Esclavage et immigration

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sources ; la situation financière des Antilles était en effet des plus précaires. De tous temps on s’expatriait aux Antilles, avec l’espoir d’y faire rapidement fortune ; et, de fait, cet espoir se réalisait souvent. Mais les propriétaires de ces fortunes mangeaient volontiers leurs revenus en Europe, quand ils n’abandonnaient pas la colonie, sans esprit de retour, entraînant à leur suite les capitaux ramassés.Il n’y avait pas de capital accumulé aux Antilles ; bien plus, le crédit n’existait pas,le prix des sucres s’était considérablement avili, l’impot même était difficile à recouvrer. Une crise financière sévissait aux Antilles ; elle s’annonçait plus critique encore avec l’émancipation immédiate : les colons, propriétaires du sol et possesseurs d’esclaves, se sentaient directement menacés dans l’avenir. Déjà ruinés, bien que jouissant du privilège de ne pas payer leurs dettes (1), soumis aux exigences d’innombrables créanciers (2), ils allaient, sans ressources pour satisfaire à cette double nécessité, se trouver en face d’une main-d’œuvre affranchie, qu’il faudra employer, compter avec un travail libre, qu’il faudra rémunérer ; la perspective des salaires à payer effrayait leur impuissance.

1. Cf. infra page 10, en note. 2. On évaluait à 140 millions de francs la dette hypothécaire de la Martinique et de la Guadeloupe. Témoignage de M. LAVOLLÉE. Cf. Procès-verbaux, page 108.


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