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Saint-Martin
UN PROJET D’ÉTUDE DES REQUINS-TIGRES AU LARGE DE L’ÎLE
Le projet One Shark vise à étudier la population de requins-tigres autour de Saint-Martin, afin de protéger à la fois les usagers de la mer et l’espèce. Les résultats de ces recherches pourront, à l’avenir, améliorer la gestion des interactions humain-requin.
INTERVIEW
HADRIEN BIDENBACH, DIRECTEUR DU GIP « ONE SHARK » À SAINT-MARTIN

• Comment a débuté le projet One Shark ?
- Il est né à la suite de deux morsures consécutives de requin-tigre fin 2020 à Saint-Martin [une baigneuse décédée à la Baie Orientale] puis en janvier 2021 à Saint-Kitts-et-Nevis, des îles à près de 80 kilomètres. Dans ce contexte, les instances de gouvernance locale ont demandé la création d’un GIP. Créé en 2023, il se compose de la préfecture, de l’AGRNSM, de l’ATE de Saint-Barth, de l’Ordre des médecins, des associations Métimer et Swali Fisherman. À partir des recherches en cours, je prépare une thèse en écologie comportementale sur le requin-tigre dans la Caraïbe.

ONE SHARK, UN PROJET AU SERVICE DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE ET DE LA POPULATION
• Quelle est l’idée directrice de One Shark ?
- Les analyses réalisées après les deux morsures de 2020 ont montré qu’elles provenaient du même requin. Cela soutient l’hypothèse du Dr Éric Clua, spécialiste des requins et directeur du conseil scienti fi que du GIP, selon lequel le risque de morsure ne serait pas lié au nombre de requins évoluant à proximité, mais à la présence d’un ou plusieurs « individus problématiques », suf fi samment téméraires pour essayer de prédater l’homme. Ma thèse, coencadrée par le Dr Clua, doit tester cette hypothèse. Ces recherches sont précieuses car elles permettront d’améliorer la gestion du risque requin et notamment de sécuriser le tourisme balnéaire.
• Quelles sont les actions mises en place ?
- Une partie du travail se fait sur le terrain : les requins sont peu à peu identifiés, afin de créer un protocole de gestion et diminuer, à terme, le risque de morsures. À plus grande échelle, ma thèse porte sur la compréhension de la population locale de requins-tigres, via une étude génétique. J’évalue aussi le nombre d’individus et les trajectoires suivies. Le GIP tient à communiquer sur les requins. Les usagers de la mer et le personnel médical sont formés à la prévention des morsures, tandis que les publics scolaire et politique sont sensibilisés pour ajuster leur perception des requins.
• Comment procédez-vous sur le terrain ?
- Nous effectuons des captures non létales, à l’aide d’hameçons conçus pour ne pas blesser le requin lorsqu’il est relâché. Une fois placé sur le dos, le requin s’endort, on appelle ça l’immobilité tonique. Nous le rendons reconnaissable par photo-identification, notamment grâce à une petite encoche faite sur l’aileron, qui sert par ailleurs pour le prélèvement d’ADN. Nous procédons aussi à la pose d’un tag visuel unique, fonctionnant comme un code-barre. Les branchies, propres à chaque individu chez les requins-tigres, sont prises en photo. Avant de relâcher l’animal, s’il est adulte on l’équipe d’une balise pour connaître ses futurs déplacements. Ces balises GPS sont programmées pour se détacher et remonter à la surface au bout de six mois.

• Comment voyez-vous la suite du projet ?
- Les activités du GIP One Shark sont récentes. Les objectifs sont de stabiliser le projet, de développer la formation et la sensibilisation du public sur le requintigre, mais aussi de poursuivre la collecte de données.
Si à moyen terme, nous avons l’ambition de réussir à fédérer la Caraïbe autour de One Shark, l’objectif à long terme serait de pouvoir exporter la stratégie issue du projet dans les autres bassins de l’outre-mer français notamment. Voire de créer une base de données commune pour les différentes régions du globe concernées par les mêmes problématiques.
ONE SHARK EN CHIFFRES
Depuis le début de cette étude principalement financée par l’État, 124 requins-tigres ont été identifiés et balisés, ce qui permet d’améliorer progressivement le suivi de cette population et d’en affiner la compréhension. En parallèle, une quinzaine d’interventions en milieu scolaire ont eu lieu au cours des six derniers mois, afin de démystifier les requins auprès des jeunes.
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