La vie aux Antilles. Tome 1 : Album portoricain

Page 22

en emmenant 23 esclaves. L’affaire fait grand bruit à l’époque. Schœlcher dénonce cette fuite à l’Assemblée nationale. Lamartine promet une intervention du gouvernement français auprès de la cour d’Espagne, en vain. En Martinique cette fois, à la suite des émeutes du Prêcheur, qui obligent le gouverneur à anticiper l’émancipation des esclaves, c’est tout un bateau de familles créoles martiniquaises qui débarque à Porto-Rico à la suite du maire du Prêcheur, Huc. Lui-même a perdu son gendre dans l’émeute et a vu ses propriétés incendiées 24. Certaines familles resteront, d’autres repartiront, créant ainsi un courant d’échanges régulier entre les deux îles. A Marie-Galante, à la suite des émeutes survenues lors des élections de juin 1849, plusieurs notables qui ont vu leurs propriétés détruites, s’installent également à Porto-Rico. L’historien de Vièques, Robert Rabin Siegal a consacré plusieurs articles à cette “conexión antillana” et a recensé les principales propriétés des colons venus des Antilles 25. Il a retrouvé également dans les archives paroissiales bon nombre de noms d’esclaves transplantés 26. Un personnage l’a particulièrement retenu tant par sa réussite sociale que par son rôle dans le développement de cette petite dépendance. Il s’agit de Théophile Le Guillou qui apparaît incidemment dans le récit de Guesde, “Pacheco”. On doit à ce Breton (1789-1843) devenu le premier gouverneur militaire de cette dépendance le mérite d’avoir assaini l’île des voleurs de bestiaux qui en avait fait une de leurs bases favorites. On a vu en lui un flibustier moderne. Un de ses fils et les archives permettent de cerner un peu mieux son identité : né à Quimperlé, il est le fils d’un avocat au Parlement de Bretagne. Les guerres napoléoniennes lui font connaître à quinze ou seize ans les pontons de Portsmouth 27. Il arrive en Guadeloupe en 1814, se marie au Moule avec Guillemete Anne Poncet de la Grave en 1816. Son acte de mariage 28 indique qu’il est alors négociant à Pointe-à-Pitre. En 1821, il est chassé de la partie espagnole de Saint-Domingue reprise par les Haïtiens. Deux ans plus tard, il se rend à Vièques à la recherche de bois à acheter pour les moulins et y devient resident en 1824. Vingt ans après, il possède plusieurs habitations dont les biennommées La Patience et La Réussite. 18


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.