Carnets de plage

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sur mon objectif : là, droit devant moi, à une dizaine de mètres, je vois un emplacement idéal, sûrement occupé par un collègue quelques minutes auparavant. Le sol fait comme une légère dépression : c’est sûr, c’est à coups de tong ou de crocs que collègue a créé son abri. Après avoir pris le contrôle de ma position, j’analyse le terrain. C’est pas beau à voir : certains abandonnent, d’autres sont faits prisonniers : debout, immobiles comme paralysés, le dos rond au vent. Les mains devant les yeux. Non, ne pas ouvrir la bouche, ne pas parler. Trop tard ! Je ne peux rien pour eux, ils sont trop loin. Heureusement, d’autres sortent l’artillerie lourde : la tente Queshua. Pas facile en plein combat. L’ennemi sait retourner nos armes contre nous. Eux sont sortis d’affaire. On échange un sourire, à peine rassurés. Il est temps pour moi de m’organiser. Je suis là pour un moment. Les salves sont trop fournies. Je rafraîchis les abords de ma tranchée et creuse davantage mon emplacement. Pas mal. Mais le vent me fouette toujours bien la gueule. Je me résous moi aussi à utiliser mon bouclier de protection. Déjà, mes voisins à la tente Queshua semblent inquiets. La femme me fait même un signe discret de la tête pour m’en dissuader. Elle a peur c’est sûr. Faut dire, ils sont légèrement derrière moi… J’ai pas le choix, j’y vais. J’empoigne mon parasol bleu et blanc en fibre non textile indéterminé (on dirait du papier mâché), je l’oriente face au vent, telle une épée, et amorce l’ouverture. Ma main est fébrile. Je sais que c’est ma seule chance pour m’en sortir. Je - 43 -


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