Néant Progressif #5

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* Tuu-dudum * Chers lecteurs, bonsoir. Nous vous informons que notre bibliothèque va bientôt fermer ses portes. Nous vous remercions d'être venus chez Néant Progressif (TM*) et espérons vous revoir très bientôt. Veuillez à présent rejoindre la sortie et partir d'ici, ou une bande de dangereux petits singes viendra vous dévorer les mollets. * Tuu-dudum *

Eh oui, ami lecteur, tu n'as pas vu la journée passer. Tu as passé ton temps à lire les précédents numéros de ce merveilleux webzine qu'est Néant Progressif, et voilà déjà qu'il est 22 heures. Tu vas devoir rentrer chez toi en pleine nuit, et cette perspective ne t'enchante pas beaucoup, hein, d'autant qu'il faut passer par tout un tas de ruelles sombres. Et en plus, ça n'est même pas la période de la Pleine Lune ; ça, c'était dans le Néant Progressif troisième du nom… Tu en veux à l'humanité, n'est-ce-pas ? Tu lui en veux d'avoir pu créer, dans son immense génie, des engins tels que la fusée ou le ramasse-crottes, et de n'avoir pas pensé à éclairer les rues la nuit ? Tu la détestes, cette humanité qui joue la grosse tête lorsqu'on parle de physique nucléaire et qui te plonge dans le noir quand tu rentres tard ? Arrête-toi donc dans ta marche, et imagine un instant : on pourrait illuminer les villes assez facilement, en fait. En prenant des lucioles qu'on enfermerait dans des bocaux qu'on suspendrait dans la rue… Mais un éclair te frappe soudain : on pourrait carrément partir sur l'idée de l'ampoule, là, l'idée d'un certain… Edison, c'est ça ? On accrocherait une ampoule sur un bâton (en métal, hein, c'est plus classe et ça supporte mieux le temps que le bois), on la brancherait à un générateur de courant auquel on dirait de s'allumer la nuit. Et ça s'appellerait… l'illumineur ! Non, le RÉVERBÈRE, ça sonne mieux comme nom !! Ça permettrait de pouvoir rentrer chez soi à 23 heures, minuit voire même 3 heures du matin, sans devoir courir parce qu'on a peur de rencontrer des gens louches ! Voilà, ça, ça serait tout simplement génial. Eh bien sache, cher lecteur, que toute l'équipe du Néant Progressif s'est penchée sur cette invention délirante et magnifique qu'est le réverbère. Elle s'en est même servie pour éclairer ses bandes dessinées les plus récentes, ainsi que ses nouveaux textes et ses illustrations toutes fraîches, pour qu'on puisse les admirer à toute heure. On va voir ensemble ce que ça pourrait donner, un monde avec des réverbères. Prêt à tenter l'aventure et à partir explorer ça avec nous ? Ah, au fait, prends une lampe torche avec toi, ça peut être utile en cas de panne d'électricité. On ne sait jamais, hein.

*TM : Thon Mayonnaise


Sommaire (clique sur le pseudo de quelqu'un pour accéder à sa fiche sur le site)

04 - L'objet oublié - Dessins et scénario par Kue 09 - Illustration - Par HeskHwis 10 - La fille Réverbère - Dessins et scénario par Ayaluna 20 - Réunion syndicale! - Par Mousqueton 22 - Grantz ép. 2 - Dessins et scénario par Shimi 31 - Contes du Néant: Une dernière chance - Texte et dessin par Mr Seta 34 - Undead Inc. 5 - Dessins par Goku, scénario par Mrs Nobody 44 - Illustration - Par Mikhlay 45 - Le Seta et L'Happosaï - Texte et dessin Mr Seta 46 - F.U.T.N. ép. 3 - Dessins et scénario par PlM et Misté 51 - Les plants de la ville - Par Zekovski 52 - Réverbère - Dessins et scénario par Sushi 60 - Papertoy: Poisson Réverbère - Par Mr Poulet 64 - Histoire du lampadaire ! - Par Siegfried 65 - Un vrai de vrai - Dessins et scénario par Misté 73 - Réverbères - Par Mr Frog 75 - Éclaire toi - Dessins et scénario par Cyfe

Informations diverses : - La couverture a été illustrée par Ayaluna - L'édito a été rédigé par HeskHwis - Le terme Néant Progressif a été trouvé par Mat-el-tea - Le logo original a été créé par LightChaol



















*Vives acclamations* Camarades ! L'heure est à l'action ! Si nous sommes tous réunis aujourd'hui, c'est pour dénoncer la concurrence déloyale des réverbères électriques ! Est-ce que tous ces entrepreneurs réalisent qu'ils mettent en péril la corporation des allumeurs pyromanciens de Paris ! *Applaudissements* "Oui, l'électricité est plus sûre", "oui, la magie, c'est vieux jeu", ASSEZ ! *Acclamations* Je propose donc un blocus devant la plupart des métalleries de la capitale, et un grand défilé collectif...Ben, en fait comme d'habitude. *Acclamations* Cela dit ! J'aimerais que cette fois personne ne grille les forces de l'ordre sur place ET je ne veux surtout pas que se reproduise *hem* cet incident...avec M. le préfet. Est-ce bien clair ? *Silence embarrassé* Bien. Aussi, je veux vous informer de notre présence -vivement demandée- sur le chantier de la grande tour de mon ami l'ingénieur Gustave Eiffel. En effet, beaucoup de bras seront nécessaires, et il faudra souder ! *Marmonnements* Oui, eh bien, "Faute de grives on mange des merles", il n'y a pas de petits profits. Surtout en ce moment, surtout DEPUIS QUE LES REVERBERES ELECTRIQUES NOUS VOLENT NOTRE PAIN ! "DEHORS LES LUMIERES ARTIFICIELLES !" Avec moi ! *DEHORS LES LUMIERES ARTIFICIELLES !* Bien ! Bien. De toute manière, l'électricité est balbutiante, bientôt obsolète je n'en doute pas, et on refera appel à nous, comme à chaque fois…Comme à chaque fois. Une énergie basée sur la technologie, c’est ridicule ! Des moyens astronomiques pour la produire ! Peut-on éteindre l’électricité avec de l’eau, ou en l’étouffant ? Non ! *NON !* Bien dit ! C’est sur ces belles paroles que va se clore notre réunion. Il est temps pour nous de chanter l'Internationale ! Haut les cœurs ! *C’est la luuuuutte…* ---Réunion syndicale des Allumeurs de réverbères pyromanciens de Paris, 1887---











« Ah, bonjour à toi, très cher lecteur de « Néant Progressif ». Si tu lis ces lignes, c'est que tu as dû apprécier à sa juste valeur le conte de la dernière fois et que tu souhaites …........ Hein? Comment ça c'est la première fois que tu viens ici? Tu n'as pas lu le dernier numéro de Néant Progressif? Si. Ben comment cela peut-être possible que tu ne sois pas …...Ah? Tu as tout vu sauf le conte …... Bon oublions tous cela et viens donc t'installer avec moi au coin de la cheminée. Comment ça cela ne sert à rien et qu'on est en été? Écoute-moi bien petit, c'est chez moi ici et j'ai tous les droits. Donc tu pose ta lune sur ce fauteuil et tu écoute attentivement et avec le sérieux d'un élève du « Cour Primaire » ce récit qui s'intitule: »

-Une Dernière ChanceJ'ouvre mes yeux, avec une grande difficulté, comme si je me réveillais d'un long sommeil. J'essaye de me lever tant bien que mal et je regarde autour de moi. L'obscurité s'étend à perte de vue. Je ne sais pas où je me trouve, ni pourquoi. J'essaye de crier, pour signaler ma présence. Aucune réponse, à part le silence qui règne dans cet endroit sombre. Je me mets à avancer, pour voir si je peux trouver une sortie un peu plus loin, ou bien quelqu'un qui pourrait m'expliquer ce qui se passe. Après une longue marche qui m'a semblé être une éternité, j'aperçois une lumière. A mesure que je m'approche, je me rends compte que la source de cette lumière est en fait un réverbère, au pied duquel se trouve un petit bassin. En me penchant un peu, je peux voir qu'au fond de ce bassin se trouve quelque chose qui brille. Malgré la lumière qui émane du réverbère, je ne peux pas vraiment savoir ce que peut être cet objet. Au moment où j'allais plonger ma main pour essayer de le pendre, je me rends compte qu'une fille me fixe en face de moi. A cet instant, je me suis demandé comment j'ai fait pour ne pas la voir plus tôt. Peut-être qu'elle est perdue comme moi. Avant que j'ai pu lui demander quoi que ce soit, elle se met à regarder tristement le fond du bassin. Sans même y réfléchir à deux fois, je plonge la main pour récupérer l'objet qui repose au fond de l'eau. Soudain, alors que j'allais l'attraper, je sens une vive douleur au bras. Sans y prêter plus d'attention que ça, je prends l'objet et je remonte ma main. Mais au moment où je la sors de l'eau, je me rends compte que des sortes de sangsues se sont attachées à mon bras. En essayant d'oublier la douleur, j'arrache les bêtes une par une. Une fois que j'ai réussi tant bien que mal à m'en débarrasser, je tends la chose que j'ai ramassé à la fille. Mais étrangement, elle a disparu. Je regarde ce que j'ai récupéré. Cela ressemble à une clé. Tout en me demandant où est-ce que j'ai bien pu tomber, j'aperçois une nouvelle lumière au loin. Je mets la clé dans ma poche et je pars en direction de cette nouvelle lumière. En arrivant sur les lieux, je m'aperçois que c'est un autre réverbère qui l'illumine. Un banc est planté à sa base. Vu que je ne sais pas du tout depuis combien de temps je marche, je décide de m'asseoir pour me reposer un peu. Cet endroit est quand même très étrange. Comment j'ai pu atterrir ici? Pourquoi fait-il aussi sombre et pourquoi la seule source de lumière se trouve être des réverbères? Et aussi, qui peut être cette fille que j'ai vu à côté du bassin? Surtout qu'elle me dit quelque chose, mais je ne sais pas qui cela pourrait être. Et cette clé, à quoi peut-elle bien servir? En relevant la tête, j'aperçois la fille qui avance dans les ténèbres. Je décide alors de la suivre.


Sans surprise, je la perds de vue. Tout en continuant, je cherche désespérément une nouvelle lumière. Mais rien, à part le son de mes pas et de ma respiration. Mon bras me fait encore mal après l'épisode des sangsues. Je déchire une manche de ma veste pour essuyer le sang qui a coulé depuis. Je continue, inlassablement, à marcher, toujours marcher. Je ne sais même pas où je vais, mais je continue. Alors que je commençe à me demander si je vais un jour sortir de là, je vois au loin une porte, éclairée par l'un de ces réverbères. Je m'en approche, en pensant que cela me permettrait de sortir de cet endroit qui commence sincèrement à me foutre les boules. Mais en voulant tourner la poignée pour l'ouvrir, la porte ne bouge pas d'un pouce. J'essaye même la clé trouvée dans le bassin, mais rien n'y fait. Cette dernière tourne dans le vide. Démoralisé par cela, je m'assois par terre, dos contre la porte. Qu'ai-je pu faire pour mériter une telle épreuve? Alors que je m'apitoie sur mon sort, la mystérieuse fille apparait devant moi. Avant même que je puisse dire un seul mot, elle me tend sa main. Je comprends ce qu'elle souhaite que je lui donne. Je sors la clé de ma poche et la pose dans la main de la fillette. Elle sourit. Elle a l'air heureuse, comme si elle avait retrouvé quelque chose qu'elle avait perdu depuis longtemps. Après m'avoir remercié de la tête, elle repart, me laissant de nouveau seul. Un long moment se passe avant que je vois revenir la fille. Mais elle ne revient pas seule. Elle est accompagnée d'une personne, dont le visage est caché par une capuche. La fille s'approche de moi, tout en me tendant une clé. Alors que je croyais qu'elle voulait me rendre celle que je lui avais rendue, la clé qu'elle me donne porte l'inscription « Retour » . Puis, elle me montre du doigt la porte. J'insère la clé dans la serrure et à ma grande surprise elle tourne parfaitement. La porte s'ouvre sur une pièce débordant d'une lumière très vive. Avant que je m'y engouffre, la fille me saute dessus pour me faire un câlin. Elle pleure. Elle rejoint après le mystérieux encapuchonné. Au moment où je passe la porte, j'entends la fille me dire « Je t'aime, Papa » J'ouvre les yeux. J'ai mal partout. J'essaye de regarder autour de moi. J' aperçois des murs blancs. Une infirmière se tient sur ma gauche. Quand elle me vois essayer de me relever, elle me demande de rester allongé. Elle me dit aussi que cela fait plusieurs jours que je suis dans un coma à la suite d'un accident de la route. D'après ce que l'infirmière me dit, un conducteur m'a coupé la priorité et m'est rentré dedans. Je regarde de nouveau dans la pièce où je suis. Je suis le seul patient. En repensant aux paroles de la jeune fille, je demande à l' infirmière si j'étais seul dans la voiture. Elle prend un air attristé. Je commence à comprendre qui était la fille que j'ai vu quand j'errais dans le noir. La tristesse m'envahit et je me mets à pleurer de tout mon cœur. Mais à la tristesse se mêle une once de bonheur. Plusieurs semaines passent avant que je sois tout à fait rétabli, autant physiquement que moralement. Je me rends au cimetière où ma fille fut enterrée lors de mon séjour à l'hôpital. Je dépose des fleurs sur sa tombe et j'en profite pour m'y recueillir. Même si je ne sais pas à qui je dois ce dernier moment que j'ai pu passer avec elle, je le remercie silencieusement. Je me sens juste un peu con de ne pas avoir reconnu la chair de ma chair. Ce qui me console un peu, c'est qu'elle ne sera pas seule là-bas, au contraire de moi. Mais un jour, je rejoindrais les deux personnes que j'aime le plus au monde. D'ici que ce moment arrive, je vais essayer de vivre le jour au jour, en repensant aux jours heureux où l'on était tous les trois.


« Une bien belle histoire, je dois l'avouer. Et elle prouve que même dans les situations les plus noires et tristes, il existe toujours une lumière pour nous guider et nous réchauffer. J'espère que cette histoire t'a ....Quoi? Une larme? Où ça? Qui coule le long de mon visage? Ah, HAHAHAHAHA. C'est juste une poussière que j'ai dans l'œil. Comment ça c'est pas crédible? Et pourquoi tu rigole? Ce n'est pas parce que je suis vieux que je ne peux pas être sensible. Tu n'as jamais perdu une personne qui t'es chère ou quoi? Pfff les jeunes de nos jours, plus aucune sensibilité. Néanmoins, notre séance d'aujourd'hui est finie. J'attend avec impatience notre prochaine rencontre avec un nouveau récit. D'ici là, profitez bien de l'instant présent avec vos proches »













-Le Seta et L'Happosaï-

Maître Happosaï, sur un réverbère perché, Tenait en sa main une petite culotte. Maître Seta, par la vue alléché, Lui tint à peu près cette parlote: "Hé ! salut, Monsieur du réverbère. Que vous êtes vifs ! que vous me semblez pépère ! Sans mentir, si votre perversité Se rapporte à votre petite calvicité, Vous êtes le maître pervers de ce hameaux" A ces paroles l'Happosaï n'en cru pas un mot ; Et pour montrer son étonnement, Il ouvre sa main, laissant tomber le sous-vêtement. Le Seta s'en empara et dit : "Mon bon vieux, Apprenez que tout pervers Vit aux dépens de celui qui est plus pervers: Cette leçon vaut bien une petite culotte, sans aucun doute. " L'Happosaï, mécontent et confus, Grommela , mais un peu tard, qu'on ne l'y en piquerait plus.







Les plants de la ville Je m'appelle Charles Robin. Je suis né en 1623 dans la banlieue parisienne. Quand j'étais petit j'adorais modeler les objets et les faire changer. Parfois pour les détourner de leur utilité première ou alors simplement dans un but esthétique ; l'important était que je puisse leur faire prendre une tournure différente, quelle qu'elle fût. Mon père tenait une boutique de fleurs près du cimetière ; l'endroit était plein des couleurs de tulipes, lavandes, parfois tournesols, et bien sûr, chrysanthèmes. Quelques fougères et dionées qui débordaient de leur pot donnaient également un aspect sauvage et exotique à la petite boutique. Baigné dans toute cette verdure, j'avais pris le temps d'appliquer ma manie à plusieurs spécimens. Plusieurs fois je rempotais des arbres nains et les attachais pour leur donner diverses formes, je divisais les tiges des hortensias pour les faire pousser dans deux milieux à la fois et leur donner un nouveau schéma de couleurs, et enfin j'appris que je pouvais faire des sélections parmi mes plants pour conserver un même effet d'un génération à l'autre. Ainsi, lorsque je dus reprendre la boutique, avec l'aide de ma femme Camille, j'avais déjà créé plusieurs nouvelles variétés aux propriétés amusantes. Des pensées dont la couleur change avec la saison, des boutons d'or qui pouvaient pousser en cercle pour former une belle couronne, des arums à l'odeur de violette et, juste pour la beauté du jeu de mots, des tournesols qui tournent vers le sol. Un jour j'ai même réussi à créer une plante dont la tige était en métal. Les affaires allaient plutôt bien et il m'arrivait parfois d'écouler quelques unes de mes « bizarreries ». La vie continua ainsi jusqu'au jour où une lanterne de l'éclairage public, qui à l'époque était suspendue à notre façade par une corde, vint par accident à enflammer l'établissement. Mon épouse et moi sommes tous deux décédés, étouffés dans la nuit. La quasi-intégralité du magasin a été perdue. Mais je ne sais comment, parmi toutes ces cendres, l'une de mes petites anomalies vivantes avait survécu et s'était perdue dans la nature. La vie est parfois impressionnante par sa volonté et son obstination à s'accrocher, à vouloir vivre tout simplement. Cette petite chose avait réussi à survivre dans une ville tout à fait hostile, à s'y adapter et à loger dans ses rues. Elle a sans doute su réveiller des gènes gardés éteints de mes précédentes expériences et trouver son chemin. Je crois que ce devait être celle sur laquelle je faisais des essais pour l'agriculture. Elle était sensée pousser en ligne et à intervalles réguliers, chaque plant relié par une racine. Son interaction avec la rue l'a obligée à pousser plus haut pour trouver la lumière, et l'hostilité du sol à changer les gaz qu'elle devait absorber le jour et émettre la nuit. Et enfin elle a su se créer une tige assez solide pour résister aux chocs que peuvent occasionner l'important trafic des rues. Aujourd'hui elle est parvenue à se développer sur presque toute la surface de la Terre. Avec le temps, elle a su évoluer et changer avec les époques, ses formes sont devenues de plus en plus différentes et variées. Le gaz que les gens avaient pris l'habitude d'allumer la nuit s'est remplacé par une sorte de bioluminescence. Je m'appelle Charles Robin, et si personne ne se souvient de moi, mon inconsciente invention a pu laisser une trace de mon existence. J'espère que par cette histoire j'aurais levé un voile d'obscurité.














Réverbère : histoire du lampadaire !

Une histoire très peu commune que cet élément que l'on trouve si commun. Quelle ville, quel village n'a pas, aujourd'hui, ses réverbères ? Ils sont partout et l'on trouve même des réverbères au cœur du Sahara et au Groenland. Mais pourquoi avoir créé le réverbère ? Et surtout QUI l'a créé ? A ces questions, nous sommes actuellement en mesure de donner une réponse. En effet, il y a plusieurs milliers d'années, alors que l'homo sapiens collait de sévères mandales à l'homme de Néandertal pour un obscur problème de colocation en Europe, une lumière s'est faite dans la nuit. Tout le monde sait que l'homme maîtrisait alors le feu depuis déjà longtemps. Il maîtrisait d'ailleurs également la frite, mais la pomme de terre n'ayant pas encore été découverte, on l'oublia rapidement d'autant plus que les frites en pierre occasionnaient de terribles maux d'estomac. Pour en revenir au feu, il faut savoir qu'à cette époque c'était un bien extrêmement précieux. Pas qu'allumer un feu ne soit pas possible sans un doctorat, mais il fallait diverses manœuvres pour réussir à en allumer un et dans les pires conditions possibles, d'autant plus que dès qu'un feu était allumé, il pleuvait. Cette constatation est on ne peut plus actuelle et les campeurs, de même que les amateurs de barbecues, savent de quoi je parle car une fois allumé, une pluie soudaine et froide réduit à néant le travail de plusieurs heures. Si aujourd'hui nous avons encore du mal à allumer un feu malgré toute notre technologie moderne, qu'est-ce que cela devait être à l'époque ! Les mains calleuses de nos lointains ancêtres, si elles pouvaient parler, nous raconteraient leurs heures à taper des cailloux les uns sur les autres pour faire apparaître une étincelle, ou à frotter deux bâtons l'un contre l'autre pour les échauffer tandis qu'elles se recouvraient d'ampoules et que de nouvelles ampoules apparaissaient sous leurs ampoules ! Et tout ça pour qu'une pluie sournoise réduise tant d'efforts à néant. On se souvient de Gompk, homme de la Préhistoire qui réussi à allumer un feu après cinq heures de travail acharné, feu qui fut immédiatement éteint par une averse. Le pauvre fut tellement bouleversé qu'il confondit sa caverne avec celle d'un tigre à dent de sabre. On ne sait pas par contre si le tigre avait eu besoin de moutarde. Mais quel bonheur quand le feu brûlait enfin : de la chaleur en hiver, un moyen efficace d'éloigner les bêtes féroces et de quoi cuire la viande et les cookies. Tout ça pour dire que le feu était, à l'époque, un bien précieux et par là même, très convoité. Qu'une tribu arrive à faire un feu et à le conserver, et immédiatement les signaux de fumée sont comme des signaux aux autres tribus voisines pour aller chercher, voler et piquer les cookies qui auront été cuit entre-temps. Vous pouvez le constater, la vie, à l'époque, ne faisait pas de cadeaux. Pour parer à ce genre de vols, les tribus qui ont réussi à faire un feu avaient, depuis longtemps, réussi à placer leurs cookies hors d'atteinte dans des paniers en haut des arbres. Malheureusement, il n'en va pas de même pour le feu. Ils ont bien tenté de le mettre dans des paniers en haut des arbres, mais le résultat n'était pas celui escompté : mains brûlées par le feu, panier brûlé, feu qui prend dans la forêt et qui ravage des centaines d'hectares mais surtout les cookies en ressortaient entièrement brûlés, durs comme de la pierre et avec un goût atroce de charbon. Le problème restait entier : comment mettre le feu à l'abri des convoitises ? La solution fut apportée par Herberk de la tribu des Béchtar. Alors qu'il mangeait nonchalamment un cookies qu'il avait piqué dans la réserve, une autre tribu jalouse du feu que sa tribu venait d'allumer il y avait quinze seconde, débarqua avec l'intention de le voler. La bataille fit rage et le feu vola de main en main avant de rester accroché à une arrête rocheuse quelques temps puis de retomber et de s'éteindre. La tribu adverse, déçue de ne pas avoir récupéré le feu, piqua néanmoins les cookies avant de disparaître. Herberk avait remarqué, durant la bataille, que la roche sur laquelle le feu était


resté coincé quelque seconde n'avait pas brûlé. Une idée germa dans son esprit : au lieu de tenter de cacher le feu dans des arbres en bois, il fallait le mettre hors de porté des autres tribus en le mettant hors de porté dans un arbre en pierre. Il se mit alors à tailler dans le rocher une longue tige en pierre surmontée d'un plateau et, après plusieurs heures... jours... mois... et plusieurs coups de marteau sur les mains, il arriva à terminer sa création. Ainsi, le feu fut placé (rapidement) sur l'arbre de pierre, hors de porté des tribus jalouses. La nuit qui suivit fut cependant une révélation plus grande encore car le feu, placé à cette hauteur, éclairait beaucoup mieux ! Cette découverte n'arrivait pas à la hauteur de celle des cookies et de l'omelette aux champignons, inventés dans la même période, mais elle avait son importance : elle permettait de dessiner des BD plus longtemps en dehors des grottes, de nuit. Le succès fut immédiat, chaque tribu voulait son arbre de pierre et bientôt Herberk croula sous les commandes. En effet, on le retrouvera un an plus tard enseveli sous les arbres de pierre qu'il avait lui-même taillé. La forme de l'arbre de pierre a varié selon les siècle, de même que la matière dans laquelle il est fait. Cependant, il y a quelque chose qui n'a pas changé, c'est le nom. En fait, à travers les siècles, le nom s'est conservé depuis le nom que Herberk lui-même a donné à son invention alors qu'il étouffait sous plusieurs tonnes de pierre. Un des assistants, triste, avait dit : « Mourir sous des arbres, c'était le rêve d'Herberk ». Les derniers mots étaient restés dans la mémoire collectives à partir ce moment. De « rêve d'Herberk », le mot a changé pour devenir « rêve d'Herberis », les grecs, qui se disaient plus intelligents, l'ont changé en « rêveHerberos », les romains en « revereberum » avant que cela finisse par donner notre « réverbère ». Au Moyen-Age, un moine copiste avait bien tenté de changer son nom en « faiseur de jour durant la nuit qui nous aide à retrouver notre chemin un soir de cuite violente », mais n'arrivant pas à mettre toute la ligne sur sa page, il se suicida en mangeant un cookie frelaté. Le nom de réverbère était dès lors attaché à jamais à la génial invention d'Herberk.









Réverbères Un titre somme toute simple et inoffensif, n'est-il pas, chers lecteurs ? Les réverbères, ces longs tubes de métal froid qui réchauffent quelque peu notre esprit par les nuits les plus noires, en déversant avec plus ou moins de délicatesse leur lumière blafarde le long de notre route. Ils sont les balises salvatrices de nos nuits qui nous guident vers un chez-nous sécuritaire. Depuis plus de deux cents années, on vit avec eux, se sentant plus protégés dès que l'on baigne dans leur lumière. Et si l'on se trompait ? L'erreur n'est-elle pas l'apanage de l'Homme ? À dire vrai, la naïveté aussi lui sied à merveille. Si ces lampadaires qui nous dédaignent de toute leur hauteur ne nous guidaient pas vers le salut, mais plutôt vers l'inverse ? Leur lumière est bien plus sombre qu'elle n'y parait... Laissez-moi, mes amis, vous conter une petite histoire courte, qui se résume plutôt à une fin qui pourrait vous faire changer d'avis vis-à-vis de nos chers réverbères et ainsi vous faire préférer la froide obscurité. Cette petite mésaventure se passe quelque part, qui pourrait être partout et nulle part à la fois... ou peut être ailleurs... Une rue près de chez vous oui... C'est l'histoire d'un jeune homme sans histoires justement. Une sorte de « monsieur tout le monde », plutôt honnête de nature, sans grands défauts ni qualités extraordinaires. Il ne sort pas du lot, il entre dans le moule, se fond parfaitement dans la masse. En bref il peut être vous, ou bien vous et même toi là au fond, qui te caches. Ce jeune homme anonyme menait une vie tout ce qu'il y a de plus banale et tranquille. Pourquoi devrait-il lui arriver quoi que ce soit d'étrange ? De... de surnaturel ? Et pourtant... C'est par une froide soirée hivernale que notre nouvel ami éphémère quittait son travail comme tous les jours de la semaine. Évidemment à cette époque de l'année le soleil est déjà couché, ou levé, tout dépend de quel côté de la sphère terrestre l'on se trouve. Il s'avère que lui se trouvait du mauvais côté. Celui où les ombres s'allongent progressivement jusqu'à recouvrir tout le paysage et en absorber les détails. Comme beaucoup de villes actuellement, toutes les rues n'étaient pas éclairées la nuit, pour diverses raisons écolo-écono-sécuritaires sur lesquelles on passera. À moins que... que ce soit pour d'autres raisons... Notre camarade passait donc principalement par les rues encore illuminées, et cela même si son itinéraire s'en trouvait quelque peu allongé, pour se sentir en sécurité dans le halo lumineux des lampadaires, comme beaucoup. Ceci dit, notez qu'il est bien plus aisé de poignarder un honnête (ou non) passant sous la lumière des réverbères où l'on voit au moins dans quoi on plante notre lame. Mais là n'est pas le sujet. Il arrivait donc à proximité de la rue principale, une longue rue rectiligne comme on en connaît tous, lorsque, soudainement dans un bref claquement, toutes les lumières, excepté celles de la grande rue qu'il apercevait au loin, s'éteignirent sans crier gare (ce qui, soit dit en passant, aurait été bien plus inquiétant) ! Il se dirigea donc prestement vers la rue principale, tel un papillon de nuit, attiré par l'unique éclairage de la ville. Par chance, une fois cette avenue passée il ne lui restait qu'une centaine de mètres après le virage du bout de la rue pour arriver chez lui. Mais pour le moment il pénétrait seulement le boulevard. L'endroit était totalement désert et le silence y était oppressant. Une fois qu'il eut parcouru une trentaine de mètres, les deux premiers lampadaires qui bordaient la rue s'éteignirent en claquant. Notre homme se retourna, l'air quelque peu inquiet puis reprit son chemin d'un pas rapide. Clac ! Firent les deux suivants en noyant un peu plus la rue dans le noir. Il accéléra encore, sans se retourner. Clac ! De nouveau. Il sentit l'adrénaline monter et se mit à marcher comme il n'avait jamais marché. Clac ! Il décida enfin que courir pouvait s’avérer judicieux... Clac!.... Courir vite même...


Clac!........... Clac!........ Clac!... Clac ! Clac ! Les claquements étaient de plus en plus rapprochés les uns des autres... Ainsi que de lui... Courir... Courir... Il sentait presque ses glandes surrénales vomir un flot continu d'hormones aux noms compliqués... Les ténèbres se rapprochaient encore... Plus vite... Il haletait, transpirait, mais continuait de foncer droit ! L'avenue faisait une centaine de mètres et pourtant il lui semblait en avoir parcouru bien plus, beaucoup plus... Le virage après lequel il pourrait apercevoir sa maison paraissait s'éloigner... Malgré tout il fini par parvenir presque au but, les claquements le talonnaient maintenant, il sentait ses oreilles vibrer à chaque réverbère s'éteignant... Trente mètres.... Vingt mètres… Dix mètres... Cinq mètres... Un mètre ! Le virage était là ! Seulement, personne ne déboula en trombe et en nage à la sortie du virage. Personne n'était non plus dans la rue. Seuls quelques pas résonnèrent dans le vide puis, dans le silence le plus total, toutes les lumières de la ville se rallumèrent. Le jeune homme ne rentra jamais chez lui. Personne ne le chercha, personne ne le réclama. Quelqu'un s'en souvenait-il seulement ? Si La Fontaine devait donner une morale à cette histoire, il dirait probablement « Rien ne sert de courir, point. » On fait bien souvent la distinction manichéenne entre lumière et ténèbres, ce que j'en dis c'est que les insectes attirés, hypnotisés, par la lumière finissent bien souvent grillés ou écrasés. Chers lecteurs vous y réfléchirez peut être à deux fois désormais dans le choix de vos rues en sortant à la nuit tombée... Mais en attendant, vous pouvez éteindre la lumière et dormir à poings fermés... Mister Frog












L es réverbères s'éteignent doucement un à un, les énergumènes regagnent leurs coins douillets, afin de se reposer après avoir raconté leurs histoires... C'est fini pour cette nuit, mais on se retrouvera avec joie au numéro suivant. S 'il te faut néanmoins plus de lumières, plus d'énergumènes et plus d'histoires, n'hésite pas à aller lire ou relire les anciens numéros sur le site. Nous avons également quelques lanternes ailleurs, comme ce forum ou ce groupe deviantART. Libre à toi de venir t'y éclairer ! Mis à part ça, merci de ne pas redistribuer ce webzine en dehors des sites officiels. Utilisez des liens vers le site, le forum ou dA ! Tout le contenu du webzine appartient à leurs auteurs respectifs, il est donc interdit de se l'approprier ou de le modifier entièrement ou partiellement sans autorisation préalable et sans en créditer l'auteur.


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