Immorama 35 - Dossier complet

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Immodossier

Catastrophes naturelles et projets verts

Une décharge transformée en réserve naturelle Par Amandine Alexandre Royaume-Uni

Sur l’estuaire de la Tamise, une ancienne décharge transformée en réserve naturelle Pendant un demi-siècle, à partir des années 1960, Thurrock a servi de décharge à six municipalités du Grand Londres. Aujourd’hui, il ne reste aucune trace des tonnes de déchets ménagers accumulés pendant des décennies sur l’ancienne carrière de graviers : l’océan d’ordures a cédé la place à un nouveau paysage composé de prairies, de bassins et de marais salants. Ouvert au public depuis deux ans, Thurrock Thameside Nature Reserve est devenu un lieu de promenade pour les habitants de la région qui souhaitent faire une balade, à pied ou à vélo. La réserve naturelle est aussi l’endroit de prédilection des ornithologues amateurs de l’Essex. Au printemps dernier, 42 espèces d’oiseaux ont été recensées sur ce site qui borde l’estuaire de la Tamise. Une couche d’argile pour emprisonner les ordures Depuis l’été 2012, la réserve naturelle a accueilli 200 000 visiteurs, des habitants des localités alentour pour les trois quarts. Aux yeux de Renae Laybourn, la directrice du centre d’information de la réserve, la popularité du site auprès des autochtones est une formidable réussite. « Lorsqu’on a commencé à parler du projet de réserve naturelle il y a des années de cela, la population locale était pourtant très sceptique », se souvient Renae, elle-même originaire de cette région située à l’est de Londres. Qui ne se serait pas montré dubitatif ! Au XXe siècle, Thurrock était l’une des plus grandes

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décharges d’Europe. A l’époque, les seuls oiseaux qui fréquentaient le site étaient des mouettes, qui réduisaient les ordures en lambeaux. Pour transformer l’ancienne décharge en un point d’observation privilégié des oiseaux, il a fallu plusieurs décennies. La rénovation du site a débuté il y a un quart de siècle. Les déchets ont dû être compactés. Les strates formées par les déchets ont été emprisonnées sous une épaisse couche d’argile. Ils ont ensuite été recouverts de terre. Par endroits, les monticules sous lesquels sont enfouies les ordures forment des collines de 30 m de hauteur. Une réserve de 352 ha à l’horizon 2018 Aujourd’hui encore, une douzaine de personnes travaillent à la rénovation du site. Il faudra attendre quatre années supplémentaires pour que la totalité des 352 ha sur lesquels s’étalait l’ancienne décharge soit complètement transformée en un havre de paix pour la faune et la flore de l’estuaire de la Tamise. Mais la centaine d’hectares déjà ouverte au public a changé du tout au tout le caractère des lieux. « C’est incroyable de voir combien l’herbe a poussé en deux ans, se félicite Renae Laybourn. Il y a plus de fleurs, plus de papillons et plus de libellules. » Des oiseaux menacés de disparition, comme l’alouette des champs, ont fait leur apparition sur la réserve. Terry Morris, le gardien du site, a également remarqué que les rossignols, les coucous et des chouettes effraies étaient devenus plus nombreux au cours des derniers mois. Un paysage vivant Toutes ces espèces d’oiseaux cohabitent l’été avec un petit troupeau de vaches. « Ce sont nos tondeuses à gazon mécaniques », précise Terry Morris, dans un sourire. Le troupeau, qui compte 11 bêtes, fait partie du « paysage vivant » que souhaite créer l’organisation chargée de la protection de la vie sauvage dans l’Essex, l’Essex Wildlife Trust Vision. L’expression fait bien sûr référence à la faune. Elle englobe également le centre d’information et d’accueil des visiteurs. Celui-ci a été construit en bois pour se fondre dans le paysage. Il repose sur des vérins pour que sa hauteur puisse être ajustée en fonction des mouvements du sol. Car, même si les ordures ne sont plus visibles, elles continuent d’avoir un impact sur la géologie et la géographie du site : les déchets enfouis sous terre produisent du méthane, ce qui veut dire que le niveau du sol est amené à baisser au fil des ans. Et, sur la réserve de Thurrock, comme dans la nature, rien ne se perd. Le méthane généré par les ordures est récupéré. Il sert à alimenter une centrale à gaz située sur l’ancienne décharge. ■

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- Automne 2014 - n° 35


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