Armance

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samment riches ; comme leur principal but est l’argent, ils sont certains de le trouver et sans procès. – Nous marchons vers un temps, répliquait Mme de Malivert, où la faveur de la Cour, à moins qu’on ne veuille l’acheter par des soins personnels de tous les instants, ne sera qu’un objet secondaire pour un homme de grande naissance, Pair de France, et fort riche. Voyez notre ami milord N*** ; son immense crédit dans son pays provient de ce qu’il nomme onze membres de la chambre des communes. Du reste, il ne voit jamais le roi. Telle fut aussi la réponse de Mme de Malivert aux objections de son frère dont l’opposition fut beaucoup plus vive. Furieux de la scène de la veille et comptant bien ne pas laisser échapper l’occasion de feindre une grande colère, il voulait, lorsqu’il se laisserait apaiser, placer son neveu sous le poids d’une reconnaissance éternelle. Il eût pardonné à Octave tout seul, car enfin il fallait ou pardonner ou renoncer aux rêves de fortune qui l’occupaient exclusivement depuis un an. À l’égard de la scène de la nuit, sa vanité aurait eu pour consolation auprès de ses intimes, la folie bien reconnue d’Octave qui jetait par les fenêtres les laquais de sa mère. Mais l’idée d’Armance toute-puissante sur le cœur d’un mari qui l’aimait à la folie décida M. de Soubirane à déclarer que de sa vie il ne reparaîtrait à Andilly. On était fort heureux à Andilly, on le prit au mot en quelque sorte, et après lui avoir fait toutes sortes d’excuses et d’avances, on l’oublia. Depuis qu’il s’était vu fortifié par l’arrivée du chevalier de Bonnivet qui le fournissait de bonnes raisons, et dans l’occasion, de phrases toutes faites, son éloignement pour Mlle de Zohiloff était devenu de la haine. Il ne lui pardonnait pas ses allusions à

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