LE SILENCE ET LES TOMBES
UNE HISTOIRE DU CIMETIÈRE D E S A I N T- G I L L E S
LE CIMETIÈRE, UN LIEU DE VIE La mémoire d’un cimetière, c’est celle de ceux qui y reposent, de ceux qui l’ont dessiné, de ceux qui ont voulu y édifier un pan d’histoire ou tenter d’immortaliser le souvenir d’un être aimé. C’est une mémoire qui se noue dans l’intime, dans le rapport particulier avec la personne disparue. Elle se vit aussi de manière collective. La fonction sociale du cimetière s’incarne dans le lieu de rassemblement et de recueillement pour les vivants. Le cimetière possède aussi d’autres fonctions. Ainsi, nombre de personnes aiment à en parcourir les allées. Comme le souligne un des célèbres guides du Père Lachaise, Philippe Landru: “L’erreur est de croire que les cimetières sont faits pour les morts. Ils sont faits pour ceux qui viennent après et ils nous parlent de la vie”. Certains visiteurs sont attirés par le calme et la sérénité qui règnent dans ces lieux. Hors de l’espace et du temps, ils sont des endroits propices au repos et à la réflexion. La beauté du lieu peut être attirante. Le visiteur qui gravit la pente du cimetière de Saint-Gilles verra son effort récompensé par la vue panoramique sur la capitale. Musée à ciel ouvert, les chapelles funéraires succèdent aux sculptures, les pleureuses émeuvent pour l’éternité, les portraits nous rappellent ici un militaire, là un peintre. Les animaux de compagnie ne sont pas oubliés: un beau chien, tout de bronze vêtu, veille affectueusement sur la tombe de son maître.
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Beaucoup d’artistes renommés ont apporté leur touche à des sépultures de personnalités qui ont marqué leur temps, et pas seulement à Saint-Gilles, mais aussi pour des défunts dont on est bien en peine, aujourd’hui, de dire mot. Sinon qu’ils ont en tout cas compté pour quelqu’un. Mais ces œuvres, tantôt majestueuses, tantôt originales ou intrigantes, ont interpellé leur époque et nous interpellent encore. J’ai souhaité que l’on puisse raconter ce cimetière, son histoire et celles de ses tombes, que l’on puisse saluer ces mémoires qui, pour être d’un autre temps, sont toujours vivantes. Charles PICQUÉ Bourgmestre
UNE HISTOIRE Lors de sa fondation en 1216, la paroisse de Saint-Gilles obtint le droit d’avoir une église construite sur le site du Parvis actuel, et un cimetière qui l’entourait. Celui-ci servit pendant plus de six cents ans, mais ne survécut pas aux transformations urbaines de la deuxième partie du 19e siècle.
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UN CIMETIÈRE POUR LES SOLDATS DE LA BATAILLE DE WATERLOO Le cimetière communal ne fut pas le seul sur le territoire de la commune. D’autres cimetières ont vu le jour afin de pallier l’exiguïté de la ville de Bruxelles. A la fin du 18e siècle, les cimetières de la Ville furent désaffectés, et celui de la paroisse de Notre-Dame de la Chapelle fut construit à l’emplacement de l’actuelle avenue du Roi. En 1815, les troupes de Wellington passèrent par Saint-Gilles pour se rendre à Waterloo. Plusieurs combattants anglais furent inhumés dans le cimetière. La rue de la Victoire salue l’heureuse issue pour les adversaires de Napoléon. Ce cimetière comportait une section réservée aux protestants et une autre aux juifs, section dont on dit qu’elle était la plus petite mais la plus somptueuse. Il fut désaffecté en 1877. Pour permettre la construction de la nouvelle église, le cimetière communal fut transféré du Parvis à la rue du Bois, devenue aujourd’hui rue Gisbert Combaz. D’une superficie
de 67 ares, il fut inauguré le 10 mai 1862 et le premier enterrement eut lieu le 12 mai. Contrairement à l’usage de l’époque, il n’y avait plus de partie réservée aux différents cultes. Saint-Gilles fut ainsi la première commune à ouvrir un cimetière “neutre”, indépendant des différentes confessions religieuses. L’accroissement rapide de la population (7.000 habitants en 1860 et 33.000 en 1880) amena les autorités communales à acquérir un terrain de près de deux hectares sur le territoire de la commune d’Uccle, le long de la chaussée d’Alsemberg. Inauguré en 1881, ce premier cimetière extra-muros dut être fermé dès 1895, la nature argileuse et humide du sol étant incompatible avec sa destination. L’eau suintait dans les fosses au moment du creusement, et les cercueils se trouvaient en pleine nappe aquifère, ce qui entravait le processus de désintégration des corps. De plus, l’instabilité du terrain rendait dangereux les travaux de terrassement. Ce lieu a été transformé pour devenir la Roseraie, lieu de culture et de loisir de la commune. Les dépouilles furent transférées dans le nouveau cimetière.
AVENUE DU SILENCE Le nouveau cimetière fut aménagé quasiment en face de l’ancien, avenue du Silence. Le 28 janvier 1895, l’actuel cimetière de Saint-Gilles fut inauguré, sur un terrain de douze hectares à flanc de colline, offrant une très belle vue panoramique sur la vallée de la Senne et les communes avoisinantes. L’aménagement du cimetière tout en courbes est l’œuvre de l’architecte communal Edmond Quétin, de même que l’enceinte d’ouverture, de style étrusque. Celle-ci est surmontée d’une somptueuse statue de marbre de Julien Dillens, Le Silence de la Tombe. L'entrée du cimetière de St-Gilles qui était situé à l'actuelle rue Gisbert Combaz 4
Le premier crématorium de Belgique fut construit en 1933 dans l’enceinte de la nécropole saint-gilloise. S’il demeure enclavé dans le cimetière, l’unique crématorium de la Région bruxelloise est une entité autonome, appartenant à la Société Coopérative Intercommunale de Crémation. En 1933, il fut avant tout une réponse à l’augmentation de la population bruxelloise, même s’il témoignait aussi d’une
volonté laïque qui provoquera d’ailleurs quelques tensions avec les autorités religieuses. En effet, l’Eglise catholique n’acceptera officiellement la crémation qu’en 1963. Aujourd’hui les inhumations à Saint-Gilles, dont le total depuis 1895 s’élève à 200.000, sont l’exception, soit une centaine par an, pour plus de 5.500 crémations au crématorium de la Région bruxelloise (2015).
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GALERIES SOUTERRAINES ET AÉRIENNES
LES GUERRES, LES SOLDATS ET LES RÉSISTANTS
Les galeries funéraires de Saint-Gilles sont une des six existantes à Bruxelles. C’est une proportion élevée puisqu’il n’y en a que deux en Wallonie et aucune en Flandre. Les premières galeries de Laeken (1878) servirent d’exemple pour les autres communes, attirées notamment par les aspects économiques. L’aménagement était rapide, peu onéreux et pouvait générer des recettes importantes pour les communes. Elles étaient également une réponse au développement démographique. Les galeries de Saint-Gilles sont l’œuvre de l’architecte du cimetière et architecte communal Edmond Quétin. Elles sont décrites par Fernand Bernier dans sa monographie de Saint-Gilles en ces termes : “Comme à Laeken, les galeries du cimetière de Saint-Gilles sont entièrement souterraines, avec terrasse supérieure destinée à recevoir des monuments de famille ou des monuments collectifs, au-dessus d’une ou plusieurs séries de cinq cases superposées. Les cryptes comportent 540 cellules en total”. Deux entrées mènent aux galeries. Ces deux allées en pente sont dans le bas reliées entre elles par une galerie à ciel ouvert où reposent les soldats de la guerre 14-18, morts au combat ou qui ont succombé des suites de blessure ou de maladie contractée pendant la guerre. Les galeries funéraires souterraines ne sont plus accessibles pour des raisons de sécurité. Entre 1930 et 1954 des nouvelles galeries, à ciel ouvert, ont été construites dans le haut du cimetière ainsi que le long du mur de clôture à gauche de l’entrée.
Dès l’entrée, le regard du visiteur est attiré par le vaste monument aux morts de la guerre 14-18 réalisé par le sculpteur René De Winne et l’architecte Edmond Deswarte, suite à un concours ouvert aux artistes et sculpteurs du pays. Quelques mois après la fin de la guerre, la commune décida du principe de l’érection au cimetière d’un monument funéraire en l’honneur des Saint-Gillois morts pour la Patrie. Le monument ne fut pas payé par souscription publique mais par la commune et des subventions accordées par le Ministre des Sciences et des Arts ainsi que par le Gouverneur du Brabant. Le monument réalisé correspond au projet présenté : “Le monument aura 11 mètres de longueur et 5 mètres de hauteur. Il sera exécuté en pierre blanche d’Euville et en pierre de taille. Le groupe de gauche se compose de deux femmes : la “Reconnaissance” et la “Douleur” ; au centre, la “Patrie” soutient un soldat mourant ; le groupe de droite se compose d’un adolescent entraîné vers l’avenir par un vieillard représentant la “Sagesse. Sur les murs latéraux seront gravés les noms des Saint-Gillois morts pour la Patrie” (Bulletin communal, 1921, p. 872). Outre les soldats qui reposent dans la galerie funéraire (voir ci-dessus), une pelouse 14-18 rend hommage aux combattants de la Grande Guerre. Elle a été rénovée en 2016 et accueille en son centre la dépouille du général Tombeur de Tabora. Une autre pelouse est consacrée aux combattants de la deuxième guerre mondiale. Plusieurs tombes individuelles rappellent le passé militaire des défunts (voir ci-dessous). Enfin, nombre de résistants et résistantes y sont enterrés (voir ci-dessous).
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Monument aux morts de la guerre 14-18 réalisé par le sculpteur René De Winne et l’architecte Edmond Deswarte
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La pelouse d'honneur pour les soldats de la guerre 14-18
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RENDEZ-VOUS DES ARTISTES ET DES POLITIQUES Le cimetière renferme de nombreux monuments d’intérêt artistique ou historique, dont six sont aujourd’hui classés, et les styles les plus variés s’y côtoient. On y retrouve des œuvres d’artistes importants du début du siècle dernier, ayant entre autres participé à la décoration sculpturale de l’Hôtel de Ville comme Julien Dillens, Jef Lambeaux ou Eugène Canneel. Une promenade dans le cimetière permet de découvrir les tombes des bourgmestres Paul Dejaer, Fernand Bernier, Maurice Van Meenen, des Vanderschrick, et même d’un ancien bourgmestre de Bruxelles Lucien
Sépulture de l’artiste Léopold Speeckaert
Sépulture de l’artiste Pierre Paulus
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Cooremans, du cofondateur du Parti Ouvrier Belge Antoine Delporte, d’artistes comme Pierre Paulus, André Hennebicq, Franz et Jean-Jacques Gailliard, Julien Dillens ou Léopold Speeckaert, du sportif Victor Boin, ainsi que celle du grand historien de la Belgique, Henri Pirenne. Par sa simplicité, une simple dalle en pierre, la tombe d’un des plus éclatants sculpteurs que la Belgique a connu, Jef Lambeaux, est tout à l’opposé de l’exubérance de sa production artistique.
UNE VISITE Dès la grille d’entrée franchie, sous l’auspice du majestueux “Silence de la tombe”, de Julien Dillens, qui surmonte l’enceinte, le visiteur aborde un premier rond-point d’où émerge une jeune pleureuse portant sa croix. Ce petit espace, parfaitement circulaire, est le premier repère du cimetière de Saint-Gilles. En le dépassant, la vue se dirige naturellement vers l’imposant Monument aux Morts. De part et d’autre, deux allées mènent vers la crypte aujourd’hui fermée. On découvre plus loin, dans le même axe, un tracé rectiligne qui conduit au sommet du site, au bout de l’avenue 1 souvent surnommée l’allée centrale. Elle sépare les pelouses d’honneur où sont enterrés les soldats de la guerre 14-18, à droite, dont les tombes viennent d’être rénovées avec grand soin, et ceux de la deuxième guerre mondiale, à gauche dans le bas de la pelouse 3. Dans le haut de cette pelouse, sont inhumés dans “les fosses ordinaires” les défunts sans moyens ou sans famille. Les galeries funéraires à ciel ouvert sont principalement situées à gauche de l’entrée le long du mur d’enceinte, de même que les récentes inhumations. Repartant du sommet, le regard ne peut que s’attarder sur la magnifique vallée de la Senne, qui donne à voir la ville dans toute sa diversité. Si du haut, près de la rue du Bourdon, le regard part en diagonale il apercevra la belle sculpture blanchâtre de la pleureuse nue sur la tombe de la famille
Walschaerts. Il l’apercevra facilement en contrebas car l’environnement noir et gris renforce l’impression que le blanc est bien la lumière de toutes les couleurs. Le bout du cimetière contient majoritairement les tombes les plus anciennes, un peu abandonnées. On y découvrira la plus sobre, une simple pierre et un prénom : Walter ; la plus énigmatique celle du peintre J.-J. Gailliard surmontée d’une chaise sur le dossier de laquelle est inscrit : “jrcommence” ; la plus originale, celle consacrée à Joseph Jacquemotte fondateur du Parti Communiste Belge. En descendant on découvrira le chien en bronze qui veille attentivement sur la tombe de son maître, un vaste sarcophage d’inspiration Art Nouveau et une des plus émouvantes pleureuses posées sur la tombe de la famille Smits-Mulier. Dans le bas, les pelouses 6 et 18 sont réservées à la dispersion des cendres, où sur cette dernière est installé un columbarium. A proximité, la pelouse 8 est dédiée aux enfants, c’est “la pelouse des étoiles”, où on remarquera la tombe aux accents Art déco du petit Henry Brutsaert. En repartant vers la sortie, il ne faut pas manquer les belles tombes-rochers, dont une contient l’épitaphe la plus ancienne du cimetière, celle d’Anna Vandenbergen.
L'entrée du cimetière
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1. Les inhumations plus récentes devant les galeries funéraires. 2. Bel exemple de tombe-rocher. 3. Pierre tombale composée d'azulejos, typiques du Portugal. 4. La vue est attirée par la sculpture blanchâtre de la pleureuse sur la tombe de la famille Walschaerts. Page de droite : Œuvre de Nat Neujean pour la sépulture de JeanJacques Gailliard.
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Les "fosses ordinaires" oĂš sont inhumĂŠes les personnes sans moyens ou sans famille.
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Sur la pelouse des enfants, la tombe d'Henry Brutsaert d'inspiration Art DĂŠco.
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AU GRÉ DU VENT Par la proximité du crématorium, souvent des cendres sont dispersées, comme celles de la violoniste Édith Volckaert (1949-1992), lauréate du concours international Reine Elisabeth, du dessinateur Peyo (Pierre Culiford, 19281992), créateur de Benoît Brisefer, Johan et Pirlouit, et surtout Les Schtroumpfs, du fondateur du Musée du Cinéma en 1962, Jacques Ledoux (1921-1988). Les cendres de certains détenus de la prison de Saint-Gilles y ont été déposées comme celles de Patrick Haemers, l’organisateur de l’enlèvement de Paul Vanden Boeynants. Enfin, tout amateur de jazz ou des nuits bruxelloises se souvient des magnifiques moustaches de Léopold Lenders (1917-2000), le Pol du Pol’s Jazz Club et du Bierodrome. Il avait fait jouer à Bruxelles les plus grands de Count Basie à Sadi, en passant par Dexter Gordon et Keith Jarrett. Il paraît qu’on les entend parfois près de la pelouse 6.
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Sculpture à l'entrée de la pelouse de dispersion.
Sculpture à l'entrée de la pelouse de dispersion.
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La mort des autres nous conforte dans l’idée que notre vie est précieuse, importante, essentielle, unique. Nos morts valorisent nos vies. Nous leur survivons en leur promettant de bien penser à eux, ce qui n’est pas cher payé pour le cadeau qu’ils nous font, c’est-à-dire permettre qu’on leur survive. Bien sûr, en revenant du cimetière, on s’en veut d’être content que, cette fois-ci encore, ce n’ait pas été notre tour. François Weyergans, Trois jours chez ma mère (Grasset)
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LA SÉPULTURE DES INCIVIQUES Dès la libération de Bruxelles en septembre 1944, les collaborateurs furent poursuivis. Nombre d’inciviques furent condamnés à mort et fusillés à la prison de Saint-Gilles. Certains d’entre eux furent inhumés au cimetière de la commune. Très rapidement la question des indications sur leur sépulture se posa, car les tombes des collaborateurs firent l’objet de diverses dégradations, comme en témoigne le rapport au bourgmestre du directeur de l’Etat civil de Saint-Gilles le 21 septembre 1945 suite à la demande de la veuve d’un collaborateur condamné à mort : “Sa veuve sollicite l’autorisation de placer sur la tombe un signe de sépulture constitué par une céramique portant l’inscription : 1910-1945. Une croix provisoire se trouve sur cette tombe. Elle est couverte de croix gammées. La croix placée sur la sépulture de M., un autre fusillé, a été brisée et a disparu. Il est à craindre qu’un signe définitif de sépulture ne soit également rapidement couvert d’inscriptions ou de croix gammées ou ne soit endommagé. Conformément à l’article 12 du décret du 23 prairial an XII sur les sépultures, chaque particulier a le droit, sans besoin d’autorisation, de faire placer sur la tombe de son parent ou de son ami, une pierre sépulcrale ou autre signe indicatif de sépulture. Le Bourgmestre peut toutefois, en vertu de son droit de police, interdire le placement sur une tombe d’un insigne qui serait, tôt ou tard, une cause de trouble du bon ordre et de la tranquillité qui doivent régner dans un lieu de repos. Je vous propose en conséquence de ne pas accueillir la demande qui est présentée. Une croix en bois, sans indication, est bien suffisante. Une planchette numérotée, placée par les soins du Conservateur au cimetière, permet l’identification. Dans le cas où la famille passerait outre à l’interdiction et ferait placer un signe de sépulture, je vous propose d’en ordonne l’enlèvement d’office par le service du cimetière”. Le Directeur
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Le Collège des Bourgmestre et Echevins de la commune décida “qu’aucun signe de sépulture ou inscription ne pouvait figurer sur les tombes des inciviques condamnés à la peine capitale”.
LE CIMETIÈRE DE SAINT-GILLES C’EST : 11,6 hectares 3 km d’avenues et de chemins 6 monuments classés 200.000 inhumations depuis 1895 97 inhumations en 2015
LES PLEUREUSES Présentes dans la plupart des cimetières dès les années 1870, les pleureuses sont particulièrement bien représentées dans celui de Saint-Gilles. Elles sont l’image emblématique de la douleur de la séparation. Elles sont debout, assises, agenouillées, couchées sur la tombe. Dans le cimetière, seule la femme pleure. Ici le visage est caché tant la douleur est forte, là le regard porte fièrement sur l’horizon pour capter l’éternité. Elle verse une larme, elle prie, la pleureuse, elle se lamente, elle crie sa douleur. Elle apporte des fleurs, souvent des roses, elle se recueille et lit près de son époux. Rarement dénudée, elle s’enveloppe dans de souples drapés, comme pour se protéger ou est-ce un linceul dans lequel elle pourra rejoindre l’être aimé ?
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LES TOMBES-ROCHERS Plusieurs tombes sont composées de roches brutes, marquant une parenté avec les sépultures ancestrales de pierre comme les cromlechs. Elles sont souvent accompagnées de sculptures de troncs d’arbres morts. Ces monuments “à l’imitation de la nature” furent très prisés dans la seconde moitié du 19e siècle. Ce retour à la nature dans sa pureté originelle voire éternelle signe l’intemporalité dans laquelle on souhaite enserrer la mémoire de ces défunts.
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LES PORTRAITS DU MORT Les sculptures du mort, bas-relief-buste-médaillon, relèvent d’une tradition millénaire et étaient réservées aux notables. Le développement de la photographie au milieu du 19e siècle va modifier ce rituel, pour en faire un procédé populaire. Après la première guerre, la statuaire funéraire disparaît pratiquement et le médaillon avec photo se généralise, qu’il soit en porcelaine ou en métal. Dans le cimetière de SaintGilles, quasiment toutes les tombes des soldats enterrés
dans la pelouse 14-18 possédaient un médaillon. La photographie posée sur les tombes indique les tensions dans lesquels une mort s’inscrit : le refus du deuil par le choix de photos réalisées bien avant le décès ; l’acceptation par la pose de portrait sur la tombe et enfin l’idéalisation de l’être disparu car le portrait disposé sur la pierre lui donne une intensité impossible d’atteindre de son vivant (C. Ziolko, Le photographique mémoriel : dire la mort et son contraire, http///id.erudit.org/iderudit/1004020ar).
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HISTOIRES DE CIMETIÈRES Le cimetière est le théâtre d’histoires étonnantes, tristes ou rocambolesques, histoires de vie dont on aimerait connaître tous les ressorts mais dont on ne sait souvent que quelques bribes. Le 12 février 1906, l’Inspecteur des inhumations relate au Bourgmestre “un drame qui s’est déroulé ce matin vers 11h1/2 heures, à l’ancien cimetière. L’un des enfants du fossoyeur qui habite l’ancien cimetière, a tué d’un coup de fusil son frère âgé de 14 ans. Le meurtrier, âgé de 16 ans, a déclaré avoir trouvé dans une des pelouses du cimetière, cachée sous des feuilles, l’arme dont il s’est servi. Ignorant qu’elle fut chargée, il a couché en joue son frère qui se trouvait à 4 ou 5 mètres de lui et a pressé la détente. Celui-ci a reçu la charge (composée de petits plombs) dans le côté gauche. Le poumon et le cœur ont été perforés. La mort a été instantanée. Les parents ont déclaré ignorer la provenance du fusil dont s’est servi leur fils”. Le 5 mars 1945, un avion est tombé sur le cimetière. Un avion militaire au retour d’une opération en Allemagne ? C’est probable. On n’en sait guère plus que l’autorisation donnée aux propriétaires de sépultures de pouvoir les réparer. Note de service du 16 août 1963 du Conservateur du cimetière à Monsieur le Commissaire en chef de Police : “Ce 18 août 1963 à 14 heures, j’ai fait appel à notre ambulance, à l’effet de transporter à I.M.C. av. Molière une femme trouvée couchée sur une tombe ; elle tremblait fortement et était incapable de se tenir debout ».
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Le 20 octobre 1929, le Conservateur du cimetière transmet un rapport à l’échevin de l’état civil concernant un suicide : “J’ai constaté qu’un particulier s’était tiré un coup de révolver dans la tempe droite, le suicidé tenait en main un revolver de petit calibre. Le suicidé avait adressé une lettre en mon nom, où il me demandait pardon pour les ennuis qu’il pourrait me causer”. Le 18 juin 1968, l’Échevin de l’État civil est inquiet et le dit dans un rapport au collège. C’est la commune qui organise le transport des cercueils, et le nouveau corbillard aménagé pour la classe 1 (la plus chère) ne fait pas recette : “Le nombre d’enterrements de première classe a diminué nettement. En 1966, il y en a eu sept ; en 1967, six, et aucun du 1er janvier 1968 à ce jour. Des entrepreneurs de pompes funèbres nous ont suggéré d’envisager l’acquisition de plumets pour la première classe. En effet, les torches lumineuses (posées sur le corbillard) ne se voient guère en plein jour et la différence d’apparat entre la première et la deuxième classe est minime, alors que les tarifs sont respectivement de 5.000 et 3.200 Fr.” Pour revaloriser la classe 1, l’échevin propose l’achat de plumets de type “Vautour”, constitués de plumes de l’oiseau macabre. Ce qui fut fait (photo).
UNE GESTION ÉCOLOGIQUE DU CIMETIÈRE Depuis quelques années, la commune de Saint-Gilles s’est engagée dans une gestion plus respectueuse de l’environnement en réduisant l’utilisation des pesticides, source de pollution, sur l’ensemble des espaces publics de la commune et de son cimetière à Uccle. Le cimetière représente une surface d’environ 11 hectares et comprend quelque 3 km d’avenues et de chemins. La commune a évolué dans la gestion du cimetière par la plantation et le remplacement de plus de 200 arbres, de centaines de mètres de haies et de nombreuses plantes vivaces et arbustes. L’équipe du cimetière a transformé des allées en gravier par des allées engazonnées afin de réduire le désherbage chimique et d’empêcher l’écoulement de
gravier dans les égouts ; dans certaines zones, il est donné libre cours à la flore spontanée : tapis de thym sauvage, lotier, sedum, coquelicot, orchidée sauvage, marguerite, achillée, prêle, etc. Toutes ces plantes concourent à la protection de la biodiversité et à l’embellissement du paysage du cimetière. La restauration de la pelouse d’honneur 14-18, 1650 sépultures d’anciens combattants, est particulièrement remarquable. Cette opération a été menée dans l’esprit de la préservation d’un très beau patrimoine funéraire et d’une gestion écologique : les tombes, autrefois recouvertes de graviers, ont été restaurées et plantées de graminées qu’agrémentent coquelicots, bleuets et marguerites, et les allées ont été engazonnées. Le cimetière de Saint-Gilles est appelé à devenir une véritable réserve de nature propice au recueillement.
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LES TOMBES
Nous avons indiqué septante-cinq tombes sur le plan qui est joint à cet ouvrage, et consacré une notice à près de soixante d’entre elles. Le choix est essentiellement guidé par des préoccupations artistiques voire socio-esthétiques. Certains le sont aussi pour la notoriété de leur occupant, comme par exemple les tombes ordinaires de Jef Lambeaux, Maurice Van Meenen ou Henri Pirenne.
MONUMENTS CLASSÉS
Le cimetière de Saint-Gilles compte six monuments classés par la Région bruxelloise, entre 1991 et 1997, en raison de leur valeur historique et/ou esthétique.
BOSQUET, GUSTAVE (1801 – 1876) Voir la rubrique “Les politiques”
DEFNET, GUSTAVE (1858 – 1904)
Voir la rubrique “Les politiques”
DUMORTIER VALÈRE (1848 – 1903)
Voir la rubrique “Notables et inconnus”
DILLENS JULIEN (1849 – 1904)
Voir la rubrique “Les artistes”.
SPEECKAERT LÉOPOLD (1834 – 1915)
Voir la rubrique “Les artistes”
STAPPERS, FAMILLE
Voir la rubrique “Notables et inconnus”. 27
LES ARTISTES BERNIER, GÉO (1862 – 1918) ET HOPPE, JENNY (1870 – 1934)
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Le frère du bourgmestre Fernand Bernier (voir ci-après) fut un célèbre paysagiste, peintre et dessinateur animalier. Il réalisa de nombreux portraits équestres ainsi que des affiches pour les courses de l’époque. Son épouse, Jenny Hoppe, était une peintre impressionniste.
DILLENS JULIEN (1849 – 1904)
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Le monument est classé. Né le 8 juin 1849 à Anvers et décédé à Saint-Gilles en 1904, il fut considéré comme le grand maître de la sculpture belge par ses contemporains. Il est l’auteur du monument à Everard t’Serclaes au coin de la rue Charles Buls et de la Grand Place de Bruxelles, ainsi que de La Porteuse d’eau, un des emblèmes de la commune. Le monument en pierre d’Euville fut réalisé en 1908 par l’architecte Eugène Dhuicque. Il est constitué d’un portique classique, flanqué de deux colonnes à chapiteau corinthien. Le buste en marbre blanc du sculpteur a été dérobé. Il avait été ciselé par l’un de ses anciens élèves, Jules Lagae. A l’entrée du cimetière, Le silence de la tombe, dont la sobre beauté invite au recueillement, est un parfait exemple du symbolisme prisé à Bruxelles à la fin du 19e siècle. “Cette haute et sombre effigie, enveloppée de voiles, imposante et méditative, qui, au seuil d’un de nos cimetières, symbolise avec tant de sereine majesté le Silence de la tombe” (Paul Hymans, Hommage à Julien Dillens, L’art moderne, n°1, janvier 1905). Une place de la commune porte son nom.
GAILLIARD FRANS (1861 – 1932)
20 / E1
Peintre de l’école impressionniste, Frans Gailliard étudie d’abord aux Beaux-Arts où il côtoie James Ensor, Léon Frédéric et Fernand Khnopff. Il sera directeur de l’Académie de Saint-Gilles. La rue où il vivait a été rebaptisée à son nom. La tombe est surmontée d’une œuvre, de style géométrique, qui suggère une croix et une figure agenouillée, les bras tendus, réalisée par son fils Jean-Jacques.
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LES ARTISTES GAILLIARD JEAN-JACQUES (1890 – 1976)
24 / F2
Peintre, le fils de Frans Gailliard s’inspira du symbolisme et de l’impressionnisme avant de devenir un des premiers abstraits belges. « L’originalité foncière et la modernité de l’œuvre de J.-J. Gailliard tiennent sans doute à cette liaison, si étrangement établie dans son esprit, entre une sorte de scepticisme insolent et ironique de caractère dadaïste, et des aspirations mystiques qui favorisent volontiers une vision métaphorique du monde et des moyens d’expression de type symbolique” (Serge Goyens de Heusch, Nouvelle biographie nationale, tome 4, Académie Royale, 1997). L’Académie de Saint-Gilles porte son nom. La chaise posée sur sa tombe avec l’inscription “jrcommence”, pour être curieuse, n’en est pas moins en pleine harmonie avec le personnage.
HENNEBICQ, ANDRÉ (1836 – 1904)
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Né à Tournai, André Hennebicq fut graveur et sculpteur. Formé à l’académisme, il évolua vers une représentation plus proche de la réalité quotidienne, notamment grâce à ses voyages en Espagne et en Afrique du Nord. Il vécut rue de la Source à Saint-Gilles où il aménagea son atelier. Une plaque avec son portrait en médaillon orne la façade. Son monument funéraire est inspiré de l’architecture du MoyenAge. Epitaphe de la main de Jenny Hoppe, peintre impressionniste.
LAMBEAUX JEF (1852 – 1908)
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Le sculpteur légendaire a été inhumé sous une dalle en pierre bleue qui, par sa simplicité, est tout à l’opposé de l’exubérance de sa production artistique. Mais ce n’est pas un signe de modestie. A l’instar du Titien et de Canova enterrés près de leurs œuvres dans l’église Dei Frari de Venise, Jef Lambeaux désirait être enterré dans le pavillon Horta au Cinquantenaire qui abrite son œuvre majeure : Les passions humaines. Mais ce souhait lui fut refusé. Saint-Gilles doit aussi à Lambeaux la Déesse du Bocq, magnifique expression de liberté, exposée dans la cour de l’Hôtel de Ville. 29
LES ARTISTES PAULUS DE CHÂTELET, PIERRE, BARON (1881 – 1959)
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Né à Châtelet, près de Charleroi, Pierre Paulus est le peintre par excellence de l’industrialisation. La Sambre ouvrière qui s’écoule dans les fumées n’est pas sans rappeler Turner dont l’influence sera majeure. En 1911, il dessine le fameux coq figurant sur le drapeau wallon. En 1916, il incorpore la section artistique de l’armée belge en campagne. En 1928, il participe à la fondation du mouvement Nervia, dont la rédécouverte actuelle montre toute l’importance de ces artistes wallons. Anobli par le roi Baudouin en 1951, il est actif dans le développement des arts à Saint-Gilles où il meurt en 1959. Un parc et une école portent son nom à SaintGilles. Le buste posé devant sa tombe est l’œuvre d’Adolphe Wansart.
SPEECKAERT LÉOPOLD (1834 – 1915)
35 / C5
Le monument est classé. Peintre de paysages, de scènes allégoriques, historiques, mythologiques et de natures mortes, il se tourna très jeune vers le réalisme social. Avec Félicien Rops, il fit partie d’un groupe d’avant-garde qui avait adopté les principes dits “réalistes” affirmés à cette époque par Gustave Courbet, pour qui Speeckaert vouait une grande admiration. Nombre de ses tableaux ornent l’Hôtel de Ville de Saint-Gilles. Son œuvre fut légué à la commune de Saint-Gilles. Sur la tombe sont posés une valise, deux palettes, des pinceaux ainsi que des lauriers à l’avant.
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ŒUVRES DE SCULPTEURS De nombreux artistes ont réalisé des œuvres intéressantes pour des personnalités tombées dans l’oubli aujourd’hui. Pensons à :
SYLVAIN NORGA (1862 – 1968) Ce sculpteur s’est tant spécialisé dans les sépultures qu’il acquit le surnom de “sépulteur”. Au cimetière, l’attention se portera sur sa très gracieuse pleureuse qui, depuis 1928, couvre la dalle sous laquelle sont enterrés les membres de la famille Croughs-Schollaert. Norga signe aussi cet étonnant chien en bronze aux aguets sur le sarcophage de la famille Greimans-De Neuter ( 71 / D4) tombée dans l’anonymat. Pour la famille Huylebroeck-Ney ( 61 / E2), désormais oubliée elle aussi, le “sépulteur” a ciselé le relief en bronze d’une pleureuse voilée qui, avec une insigne émotion, délivre quelques roses sur le plancher du caveau.
PAUL DUBOIS (1821 – 1905)
53 / D3
Pour la famille Fourneaux-Liénart, le célèbre sculpteur français, contemporain d’Auguste Rodin, a taillé en 1903 une touchante pleureuse mi-nue, dont le désordre de ses vêtements et de ses cheveux accentue le désarroi.
FRANZ VAN HOOF (1873 – 1963)
62 / E6
Pour le couple formé par Jeanne Tolleneer et Gustave Eylenbosch, décédés respectivement en 1946 et 1943, le sculpteur schaerbeekois a taillé une pleureuse stupéfiante dans un marbre blanc fiché sur une pierre bleue dite de petit granit, c’est-à-dire de pays. Agenouillée, affaissée, comme repentante, elle ploie de douleur sous le portrait altier d’époux qui n’ont été séparés que dans la mort.
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ŒUVRES DE SCULPTEURS HENRI PUVREZ (1893 – 1971)
22 / E2
Le sculpteur a façonné une “Porteuse de fleurs” africanisante, aux airs ingénus. Elle rend hommage aux familles Meunier-Lambillotte et Losseau-Stevens. Henri Puvrez est considéré comme l’un des plus importants sculpteurs belges de sa période, avec Oscar Jespers, Jozef Cantré et Charles Leplae.
LES ARTISTES ANONYMES De très beaux monuments ne sont pas signés, pour des défunts dont on n’a guère gardé de traces. Elle est émouvante cette scène d’adieu de l’homme à sa femme et à son enfant (Antoine Bolongaro et Marie d’Ester 51 / D3) . Une jeune femme se torsade de douleurs sur la tombe de la famille Evrard-Bougeau ( 66 / C3). Il n’y a pas que des pleureuses dans le cimetière. Sur la tombe de la famille Huart-Tegelbeckers ( 27 / F3), un adolescent, une rose à la main, livre le spectacle d’une émotion glaçante.
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SOUS LES ARMES TOMBEUR DE TABORA, CHARLES (1867 – 1947)
58 / D3
Pelouse d’honneur 14-18. Commandée par le général Tombeur, la force publique congolaise a participé pour la première fois à des opérations d’envergure en 1916. A la fin du mois de juin 1916, elle occupait l’ensemble du territoire ruandais avant de remporter, le 19 septembre 1916, la victoire décisive lors de la bataille de Tabora, ville principale de l’Afrique de l’est allemande. Le général Tombeur, anobli par le Roi Albert en Tombeur de Tabora, est décédé en 1947 et est enterré dans la galerie de la crypte, puis transféré, en septembre 2016, au centre de la pelouse d’honneur 14-18. En 1951, un monument incorporant un buste en bronze dû à Jacques Marin lui est dédié, avenue du Parc à Saint-Gilles..
DEMEY, JOSSE (1892 – 1921)
8 / B4
Ce capitaine du 9ème régiment de Ligne, invalide de guerre, n’a pas survécu trois ans à l’Armistice. Le sculpteur Norga a conçu ce relief à l’image d’un jeune soldat portant ses décorations et en retrait par rapport à son étendard, son casque, son sabre et sa baïonnette. A ses pieds, quelques feuilles de chêne et de laurier complètent le tableau.
EMPAIN, MARIUS (1896 – 1918)
6 / B4
Volontaire de guerre, ce sous-lieutenant issu d’une famille d’industriels de la région de Binche est tombé au combat, pendant les bombardements ennemis sur Nieuport. Ses parents lui ont fait ériger une statue “en honneur à notre glorieux fils”. Une femme, semblant surgir de l’Antiquité, écrit l’épitaphe, une couronne mortuaire à la main.
Pages 34-35 : Des médaillons de soldats de la guerre 14-18 sont rassemblés sur une pierre posée au centre de la pelouse d'honneur 14-18. 33
34
35
SOUS LES ARMES FOULON, FÉLIX (1864 – 1937)
33 / E5
Commandant retraité et vétéran colonial. La sépulture le présente en uniforme de cérémonie, la poitrine ornée de décorations. Son épouse, Anne Dethy, décédée en 1955, est enterrée à ses côtés.
MAES, ALBERT (1859 – 1915)
46 / C4
Général-major d’artillerie, il fut l’aide de camp du roi Albert 1er de 1910 à 1914 et le commandant supérieur de l’enceinte d’Anvers jusqu’à la chute de celle-ci, le 10 octobre 1914, après une résistance héroïque de près de deux mois, à un contre trois. Juste avant la capitulation des dernières forteresses, signifiée à l’ennemi par le bourgmestre d’Anvers, le Roi avait ordonné au staff militaire et au gros de ses troupes d’évacuer la ville et de faire mouvement vers le front de l’Yser. De retour à Saint-Gilles, rongé par la maladie, le commandeur de l’Ordre de la Couronne s’est éteint le 31 août 1915. C’est son épouse, Louise Thiery (1865 – 1934), qui fit ériger cette imposante chapelle de style néo-roman, œuvre de l’architecte Maurice Van Ysendyck, à la mémoire de son mari et de leur fille Suzanne, qui avait elle aussi succombé à la maladie, en 1914. L’église Saint-Suzanne à Schaerbeek, dont le bêton la rend toujours moderne aujourd’hui, est également un hommage rendu par Louise Thiery à sa fille.
MULS, CHARLES (1896 – 1917)
74 / D5
Médaillon en hommage à ce caporal du 5ème de ligne, tué sur le front de l’Yser.
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LES RÉSISTANTS ET LES ENGAGÉS DUCHAINE, CHRISTINE (1902-1985)
5 / A4
Née à Saint-Gilles, Christine Duchaine fut médecin au sanatorium Prince Charles à Auderghem. Dès le début de la guerre, elle participa au sauvetage d’enfants juifs admis au sanatorium sous une fausse identité pour échapper aux Allemands. Entre 1942 et 1944, une centaine d’enfants furent hébergés. Elle décède à Forest le 21 mars 1985.
LE MONUMENT FRAITEUR
45 / C4
Arnaud Fraiteur (1924-1943) fut un agent de liaison du Front de l’Indépendance (FI). Il participe à plusieurs actions, dont l’assassinat du journaliste Paul Colin, collaborateur notoire et journaliste pro-allemand. Activement recherché, il est arrêté, sur dénonciation, torturé et pendu le 10 mai 1943 au Fort de Breendonk. Il avait 19 ans. D’abord enterré dans l’Enclos des Fusillés rue du Colonel Bourg à Schaerbeek, Arnaud Fraiteur est exhumé et inhumé dans le caveau familial le 7 juin 1945. Ses dénonciateurs seront fusillés dans le dos, comme les traîtres, à la prison de Saint-Gilles. L’un d’entre eux, Paul Herten, fusillé le 13 novembre 1944, sera inhumé à quelques mètres du monument Fraiteur.
MICHEL, JOSEPH-JEAN (1890 – 1974)
57 / D3
J.-J. Michel c’est l’usine à dix ans et la guerre à 24, où il est blessé grièvement. Après la guerre, homme d’affaires dans les carrosseries, il ne cessera de s’investir au profit des anciens combattants, puis dans la résistance lors de la seconde guerre mondiale. Homme au caractère trempé, il sera, en tant que Président du Front Unique des Anciens Combattants, à l’initiative de la pelouse d’honneur pour les combattants de 14-18 au cimetière de Saint-Gilles. Comme les autorités n’en voulaient pas, il envahit un beau soir avec ses amis la salle du Conseil communal et n’abandonne la place que le vote acquis. L’école J.J. Michel de la rue de Bordeaux lui est dédiée. Sa dépouille repose au pied du mât d’honneur de la pelouse 14-18.
RABINOWICZ, LEIB (1918-1943)
68 / C3
Membre de l’armée belge des Partisans, issue du parti communiste, il participa à de nombreuses interventions armées telles que le sabotage d’usines et l’exécution de soldats allemands ou de collaborateurs. Il est mortellement blessé lors d’une de ces actions.
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LES RÉSISTANTS ET LES ENGAGÉS JACQUEMOTTE, JOSEPH (1883 – 1936) 29 / F4 Issu d’une famille ouvrière, Joseph Jacquemotte s’engage très jeune dans les actions militantes. Membre fondateur, puis secrétaire général du Parti Communiste Belge (PCB), directeur du Drapeau Rouge, il fut de tous les combats sociaux et politiques de la première moitié du 20e siècle. Le monument fut élaboré par les architectes progressistes, Fernand et Maxime Brunfaut, à qui l’on doit notamment les sièges des journaux socialistes Vooruit, à Gand, et Le Peuple, à Bruxelles, et son buste par l’artiste Dolf Ledel. L’hommage au militant n’est pas sans grandiloquence. L’étoile, symbole du communisme, est portée par deux représentants du peuple et entoure la colonne sur laquelle est posé le buste du dirigeant communiste. Une faucille et un marteau sont gravés sur la stèle.
VOLONTAIRES DES BRIGADES INTERNATIONALES
28 / F3
Une stèle fut posée en 1976, à la mémoire des volontaires des Brigades internationales partis combattre l’armée putschiste du général Franco, pendant la guerre d’Espagne. La gauche radicale, fort présente dans la commune, s’est notablement mobilisée en faveur du Frente Popular, dès 1936, et impulsera pendant la Seconde Guerre Mondiale le plus important réseau de résistance civile, le fameux FI (Front de l’Indépendance). En 1976, l’édification du monument a été encouragée par plusieurs édiles communaux, jadis opposants farouches à la sanglante dictature du Caudillo. Le monument est relié à six bornes portant les noms de batailles de la guerre d’Espagne : Caspe-Ebro, Guadalaraja, Guadarame, Jarama, Huesca, Madrid.
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LES HOMMES POLITIQUES ST-GILLOIS
BERNIER, FERNAND (1864-1929)
70 / D4
Journaliste et écrivain, il publia en 1904 le 1er ouvrage sur l’histoire de SaintGilles (Monographie de la commune de Saint-Gilles, P. Weissenbruch éditeur, 1904). Dans sa préface, il espérait avoir la possibilité de le compléter. Il faudra attendre 110 ans pour que paraisse un nouvel ouvrage général sur la commune (St-Gilles, 800 ans d’histoires, édition Mardaga, 2016). Longtemps conseiller communal et échevin, Fernand Bernier fut le bourgmestre dont le mandat fut le plus court : il décéda le 8 septembre 1929, l’année même de sa nomination. Il est le frère du peintre Géo Bernier. Une rue de la commune porte son nom.
BOSQUET, GUSTAVE (1801 – 1876)
21 / E2
Le monument est classé. Député libéral et échevin de St-Gilles en 1836. La chapelle en pierre de taille (extraite de la carrière des Nutons, à Spontin) qui lui est consacrée est d’inspiration classique, faite de colonnes à chapiteau doriques, d’un entablement et d’un fronton triangulaire. Elle a été façonnée par l’architecte éclectique Hubert Marcq. Une rue de la commune porte son nom.
BRÉART, ANTOINE (1851-1935)
54 / D3
Homme politique libéral, Antoine Bréart fut échevin des Finances puis bourgmestre de St-Gilles (19091929), particulièrement pendant la période d’occupation de la première guerre mondiale. Une rue de la commune porte son nom.
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COENEN, LOUIS (1881 – 1965)
26 / F2
Militant socialiste de la première heure, il en paiera le prix, surtout au cours de la Deuxième Guerre. Entré au conseil communal en 1912, il y siègera jusqu’en 1959. Entre temps, il fut échevin des Travaux publics et bourgmestre de 1947 et 1953. Résistant actif, il sera arrêté et incarcéré par l’armée d’occupation. Une rue de Saint-Gilles lui est dédiée.
DEFNET, GUSTAVE (1858 – 1904)
4 / B4
Le monument est classé. Apprenti typographe à 14 ans, conseiller communal à Saint-Gilles en 1890, avant d’y devenir échevin, il fut l’un des premiers députés socialistes à la Chambre, en 1894. Le monument Defnet a été érigé par l’Alliance des Carriers de Modave, dans un style d’inspiration Art nouveau. Une rue de Saint-Gilles lui est dédiée.
DEJAER PAUL (1840 – 1893)
41 / B5
Géomètre de formation, il fréquentera très tôt le parti libéral. Conseiller communal à Saint-Gilles, puis échevin, il en fut le bourgmestre de 1882 à 1893. Il consacra une grande partie de son action politique au développement de l’enseignement officiel et des hospices civils. Une rue de la commune porte son nom.
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C2/D2
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LES HOMMES POLITIQUES ST-GILLOIS VANDERSCHRICK, FAMILLE
MORICHAR, LOUIS (1858 – 1939)
69 / C4
Avocat, humaniste, tôt engagé dans les rangs du parti libéral, il fut surtout l’échevin historique de l’Instruction publique et des Beaux-Arts, entre 1893 et 1920. Conseiller provincial aussi, partisan inconditionnel de l’école publique, il fit construire des écoles primaires, créa le premier réseau secondaire communal, ainsi que le “4ème” degré technique et professionnel. Il instaura également les académies de musique et de dessin, ainsi que les cours pour adultes. Une place de la commune porte son nom.
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40 / B5
Issus d’une famille de grands propriétaires terriens, Égide Vanderschrick fut bourgmestre de 1825 à 1840, son fils Jean de 1840 à 1860 et son petitfils Ferdinand de 1896 à 1899. Ils marquèrent de leur empreinte le développement urbanistique de la commune. Une rue de la commune leur est dédiée.
VAN MEENEN, MAURICE 65 / C3 (1848 – 1909) Entré au conseil communal sur les bancs du parti libéral en 1879, cette grande figure de l’histoire de SaintGilles occupa rapidement et durablement l’échevinat de l’Instruction publique avant de ceindre l’écharpe maïorale, à partir de 1893. Sous l’impulsion de Van Meenen, la cité va gagner en surface et en importance, grâce à l’acquisition, puis à l’urbanisation des terrains situés au sud de la commune. C’est sous son maïorat que sera inauguré le somptueux Hôtel de Ville, sur la place communale qui porte son nom.
LES SPORTIFS BOIN, VICTOR (1886 – 1974)
60 / E2
Champion très jeune, il remporte un concours de beauté à l’âge de deux ans. Nageur et escrimeur, il est médaillé d’argent aux Jeux Olympiques de Londres en 1908 et de bronze en 1912 à Stockholm en water-polo. Il fut le premier athlète à prêter le Serment olympique en 1920 aux Jeux Olympiques d’Anvers : “Nous jurons de prendre part aux Jeux olympiques en compétiteurs loyaux, d’observer scrupuleusement les règlements et de faire preuve d’un esprit chevaleresque pour l’honneur de nos pays et pour la gloire du Sport”. A ces Jeux, il obtint la médaille d’argent à l’épée par équipe. La piscine de la rue de la Perche lui est dédiée.
MASUY, MARCEL (1909 – 1955)
25 / F2
Champion de sports moteurs, il décède en side-car lors du Grand-Prix de Senigallia (Italie). Le journal suisse L’impartial du 2 août 1955 relate : “Le coureur belge Marcel Masuy a trouvé la mort au cours de l’épreuve des side-cars qui s’est courue dimanche après-midi sur le circuit de Senigallia. La machine de Marcel Masuy, une Norton 500, a dérapé dans le virage de Molinella, puis s’est renversée dans un pré. Marcel Masuy est mort sur le coup tandis que l’Italien Marino Saguato, qui se trouvait dans le side-car, n’a été que légèrement blessé et hospitalisé à Sanigalia”. Son palmarès est affiché sur sa tombe.
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NOTABLES OU INCONNUS CASQUINHA -MARRO (1931-2013)
12 / B2
Cette sépulture récente (photo p.12) est non seulement très belle avec les azulejos (carreaux de faïence) typiques du Portugal, elle est aussi caractéristique des inhumations d’aujourd’hui qui sont principalement le fait de ressortissants de pays méditerranéens.
DEJONCKER, JEAN-PHILIPPE
39 / B5
Grand propriétaire immobilier, il fut un mécène et consentit d’importants legs à la commune. Il fut avec Gustave Bosquet et Jean-Baptiste Jourdan à l’origine de l’urbanisation du quartier Louise au milieu du 19e siècle. Bien après son décès, en 1869, un “temple” de style antique lui fut élevé. Un socle épais est surmonté de colonnettes entourant une urne et couronnées d’un chapiteau portant une croix dressée au sommet. Une rue de la commune lui est dédiée.
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DUMORTIER, VALÈRE (1848 – 1903)
64 / D3
Le monument est classé. Architecte principal de la province du Brabant, et président de la société centrale d’architecture de Belgique, il est l’auteur du palais de Justice de Nivelles et de deux maisons néo-gothiques av. Ducpétiaux à St-Gilles. Il présenta en 1899 un projet de jonction entre les gares du Nord et du Midi. Son monument fut construit grâce à une souscription internationale. Le médaillon à l’effigie du défunt est de Charles Samuel, sculpteur et médailleur belge (La Brabançonne, place Surlet de Chokier à Bruxelles). Un niveau et un compas, symboles de l’architecte et de la francmaçonnerie, accompagnent le défunt.
HOGUET, FAMILLE
52 / D3
“Hoguet vous plaît ! ». Il s’agit d’une des plus vieilles publicités de la radio belge - privée -, dans les années ‘30. En 1929, la Maison Hoguet installa son quartier général, rue de Rome, à SaintGilles. Le patron de l’époque, Jean Hoguet, y a fait édifier un magnifique immeuble Art Déco pour accueillir ses ateliers de filature, ses bureaux et l’appartement privé du directeur, alors que les magasins étaient établis chaussée de Waterloo. En 1970, les héritiers ont légué à la commune ce superbe édifice, à condition de le confiner à des activités culturelles. La bibliothèque communale s’y installera, ainsi que la Maison du Livre. Le profil du patriarche, Alexandre Hoguet (1888 – 1935), fut gravé en 1937 sur le tombeau par le sculpteur bruxellois, Alfred Courtens. Sa très nombreuse famille repose à ses côtés.
NOTABLES OU INCONNUS JANSON, MARIE (1873-1960)
63 / D2
De son mariage avec le dramaturge Paul Spaak, Marie Janson eut quatre enfants dont Paul-Henri Spaak et le grand scénariste de cinéma, Charles Spaak. Très active pendant la Première Guerre mondiale, elle rejoint le Parti ouvrier belge. Élue au Conseil communal en 1921, elle fut choisie par l’exécutif du POB pour devenir sénatrice cooptée, alors que les femmes n’avaient même pas encore le droit de vote aux élections législatives. Elle s’intéressa principalement à l’enseignement, à l’enfance et à la condition féminine. Elle est la fondatrice des Femmes prévoyantes socialistes. Elle a été enterrée sur la pelouse 6 en “fosses ordinaires”. Il n’y a dès lors plus de traces de sa sépulture depuis bien longtemps.
JANSSEN, LÉON (1849 – 1923)
73 / D5
Directeur général des Tramways bruxellois de 1888 à 1921, il amplifia considérablement le réseau et fit desservir les quartiers suburbains, pour favoriser le développement de la ville. Patron de chemins de fer ou de tramways en Argentine, en Autriche, en Italie, en Espagne, en France, en Syrie, en Chine et au Congo, il contribua grandement à l’essor de l’industrie belge du transport. Un artiste anonyme a sculpté une saisissante femme voilée, dont le corps épouse les marches de ce caveau familial, particulièrement volumineux.
PIRENNE HENRI (1862 - 1935)
19 / E2
Il est probablement l’historien belge le plus renommé, auteur d’une monumentale Histoire de Belgique. Inspirateur de l’école historique française Les Annales, il fut également une grande figure de la résistance non violente durant la première guerre mondiale. Il publia après guerre “Souvenirs de captivité en Allemagne”.
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NOTABLES OU INCONNUS SCHOOVAERTS, FRANÇOIS (1864 – 1921) 11 / C3 Curé de St-Gilles de 1911 jusqu’à son décès, le chanoine fut adulé par ses paroissiens qui se mobilisèrent pour lui faire ériger un somptueux mausolée, taillé dans la pierre bleue par un anonyme.
SMITS – MULLIER, FAMILLE
42 / C4
Par son ampleur, ce monument est symptomatique d’une époque où la douleur du deuil se voulait éclatante. Adrien Smits dirigea une fabrique de soieries, au n° 124 rue de l’Hôtel des Monnaies. A la mort de sa femme, il demanda au bourgmestre de pouvoir 46
élever un monument qui se voulait comme un des plus artistiques et des plus importants du cimetière. Une jeune femme est assise dans un somptueux drapé. Toute en élégance, elle porte le regard aussi loin qu’elle peut, dans une recherche d’éternité. Sur le monument, cette adresse : “A une mère. L’amour et le travail partagèrent sa vie. Son cœur fut simple et bon, généreux et charmant. Elle dort hélas ! Elle nous est ravie et ses enfants en pleurs l’appellent vainement.” Cette magnifique pleureuse est signée du sculpteur et statuaire saint-gillois, Eugène Canneel (1888 -1966), qui réalisa également des sculptures pour
l’hôtel de ville de Saint-Gilles ainsi que des monuments commémoratifs de la guerre 14-18 dont celui de WoluweSaint-Lambert et de Spontin.
STAPPERS, FAMILLE
10 / C3
Le monument est classé. Ce monument fut conçu pour une famille saint-gilloise particulièrement aisée, et indique la volonté de se distinguer. Il est formé d’un haut socle de huit colonnettes en marbre blanc, d’un entablement en pierres de taille et il est surmonté d’une coupole. L’ensemble abrite un ange sculpté dans la terre cuite, couleur rouille.
NOTABLES OU INCONNUS WISKEMANN, FAMILLE
VANDENBERGEN, ANNA 37 / C5 (1841 – 1887) Aucun renseignement n’a jamais perlé à propos de cette dame mais sa sépulture présente l’épitaphe la plus ancienne du cimetière. Par ailleurs, son sarcophage est d’une originale sobriété. Composé de roches, il est couvert d’un drap et orné d’une croix.
WALSCHAERTS, EGIDE (1820 – 1901)
motrices et mécaniques au n°62 de la place de Constantinople (aujourd’hui place des Héros). La sépulture, réalisée par le sculpteur bruxellois Ernest Salu (1909-1987), est surmontée d’un relief en marbre blanc gravé par le médailleur schaerbeekois, Pierre Theunis (1883 – 1950). Agenouillée, une jeune femme nue médite. Rarement le blanc n’aura été si éclatant. Une rue de la commune porte son nom.
WALTER
43 / C4
Cette très ancienne famille d’orfèvres, spécialisée dans l’argenterie, est implantée à Bruxelles depuis 1873. Elle est toujours active, à l’heure actuelle. Une haute stèle est prise d’assaut par un corps de femme en bronze, aux lignes élégantes. Garnie aussi d’une couronne de fleurs et d’instruments d’orfèvrerie, l’œuvre a été conçue par le sculpteur Hippolyte Le Roy, en 1909.
23 / E2
Juste un prénom sur une tombe, Walter. Ce fut sûrement un bel amour, Walter.
59 / D3
Cet ingénieur des chemins de fer belges a révolutionné la machine à vapeur. La distribution par coulisse, qui porte le nom d’Egide Walschaerts, a rapidement équipé, dès 1870, la plupart des locomotives du monde. Les ateliers Walschaerts fabriquaient des machines
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Est-ce avouable de dire qu’on aime les cimetières ? Et bien, je l’avoue, du plus loin qu’il m’en souvienne. Je les aime pour diverses raisons: Pour le silence, le calme, la quiétude, le recueillement. Pour la poésie qui émane de bien des tombes. Pour les pages de lecture et les photos, les noms et les dates. Pour l’architecture des tombes, des simples tertres ou des caveaux. Pour les histoires qui sont esquissées et celles que l’on peut imaginer. Pour les rancœurs qui sont exhalées.(«Pourquoi tant de haine» ai-je lu sur une tombe) Pour les croix penchées, maladroitement forgées, qui évoquent les gestes de qui les a créées. Pour...Pour...il n’y a pas de limites à mon amour... Les balades de Lison, http://balades-lison.blogspot.be/
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30 / F4
44 / C4
Une tombe-livre, un poème simple et touchant, une pleureuse inspirée par sa lecture accompagnent le caveau Art nouveau de la tombe d'Eugène Verheggen. A gauche, le regard éperdu, mélange d'effroi et de douleur, de la pleureuses sur la tombe de la famille Smits-Mullier
13 / C3
14 / D2
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Face au marbre et au granit qui dissimulent leurs restes, je ne recherche aucun dialogue ni ne leur pose la moindre question. C’est à moi que je parle mais je me parle d’eux. Bertrand Beyern, Mémoires d’entre-tombes (Cherche-Midi éditions)
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Conception et coordination Pierre Dejemeppe Rédaction Pierre Dejemeppe et Jean-Pierre De Staercke Photographies Roberta Saviane Graphisme Thierry De Prince / Teepee Traduction Erik Springael Editeur responsable Charles Picqué, 39 place Van Meenen, 1060 Saint-Gilles. Merci à Michel Hecq et l’équipe du cimetière : Georges Angeli, David Baligand, Alain Coomans, Georges Casellas, Jacques Menu, Tobie Moimont, Alain Norre, Lucas Van Lancker ; Catherine Avakian, Jean-Jacques Bouchez, Julien Casimir, le Centre des Archives du communisme en Belgique ; le collectif Garcia Lorca ; Anne De Cannière ; Guy Delepeleere ; José Delsaute ; Maggy De Pootere ; José Gotovitch ; Marie-France Hannon ; Hélène Philippart ; Jean Puissant ; Cecilia Vandervelde ; Lucas Van Lancker ; Amandine Verheyleweggen ; Martine Wille. Le cimetière de Saint-Gilles est situé 72 avenue du Silence à Uccle. Il est ouvert au public du lundi au vendredi de 8h00 à 16h00, le samedi, le dimanche et les jours fériés de 9h à 16h30. Téléphone : 02/376.45.49. Conservateur : Michel Hecq.
BIBLIOGRAPHIE Bernier, Fernand, Monographie de Saint-Gilles, P. Weissenbruch, Bruxelles, 1904. Dejemeppe Pierre (dir.), Saint-Gilles, huit siècles d’histoire(s), Mardaga, Bruxelles, 2016. Jaumain, Serge (dir.), Dictionnaire d’Histoire de Bruxelles, Prosopon, 2013. Kempeneers, Joseph, Histoire d’Obbrussel Saint-Gilles, éditions Publimonde, Bruxelles, 1962. Vandervelde, Cecilia, Les champs de repos de la Région bruxelloise, édition de l’auteur, Bruxelles, 1997. Verhofstadt, Tom, Les galeries funéraires, une particularité des cimetières bruxellois, in Bruxelles Patrimoines, n°008, novembre 2013, pp. 50-67.
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Le cimetière de Saint-Gilles s’étend sur onze hectares, avenue du Silence, derrière le crématorium de la Région bruxelloise. Encore trop peu connu, il mérite pourtant qu’on s’y attarde, pour la beauté du site et de ses tombes. Le cimetière révèle de nombreux monuments d’intérêt artistique ou historique, dont six sont aujourd’hui classés. Les styles les plus variés s’y côtoient, du gothique à l’Art déco en passant par l’étrusque et l’Art nouveau. Musée à ciel ouvert, les chapelles funéraires succèdent aux sculptures, les pleureuses émeuvent pour l’éternité, les portraits nous rappellent ici un militaire, là un peintre. Les animaux de compagnie ne sont pas oubliés : un beau chien, tout de bronze vêtu, veille affectueusement sur la tombe de son maître.
On y retrouve des tombes et des œuvres d’artistes importants du début du siècle dernier, ayant entre autres participé à la décoration de l’Hôtel de Ville comme Julien Dillens, Jef Lambeaux ou Eugène Canneel. Une promenade dans le cimetière permet de découvrir la tombe la plus énigmatique celle du peintre J.-J. Gailliard surmontée d’une chaise sur le dossier de laquelle est inscrit : “jrcommence” ; la plus étonnante, celle consacrée à Joseph Jacquemotte, fondateur du Parti Communiste Belge, et enfin la plus sobre, une simple pierre et un prénom : Walter. Sous la direction de Pierre Dejemeppe