Au cœur de l'Amérique vierge

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AU CŒUR DE L'AMÉRIQUE VIERGE

Une fois ce travail terminé, du bois même que Quega avait donné pour Moneycuegno, ils formèrent le monument funéraire au fond du tombeau. Le nouveau chef prit alors une longue esquille de popay enflammée et mit le feu au bûcher qui, bientôt, flamba avec fureur. Et les indigènes, se levant tout à coup, entourèrent cet abîme de flammes en entonnant un chant funèbre aux rythmes mystérieux et monotones, balançant lentement leurs corps en cadence. Gitomaguegno et Dizié prirent alors le cadavre dans leurs bras et le posèrent avec dévotion sur le bûcher enflammé. Des cris de désespoir et des sanglots touchants remplirent aussitôt l'enceinte sauvage ; l'épouse malheureuse jetait dans le feu toutes les armes du défunt et tout ce qui lui avait appartenu en exhalant de douloureux gémissements. Dans son affolement elle prit un petit enfant, fruit d'un amour clandestin de Fusicâyna avec une jeune femme de la tribu de Mereciennes qu'il avait recueillie dans son foyer, et le lança dans la flamme ; le sacrifice humain étant dû aux grands hommes qui disparaissent, elle exprima ainsi son regret. Le feu n'avait pas encore consumé le cadavre de Fusicâyna, tous les indigènes veillaient autour du bûcher, lorsque la tribu des Emuas arriva en poussant des cris de désespoir. D'un pas précipité, ils pénétrèrent dans la maison en deuil par toutes les portes et même en se frayant


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