Nos créoles

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LES ORIGINES DE LA POPULATION

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achètent un autre pour servir en sa place, et, en ce cas, les gouverneurs contraignent les maistres d'agréer cet échange... Les femmes et les filles sont sujettes à la même loy ; mais comme elles sont beaucoup plus rares, aussi elles ne sont pas soumises à toutes ces rigueurs ; car les femmes des officiers les achètent, et s'en servent à faire leur ménage... Elles ont un privilège que les maistres et maistresses ne les peuvent pas retenir, quand quelqu'un les recherche en mariage; car, en rendant le prix qu’ils en ont payé, elles sont mises en liberté et ils les épousent. Les familles d’aujourdhuy sont bien différentes de celles du commencement où la rareté des femmes obligeoit les habitans d'épouser les premières venues ; ce qui fait que quantité de pauvres filles ont trouvé de fort bons partis, car on ne travailloit que pour avoir une femme et la première chose qu’on demandoit aux capitaines quand ils arrivoient de France estoit des filles. A peine estoient-elles descendues à terre, qu’on couroit tout ensemble au marché et à l’amour; on n'y examinoit bien souvent ny leur naissance, ny leur vertu, ny leur beauté, et deux jours après qu’elles estoient arrivées, on les épousoit sans les connoître ; car il n’y avoit presque pas une do ces précieuses qui ne se vantât d’estre bien alliée en France ; quoy qu'il en fût, le mary les habilloit le plus superbement qu’il pouvoit et s’estimoit encore bien heureux d’en avoir à ce


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