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Il n’y a pas de mal à faire le bien

Le premier est désintéressé : un don à une association par exemple. Le second vise la publicité : son nom sur un voilier du Vendée Globe. En revanche, rien ne les empêche d’accommoder la loi à leur sauce pour en faire un outil d’ «optimisation fiscale». Stéphane Couchoux est avocat fiscaliste, spécialisé dans les organismes à but non lucratif, «OSBL» comme il préfère les nommer. Au mot «optimisation», il préfère celui d’ «innovation». Dans «une finalité sociétale», précise-t-il. Stéphane Couchoux démontre ainsi comment un fonds de dotation peut devenir, pour une entreprise, «un instrument anti-OPA», soit en bénéficiant du transfert de titres de participation d’une entreprise, soit en utilisant une partie de son capital philanthropique pour investir dans des PME. Ou encore comment les redevables de l’Impôt de Solidarité sur la Fortune (ISF) peuvent s’en faire exonérer en cédant temporairement à un fonds de dotation l’usufruit de leurs actions en bourse. «Quand un contribuable donne à titre temporaire l’usufruit d’un bien ou de son revenu à un organisme d’intérêt général, il en retire un double avantage, révèle-t-il. D’abord, il ne paye plus d’impôt sur le revenu. Ensuite, comme il ne conserve que la «nue propriété» du bien, il ne paye pas l’ISF sur la valeur en pleine propriété de ce bien.» Avant de préciser : «Mais pour la bonne cause». En clair, un particulier peut s’exonérer d’une partie de l’ISF grâce au mécénat. Rien d’illégal à cela, seulement des petits arrangements. Une façon de trouver, dans l’intérêt général, son intérêt particulier.

UNE PUB MEILLEURE QU’UNE PUB

L

e signe ne trompe pas : la plupart des salariés des fondations d’entreprises viennent du monde de la communication. Les entreprises l’ont bien compris : parler au grand public de ses bonnes actions constitue une très efficace «publicité par la preuve». En particulier quand l’image de l’entreprise est mauvaise. Comme tout établissement financier en ces temps de crise, la banque BNP Paribas a bien besoin de se refaire une réputation. Elle a ainsi lancé, en février 2012, une vaste campagne de publicité. Spots radio et encarts tous azimuts dans les journaux, sur le thème : «Aider les chômeurs, c’est le dernier souci d’une banque ?»» Non madame, répond la BNP Paribas qui «s’engage aux côtés de l’Adie [ « Association pour le droit à l’initiative économique », une association de microcrédit] depuis 20 ans». En fait, c’est la Fondation BNP Paribas qui subventionne l’Adie depuis deux décennies. Mais la fondation n’est mentionnée nulle part dans la pub. Et pour cause : il s’agit bien d’une campagne mijotée par le service communication de la banque, pour un montant gardé confidentiel par la banque, qui serait compris entre 600 000 euros et 800 000 euros selon nos calculs. Contre 600 000 euros versés à l’Adie par la Fondation BNP Paribas par an. «Attention, l’action de la BNP ne se limite pas à ces 600 000 euros annuels», se défend-on à la Fondation BNP. La banque aiguille les micro-entrepreneurs vers l’Adie, et leur ouvre également des crédits à des «taux hyper préférentiels, pas rentables pour la banque. Ce n’est pas complètement du business, c’est de la générosité. Sinon on ne le ferait pas.» Au service microcrédit de

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