineté-association. Le 16 avril 1981, Lévesque et sept de ses homologues suite à la page 9


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premiers ministres signent un accord interprovincial pour maintenir un front commun face à Ottawa, qui veut rapatrier la Constitution de 1867 et l’assortir d’une formule d’amendement et d’une charte des droits. Une conférence constitutionnelle débute le 1 er novembre. Les discussions s’éternisent. Le 4 novembre au soir, Lévesque et toute la délégation québécoise rentrent à l’hôtel. Durant la nuit, les autres provinces et le gouvernement fédéral concoctent un accord en l’absence du Québec. Le 5 novembre au matin, Lévesque et les siens sont mis devant un fait accompli. Le Québec que Trudeau avait pourtant promis de satisfaire est isolé. Le veto traditionnel du Québec est bafoué. Lévesque est furieux et crie à la trahison des sept provinces qui ont renié leur signature du 16 avril. Le fédéralisme renouvelé promis par Trudeau en campagne référendaire consistera en une constitution imposée qui diminue les pouvoirs de l’Assemblée nationale et dont la charte est conçue spécifiquement pour mettre en échec la loi 101. C’est ce qu’on appellera la « nuit des longs couteaux ». Le 17 avril 1982, la reine Elizabeth II n’aura aucun scrupule à venir à Ottawa accorder la sanction royale à ce coup de force. Plus tard, la Cour suprême du Canada établira que même si le procédé viole les conventions, il est légal. Depuis ce temps, le Québec n’est pas signataire de la Constitution canadienne. La formule d’amendement de 1982 est d’ailleurs si exigeante et l’opinion canadienneanglaise si réfractaire à la reprise de discussions constitutionnelles qu’on peut affirmer hors de tout doute qu’après les échecs de Meech et de Charlottetown, il n’y aura jamais plus de tentative de renouvellement du fédéralisme dans le sens des revendications du Québec. •••

J’aime ma langue dans ta bouche Un spectacle marathon en hommage à la langue française par Rachid Bandou

Denis Trudel, metteur en scène et animateur du spectacle. (Photo : Mathieu Breton)

Le 4 février dernier, le Lion d’Or à Montréal a été le théâtre d’un grand rassemblement artistique organisé par le Mouvement Montréal français et qui célébrait, de midi à minuit, la langue française sous le thème « J’aime ma langue dans ta bouche ». Le public présent à cet événement, mis en scène par le comédien Denis Trudel, porte-parole du Mouvement Montréal français, a vibré aux rythmes de la musique, des chansons, poèmes et danses des artistes et groupes de divers horizons. Quelque soixante-dix artistes sont venus déclarer leur amour pour notre langue commune dont le recul, remarqué lors de ces dernières années dans l’espace publique métropolitain, inquiète sérieusement et à juste titre ses défenseurs. Parmi les artistes qui se sont succédés sur la scène du Lion d’Or jusqu’à minuit, on retrouvait Boucar Diouf, Christian Bégin, Hélène Florent, Yves Beauchemin, Marie Tifo, Luc Picard et Paul Piché. Les spectateurs ont aussi pu découvrir Sylvaine Bellec qui a repris une des œuvres de la légendaire Edith Piaf. Les artistes des communautés kabyle et bretonne, qui ont répondu présents à l’appel lancé par les organisateurs, ont introduit dans le spectacle des sonorités et rythmes qui viennent d’ailleurs. On a ainsi pu voir et entendre Tafsut, un groupe de danse kabyle ; In Te Ya, un groupe musical breton ; Imane, une chanteuse kabyle qui a admirablement interprété un hymne au Québec, et Zahia, une chanteuse kabyle à la voix envoûtante. Le jeune dramaturge et écrivain Karim Akouche a quant à lui conclu son poème dédié à Gaston Miron par la déclaration suivante qui a soulevé les applaudissements de l’assistance : Un peuple qui ne défend pas sa langue est mûr pour l’esclavage. Le milieu politique était aussi de la partie. Pierre Curzi, Yves-François Blanchet, Daniel Paillé, Françoise David et Amir Khadir ont voulu participé à ce marathon culturel en adoptant, à la demande des organisateurs, une démarche plutôt apolitique.

Pourquoi donc Stephen Harper ne s’est-il pas inspiré de cette médaille pour créer, à l’image des rapports Québec-Ottawa, celle du jubilé de diamant? Frappée en Angleterre en 1759 pour célébrer la prise de Québec par le vice-amiral Charles Saunders et le général James Wolfe, cette médaille intitulée « Quebec taken » (Québec conquise) porte en son verso la représentation de l’ange de la victoire tenant une couronne de laurier au-dessus des armes françaises, dont un bouclier orné d’une fleur de lys. Au pied de ces armes se trouve un homme représentant la ville vaincue de Québec. L’homme est nu et a les mains ligotées dans le dos. Deux cent cinquante ans plus tard, les perceptions canadiennes-anglaises du Québec ont-elles évolué?

Si j’avais été invitée, je serais allée faire un tour avec plaisir, le Parti Québécois n’a pas le monopole de la défense de la langue française, a déclaré Madame Christine St-Pierre, ministre libérale de la Culture, des Communications et de la Condition féminine. Elle a toutefois salué l’appel du mouvement aux communautés culturelles et l’originalité du thème choisi pour cet évènement. Ces artistes, et ces hommes et femmes politiques qui ont témoigné de leur amour du français, ont suscité l’enthousiasme du public qui s’était déplacé en grand nombre pour admirer la langue de Molière racontée, chantée et parlée. •••

Voyez les photos de l’événement aux deux pages suivantes

Céline Faucher à la rencontre de PAULINE JULIEN

Pauline Julien nous quittait le 1er octobre 1998. Pour ne pas oublier, au printemps 2005, Céline Faucher a créé « À la rencontre de Pauline Julien ». Depuis, elle sillonne les routes du Québec et de la France et constate que le public, lui non plus, n’a pas oublié.

DÉJEUNER et SPECTACLE Le 6 mai 2012 à 11 h 30 À la maison Ludger-Duvernay

Billets en vente dès le 6 avril au coût de 20 $. On peut se les procurer à la SSJB de Montréal au 82, rue Sherbrooke Ouest, Montréal (Métro Place-des-Arts) 514-843-8851

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J’aime ma langue dans ta bouche

Paul Piché (Photo : Mathieu Breton)

Romain Pollender, auteur et metteur en scène, et Hamidou Savagodo, conteur et comédien originaire du Burkina Faso. (Photo : Mathieu Breton)

Geneviève Rioux et Gabriel Sabourin (Photo : Mathieu Breton)

Jean-Martin Aussant, député de Nicolet-Yamaska. (Photo : M. Breton)

Boucar Diouf, humoriste d’origine sénégalaise. (Photo : M. Breton)

Photo du haut : Song Lan Photo du bas : la slameuse Julie Dirwimmer (Photos : M. Breton)

Coralie Laperrière (Photo : Mathieu Breton)

La comédienne Hélène Major (Photo : M. Breton)

La chanteuse Lyne Cadieux (Photo : M. Breton)

Yves Beauchemin (Photo : M. Breton)

L’écrivain et dramaturge kabyle Karim Akouche (Photo : M. Breton)

Tafsut, groupe de danseuses kabyles. En médaillon, la chanteuse kabyle Zahia. (Photo : Mathieu Breton)

Smail Hami, chanteur kabyle. (Photo : M. Breton)

Imane, chanteuse kabyle. (Photo : M. Breton)

Le groupe montréalais Les Oeuvriers (Photo : Mathieu Breton) Jacques Archambault (Photo : M. Breton)

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Le conteur Daniel Boiteau. (Photo : M. Breton)


par Élaine Des Lauriers

Françoise David et Amir Khadir, de Québec solidaire. (Photo : Mathieu Breton)

Danny Gilmore (Photo : M. Breton)

Pierre Curzi et Marie Tifo (Photo : Mathieu Breton)

La comédienne Michelle Labonté (Photo : M. Breton)

Christian Bégin (Photo : M. Breton)

Geneviève Rochette (Photo : M. Breton)

La horde vocale (Photo : Mathieu Breton)

Gary Klang, poète d’origine haïtienne. (Photo : M. Breton)

Luc Picard (Photo : M. Breton)

Le groupe hip hop Megafon (Photo : Mathieu Breton)

Mario Beaulieu et Denis Trudel (Photo : Mathieu Breton)

Le conteur Marc Sauvageau (Photo : M. Breton)

Hélène Florent (Photo : M. Breton)

La chanteuse et comédienne d’origine tunisienne, Queen KA. (Photo : M. Breton)

Le comédien kabyle Hace Mess (Photo : M. Breton)

La conteuse Lucie Bisson (Photo : M. Breton)

Yves-François Blanchet, député du Parti Québécois de Drummond. (Photo : M. Breton)

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Enquête auprès des enseignants d’histoire du secondaire Trop de présent, pas assez de connaissances historiques Source : ssjb.com

structure du programme en 3e et 4e secondaire où l’on enseigne deux ans la même histoire, sans oublier l’absence d’un cours obligatoire en histoire du XXe siècle, constate la chercheure. Le porte-parole de la Coalition pour l’histoire, Robert Comeau, a rappelé les précédentes études de la Coalition financées par la Fondation Lionel-Groulx portant sur le recul de l’enseignement de l’histoire au niveau collégial et le peu de formation dans la discipline historique à l’université dans les programmes de formation des maîtres. Monsieur Comeau souligne que dans son Discours sur l’école et la nation, Francois Hollande du Parti socialiste français, fait valoir que l’école devrait être au premier rang des engagements politiques, car c’est la condition de notre cohésion nationale et insiste sur l’importance de valoriser le savoir, car l’école est d’abord faite pour transmettre des connaissances. Gommer des pans d’histoire Quant à l’historienne, romancière et biographe (auteure de Le Roman de Julie Papineau, Lady Cartier et Les Filles tombées), Micheline Lachance, elle a insisté sur l’importance de redonner à l’histoire politique la place qui lui revient, car gommer des pans de l’histoire, n’est-ce pas aussi servir une cause? N’ayons pas peur des mots : nous assistons en ce moment à une tentative pour réécrire le passé en effaçant d’un trait les pages qui nous définissent comme peuple différent.

(Photo : Mathieu Breton)

Le porte-parole de la Coalition pour l’histoire Robert Comeau et l’historienne et chercheure Josiane Lavallée rendaient public le 1er mars dernier en conférence de presse les résultats d’une enquête réalisée auprès des enseignants d’histoire du secondaire. Cette enquête révèle que les enseignants sont insatisfaits des programmes qu’ils ont à enseigner, car ils sont trop axés sur l’éducation à la citoyenneté et le présent et pas assez sur l’acquisition des connaissances historiques.

La Coalition pour l’histoire, conclut Josiane Lavallée, demande à la ministre de l’Éducation de revoir les contenus des programmes d’histoire au secondaire. Les professeurs ont vraiment besoin d’un programme plus équilibré pour enseigner à nos jeunes toutes les dimensions de l’histoire, y compris l’histoire politique et les événements cruciaux et fondateurs de notre histoire. Au premier cycle, les enseignants réclament une augmentation d’heures d’enseignement de l’histoire. •••

Madame Lavallée a fait valoir dans son étude de 72 pages que s’il est vrai que le passé éclaire le présent, il n’en demeure pas moins que l’histoire ne devrait jamais être mise au service du présent pour cautionner une quelconque idéologie, et ce, que cette idéologie soit progressiste ou non. La Coalition pour l’histoire a procédé à une enquête par sondage à laquelle 215 enseignants d’histoire du niveau secondaire ont répondu. Ce qui correspond à environ 20 % des enseignants d’histoire provenant de toutes les régions du Québec. Les réponses reçues démontrent de façon majoritaire leur insatisfaction. Ainsi, ils dénoncent les programmes d’histoire, notamment en ce qui a trait à l’introduction de l’éducation à la citoyenneté dans les cours d’histoire, à la quasiabsence de l’histoire de la nation québécoise et de la dimension politique de l’histoire et à la

De gauche à droite : Gaston Bergeron, président de la Fondation du Prêt d’Honneur ; Josiane Lavallée, historienne et auteure du rapport d’enquête sur les enseignants d’histoire ; Robert Comeau, porte-parole de la Coalition pour l’histoire ; Mario Beaulieu, président de la SSJB ; Micheline Lachance, historienne et romancière, et Pierre Graveline, directeur de la Fondation Lionel-Groulx. (Photo : Mathieu Breton)

L’INSIPIDITÉ DES MANUELS D’HISTOIRE DU SECONDAIRE par Claude Richard Il n’est évidemment pas question de Dollard des Ormeaux et de ses compagnons ni de leur sacrifice qui a fort probablement sauvé la colonie en 1660. Comme il n’a précédemment été fait aucune mention des aménités prodiguées aux missionnaires appelés saints Martyrs canadiens qui étaient, pour tout dire, des êtres très menaçants.

Insipidité : caractère de ce qui est insipide. Insipide : qui n’a pas de saveur, de goût. Voilà. Les manuels d’histoire du secondaire ne goûtent rien, ils manquent de saveur. Les auteurs racontent l’histoire de leur peuple avec autant de détachement et de froideur que s’ils décrivaient la pierre qu’il y a devant chez eux. Extérieurement, ces manuels se présentent comme des Cadillac : papier glacé, couverture rigide cartonnée et plastifiée, riche iconographie, typographie soignée. C’est le texte qui fait problème. Non seulement il est neutre à l’excès, mais il passe sous silence des faits et des personnages du plus haut intérêt. De quels manuels s’agit-il? L’histoire nationale se donne en 3e et en 4e secondaire. Les manuels qui semblent les plus utilisés sont Fresques A et B en 3e et Le Québec, une histoire à construire en 4e. En passant, une trouvaille que ce dernier titre. Comme si on pouvait construire une histoire en 4e secondaire! Vraiment, nos concepteurs de programme au ministère sont des génies! Ces manuels sont des briques de 240 à 419 pages chacun. On se dit qu’il doit y avoir de la matière là-dedans. Le hic, c’est qu’on a introduit à chaque chapitre ce qu’on désigne comme des « sections sur les sociétés de comparaison ». Ce sont des pages et des pages consacrées à la Virginie, aux îles Moluques, à l’Irlande, etc. Dans un cours d’histoire nationale, alors qu’il y a des cours d’histoire universelle en 1re et 2e secondaire. Ces sections représentent de 10 à 25 % de l’espace selon le livre. Ajoutons à cela des parties méthodologiques non négligeables

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et on en arrive à un contenu matière forcément restreint, qu’on s’empressera sans doute d’invoquer pour expliquer en partie les lacunes. Voyons un peu ce contenu. Je n’ai pas de prétention à l’exhaustivité. J’ai une maîtrise en histoire, mais je n’enseigne plus depuis plusieurs années. J’ai des contacts dans le monde scolaire grâce à un concours d’histoire que j’organise dans la région de Lanaudière depuis maintenant 23 ans. Premier arrêt : la Nouvelle-France. Il y a eu les explorations, les établissements, la construction d’une économie et d’une société. Mais il y a eu aussi, surtout au XVIIe siècle, les guerres, principalement avec les Iroquois. C’est un élément important de la vie dans les débuts de la Nouvelle-France. Or, assez étrangement, alors qu’autrefois ces guerres occupaient une place importante, peut-être trop importante, elles sont maintenant presque absentes des manuels. Ce qu’on en dit, en quelque 150 pages consacrées à la Nouvelle-France : Ils [les Français en 1603] s’engagent à combattre les ennemis des Montagnais, soit la Ligue iroquoise (…). Les conflits armés avec les Iroquois vont se prolonger durant tout le XVIIe siècle. (Fr. A, p. 67); En 1665, (…), le régiment CarignanSalières (…) a pour mission de sécuriser la colonie en combattant les Iroquois. (…) Quatre nations iroquoises vont finalement proposer de faire la paix. Une seule nation, celle des Agniers, maintient l’état de guerre. Les militaires répliquent en attaquant son territoire et en détruisant ses habitations et ses récoltes. (p.84) Ce sont qui les méchants d’après ce résumé?

Je concède que les Français n’étaient pas des enfants d’école à la guerre et que les tactiques de leurs chefs n’étaient pas toujours hors de tout reproche, comme dans le cas des négociateurs iroquois enlevés et envoyés aux galères. Mais le massacre de Lachine en 1689 (24 morts et 80 prisonniers qui, la plupart, ne reviendront jamais) et les multiples attaques iroquoises de cette période qui feront près de 200 morts dans une population de quelques milliers de personnes devraient être rapportés dans des livres d’histoire sérieux. Ce qu’on en dit : Cette situation [de conflit entre Français et Iroquois dans les années 1680 et 1690] entraîne des affrontements. (p. 90) Heureusement qu’on nous le dit, mais peut-être ne seraitil pas inutile d’élaborer? Encore faudrait-il évacuer un diffus sentiment de culpabilité. Jean Talon n’est quand même pas n’importe qui. C’est un homme remarquable qui a imprimé sa marque sur le développement de la colonie. Voici comment on le présente : Colbert nomme aussi un intendant pour soutenir l’essor de la colonie : Jean Talon. (p. 84) Fret, net, sec. On va ensuite mentionner quelques-unes de ses réalisations, très posément. Une appréciation globale positive du personnage? Cherchez-la. Il faut surtout éviter le culte du héros. Idem dans le cas de d’Iberville d’ailleurs. D’Iberville, pour nos auteurs, mérite un petit portrait dans un encadré de quelques lignes à l’écart du texte principal. La dimension extraordinaire de ce personnage, qui serait présenté avec admiration dans n’importe quelle histoire nationale, est ici complètement gommée. Surtout pas d’éclat dans un manuel scolaire. Gardons cela pour Paul McCartney, Madonna et Kiss dans les chroniques spectacles. La guerre de la Conquête est un autre sujet à aborder délicatement pour nos auteurs.

Délicatement et avec discrétion. En ce qui concerne le déroulement de la guerre, nous aurons ceci : Au cours des deux premières années de la guerre de Sept Ans, les Français remportent plusieurs victoires. Cependant, la situation se transforme en 1758 quand les Britanniques prennent Louisbourg. (p. 102) Les brillantes victoires françaises de la Monongahéla, d’Oswego, de WilliamHenry, de Carillon ne sont nommément pas citées, ni encore moins décrites, ne seraitce qu’en quelques mots. On a beau ne pas être partisan des guerres ni féru d’histoire militaire, ce sont des faits passés, des actes de bravoure dont pourraient s’enorgueillir les descendants que nous sommes. Mais attention, défense d’être fier dans cette histoire! Défense aussi de s’indigner devant le spectacle de la déportation des Acadiens, résumée de cette façon : Les autorités britanniques ordonnent la déportation des Acadiens. Deux raisons les motivent. D’abord, les Britanniques craignent que les Acadiens se rangent dans le camp français (…). Ensuite, les autorités veulent favoriser l’immigration britannique dans leur colonie de NouvelleÉcosse. Sur une population totale d’environ 13 000 Acadiens, on estime que 10 000 environ sont déportés (…). (p. 102) Sobriété poussée à l’excès. Plus que cela, on justifie presque l’opération au lieu d’en montrer le côté sordide. Passons aux effets de la Conquête. Il est bien question du départ de plus du tiers de la noblesse et de l’élimination des marchands locaux du commerce des fourrures. Mais il ne faut pas chercher ici de jugement sur les effets déstructurants de la Conquête sur la société québécoise d’alors. On est loin ici de Maurice Séguin et de Michel Brunet. Allô Létourneau ! Nous voilà au XIXe siècle. Adam Thom, rédacteur en chef du Montreal Herald, s’emploie (…) à lutter contre les revendications des députés canadiens. Il dénonce entre autres la politique des administrateurs britanniques à l’égard des Canadiens, qu’il qualifie de trop conciliante. (Fr. B, p. 14) C’est vraiment beaucoup de retenue vis-à-vis d’un pamphlétaire virulent, raciste et assoiffé de suite à la page 13


Les patriotes dans les rues de Montréal

Peut-on en faire plus pour eux et les grandes oubliées de l’histoire, leurs épouses ? par France Langlais En 2012, on célèbrera le 175e anniversaire du soulèvement du mouvement patriote et des évènements de 1837-1838. Par sa toponymie, Montréal a rendu hommage à ces bâtisseurs de démocratie en nommant des rues, avenues, parcs et places en leur honneur.

Rue Cartier (Georges-Étienne), square Sir-Georges-Étienne-Cartier Il prend part aux rébellions de 1837-1838 et il contribue à l’établissement de la Confédération canadienne.

Je me suis intéressée de près à l’histoire des patriotes et j’ai consulté l’ouvrage Les rues de Montréal, répertoire historique, paru aux Éditions du Méridien en 1995. J’y ai appris que trente-six patriotes directement engagés dans les luttes de 1837-1838 et dont la plupart ont été incarcérés, ont eu, entre 1879 et 1983, leur mémoire honorée. De plus, une place des Patriotes a été nommée en l’honneur de leur sacrifice. Aussi, dix-huit autres noms de rue rappellent des personnages ayant participé à la révolte et même des ennemis des patriotes.

Rue de Fleurimont

Les 36 rues et lieux de Montréal nommés en l’honneur de patriotes directement impliqués dans les Rébellions André-Jobin, rue André-Ouimet, rue Barrette (Jérémie) rue Barrière (Pierre) rue Béchard (Théodore) rue Bellefleur (Abraham Rémi) place Boucherville (Pierre-Georges Boucher) place Bourque (Jean-Baptiste), rue Bousquet (Constant), rue Bouvret (Joseph), rue Brazeau Joseph), rue Cardinal (Joseph-Narcisse) rue Chénier (Jean-Olivier), place et rue Cherrier (Côme-Séraphin), rue Coupal (Antoine), rue Daigle (Antoine), rue Daunais (Amable), rue Ducharme (Léandre), avenue Duvernay (Ludger), rue Duvert (François Chicou), rue François-Davignon, avenue Gauvin (prénom inconnu), rue Hamelin (François-Xavier), avenue Hippolyte-Lanctôt, rue Lepailleur (François-Maurice) place et rue Longtin (Michel dit Jérôme), avenue De Lorimier (François-Marie Thomas Chevalier de), avenue Louis-Dumouchel, rue Louis-Hainault, rue Mongeau (Louis), rue Papineau (Joseph et Louis-Joseph), avenue Patriotes, place des Pierre-Chasseur, rue Pierre-Héroux, rue Pierre-Rémi-Narbonne, avenue Robert (Joseph-Jacques), allée et boulevard

Rue Gosford (Archibald Atcheson) Gouverneur général de 1835 à 1837. Chargé d’étudier la situation du Bas-Canada, il présente, en 1837, un rapport favorable aux Canadiens, puis demande son rappel en Angleterre. Parc Jos-Montferrand, (Joseph Favre, dit) En 1832, à la tête des patriotes, il participe à une émeute à la place d’Armes où il s’en prend aux bureaucrates. Parc et rue La Fontaine (Louis-Hippolyte) Sa loi d’indemnité destinée aux victimes de la Rébellion de 1837-1838 soulève des émeutes en 1848 qui conduiront à l’incendie du Parlement de Montréal à la place d’Youville. Place La Minerve Journal fondé par Auguste-Norbert Morin en 1826, vendu à Ludger Duvernay et interdit en 1837. Rue Mondelet (Charles-Elzéar) Avocat et patriote, il choisit le journalisme pour défendre ses opinions. Avenue et place Pierre-Blanchet Il quitte la prêtrise et soutient les revendications des patriotes de 1837-1838. Rue et terrasse Quesnel (Frédéric-Auguste) Avocat et homme politique, il intervient dans plusieurs dossiers comme le vote sur les 92 Résolutions, l’indemnisation des victimes des rébellions de 1837 et de 1838. Rue Rachel Cette rue rappelle la fille du notaire Jean-Marie Cadieux. L’époux de celle-ci, l’avocat JeanBaptiste Chamilly de Lorimier, membre des Fils de la liberté participe aux évènements de 1837-1838. Rue Robert-Armour Écossais, il achète la Montreal Gazette qu’il utilise pour combattre le nationalisme canadienfrançais et Louis-Joseph Papineau. Rue Wellington (Arthur Wellesley, duc de) Général anglais, il recommande à la Chambre des lords la clémence envers les insurgés canadiens de 1837-1838. Il combat les projets de Durham et s’oppose à la loi d’Union de 1840. Place d’Youville Le 25 avril 1849, des tories mécontents de la loi visant à indemniser les Canadiens français victimes de la rébellion de 1837-1838, incendient le Parlement. Où sont les femmes patriotes ?

Les 18 désignations de rues de Montréal liées de près ou de loin à l’histoire des patriotes Avenue Alfred-Laliberté Pour le monument aux patriotes du Pied-du-Courant. Rue Aylmer (Matthew Whitworth) Gouverneur général qui s’est fait conciliateur. Rue Aylwin (Thomas Cushing) Criminaliste qui s’est porté à la défense des Patriotes. Rue Baldwin (Robert) Il participe à l’adoption de la loi sur les indemnités accordées aux victimes de la Rébellion. Rue Bardy (Pierre-Martial Bardy) Député de Rouville dans l’équipe de Louis-Joseph Papineau, de 1834 à 1846. En 1842, il fonde la section de Québec de la Société Saint-Jean-Baptiste.

L’INSIPIDITÉ DES MANUELS D’HISTOIRE DU SECONDAIRE seront nommés une fois… pour illustrer suite de la page 12 la jeunesse des leaders patriotes. L’élément sang. Est-ce cela qu’on appelle de l’histoire humain en histoire : pfff! édulcorée? Dans le Canada-Uni, Londres attribue une Parlant de choses édulcorées, les représentation politique identique au Canadaaffrontements de 1837 sont réduits à leur Est et au Canada-Ouest. Et ce, même si le plus simple expression. En novembre, une Canada-Est est plus peuplé. (p. 38) Merci première bataille s’engage entre les Patriotes de le souligner, mais « plus peuplé » ou et l’armée britannique à Saint-Denis. Les beaucoup plus peuplé? La population du Patriotes remportent la victoire, mais partout Haut-Canada est de 450 000 et celle du ailleurs, les affrontements contre l’armée Bas de 650 000, seulement 45 % de plus! britannique se soldent par des défaites. Après les batailles, il arrive que les troupes britanniques Passons sur le procès de Louis Riel, où pillent et incendient les villages. C’est le cas un détail, comme le fait que le jury à Saint-Benoît et à Saint-Eustache. (p. 29) qui l’a condamné à mort était composé Admirez la formule : « Il arrive que… » uniquement d’anglophones, est laissé dans En réalité, c’est le cas partout. l’ombre. Passons aussi sur le lynchage politique d’Honoré Mercier, qu’il serait Dans Fresques A et B (566 pages en tout), beaucoup trop choquant d’aborder dans il n’y a aucune mention de Jean-Olivier un manuel à l’usage de jeunes cerveaux Chénier ni de Thomas Chevalier De trop influençables… Lorimier. Après tout, ce ne sont que des noms de rue, comme dirait Gilles Proulx. Sautons au rapatriement de la Constitution Dans le manuel de 4e secondaire, ils de 1982. Si on montre bien que la

Pour les femmes patriotes, on repassera! Une seule indication, soit la rue de Fleurimont, quoique incertaine selon l’ouvrage car il existe deux hypothèses : pour l’épouse du docteur Wolfred Nelson, née Josephe-Charlotte de Noyelles de Fleurimont ou pour Nicolas de Noyelles de Fleurimont, commandant de Pontchartrain (aujourd’hui Détroit). Rien pour Julie Papineau, Marie-Reine Harnois, épouse de Ludger-Duvernay, Henriette Cadieux de Courville et toutes celles dont l’histoire ne nous a pas enseigné l’existence malgré l’invasion des anglais et la destruction de leur famille et de leur maison. À l’aube du 175e anniversaire de nos patriotes, je crois qu’il faut exercer des pressions sur le Comité de toponymie de la ville de Montréal. Il faudra également en aviser son Comité du 375e anniversaire (2017). Nos patriotes et leurs épouses n’ont-ils pas donné leur vie pour la patrie ? À nous de voir à ce que leurs noms et leur sacrifice restent dans nos mémoires et dans celles des prochaines générations de Québécoises et de Québécois. C’est grandement mérité! Vous pouvez consulter le répertoire historique des toponymes montréalais en visitant le lien suivant : http://ville.montreal.qc.ca/portal/page?_pageid=1560,11241558&_dad=portal&_ schema=PORTAL •••

Constitution a été rapatriée sans l’accord du Québec, on est chastement silencieux sur la « nuit des longs couteaux » de novembre 1981, où les provinces anglophones ont renié leur accord solennel avec le Québec pour s’opposer au rapatriement unilatéral de P. E. Trudeau. Que dalle aussi de l’amenuisement des pouvoirs du Québec! La campagne référendaire de 1995 a été marquée notamment par le « love-in ». Fresques décrit la chose sans émotion en disant que des milliers de Canadiens anglais se sont rassemblés à Montréal pour témoigner leur attachement envers les Québécois. (p. 230) Aurait-il été superflu de préciser que ce rassemblement a été financé illégalement et que l’attachement en question n’était assorti d’aucune concession au Québec? Tous seront d’accord qu’un manuel scolaire ne doit pas contenir de propagande. Ce n’est pas de cela dont il est question ici, mais

plutôt de rapporter tous les faits importants et de ne pas les minimiser à des fins de bon-ententisme et de rectitude politique. Aussi, il est question du ton employé pour raconter notre histoire nationale. Nous ne demandons pas de revenir à l’époque de François-Xavier Garneau où l’indignation de l’auteur devant l’injustice s’étalait à pleines pages. Mais pourrions-nous nous attendre à un minimum d’empathie de la part d’auteurs qui ne sont quand même pas désincarnés et qui ont à transmettre un héritage? La minéralogie, c’est une chose, mais l’histoire nationale, c’en est une autre! Note. À mon avis, le juste milieu se trouvait dans un opuscule publié à l’occasion du référendum de 1995. Dans la Petite Histoire du Québec, Yves Beauchemin faisait un magistral résumé de l’histoire du Québec, d’un ton sobre, mais n’omettant aucun fait important. Vivement une mise à jour et une distribution à grande échelle! •••

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LES ANCIENS PRÉSIDENTS DE LA SSJB

Augustin-Norbert Morin Un modèle de président par Jean-Pierre Durand

redoutable adversaire qu’est Morin. Et, bien entendu, ils l’ont à l’œil au même titre que les orateurs qui soulèvent les passions populaires et les combattants armés, en cas d’insurrection ou de « prévention de sédition ». Même un partisan de Papineau craint le ton intransigeant de Morin : la marche proposée par M. Morin tend à repousser le gouvernement par la force, que cette ligne de conduite est dangereuse et peut mener à la révolution. Bref, à n’en point douter, le député de Bellechasse est un révolutionnaire, un partisan de l’appel aux armes. Alors on ne s’étonnera pas de son arrestation préventive le 15 novembre 1837, geste qui fera long feu, car les autorités ne peuvent l’incriminer et le libèrent sous caution trois jours plus tard. Mais les rébellions suivent leur cours et les patriotes ne sont pas au bout de leur peine. Alors que certains ont dû prendre le chemin de l’exil (c’est le cas de Papineau, réfugié dans l’État de New York), d’autres, refusant de s’y résoudre, disparaissent dans la nature. C’est le cas de Morin. Mais son père et toute sa famille n’approuvent pas la conduite d’Augustin-Norbert, et refuseront de lui prêter main-forte dans son geste de désobéissance civile. Qu’à cela ne tienne, le révolutionnaire a trente-cinq ans et n’est pas du genre « moumoune ». N’empêche que son séjour dans les bois altérera sa santé déjà vacillante.

Augustin-Norbert Morin naquit le 13 octobre 1803 à Saint-Michel-deBellechasse, du mariage d’Augustin et de Marianne Cottin dit Dugal. Les finances de la famille ne permettent pas à la nombreuse progéniture des Morin de bénéficier d’une scolarité satisfaisante, mais grâce aux bons auspices du curé de la paroisse, prompt à déceler les aptitudes scolaires chez ses jeunes ouailles, on identifie assez rapidement un candidat potentiel en la personne d’Augustin-Norbert, ce qui lui vaudra, sans bourse délier, son entrée au Séminaire de Québec. On se doute bien que les attentes de la providence pour son jeune protégé s’orientent vers une vocation sacerdotale, mais celui-ci va préférer la défense de la veuve et de l’orphelin, ce qui n’en est pas moins méritoire. Mais le jeune étudiant en droit ne roule pas carrosse et les difficultés financières seront son lot quotidien. Il persévère néanmoins. C’est d’ailleurs alors qu’il est aux études qu’Au gustin-Norber t s’illustre, le 1er juillet 1825, avec une lettre de plusieurs pages à l’attention du juge Edward Bowen, lequel avait refusé un bref de sommation écrit en français. Une fois cette lettre rendue publique, on donne finalement raison au culotté stagiaire en droit. Augustin-Norbert Morin avait la réputation d’être un bourreau de travail, d’une curiosité intellectuelle insatiable, d’où son ardeur dans une autre sphère d’activité : le journalisme. En 1826, il fonde le journal patriote La Minerve, qu’il doit se résoudre aussitôt à fermer, faute de fonds suffisants. De 1827 à 1830, il en devient le rédacteur, Ludger Duvernay l’ayant acheté. Il y collabore jusqu’à l’interdiction du journal en novembre 1837. Augustin-Norbert Morin s’engage fortement dans la cause des patriotes, dont il est l’un des dirigeants les plus en vue. C’est un militant fougueux aux idées radicales, sans être extrémiste pour autant. On peut le classer en quelque sorte parmi les modérés. Fervent admirateur de Louis-Joseph Papineau, il est élu député pour le Parti patriote en octobre 1830, mais ce statut, somme toute honorable, ne règle pas ses problèmes financiers pour autant.

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Lors de sa réélection dans Bellechasse en 1834, Morin remercie en ces termes ses électeurs : Dévoué de cœur et d’intérêts à la cause canadienne, j’y ai depuis longtemps voué pour ainsi dire toute mon existence. Je continuerai jusqu’à ce que le pays ait appris s’il jouira librement des institutions qui lui sont chères et des droits les plus essentiels des sujets anglais, ou si nous sommes des esclaves à la merci d’un décret ministériel. Votre attachement aux principes pour lesquels nous avons combattu ensemble, me persuade davantage que le peuple ne se mentira pas à lui-même, que par son attitude imposante, mais calme, il réduira au silence les ennemis de sa prospérité. Si la contestation du Parti patriote est au départ légale, elle changera de ton quand le dialogue avec les autorités coloniales deviendra de plus en plus difficile, voire impossible. Face à l’impasse, Papineau et le Parti patriote décident de faire état de leurs griefs dans un réquisitoire, connu sous le nom des Quatre-vingt-douze Résolutions, et c’est Augustin-Norbert Morin qui est chargé de sa rédaction. Jean-Claude Germain décrit le document comme : un manifeste qui fait la liste d’épicerie des adjurations, des doléances, des requêtes légitimes, des réclamations pressantes et des diverses revendications identitaires ( ) Ce n’est pas une longue lamentation, mais la mise au point d’un plan d’action pour que le Parlement bas-canadien puisse servir les intérêts des citoyens qu’il représente et fonctionne démocratiquement dans le cadre législatif britannique. Le manifeste, poursuitil, se (résume) pour l’essentiel à obtenir le droit souverain pour l’Assemblée de faire ses lois, de lever ses impôts et de contrôler ses dépenses. Et, de conclure malicieusement Germain : Si on ajoutait à cette liste une quatrième requête, celle de pouvoir signer ses traités, nous aurions la question du référendum de 1995 sur l’indépendance du Québec. Durant ces années tourmentées, AugustinNorbert Morin mettra à contribution sa belle et acérée plume au service de la cause patriote : Et nous verrons s’élever pour le pays des jours de liberté et de bonheur parce que nous combattons pour nos lois, nos autels et nos foyers avec les armes puissantes de la vérité et de la justice (novembre 1837). Ces propos et bien d’autres n’échappent pas aux autorités coloniales qui perçoivent rapidement le

Une fois la tourmente derrière lui, alors que l’Empire a écrasé les patriotes, Morin se remet à la pratique du droit, la mort dans l’âme, sans songer à un retour à la politique active. Comble de malheur, sa situation financière ne s’est pas améliorée non plus. Mais l’oisiveté politique sera de courte durée et Morin reprendra du service afin de combattre la proposition d’unir les provinces du Haut et du Bas-Canada, mais, cette fois, sans même songer à recourir à la violence. Morin se représente et est élu dans Nicolet le 8 avril 1841. Il se préoccupe d’enseignement, tout comme JosephFrançois Perrault. Il préconise un système d’enseignement public pour toutes les classes, enseignement gratuit bien entendu, comme c’est le cas dans plusieurs villes d’Europe. Il faut que le pauvre ait comme le riche l’occasion de s’instruire. En plus de l’éducation, Morin s’intéresse et se passionne pour la vie intellectuelle et littéraire, question entre autres de manifester son attachement au fait français. On connaît même quelques poèmes de son cru, parmi lesquels sa « Chanson patriotique », où il dit : Riches cités, gardez votre opulence, / Mon pays seul a des charmes pour moi : / Dernier asile où règne l’innocence, / Quel pays peut se comparer à toi ? / Dans ma douce patrie / Je veux finir ma vie ; / Si je quittais ces lieux chers à mon cœur, / Je m’écrierais : j’ai perdu le bonheur ! Mais le député de Nicolet ne restera pas longtemps en poste et démissionnera en 1842 afin de devenir juge de district pour redevenir à nouveau député, mais cette fois de Saguenay. Il occupera plusieurs fonctions dans les gouvernements de coalition des années 1840 et 1850. C’est à quarante ans bien sonnés que ce célibataire endurci convolera en justes noces avec Albine-Adèle Raymond, de quinze ans sa cadette. Enfin casé, il pourra compter sur sa douce moitié pour surveiller et gérer les finances familiales. Aucun enfant ne naîtra de cette union. Parmi les causes chères au député, il y a son action en vue de dédommager les victimes des troubles de 1837. Il dépose par ailleurs une pétition des habitants de Saint-Eustache réclamant une aide pour la reconstruction de l’église et du couvent brûlés pendant la rébellion. Membre de la première heure de l’Association Saint-Jean-Baptiste, fondée par son ami Ludger Duvernay, il en deviendra son quatrième président en 1846. Bien entendu, l’association n’éveille plus les craintes des autorités anglaises ni la méfiance du clergé catholique. Les révolutionnaires de 1837 sont devenus de respectables notables. Notre Société prend soin de

ses membres dans le besoin et organise le 24 juin de chaque année la Fête nationale, avec une grand-messe (et distribution du pain bénit) et une procession dans les rues. Rumilly décrit ainsi cette époque: L’Association Saint-Jean-Baptiste, société de bienfaisance et société nationale des Canadiens français, coule des jours paisibles sous la présidence de l’un des hommes les plus estimés du pays, ( ) réputé, dans toute la province, pour sa science juridique, pour son désintéressement civique, et pour la douceur presque féminine de son caractère. Il sera remplacé en 1848. Au moment de l’émeute du 25 avril 1849, alors que des anglophones mettent le feu au parlement, situé à Montréal, Morin, qui agit comme orateur, fait preuve d’un sang-froid incomparable en réclamant une motion d’ajournement en bonne et due forme en vue de lever la séance, alors que le feu léchait déjà les draperies de la salle où siégeaient les députés ! (Je vous suggère à ce propos la lecture du texte de Christian Gagnon, « SSJB : 1, The Gazette : 0 », publié dans Le Patriote de juin 2009.) De 1851 à 1853, il dirige le Bas-Canada avec Francis Hincks sous la bannière du Parti réformiste, puis en 1854 et 1855, il forme un gouvernement avec le libéral-conservateur Allan MacNab. En janvier 1855, Morin abandonne sa carrière politique afin d’accepter le poste de juge de la Cour du Banc de la Reine, où il œuvre à parfaire le code civil du Canada-Est... Il se fait vieux et aspire à moins d’activités qui requièrent de l’effort. Il meurt subitement le 27 juillet 1865 à Sainte-Adèle, dans les Laurentides. Ses funérailles auront lieu à Saint-Hyacinthe. Dans la biographie qu’il fait de Morin, Jean-Marc Paradis donne un portrait moral de l’homme : ce sont sans doute ses qualités humaines et morales qui font de Morin un être attachant. Son exquise politesse apparaît dès le premier contact avec lui, peu importe les circonstances. On se rend vite compte qu’il n’a jamais oublié ses origines modestes et terriennes; bien au contraire, il s’en sert souvent comme des titres de gloire. Et sa modestie est certes le trait qui frappe le plus ses interlocuteurs. Et, de poursuivre plus loin le biographe : Morin, à ne pas douter, est le type parfait de l’honnête homme. Tout ce qui est problème humain l’intéresse, tout ce qui est cas de justice est défendable. Progressiste en tout, il vit à l’aise dans son siècle, mais il a le défaut d’être avantgardiste. Mais est-ce bien là un défaut ? ••• SOURCES BIBLIOGRAPHIQUES AUCLAIR, André. « Quelque part en Bellechasse », Au fil des ans, bulletin de la Société historique de Bellechasse, vol. 24, no 1, hiver 2012, p. 4 à 9. BÉDARD, Éric. Les Réformistes : une génération canadienne-française au milieu du XIXe siècle, Montréal, Boréal, 2009, 415 p. GERMAIN, Jean-Claude. Nous étions le Nouveau Monde. Tome 2 : le feuilleton des premières, Montréal, Hurtubise, 2012, 308 p. PARADIS, Jean-Marc. Augustin-Norbert Morin, Sillery, Québec, Éditions du Septentrion, 2005, 312 p. RUMILLY, Robert. Histoire de la Société SaintJean-Baptiste de Montréal. Des Patriotes au fleurdelisé, 1834-1948, Montréal, Éditions de l’Aurore, 1975, 564 p.


Manif au Centre Bell

Tricolore, mais unilingue anglais par Christian Gagnon

québécois. Quand je suis arrivé, en 1983, il n’y avait plus que deux ou trois francophones. J’ai renversé la vapeur. Tant et si bien qu’à un moment donné, nous en comptions une douzaine, a dit fièrement l’ex-numéro 18 de ceux qu’on pouvait encore surnommer « les Glorieux ». Cette attitude du Canadien a pourtant des airs de déjà-vu. Louis Fournier est journaliste à la retraite et a été vice-président aux communications du Fonds de solidarité FTQ, un des propriétaires du Canadien. Dans Le Devoir du 21 décembre, il écrit, Le plus méprisant dans l’« affaire Cunneyworth », c’est qu’elle laisse croire qu’il n’y a pas de francophone compétent, à l’heure actuelle, pour occuper le poste d’entraîneur-chef du Canadien. Ce mépris nous ramène 50 ans en arrière, au moment de l « affaire Gordon ». Le 19 novembre 1962, devant un comité parlementaire à Ottawa, le président des Chemins de fer nationaux (CN), Donald Gordon, à qui l’on demandait des comptes sur l’absence totale de francophones aux 17 postes de vice-présidents de la société d’État, avait répondu sèchement que les promotions se faisaient « au mérite ». En d’autres termes, les Canadiens français, comme on les appelait alors, n’étaient pas assez compétents pour occuper ces postes. M. Fournier conclut, Pour ma part, je crois qu’il faudra attendre la venue à Québec d’une nouvelle équipe de la LNH, fleurdelisée celle-là, pour qu’enfin les Québécois obtiennent un peu plus de respect de la part d’une équipe plus que centenaire, le Canadien, qui s’est bâtie grâce à eux et qui, en fin de compte, leur appartient un peu. Le 7 janvier, la table était donc mise pour la tenue d’une manifestation très suivie par les médias au Centre Bell, là où le Canadien affrontait le Lightning de Tampa Bay. Cessons de jouer défensif et passons à l’offensive, il ne faut plus accepter que la langue française soit reléguée au second plan au Québec. C’est une question de justice sociale pour le peuple québécois et de fierté nationale !, a fait valoir le président du Mouvement Québec français, Mario Beaulieu, en s’adressant aux centaines de manifestants qui remettaient des milliers de drapeaux du Québec aux partisans du club de hockey Canadien avant le match. Monsieur Beaulieu était accompagné du porte-parole du Mouvement Montréal français, Denis Trudel, et de Robert Sirois, ex-joueur professionnel et auteur du livre Le Québec mis en échec sur la discrimination envers les Québécois dans la Ligue nationale de hockey. Le Syndicat de la fonction publique du Québec a aussi participé à la manifestation.

À l’approche des Fêtes, les Québécois étaient déjà agacés par la piètre performance sur glace de la Sainte Flanelle. Ils ont ensuite été titillés par la Caisse de dépôt et la Banque Nationale dont des cadres supérieurs unilingues anglophones imposent l’anglais comme langue de travail à leur personnel. Leur patience a été mise à l’épreuve encore davantage lorsqu’ils ont appris que même après trente ans de prétendues démarches de francisation, l’anglais était toujours la langue de travail chez Bombardier Aéronautique, une entreprise bénéficiant pourtant de contrats du gouvernement du Québec qui lui apporte aussi un très important soutien financier. Mais lorsque le 17 décembre dernier, les Québécois ont appris que le Canadien de Montréal remplaçait l’entraîneur Jacques Martin par un unilingue anglophone, leur sang n’a fait qu’un tour. Les premiers à bondir furent la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal et Impératif français. Qualifiant ce choix d’« insultant », le président de la SSJB, Mario Beaulieu, a fait remarquer qu’au début de son existence, le Canadien était l’équipe des francophones et qu’il y a aujourd’hui de moins en moins de joueurs francophones dans l’équipe. Il annonça aussitôt que la SSJB organiserait une manifestation lors du prochain match du Canadien au Centre Bell. Quant à Impératif français, il lançait un appel au boycott des bières Molson, les frères Geoff, Andrew et Justin Molson étant les principaux propriétaires du club. Le hockey étant une affaire d’État chez nous, le ministre de la Santé, Yves Bolduc, se risqua à déclarer qu’au Québec, il était préférable d’avoir un entraîneur qui parle français. Puis, un sondage Léger Marketing-Agence QMI rendu public le 19 décembre révélait que la décision prise deux jours auparavant de nommer l’unilingue anglophone Randy Cunneyworth comme nouvel entraîneur-chef intérimaire du Canadien, ne plaisait pas du tout aux francophones : 83 % d’entre eux trouvaient cela inacceptable. Devant pareil tollé, les ministres de la Culture et du Sport, Christine St-Pierre et Line Beauchamp, ont senti le besoin de suivre la vague en déplorant que cette « institution » inscrite « dans notre ADN » qu’est le club de hockey Canadien ait à ce point manqué de « sensibilité » à l’égard de ses partisans. Même le très fédéraliste Serge Savard, directeur général du Canadien de 1983 à 1995, a tenu à apostropher Pierre Gauthier, son successeur. L’entraîneur du Canadien s’adresse aux médias et, par conséquent, à la population chaque jour. C’est primordial qu’il soit capable de s’exprimer dans les deux langues, a-t-il insisté dans une entrevue à l’agence QMI. Dans mon temps, jamais une chose pareille n’aurait été permise. Ronald Corey ne m’aurait jamais laissé faire, a-t-il soutenu. Jusqu’à hier [17 décembre], MacNeil avait été le seul entraîneur unilingue anglophone depuis Dick Irvin [de 1940 à 1955], a indiqué Serge Savard. Il reconnaît dans la nomination de Cunneyworth la philosophie adoptée par le Canadien après son départ, en 1995. À partir de ce jour-là, le Canadien a arrêté de repêcher dans la LHJMQ. Ce qui était pourtant vital pour nous à l’époque. Du moins, à talent égal, soutient-t-il en rappelant qu’en 1993, 13 des 27 noms de joueurs gravés sur la coupe Stanley étaient ceux de joueurs

Mario Beaulieu (Photo : M. Breton)

Yves Beauchemin (Photo : M. Breton)

La nomination d’un entraîneur-chef unilingue anglophone par Les Canadiens de Montréal, a affirmé Mario Beaulieu, ce n’est que la pointe de l’iceberg d’une culture d’entreprise où les dirigeants transgressent allégrement la loi 101 en imposant le travail en anglais seulement. À peine deux joueurs réguliers sont francophones; la musique d’ambiance était totalement en anglais jusqu’à mercredi dernier; les annonces sont bilingues sans prépondérance du français, et ce, malgré la loi 101; il y a belle lurette qu’un capitaine de l’équipe ne s’est pas adressé en français à ses supporteurs, a-t-il rappelé. Devant tous ces constats, on se dit que dorénavant le Canadien devrait perdre son surnom de Sainte-Flanelle pour Holy Tweed ! Le club de hockey et le Centre Bell doivent respecter le statut du français comme langue commune et respecter la législation québécoise, a déclaré Denis Trudel. Nous demandons au club Les Canadiens d’agir rapidement pour respecter sa clientèle québécoise. Nous n’excluons pas de poursuivre nos actions ou d’appuyer activement le mouvement de boycott des produits Molson. Nous avons aussi reçu des plaintes relativement à d’autres secteurs sportifs, ont fait valoir les organisateurs. Ils ont ajouté : Il faut être vigilant et continuer à défendre et à promouvoir notre langue; défendre notre langue, c’est défendre notre identité, notre fierté. C’est une question de survie pour une nation qui ne forme que 3 % de la population dans une mer nord-américaine d’anglophones. Quant à Robert Sirois, il a affirmé que depuis 1970, tous les instructeurs québécois qui ont fait carrière dans la Ligue nationale de hockey ont débuté leur carrière dans l’organisation des Canadiens ou des Nordiques, sauf Denis Savard. Si les Canadiens de Montréal n’engagent plus de Québécois, qui le fera ? Maintenant dans les bas fonds du classement de la ligue, le Canadien sera parmi les premiers à se servir lors du repêchage de cet été. Portera-t-il un œil plus attentif à la Ligue de hockey junior majeure du Québec? Le prochain entraîneur-chef et le prochain directeur-général du Canadien parleront-ils la langue des partisans du club? C’est une histoire à suivre. •••

Dans la vie comme au hockey…

René Bourque

Blake Geoffrion

Incapable de ralentir sa débandade après l’embauche de Randy Cunneyworth, le Canadien a transigé avec d’autres équipes afin de tenter de sauver sa saison. Il est intéressant de constater que les deux joueurs prometteurs ainsi obtenus sont très représentatifs des torts subis par les francophones d’Amérique au cours des siècles passés. Le premier nouveau venu est René Bourque, un Albertain d’origine métisse acquis le 12 janvier et qui a fait son hockey mineur près de Régina, là même où a été pendu Louis Riel. M. Bourque a beau porter un nom français et sa sœur jumelle s’appeller Chantal, il ne parle pas la langue de ses ancêtres francophones. Aussitôt échangé, il a lancé sur le compte Twitter des Flames: Je suis dans l’eau chaude, je crois. Je ne parle pas français même si j’ai le nom de famille le plus français dans l’équipe. Je me souviens de quelques mots appris à l’école, mais c’est tout. Je vais devoir l’apprendre maintenant et je veux le faire, a-t-il ajouté. Le 17 février, Pierre Gauthier a aussi mis la main sur Blake Geoffrion, petit-fils du grand Bernard « Boum-Boum » Geoffrion, qui brilla de tous ses feux à Montréal, alors qu’il était un coéquipier de Maurice « Rocket » Richard. Ayant grandi au Tennessee, Blake Geoffrion a subi le même sort linguistique que les Tisserands du pouvoir du cinéaste Claude Fournier. Le jeune Geoffrion ne parle pas la langue de son illustre grand-père. Danny Geoffrion, père de Blake et fils de Bernard, a lui aussi joué pour le Canadien en 1979-80. Le 1er mars dernier, il a assisté avec émotion au premier match de son fils dans l’uniforme tricolore au Centre Bell et a fait part à La Presse du désir de son fils de renouer avec ses racines. Je me souviens qu’à l’université, il s’était procuré les disques de langues Rosetta Stone pour apprendre le français. Je croyais qu’il se lancerait dans l’espagnol parce que ça pouvait lui être plus utile dans la vie. Mais il a insisté pour se procurer ceux en français en me disant: papa, on ne sait jamais, peut-être qu’un jour je jouerai pour le Canadien. Il va falloir que je sache parler français. Ce sera donc son gros projet. Si tout va bien d’ici la fin de la saison, l’un de ses objectifs sera d’être capable de communiquer en français. •••

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178e assemblée générale de la SSJB par Élaine Des Lauriers

Hommage à deux militantes Mario Beaulieu a profité de l’assemblée générale pour rendre un hommage touchant à deux membres très engagées, qui militent depuis de nombreuses années dans le mouvement souverainiste : Jeannette Fabien-Jasmin et sa fille, Christiane Jasmin. Elles ont toutes deux reçu avec émotion la médaille de la SSJB. Vous trouverez ci-dessous le discours de Christiane Jasmin. L’assemblée s’est déroulée dans un enthousiasme certain face à la vigilance renouvelée des médias à l’égard du débat linguistique. Au moment où l’avenir du français au Québec est menacé plus que jamais, il est rassurant de voir que les efforts des dernières années pour rétablir le Mouvement Québec français commencent à porter leurs fruits de façon plus percutante, a fait valoir Mario Beaulieu en invitant les militantes et les militants à redoubler d’ardeur.

Le nouveau Conseil général. De gauche à droite : Christian Gagnon, Jean-Pierre Durand, Jean Dorion, Mario Beaulieu, Diane Toupin, France Langlais, Maxime Laporte, Élaine Des Lauriers, Rachid Bandou, Marcel Henry et Jules Gagné. Absents sur la photo : Robert Comeau, François Lemieux, Gilles Rhéaume et Pierre Serré. (Photo : Mathieu Breton)

Près de quatre-vingts délégués élus lors des assemblées annuelles des sections ont participé les 8 et 9 mars derniers, à la maison Ludger-Duvernay, à la 178e assemblée générale annuelle de la SSJB. Le thème de cette année, En action pour un Québec FRANÇAIS ET LIBRE, soulignait à nouveau deux missions piliers de la Société : la défense du français et la réalisation de l’indépendance du Québec. Assemblées des sections Au cours de leurs assemblées, tenues avant l’assemblée générale annuelle, les sections se sont dotées de nouveaux conseils exécutifs. Six sections ont élu un nouveau président ou une nouvelle présidente. On remercie les présidents sortants Marc-André Bahl (Chevalierde-Lorimier), Serge Héroux (Chomedey-de-Maisonneuve), Jean Lapointe (Jacques-Viger), Michel Thisdale (Laval), Denis Martel (Ouest-de-l’Île) et Jacques R. Blier (René-Lévesque) pour le travail accompli au cours de la dernière année et on félicite les nouveaux élus Denise Laroche, Sylvie Mérineau, Aude De La Tremoille, Manon Arsenault, Claude Boisvert et Guy Brien. Les sections ont également voté une trentaine des propositions qui ont été étudiées lors de l’assemblée générale. Parmi ces propositions, plusieurs avaient pour thème la défense du français, la protection du patrimoine et la mise en valeur de notre drapeau national. Les membres ont aussi voté un appui massif au mouvement étudiant en adoptant des propositions contre la hausse des frais de scolarité et pour la gratuité scolaire. La SSJB a rapidement fait état de cet appui dans un communiqué faisant le bilan de son assemblée générale. Elle a également donné aux étudiants des centaines de drapeaux du Québec pour que le fleurdelisé soit présent dans les manifestations, allant ainsi dans l’esprit des propositions demandant de donner au fleurdelisé toute la place qui lui revient. Commission des présidences La Commission des présidents a élu au poste de présidente Agathe Boyer, qui succède à Marc-André Bahl. On remercie ce dernier pour le travail accompli durant son mandat à la tête de la commission. Conseil général Sept postes au Conseil général de la Société étaient en élection cette année, dont cinq à titre de représentants des sections et deux à titre d’anciens présidents. Marcel Henry et Gilles Rhéaume ont été réélus sans opposition aux postes d’anciens présidents. Robert Comeau, Christian Gagnon, France Langlais et Maxime Laporte ont été réélus à titre de représentants des sections. Jules Gagné, qui a travaillé au cours des dernières années comme conseiller général au sein du comité de vérification des finances, a quant à lui été élu pour un premier mandat. Comité de vérification des finances

Étienne Gougoux, président du Conseil jeunesse. (Photo : Mathieu Breton)

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VIBRANT DISCOURS Voici le vibrant discours qu’a fait Christiane Jasmin en acceptant la médaille de la SSJB que lui a remis Mario Beaulieu lors de l’assemblée générale annuelle. Monsieur le président d’assemblée, Monsieur le président de la Société Saint-Jean-Baptiste, Mario Beaulieu et très chers délégués. Je tiens à vous préciser que je suis meilleure comme idéatrice que comme oratrice. Je me suis posé la question: Pourquoi moi? Pourquoi ma mère? Pourquoi ma mère et moi? Et après mûre réflexion, j’ai trouvé une réponse satisfaisante à ce questionnement. En m’honorant, en célébrant ma mère, c’est toute une famille comme les autres, avec des liens de sang, un lien intergénérationnel que vous honorez chez les Jasmin-Fabien et une longue série d’actions militantes. Mais aussi, vous honorez la grande famille politique que nous sommes, c’est-à-dire vous aussi, tous les militants amoureux et fiers du Québec que vous êtes. Je félicite chaleureusement ma mère, Jeannette Fabien Jasmin, pour ses actions militantes et son implication depuis plus de cinquante ans à la promotion du français et de l’indépendance. Merci! Et, j’offre cette médaille à mon père Alban Jasmin, décédé en 1988, qui a su m’insuffler très jeune le goût du Québec et la nécessité de l’indépendance. Merci! Tout un héritage! Je veux vous dire que le Québec a grandement besoin de militants comme vous pour faire la promotion de sa culture, de sa langue, et pour accéder à sa liberté et à son indépendance. Nous sommes une nation distincte et c’est cette nation distincte qui se dotera d’un pays indépendant. C’est la cause que je défends, notre Marche vers la Liberté! C’est mon rêve et il ne faut jamais renoncer à ses rêves. Je termine par une citation de Gaston Miron: Je suis arrivé à ce qui commence. Encore une fois merci! Et vive l’indépendance! Christiane Jasmin À conserver… Liste des personnes en poste aux instances de la SSJB pour l’année 2012.

Trois personnes ont été élues au Comité de vérification des finances. Il s’agit de Pierre Benoît (Laval), Robert Gagnon (Marguerite-Bourgeoys) et Anne Michèle Meggs (JacquesViger). Elles se joignent à Paolo Zambito (Pierre-Lemoyne-d’Iberville) pour compléter le comité.

Maxime Laporte a été élu au poste de conseiller général. (Photo : Mathieu Breton)

Jeannette Fabien-Jasmin, Mario Beaulieu et Christiane Jasmin. (Photo : Christian Gagnon)

France Langlais, secrétaire générale, a été élue pour un quatrième mandat. (Photo : Mathieu Breton)

Agathe Boyer, présidente de la section Doris-Lussier et de la Commission des présidentes et des présidents. (Photo : Mathieu Breton)

Présidence de section Chevalier-de-Lorimier Denise Laroche Chomedey-de-Maisonneuve Sylvie Mérineau Doris-Lussier Agathe Boyer Henri-Bourassa Roger Trépanier Jacques-Viger Aude De La Trémoille Jean-Olivier-Chénier Benoît Coulombe Laval Manon Arsenault Louis-Riel Jacques Binette Ludger-Duvernay Yves Saint-Denis Marguerite-Bourgeoys Sébastien Lafortune Nicolas-Viel Denis Rebelo Ouest-de-l’Île Claude Boisvert Pierre-Le Gardeur Claude J. Allard Pierre-Lemoyne-d’Iberville Michel Gagnon René-Lévesque Guy Brien Yves-Blais Normand Archambault Conseil général Président : Mario Beaulieu

Conseil jeunesse Président : Étienne Gougoux

Anciens présidents : Jean Dorion Marcel Henry François Lemieux Gilles Rhéaume

Commission des présidents et des présidentes Agathe Boyer, présidente Roger Trépanier, vice-président Manon Arsenault, secrétaire

Représentants des sections : Rachid Bandou Robert Comeau Élaine Des Lauriers Jean-Pierre Durand Jules Gagné France Langlais Maxime Laporte Pierre Serré Diane Toupin

Comité de vérification des finances Pierre Benoît Robert Gagnon Anne-Michèle Meggs Paolo Zambito


LES ARTISTES ONT LEUR PLACE À LA MAISON LUDGER-DUVERNAY Les Jeudis culturels présentent

Mario Beaulieu, Alexandre Belliard et Manon Arsenault, organisatrice des Jeudis culturels. (Photo : Mathieu Breton)

Alexandre Belliard chante l’histoire des francophones d’Amérique Le jeudi 23 février, à la maison Ludger-Duvernay, Alexandre Belliard, jeune auteurcompositeur-interprète, présentait le premier album de sa série Légendes d’un peuple, qui raconte en chansons l’histoire des francophones d’Amérique. En musique, avec ses propres mots et ceux de Michèle Lalonde, Joséphine Bacon, Louis Fréchette et François-Xavier Garneau, il fait revivre des personnages marquants comme Marie Rollet et Pierre Le Moyne d’Iberville et des événements clés de notre histoire comme les Rébellions de 1837-1838.

Mathieu Poirier

Auteur-compositeur-interprète

26 avril 2012 à 19 h Auteur-compositeur-interprète très engagé pour son pays, Mathieu Poirier compose des pièces colorées et piquantes qui dénoncent l’inaction des gouvernements. Il nous rappelle qu’il est important de nous prendre en main… ce qui ne l’empêche pas de nous chanter les beaux côtés de la vie. Mathieu Poirier profitera de cette soirée pour présenter son tout dernier album, Appartement A.

Maison Ludger-Duvernay, 82, rue Sherbrooke Ouest, Montréal (métro Place-des-Arts) Renseignements : 514-843-8851 Alain Gadbois et Agnès La Minotte (Photo : Mathieu Breton)

Prix d’entrée : 8 $ (donne droit à une consommation)

La chanson française à l’honneur Le samedi 25 février dernier, la chanteuse Agnès La Minotte est venue à la maison Ludger-Duvernay interpréter des chansons françaises des années 1920 à 1960. Cette soirée, organisée par Alain Gadbois, qui s’adressait aux étudiants du club de conversation française et à tous les membres de la SSJB, a été un franc succès.

(Photos : Mathieu Breton)

Les Oeuvriers aux Jeudis culturels de la SSJB Le 23 février, le groupe Les Oeuvriers donnait un spectacle à la maison LudgerDuvernay dans le cadre des Jeudis culturels. Déjà connus de bien des militants qui les ont vus au spectacle J’aime ma langue dans ta bouche, les membres du groupe ont présenté leurs chansons teintées de folk et de textes engagés devant une salle comble et enthousiaste.

(Photos : Mathieu Breton)

Déjeuner-causerie avec Bob Sirois Le 11 mars dernier, les Jeudis culturels conviaient les amateurs de lecture et de hockey à une rencontre avec Bob Sirois. Ancien joueur de hockey et auteur du livre Le Québec mis en échec, Bob Sirois a profité de l’occasion pour autographier son livre.

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Le mot juste... Pour l’amour du français par Élaine Des Lauriers Lorsqu’on prend conscience des anglicismes et impropriétés qui parsèment notre vocabulaire quotidien, on cherche à se corriger ou, du moins, à se débarrasser des pires. Ce n’est cependant pas parce qu’on sait qu’un mot n’est pas approprié qu’on va le délaisser facilement. L’habitude est très forte, mais il ne faut pas se décourager. Voici une liste de mots justes pour remplacer ces mots qui polluent notre belle langue. Expression fautive

Bonne expression

Une bonne main d’applaudissement

Applaudissons

Voilà un calque de l’anglais A good hand for… En bon français, on dira : Applaudissons le récipiendaire du prix Ludger-Duvernay, monsieur Yves Beauchemin. On peut aussi dire : Applaudissons-le bien fort. Aux deux heures

Toutes les deux heures

Mieux dire au téléphone Nous vous proposons cet article fort intéressant paru dans le bulletin de l’Asulf (Association pour le soutien et l’usage de la langue française) de décembre 2011. Ne quittez pas On a l’habitude de dire à son interlocuteur gardez la ligne, un calque de l’anglais à rejeter. On peut dire aussi veuillez rester en ligne. Je vous rappelle, je donne suite à votre message ou je vous rappelle à la suite de votre message. On ne devrait pas utiliser le calque je retourne votre appel. Veuillez composer le numéro 418 627-0000. On ne devrait pas dire : signalez..., une impropriété. On peut dire aussi veuillez faire le ... La ligne est occupée. Il ne faut pas dire la ligne est engagée, c’est un anglicisme. Que puis-je faire pour vous ? Comment peut-on demander puis-je vous aider? à une personne qui n’a pas nécessairement besoin d’aide? Qui est probablement en bonne santé. On peut dire aussi puis-je vous être utile ? Je vous mets en communication avec... Il ne faut pas se contenter de l’expression je vous transfère ou de je vous communique. Le verbe communiquer exige un complément direct. On pourrait aussi opter pour je vous le passe. Je viens de recevoir un appel téléphonique. On ne dit pas je viens de recevoir un téléphone à moins qu’on vienne de vous faire cadeau d’un appareil.

Il doit prendre son médicament toutes les deux heures. Ce magazine paraît tous les trois mois.

Appelez-moi sur mon téléphone cellulaire. C’est mieux que sur mon portable.

Pour le bénéfice de

J’ai reçu un appel interurbain. Il faut éviter j’ai reçu un longue distance. Cette expression fautive est une traduction directe de l’anglais.

À l’intention de

Calque de for the benefit of… On dira plutôt à l’intention de… À l’intention de ceux qui sont arrivés en retard, je répète que…

On te demande au téléphone. Cette façon de dire est préférable à t’es demandé..., formule passive inspirée de l’anglais.

Bloc appartements

On a coupé la communication. On conseille d’éviter on a coupé la ligne.

Immeuble résidentiel Immeuble d’appartements

J’habite dans un petit immeuble résidentiel dans le quartier Villeray. On utilisera tour d’habitation si c’est un immeuble en hauteur. Système de son

Chaîne stéréophonique

Calque de sound system. On parlera plutôt de chaîne stéréophonique ou tout simplement de chaîne stéréo. Caisse de son Boîte de son

Enceinte sonore Enceinte acoustique

On entend de plus en plus les gens parler d’enceintes acoustiques, mais boîte de son se glisse encore parfois dans la conversation... Sauter aux conclusions

Tirer des conclusions hâtives

Voilà un calque de l’anglais to jump to conclusions. On dira plutôt Ne tirez pas de conclusions hâtives ou Ils ont tiré trop vite des conclusions. Drastique

On fait un appel téléphonique. On ne loge pas un appel. Pour satisfaire pleinement sa curiosité, on consultera la liste proposée sous la rubrique Mots et expressions à connaître en téléphonie aux pages 253-256 de Français au bureau, Office québécois de la langue française (Québec : les Publications du Québec, 2005). On consultera aussi, à distance, les articles de la Banque de dépannage linguistique sur le site de l’Office québécois de la langue française. olf.gouv.qc.ca/ ressources/bdl.html

Les timbres de la Société Saint-Jean-Baptiste

Paul Chomedey de Maisonneuve (1612-1676)

Draconien

On utilise souvent drastique pour dire qu’une personne a opté pour des moyens radicaux pour régler une situation. Cet emploi est critiqué. On utilisera plutôt ce mot pour parler d’un remède puissant. Le médecin lui a prescrit un médicament drastique. Mais on dira le gouvernement a pris de mesures draconiennes… ou il a opté pour un moyen assez radical pour régler le problème.

Paul Chomedey de Maisonneuve est le co-fondateur, avec Jeanne Mance, de Ville-Marie. Il est né à Neuville-sur-Vanne, province de Champagne, en 1612. Il se rend en Nouvelle-France en 1641. Ainsi, le 9 mai 1641, deux navires quittent le port de La Rochelle. Dans l’un d’eux, se trouve de Maisonneuve, accompagné de vingt-cinq hommes et d’un prêtre. Dans le second vaisseau se trouve Jeanne Mance, une infirmière qui jouera un rôle crucial dans les débuts de la colonie, un père Jésuite et douze hommes.

Le gouverneur Jean de Huault de Montmagny, aurait préféré voir les nouveaux colons s’installer à proximité de Québec. Maisonneuve travaille cependant pour que la colonie s’installe à VilleMarie. Il retournera en France chercher du soutien financier et de nouvelles personnes pour se joindre aux colons déjà en place.

En raison de

On ne dira pas Dû à la pluie diluvienne, le match de tennis a été retardé… mais plutôt En raison de la pluie diluvienne, le match de tennis a été retardé. En raison du mauvais temps, le pique-nique a été annulé. On ne dira pas elle est dûe pour des vacances, mais elle a un grand besoin de vacances. Rapport d’impôt

Déclaration de revenus

Vous vous préparez à la faire, comme chaque année, votre déclaration de revenus… pour payer votre impôt. Le site de l’Office québécois de la langue française (oqlf.gouv.qc.ca) propose des outils pour les amoureux du français. Vous y trouverez entre autres des capsules linguistiques, des questions pour tester vos connaissances de la langue, des lexiques ainsi que des exercices interactifs tirés du livre Le français au bureau.

Source :

CHOUINARD, Camille, 1300 pièges du français parlé et écrit au Québec et au Canada, Éditions Libre Expression, 2001.

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Gouverneur de l’île de Montréal, Maisonneuve sera pendant plus de vingt ans à la tête du poste français. En 1642, il travaille à la construction de la fortification et de divers édifices de VilleMarie. En 1643, il plante une croix au sommet du Mont Royal. En 1644 il concède à Jeanne Mance une terre de 200 arpents qui a 4 arpents de front en bordure du fleuve Saint-Laurent. Elle y construira l’Hôpital Saint-Joseph, qui deviendra l’Hôtel-Dieu de Montréal, le premier hôpital en Amérique du Nord. À partir de janvier 1648, Maisonneuve concède des terres à d’autres colons. Par la suite, il laissera aussi aller des terres dans un espace qu’il réserve pour établir la ville, le site actuel du Vieux-Montréal. Les colons habitent désormais dans des habitations individuelles, sur des terrains concédés selon le régime seigneurial. Seule la menace iroquoise les oblige régulièrement à se rassembler au fort ou à l’hôpital. En 1663, des difficultés financières obligent la Société de Notre-Dame à céder l’île de Montréal au Séminaire de Saint-Sulpice, établi à Ville-Marie depuis 1659. Maisonneuve lui-même a quitté le fort pour loger dans le premier séminaire construit par les sulpiciens sur la commune, en retrait de l’actuelle rue Saint-Paul. Le pouvoir royal est désormais plus présent dans la colonie. En 1665, Paul Chomedey de Maisonneuve est rappelé en France. Il se retire à Paris où il meurt en 1676. Sources : fr.wikipedia.org/wiki/Paul_de_Chomedey,_sieur_de_Maisonneuvevieux.montreal.qc.ca/ inventaire/fiches/fiche_pers.php?id=106republiquelibre.org/cousture/MAISON.HTM

On peut se procurer les timbres de la Société et les albums à la réception. Tél. : 514-843-8851


Activités des sections Section Pierre-Le Gardeur Dernièrement, un groupe de militants de la Société Saint-Jean-Baptiste et du Mouvement Québec français a organisé une opération de sensibilisation à l’occasion de la venue de Pascale Picard au Théâtre Hector-Charland de L’Assomption. On sait que cette demoiselle très pure laine ne chante et ne compose qu’en anglais. Pour faire prendre conscience aux spectateurs que cette orientation est préjudiciable à la culture québécoise, le conseil de la section Pierre-Le Gardeur de la SSJB a décidé d’organiser une distribution de tracts à l’entrée du théâtre le 9 mars dernier en soirée. Raymond Gagnier, d’Anjou, et Claude Richard, de Repentigny, ont composé le tract. Le soir même, monsieur Gagnier, monsieur Roger Dormoy et monsieur Gingras se sont installés près des portes et ont distribué un exemplaire du tract à chaque spectateur. Tout s’est bien déroulé et certains spectateurs sont même ressortis pour dire à nos amis qu’ils approuvaient leur geste et qu’ils avaient raison de défendre le français. La foule n’était pas tellement nombreuse (100 à 120 personnes), signe que ce genre de musique n’a pas autant la cote qu’on pourrait le croire. C’était une opération modeste, mais on peut espérer qu’elle aura fait réfléchir certains Québécois sur un phénomène inquiétant car il semble s’intensifier. Il y aurait peut-être lieu de multiplier ce genre d’action.

FLORILÈGE CULTUREL Cette chronique n’a aucune prétention, si ce n’est de vous signaler des livres, sorties ou disques susceptibles de combler vos attentes. À LIRE Ah, qu’il était bon le temps où l’on présentait à la télé les émissions culturelles de Bernard Pivot (Apostrophes et Bouillon de culture) ! Toute bonne chose a une fin et il nous reste le souvenir et quelques livres du fort sympathique et attachant animateur. Paru en 2011 aux éditions Albin Michel, Les mots de ma vie est un dictionnaire bien personnel de Pivot qui nous fait découvrir les mots qui l’ont marqué, ému ou amusé. On peut parcourir ce livre au hasard des pages et se délecter chaque fois de son contenu. Ainsi, à l’entrée du mot « museau », on peut entre autres lire « Dire d’une jeune fille qu’elle a un joli museau laisse entendre qu’à la beauté de son visage s’ajoute un peu d’espièglerie ou de malice ». Pointer son museau, c’est noter avec un peu d’ironie que l’on s’est risqué dans une assemblée avec prudence ou avec discrétion.

Pascale Picard, Bobby Bazzini et Simple Plan sont issus de notre peuple. Ils ont du talent, mais ils composent et chantent dans une langue qui n’est pas la nôtre.

Pierre Falardeau me (nous) manque. Ses mots, ses coups de gueule, son cinéma... Alors, quel bonheur d’apprendre la sortie en avril d’un scénario inédit, même si la maladie l’aura empêché de le porter à l’écran. J’ai eu l’occasion de lire (en primeur, comme on dit au cinéma) Le Jardinier des Molson et je peux d’ores et déjà vous dire qu’à mon avis (connaissant et aimant le cinéma de Falardeau) cela aurait fait un excellent film. Vous pourrez aussi en avoir la primeur, puisque le livre (qui paraîtra aux Éditions du Québécois) sera lancé à la Maison Ludger-Duvernay le 11 avril prochain à 19 heures, en présence de Manon Leriche (compagne de Falardeau), de son fils Jules et du comédien Denis Trudel (qui animera la soirée et lira quelques extraits du livre). Entrée libre.

Pourrions-nous leur demander de s’inscrire dans la continuité de leurs illustres prédécesseurs et de chanter dans notre langue à nous, qui est aussi la leur?

À ÉCOUTER

« C’est une langue belle… » La langue française est ce qui nous distingue et ce qui fait notre fierté au Québec. Depuis 400 ans, les Québécois se battent pour conserver leur langue et la faire s’épanouir. Depuis 400 ans, ils parlent, écrivent, créent et chantent en français. Nos auteurs ont bâti un répertoire unique de chansons qui sont des chefs-d’œuvre et qui expriment admirablement ce que nous sommes. Félix Leclerc, Gilles Vigneault, Claude Léveillé, Jean-Pierre Ferland, Robert Charlebois, Harmonium, Beau Dommage, Paul Piché, Richard Desjardins, Les Cowboys Fringants et combien d’autres ont tracé la voie et nous ont fait vibrer par leurs accents bien de chez nous.

L’effondrement de la chanson française au Québec Quelques données inquiétantes… En janvier 2009, parmi les 40 chansons les plus jouées à la radio, on retrouvait 19 pièces francophones, soit 48 %1. En octobre 2011, parmi les 40 chansons les plus jouées à la radio, on ne retrouvait que 5 chansons uniquement francophones, dont deux d’artistes étrangers, pour une représentation d’à peine 13 %2. 1. Le Journal de Montréal, 21 octobre 2011. 2. Ibid.

Déclin de la population de langue maternelle française au Québec1 1991 1996 2001 2006

83,3 % 82,1 % 81,6 % 79,6 %

Évolution récente des langues d’usage à la maison au Québec2 Langue parlée à la maison Anglais Français

2001 2002

10,5 % 83,1 % 10,6 % 81,8 %

1. Pierre-Luc Bégin, Le génocide culturel. Synthèse du français au Canada, Québec, Éditions du Québécois, 2010, p. 37. 2. Ibid.

LA SECTION LOUIS-RIEL

Voilà une bien belle idée de cadeau si vous connaissez dans votre entourage des mères ou des pères qui ont des enfants en bas âge. C’est une compilation de 14 berceuses composées par Gilles Vigneault. L’album s’intitule Tu peux dormir, le temps nous veille - Les berceuses de Gilles Vigneault. Elles sont interprétées et revisitées par autant de femmes d’ici, comme Marie-Michèle Desrosiers, Pascale Bussières, Marie-Denise Pelletier, Marie-Claire Séguin, Julie Snyder... Un bijou pour endormir les petits anges. Je viens de me procurer le nouvel opus de Mes aïeux, À l’aube du printemps, et déjà je suis conquis. Ce groupe ne nous déçoit pas et on espère que leurs chansons tourneront à la radio davantage que les tubes angloaméricains infantiles de Lady Gaga et compagnie. Enfin, il est permis de rêver... Si vous cherchez quelque chose de plus politique, mettons de plus historique, alors ce sont les Légendes d’un peuple qu’il vous faut (CD paru en format MP3). Il s’agit d’une série musicale concoctée et interprétée par Alexandre Belliard, qui raconte en chansons l’histoire des francophones d’Amérique, de la Nouvelle-France à nos jours. Parmi les titres, on trouve Saint-Denis. Papineau et Quelque chose comme un grand peuple. Plus de détails sur le site alexandrebelliard.com.

Une équipe rajeunie

Chaque année, en mars, la Société-Saint-Jean-Baptiste tient son assemblée générale annuelle où les membres décident de l’orientation de la Société et prennent connaissance des rapports de l’organisation. Chaque section réunit ses membres en vue d’élire les délégués qui iront la représenter lors de l’assemblée annuelle. Ainsi, la section Louis-Riel a réuni ses membres le 5 février dernier à Pointe-aux-Trembles. En plus d’élire les délégués, l’assemblée a étudié plusieurs propositions et adopté des projets que la section veut mener à terme. Prochaine Fête nationale, protection de la langue française, gratuité de l’éducation, train de l’Est, etc. Il y a en a eu pour tous les goûts! L’assemblée générale a aussi permis de rajeunir l’équipe de la section avec l’élection d’un nouveau conseil exécutif qui aura beaucoup de pain sur la planche au cours des prochains mois. Le président de la section, Jacques Binette, remercie les participants et participantes qui sont venus nombreux à cette assemblée.

À FAIRE Il y a tant et tant de films qui sortent sur nos écrans que, une fois n’est pas coutume, je vous propose aujourd’hui un lieu de visionnement plutôt qu’un métrage en particulier. Et ce lieu, c’est le cinéma Beaubien, situé au 2396, rue Beaubien Est. Pourquoi cet endroit ? Tout simplement parce qu’on y présente et privilégie la production cinématographique québécoise et française, chose plutôt rare quand on voit les films américains se jeter sur nos écrans comme la misère sur le pauvre monde. Seul bémol avec les films français: cette inconscience (ou cette manie) de nos cousins français de truffer plus souvent qu’autrement leurs films de chansons en anglais... Ça va pas, la tête ? J’apprenais récemment que la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal avait un banc bien à elle (identifié à son nom) à l’église Saint-Jean-Baptiste, située au 309, rue Rachel Est (eglisestjeanbaptiste.org). Voilà donc une belle occasion pour vos sorties ! N’y voyez aucune ironie de ma part, puisqu’on y présente de multiples concerts et autres spectacles, que l’église possède de magnifiques grandes orgues et que rien non plus ne vous interdit d’aller y prier si vous êtes croyant. C’est aussi dans cette église que se tinrent de regrettée mémoire les funérailles de Pierre Falardeau. Jean-Pierre Durand

Téléphonistes recherchés

Mario Beaulieu, président de la SSJB, s’est adressé aux membres de la section Louis-Riel lors de leur assemblée générale. (Photo : Marcel Hurteau)

Le Mouvement Montréal français est à la recherche de personnes sérieuses, dynamiques, méthodiques, aimant les contacts interpersonnels et détenant un bon esprit d’équipe pour donner un petit coup de main à la mobilisation. Si cette offre vous intéresse, communiquez au 514-835-6319 et nous nous ferons un plaisir de vous accueillir dans l’équipe !

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La Société Saint-Jean-Bapsiste de Montréal remercie ceux qui, par leur don ou par leur legs testamentaire, nous aident à poursuivre encore mieux notre combat.

de 10 comme de 200 personnes, la Maison Ludger-Duvernay offre trois somptueux salons, à des prix très abordables.

Pour tout renseignement, veuillez vous adresser à madame Monique Paquette au 514-843-8851

Laissez-vous charmer par le cachet historique de cet édifice victorien, construit en 1874. Pour plus de renseignements, communiquez au 514-843-8851 ou consultez le site de la SSJB à ssjb.com.

Directrice et rédactrice en chef Élaine Des Lauriers Journal trimestriel édité par la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal 82, rue Sherbrooke Ouest Montréal (Québec) H2X 1X3 Tél. : 514-843-8851 Téléc. : 514-844-6369 Vous avez des commentaires ? Communiquez avec nous à journal@ssjb.com Dépôt légal : 2e trimestre 2012. Bibliothèque et archives nationales du Québec. Reproduction autorisée avec mention de la source

Ou encore, contactez-nous par courriel à info@ssjb.com

Mise en page Pierre Dagesse

Ont collaboré à ce numéro Manon Arsenault Rachid Bandou Jacques Binette Agathe Boyer Jean-Pierre Durand Véronique Gagné Michel Gagnon Christiane Jasmin Maxime Laporte Monique Paquette Joëlle Pinard Mélissa Provost Photographies et illustrations Manon Arsenault Mathieu Breton Christian Gagnon Marcel Hurteau

OUI, je suis indépendantiste et j'encourage la Société ! ❑ Membre ordinaire

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