Paysans, Systèmes et Crise. Travaux sur l'agraire haïtien. Tome 2 : Stratégies et logiques sociales

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192 circonstances sont exceptionnelles par rapport à la tendance habituelle des prix, qui montent à partir de septembre jusqu'en mars. Ils mettent également en avant l' "irrégularité" des paysans qui vendent leur café à un autre spéculateur. Ceci est à notre avis assez limité dans la mesure où le paysan est placé sous la coupe du spéculateur par la remise d'un gage de garantie ou par la nécessité de conserver de bonnes relations avec lui pour obtenir d'autres crédits. Le montant du prêt dépend du volume de café que le producteur peut livrer. La valeur de la marmite de cerises ou de coques est plus ou moins basée sur le prix du café au moment du prêt. Si celui-ci intervient bien avant la période de récolte, le prêteur se base sur les prix des cerises de la saison précédente, qu'il dévalue. Si la récolte est déjà commencée, la valeur de la marmite de cerises est également inférieure aux prix pratiqués à cette époque-là : cette manœuvre est facilitée parce que le montant du prêt ne résulte pas de l'application du barème unitaire au nombre potentiel de marmites de l'exploitant : il s'agit d'une somme globale qui permet un "grignotage" supplémentaire. A Changieux, il est encore simplifié par la fourchette des prix et le peu de transactions réalisées en cerises. Plus le prêt est fait avant la récolte, plus cette manipulation est aisée et importante. Cette manipulation des prix est un moyen supplémentaire pour les prêteurs d'assurer leur profit, habituellement garanti par la hausse régulière des prix au cours de la saison. A Changieux, les emprunts faits avant et en début de récolte sont encore plus pénalisants que sur le plateau des Rochelois en raison du faible prix des cerises et de leur non-alignement sur le prix du café coque et du café pilé.


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