Cerveau & Psycho n°106 - janvier 2018

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DÉVELOPPEMENT

Juger quelqu’un d’après sa silhouette

L’immunité forge le cerveau de l’ado A. M. Kopec et al., Nature Communications, vol. 9, p. 3769, 2018.

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ous venez de recevoir trois nouveaux collaborateurs. Le premier est obèse, le second un athlète aux larges épaules, le troisième de silhouette plutôt « rectangulaire », avec un bassin à peu près de mêmes dimensions que les épaules. Avec lequel voulez-vous travailler ? Ne vous fatiguez pas, votre cerveau a déjà tiré ses conclusions, révèle une étude de l’université du Texas à Dallas. Pour lui, le premier est paresseux et peu soigneux ; le second est extraverti et irritable ; le troisième, fiable, un brin timide mais chaleureux. Telles sont les inférences moyennes réalisées par un échantillon de 76 personnes consultées pour cette étude. Cela dit, les mêmes jugements seraient-ils formulés à Lille ou à Toulouse ? £ S. B.

Scanners : un risque de cancer ?

© Shutterstock.com/Zurijeta

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a tomodensitométrie, plus couramment appelée scanner, est une méthode largement utilisée pour le diagnostic de maladies du cerveau. Elle consiste à mesurer l’absorption de rayons X par le cerveau pour en reconstruire ensuite une image tridimensionnelle. Les rayons X n’étant pas inoffensifs, une vaste étude épidémilogique a été réalisée aux Pays-Bas, sur 168 000 enfants, pour savoir s’ils augmentaient le risque de tumeur cérébrale. La réponse s’est avérée positive, puisque le risque de développer une tumeur cérébrale augmente de 86 % pour chaque dose d’irradiation de 100 milligrays, sachant qu’en moyenne les enfants ont reçu des doses de 35 milligrays. Le scanner est donc, plus que jamais, à prescrire en mesurant les risques et les bénéfices. £ S. B.

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ers l’âge de 12 ans, les adolescents commencent à préférer la compagnie de leurs pairs à celle des adultes, voire de leur famille. Chez les garçons, ces regroupements activent une partie du cerveau appelée circuit de la récompense, et donnent lieu à ce que les éthologues appellent le « jeu social », qui met en scène des confrontations préfigurant l’établissement de hiérarchies basées sur le statut et le prestige : comportements d’approche, d’exploration, de combats simulés et souvent désordonnés. Peu à peu, toutefois, le circuit de la récompense mature et le jeu social s’apaise pour faire place à la cognition sociale, qui permet au jeune de se représenter les émotions d’autrui, de mieux jauger les situations et de se préparer à l’entrée dans le monde des adultes. Cette maturation s’appuie sur le phénomène d’élagage synaptique : peu à peu, des synapses disparaissent et d’autres sont renforcées. Or cet élagage, viennent de découvrir la neurobiologiste Ashley Kopec et ses collègues de la faculté de médecine de Boston, fait intervenir – chez les

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garçons – le système immunitaire. Vers le milieu de l’adolescence, celuici commence à détruire les récepteurs de la dopamine en leur accolant des molécules de signalisation qui commandent leur destruction par des cellules cérébrales appelées cellules gliales. Le nombre de récepteurs de la dopamine diminue : le jeu social s’apaise, des synapses commencent à disparaître tandis que d’autres sont stabilisées – bref, le cerveau mûrit. QUAND LE SYSTÈME DÉRAILLE Chez les filles, le développement des conduites prosociales ne semble pas sous l’influence du système immunitaire. D’où l’idée que certaines maladies psychiatriques comme les addictions ou la schizophrénie, qui touchent plus souvent les garçons à l’adolescence et qui se caractérisent par une altération des comportements prosociaux, seraient en partie dus à un défaut de maturation du système de récompense sous l’influence du système immunitaire. Ce qui offre de nouvelles perspectives de prévention et de traitement de ces troubles. £ S. B.


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