Œuvres de Léonard. Tome II

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CHANT

IV.

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Je ne vois , je n’entends que des spectres funèbres. Je cours au fond de l’antre , épouvanté, tremblant : J’y trouve la Fureur, déité plus cruelle. Sa main faisait briller un glaive étincelant ; Je recule.... ô terreur ! l’odieuse immortelle Me lance un des serpents dont son front est armé: Il part, siffle , et m’atteint comme un dard enflammé. Pareil au voyageur que la foudre dévore, Je demeure immobile et ne sens rien encore , Et déjà le serpent s’est glissé dans mon cœur : Mais dès que son poison , coulant de veine en veine , De mon sang plus actif eut allumé l’ardeur, Tous les maux des enfers n’égalaient point ma peine ; J’allais d’un monstre à l’autre , agité , furieux ; Cent fois je fis le tour de l’antre épouvantable ; Et je criais : Thémire ! et ces murs ténébreux Me répétaient Thémire ! en écho lamentable. Si Thémire eût paru, ma main, ma propre main , Pour assouvir ma rage, eût déchiré son sein. Enfin je vois le jour , et sa clarté me blesse. L’antre que j’ai quitté m’inspirait moins d’effroi. Je m’arrête.... je tombe accablé de faiblesse, Et ce repos lui-même est un tourment pour moi. Mon œil sec et brûlé me refuse des larmes, Et pour me soulager je n’ai plus de soupirs ! Du sommeil, un moment, je goûte les plaisirs.... O dieux ! il est encore environné d’alarmes ! Mille songes cruels m’obsèdent tour-à-tour ; Ils me peignent Thémire ingrate à mon amour


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