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SOUVENIRS DE LA MARTINIQUE
L'Amérique est réellement un nouveau monde. La paix n'y dépend pas de la démence d'un souverain. La décentralisation et la fédération garantissent l'Union ; comme dans un navire à cloisons étanches, aucun accident local n'entraîne un désastre général. Le fonctionnarisme, le pédantisme et le caporalisme n'entravent pas l'évolution. Le fard des histrions, l'argot des mauvais lieux, la quintessence d'immondices ne remplacent pas le savoir et l'esprit. Une psychologie de cabinets particuliers ne régente pas la littérature et les mœurs. Barnum sur un cheval noir ne brigue pas le consulat. Bref, l'humanité est là plus fière qu'ailleurs; on dirait que chaque immigrant a rejeté derrière lui la livrée de l'ancien monde, pour faire peau neuve, semblable au papillon où ne se reconnaît plus la chenille d'hier. L'immensité et la fertilité du sol ; des fleuves, auprès desquels le Rhin et le Danube ne sont que des ruisseaux; la race d'hommes, sélection de toutes les autres races; un système d'instruction publique tendant à égaliser les armes dans la lutte pour l'existence, à stimuler l'esprit d'invention, à favoriser la marche parallèle de l'ordre