paperJam Economie & Finance - Juillet-Août 2010

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politique et, clairement, un tout autre électorat. Ce qu’on attend de nous, c’est que nous gardions le cap et sachions défendre cette indexation qui sert surtout aux petites gens et à ceux qui ne sont pas protégés par des conventions collectives. En parallèle, une taxation plus forte des salaires plus élevés doit aller pair avec cette indexation. Je ne veux pas que nous disions que nous avons raison sur ce point et que les autres ont tort. Mais il ne faut pas non plus que les autres disent que ce sont eux qui ont raison et que c’est nous qui avons tort. J’espère bien que nous trouverons tous ensemble une solution, avec les partenaires sociaux. Vous l’espérez, ou vous y croyez vraiment? «Je crois vraiment qu’un tel accord est possible. Peutêtre qu’il n’y aura pas d’accord formel, mais il y aura quand même des convergences de vues. Un paquet de mesures a été annoncé par le Premier ministre lors de son discours sur l’état de la Nation, dont certaines sont marquées du sceau de l’austérité. Entre-temps, les indicateurs économiques semblent repartir à la hausse. Cela peut-il amener à une retouche de ces mesures? «Nous ne sommes effectivement plus dans les chiffres sur lesquels nous nous sommes basés lors des travaux de coalition. Mais à partir du moment où la coalition a décidé de la mise en œuvre de ce paquet, il convient de s’y tenir. Le déficit budgétaire est bien là. Je rappelle que ces mesures ont été établies pour deux années. Pour 2011, nous allons, de toute façon, faire ce qui a été décidé. Nous savons que cette année sera difficile, puisque les rentrées fiscales venant des entreprises seront principalement celles liées aux résultats des années 2008 et 2009 qui ont été plus faibles. Les recettes fiscales seront donc très réduites. Pour 2012, en revanche, en fonction de l’évolution économique, nous pouvons tout à fait envisager des allégements ou bien de renoncer à certains prélèvements supplémentaires initialement prévus. Nous verrons alors ce qu’il convient de faire pour la période 2013-2014. Aujourd’hui, il y a une reprise, c’est clair. Mais assainir les finances publiques reste un objectif

prioritaire. Là, à nouveau, en tant que membre du parti socialiste qui pense en termes générationnels, j’estime qu’il faut couper court à cette inflation de l’endettement qui est en fait la cause, à une échelle plus large, de la faiblesse de l’euro. Chacun doit donc faire un effort, y compris au Luxembourg, pour ne pas s’enliser dans cet endettement. Nous ne pouvons pas emprunter tous les ans 2 milliards d’euros sur un budget de 10 milliards, c’est impossible. Nous n’avons plus, comme dans le faste des années 90 et du début 2000, des excédents à placer. Nos réserves sont assez précaires. Nous devons donc assainir ces finances publiques et mettre en œuvre les dispositions qui ont été décidées. Je pense que le paquet de mesures sera ficelé avant les vacances et qu’il sera débattu à l’automne, avant d’être adopté au travers de différentes lois. Bien sûr, la Chambre des députés aura le dernier mot. Ces mesures annoncées n’ont pas fait que des heureux, en particulier au niveau des travailleurs frontaliers. Etait-il impossible de trouver un équilibre plus juste? «A aucun moment, les mesures prises n’ont été dirigées contre les frontaliers. Et je rappelle qu’il s’agit là de mesures temporaires qui ne sont prévues que pour deux années. Au plus fort des négociations tripartites et des divergences de vues affichées, la coalition gouvernementale a-t-elle été à deux doigts d’exploser, comme bon nombre d’observateurs l’ont craint? «Il y a eu des moments difficiles à passer, essentiellement dus à nos différences de conception. Le parti chrétien social est plutôt axé sur une réduction des dépenses, alors que nous sommes plutôt favorables à une augmentation des recettes. D’ailleurs, nous souhaitons que, en parallèle au maintien de l’index en particulier pour les bas salaires, il y ait un certain rééquilibrage à l’autre bout de l’échelle des salaires, par le biais d’une pression fiscale supérieure envers ceux qui en ont les moyens. Pour en revenir à la survie de la coalition, la question s’est clairement posée à un moment }  12

Réformes

«Ne pas tuer le modèle luxembourgeois» Parmi les grands chantiers en cours sur le plan national, celui du régime de pension et de la caisse de santé n’est pas le moindre. «Nous devons préserver un système qui fonctionne et qui n’aboutisse pas à un système de soins à deux vitesses, prévient Jean Asselborn. La sécurité sociale doit être autant à la disposition de celui qui est millionnaire que de celui qui est au chômage. Je suis convaincu que nous parviendrons, avec les partenaires sociaux, à trouver les mesures nécessaires pour le redressement des comptes, comme cela est régulièrement fait tous les quatre-cinq ans.» En filigrane se profile aussi la réforme des pensions, un sujet hautement sensible en ce moment, notamment chez certains voisins. «J’espère que nous n’arriverons jamais à un clash comme en France. Le ministre de la Sécurité sociale, Mars di Bartolomeo, est en train d’établir un schéma qui sera discuté au sein du gouvernement cet automne et j’espère bien que la loi sera votée avant l’été 2011. Il faudra avant tout ne pas tomber dans des discussions interminables autour de la pénibilité de certains métiers. Mais il est clair que cette réforme se basera sur le principe d’une durée de cotisation minimale de 40 ans. Ensuite, il faut aussi avoir à l’esprit que bon nombre de paramètres dépendent des taux de croissance à venir. Jusqu’à présent, les discussions avec patrons et syndicats n’ont pas donné lieu à des crispations.» Est-ce là un signe encourageant, alors qu’une réforme du dialogue social est aussi en réflexion? «Le dialogue social, c’est surtout la Tripartite, note le vice-Premier ministre. Nous allons tout faire pour ne pas tuer le modèle luxembourgeois.»

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