Quelques réflexions rapides sur la question européenne aujourd 1

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Nul doute qu’il s’agit là d’une question difficile pour tous les États européens et leurs dirigeants, en raison notamment des limitations de souveraineté que cela implique pour les États membres. Je l’ai dit et écrit : pour les États européens, faire l’Europe politique relève quasiment de la « quadrature du cercle ». Et cela se révèle encore plus difficile en période de crise aiguë. Comme cela démontre qu’il est sans doute plus sage de suspendre le processus d’élargissement en dehors du « périmètre » de la zone de l’Europe actuelle (sans exclure des accords de coopération renforcée avec d’autres zones). . Mais la difficulté deviendra d’autant plus insurmontable que les mêmes responsables politiques « nationaux » continueront à cacher la vérité aux citoyens et à leur faire croire qu’ils ont encore, au plan étatique, le pouvoir de répondre à leurs attentes, quand déjà l’essentiel des décisions politico-économiques qui nous concernent sont prises au niveau européen 1et ceci sans véritable transparence ni véritable contrôle démocratique (le Parlement Européen n’ayant jamais qu’un pouvoir partiel de co-décision avec le Conseil des Ministres ou le Conseil Européen des chefs d’État ou de Gouvernement) ; et qu’ils continueront de même, pour se dédouaner de la responsabilité politique qui est la leur, en abusant de cette absence de transparence (impliquée quasiment par la nature interétatique de la construction européenne), à attribuer cette responsabilité à la Commission Européenne, laquelle a sans doute le pouvoir d’initiative –qu’elle exerce d’ailleurs souvent en accord avec les représentants gouvernementaux à Bruxelles- mais n’a jamais le pouvoir de décision. Si le cadre n’était pas aussi cadenassé, on pourrait espérer avoir un débat politique plus en phase avec la réalité. Et il serait alors juste de reconnaître que toutes nos difficultés ne viennent pas du « machin » européen : les dérapages budgétaires ne lui sont pas imputables et, sans la monnaie commune, comment aurions-nous subi la crise de 2008 ? Il serait de même nécessaire d’admettre que si l’Union Européenne a sérieusement besoin d’être réformée pour être démocratisée, cela tient essentiellement aux acteurs de cette construction européenne qui la refusent, accrochés qu’ils sont à leur perspective nationale pour ne pas dire nationaliste, et ne la conduisent qu’à reculons comme nous venons de le voir encore avec l’épisode du dernier accord européen destiné à endiguer la crise des finances publiques de certains États membres. Les souverainismes Il n’est pas question de nier ici les difficultés et les embûches de la construction européenne, tant dans les Pays de l’ancienne Europe de l’Ouest que dans les PECO pour lesquels, après la période de glaciation soviétique, il est difficile d’imaginer qu’ils soient prêts à abandonner une souveraineté qu’ils ont si fraîchement conquise ou reconquise, surtout quand cela se fait au profit ceux des États les plus importants (cf. le « couple franco-allemand). Mais est-il inimaginable que la République française cesse un jour de vouloir donner des leçons à la Planète entière, sous prétexte d’universalisme et de sa culture et des fondements de son système politique, au point de refuser en interne ce qu’elle voudrait imposer aux autres ? Est-il 1

Pour illustrer ce propos, il suffit de citer un chiffre sur lequel la plupart des spécialistes de la question sont d’accord : 80% des règles juridiques qui voient le jour chaque année en France (comme dans tous les autres États européens) et qui s’imposent aux citoyens et acteurs économiques sont d’origine européenne aujourd’hui. Certes, il conviendrait de nuancer et de distinguer entre les règles d’origine européenne directe, celles qui découlent des « règlements » européens applicables sans aucune modulation de la part des États membres, et celles découlant des « directives » qui sont transposées en droit interne avec une certaine latitude pour le législateur national ; il faudrait aussi distinguer entre les règles posées par l’Union Européenne et celle qui découlent de la « Convention Européenne des Droits de l’Homme » adoptée dans le cadre du Conseil de l’Europe. Mais tout ceci fait in fine beaucoup de droit « européen » et donc de décisions politiques qui échappent à nos "principaux" responsables politiques démocratiquement élus. Peuvent-ils l’avouer sans se remettre en cause ?

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