Planète Paix 541

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MONDIALISER LA PAIX Afghanistan

L’éducation, une source de liberté Classe du lycée Atèfa-é-Chahid

Nasrine Nabiyar, ancienne enseignante de français au lycée de Kaboul, est réfugiée en France depuis 1990. Elle a fondé en 1998 l’association Malalay-Afghanistan, association de bénévoles qui milite en faveur de l’éducation et de la formation en Afghanistan. Elle est convaincue qu’avec la solidarité et le dialogue, la paix est possible.

EN SAVOIR PLUS « Malalay ». Siège social à la maison de quartier de Villejean, 2, rue de Bourgogne à Rennes. Tél : 02 99 14 59 35. Pour vos dons : CCP 526900M Rennes

uels sont les objectifs de l’association Malalay-Afghanistan ? Dans quel contexte a-t- elle été créée ? Le problème de base en Afghanistan c’est le manque d’éducation. En travaillant pour y remédier, on peut changer les mentalités. L’avenir de l’Afghanistan est lié à l’éducation. Notre association a été fondée par moi-même et des amies rennaises en réaction à la fermeture des écoles de filles. Ensuite se sont jointes une douzaine de vannetaises. Malalay a pour but de lutter contre l’illettrisme des femmes et des enfants. En effet, leur autonomie et leur capacité d’intervention dans la société sont directement liées à l’alphabétisation. Nos phrases emblématiques sont « étudiez depuis le berceau jusqu’au tombeau » et « celui dans lequel demeure l’essence du savoir, domine tout ce qu’il entreprend »

Pouvez-vous faire un bilan de vos principales réalisations matérielles et éducatives ? Commentavez-vous obtenu les moyens nécessaires ? Notre action se situe à Estalef au Nord-est de Kaboul. Cette ville de 12000 habitants est ma ville natale a été détruite à 99% en 2001. Au début (de 1998 à 2002), nous avons conduit notre action depuis Peshawar en venant en aide aux réfugiés et par la prise en charge de deux enseignantes de l’école « Mahréfat ». En 2002, nous nous sommes fixé l’objectif de construire une école. « Atefa-é-Chahid » pour jeunes filles est inaugurée en mars 2003 par notre association. Une extension de l’école a été réalisée en 2005 avec forage d’un puits, achat d’un groupe électrogène et d’une pompe à eau. Aujourd’hui, l’école comprend 18 salles de classe, deux bureaux et une salle polyvalente. Elle accueille, chaque jour, 530 élèves, 16 enseignantes et 4 employées de service et d’administration. Depuis 2003, le personnel est pris en charge par le ministère de l’Éducation afghan. A force d’actions militantes, nous avons pu réaliser ce projet en partenariat avec l’ambassade de France en Afghanistan et les associations Eschân, qui regroupent les habitants d’Estalef résidant en Europe, l’Association Cadillacaise d’Echanges Interculturels Franco Afghans, l’association Intercommunalité Solidarité Afghane, nos donateurs et nos adhérents.

Quels sont vos besoins actuels mais aussi vos difficultés ? Nous avons déjà mis en place des ateliers professionnels (couture et broderie) et nous souhaitons en initier de nouveaux (informatique en particulier). Actuellement, nous avons un projet de construction d’un centre de formation professionnelle à Estalef. Nous recherchons des fonds pour pouvoir réaliser ce projet vital dans cette ville.

Vous allez régulièrement à Estalef ? Ne craignezvous pas pour votre sécurité ? L’école a-t-elle subi des attaques ou des destructions ? Nous n’avons jamais eu de problème de sécurité. Les habitants ont aussi contribué à l’achat et à l’aménagement, ce qui facilite bien des choses. Mais c’est clair que le pays a beaucoup de problèmes, politiques, économiques, sociaux. En Afghanistan, partout, il y a des risques comme dans le monde entier. Mais cela ne m’empêche pas de me rendre sur place régulièrement.

Quelles réflexions tirez-vous de cette expérience pour ce qui concerne l’avenir de l’Afghanistan ? A titre personnel, l’Afghanistan, que j’ai du fuir en 1990, m’a donné beaucoup d’opportunités. Actuellement, je suis entre deux pays que j’aime beaucoup. Nous avons été capables dans une logique citoyenne et associative de réaliser ce projet à force de persévérance. Si les aides des États étaient beaucoup plus importantes pour ce qui concerne les besoins de la population afghane dans les domaines éducatifs, sociaux et culturels nous pourrions réaliser beaucoup de projets similaires. En alliant la solidarité ici, avec un dialogue constructif avec la population afghane là bas, nous apporterions une contribution essentielle à la construction d’un avenir de paix pour ce pays meurtri par la guerre. Les forces pour cela existent en Afghanistan. Le peuple afghan a besoin de nous.

Propos recueillis par Roland Nivet

N° 541 - Avril 2009 - Planète PAIX

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