Aurore-Niezsche

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§497 Le regard purificateur. - Il faudrait de préférence parler de «génie» chez des hommes comme Platon, Spinoza, Goethe, où l'esprit paraît ne se rattacher que de façon assez lâche au caractère et au tempérament, tel un être ailé qui s'en sépare facilement et qui peut alors s'élever très haut au-dessus d'eux. Au contraire, ceux qui se parèrent avec le plus d'insistance de leur «génie» sont précisément ceux qui ne parvinrent jamais à s'arracher à leur tempérament et s'entendirent à lui prêter l'expression la plus spiritualisée, la plus vaste et la plus générale, une expression cosmique, même dans certaines circonstances (par exemple Schopenhauer). Ces génies ne surent pas voler au-delà d'eux-mêmes, mais ils crurent se trouver, se retrouver, quel que soit l'endroit où ils dirigeaient leur vol, - c'est là leur «grandeur», cela peut être de la grandeur! - Les autres à qui ce nom s'attribue plus exactement possèdent le regard pur, purifiant qui ne semble pas sortir de leur tempérament et de leur caractère, mais qui, libre de ceux-ci, et le plus souvent dans une douce contradiction avec eux, contemple le monde comme s'il était un dieu, et qui aime ce dieu. A eux aussi ce regard n'a pas été donné en une seule fois. Il y a une préparation et un apprentissage dans l'art de voir, et celui qui a une chance véritable trouve aussi à temps un maître du regard pur!

§498 Ne pas exiger! - Vous ne le connaissez pas! Il est vrai qu'il se soumet facilement et librement aux hommes et aux choses, et qu'il a des bontés pour tous deux - tout ce qu'il demande c'est qu'on le laisse tranquille - mais seulement tant que les hommes et les choses n'exigent pas de soumission. Toute exigence le rend fier, farouche et belliqueux.

§499

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