La Seconde terreur, ou Histoire d'un prêtre déporté à la Guyane en 1798

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CHAPITRE

IV

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Peuple infortuné , aurais-je pu lui dire, pourquoi m’accuser et me maudire sans me connaître ? pourquoi me traiter comme les sauvages traitent leurs prisonniers avant de leur donner la mort ? Mon crime, c’est d’avoir voulu défendre tes intérêts les plus chers, ta foi et ton bonheur éternel, et tu demandes à grands cris mon sang! O peuple, connais donc tes vrais amis ! Mais toutes ces paroles auraient été inutiles, je me souvins d’ailleurs de la conduite de Jésus-Christ devant ses insulteurs, et à son exemple je gardais le silence. Cependant bientôt de nouvelles réflexions, plus tristes les unes que les autres, s’emparèrent de mon âme, et abattirent mon courage à tel point que je me pris à pleurer. Cette faiblesse me valut une leçon énergique, que la divine Providence m’avait sans doute ménagée. — Pourquoi ces pleurs ? s’écria tout à coup une femme du peuple, tous les prêtres que nous avons vu passer ici, n’ont pas été traités moins rigoureusement que toi, cependant ils ne pleuraient pas ; les vrais prêtres de Dieu n’ont jamais rougi de leurs chaînes, courage! Des paroles si chrétiennes et si énergiques de cette femme pénétrèrent dans mon âme s


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