Les Caraïbes de la Guadeloupe 1635-1656 : histoire des vingt premières années de la colonisation

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RELATION DE L'ILE DE LA GUADELOUPE

Les gouverneurs avec le Père Supérieur et son compagnon allèrent à Saint Christophe et y furent six semaines. Quinze jours environ après leur venue, Monsieur d'Esnambuc envoya du monde de Saint Cristophe pour habiter la Martinique et le Révérend Père Hyacinthe Capucin les y accompagna, mais retourna bientôt à Saint Christophe. On envoya aussi des gens à la Dominique ; mais ils y furent massacrés (2). Les Gouverneurs ayant fait deux quartiers, nos Pères aussi firent deux chapelles et plantèrent la croix solennellement avant la grand'messe. Dieu bénit leur commencement par la conversion de plusieurs hérétiques en ayant reçu cinq à la fois et cela à la première Messe. Et cette année ils en amenèrent jusqu'au nombre de cinquante. Depuis, on a continué de temps en temps. Ils gagnèrent aussi beaucoup contre les jurements. D'autant que leur monde étant assemblé en un, ils en jouissaient aisément. Mais à la fin, le monde étant dispersé, nous y perdons quasi notre latin ; les blasphémateurs n'étant pas chatiés du tout comme on devrait pourtant faire en ce pays. Quelques sauvages en ont appris de bons mots et quoiqu'ils ne sachent pas la signification des paroles sales et des blasphèmes qu'ils disent, c'est néanmoins un très pernicieux exemple. Les soirs le monde étant assemblé, nos Pères faisaient chanter les Litanies de Notre Dame et ensuite le chapelet tout haut et par ce moyen, les nègres et les sauvages l'apprenaient aussi. Outre cela, ils les instruisaient en particulier. Nous donnerons aussi cette louange à Mademoiselle de L'Olive qu'elle a eu un soin très particulier de ses esclaves et spécialement des petits, auxquels elle apprit leur catéchisme en perfection. Entre ceux-là, il y avait une petite sauvagesse de Sainte Alousie qu'un Flamand leur avait amenée. Elle la rendit capable du baptême puis de confession et enfin de la communion qu'elle reçut avec édification. Au commencement qu'on eut habité, les sauvages (2) M. de la Vallée prit possession de la Dominique le 17 novembre 1635 ; mais, craignant d'être massacré par les Caraïbes, il fit voile pour la Martinique avec ses quarante hommes.


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