Numéro 60 - Octobre/Décembre 2013

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LA DANSE À BIARRITZ # 55

Ainsi, le 19 juin 1901, elle fera merveille à l’Automobile Club, dans Pierrot salutiste, pantomime de Jean Michaud d’Humiac, Etienne Rey pour la partition. Le 20 juin 1903, auprès de Carlotta Zambelli, Berthe Sirède et Marceline Rouvier, c’est au Cercle de la rue Royale qu’elle joue la Vieille Revue, due à la plume du marquis de Massa. Autrement, son répertoire de soirées mondaines comprend un frénétique Cake-Walk dansé avec Berthe Sirède (1903), la Gavotte et la Chaconne d’Armide de Gluck avec Marcelle Lozeron (1906), des danses javanaises (1907), des danses des XVIIème et XVIIIème siècles avec Marthe Urban (1980), enfin avec Jeanne Chasles des danses du Premier Empire sur des airs arrangés par Edouard Mathé (1909). Mais revenons au Palais Garnier. En 1889, âgée de douze ans, dans un costume de libellule gouaché par Charles Bianchini, elle participe à la création de la Tempête sous le nom de Meunier 2ème. Le programme se souvient aussi de Meunier 1ère, ce qui invite à penser que Joséphine, sa sœur aînée, entra à l’Opéra avant d’emprunter une autre voie. En effet, selon Lucien Descaves, encore mineure, elle épousa un médecin et Huysmans fut désigné comme tuteur sur le faire-part du mariage. Après la Tempête, en dehors du répertoire courant, Coppélia, la Maladetta, etc., Antonine parut dans l’Etoile en 1897, puis dans Bacchus où en 1902, elle remplace au pied levé l’un des deux faunes. En 1904, dans Faust, que l’orchestre jouait par cœur, la direction n’ayant qu’un but : faire travailler les jeunes ! Elle danse la variation du miroir dont elle notera les pas comme nous le verrons ultérieurement.

Antonine Meunier, le Cid • photo Albert Bert, Fonds Gilberte Cournand, Médiathèque du Centre National de la Danse

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En 1902, tout en poursuivant sa carrière de danseuse-chorégraphe, Antonine se tourna vers l’enseignement. On peut se demander où elle trouva le temps. Mais sensible aux questions féminines et sociales, elle accueillit avec enthousiasme l’idée d’enseigner au Conservatoire populaire de Mimi-Pinson, fondé par Gustave Charpentier. Le compositeur de Louise et des Impressions d’Italie, rêvant d’offrir « un peu de poésie, un peu de gaîté, un peu d’art, à celles que le dur labeur retient du matin au soir dans les ateliers, pour un salaire dérisoire » (11), les ouvrières pouvaient suivre gratuitement le soir des cours de chant, de piano, de solfège, de harpe et de danse. Cette initiative fut l’objet de vives attaques, les bons bourgeois reprochant au musicien de « vouloir donner le goût du théâtre à des jeunes filles, qui devraient s’en tenir à celui du pot-au-feu » (12).Pour d’autres, il aurait fallu ouvrir partout des Conservatoires populaires. Bien plus, créer des Mimi - Pinson masculins ! Quoi qu’il

Joris Karl Huysmans

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Le premier, la Parade, mis en musique par Maurice Ravel encore élève au Conservatoire, fut créé au Palais des BeauxArts de Monte-Carlo en 1896. Toujours à Monaco, les Joujoux perfectionnés, dansé avec Jeanne Barbier sur « une pimpante partitionnette » d’Henri Hirschmann, obtiendra « un vif succès » en mars 1903. Les salons de la haute-société ayant aussi leurs soirées, ce ballet sera repris à d’autres occasions. Autrement, les Danses de chez nous sur une musique de Maurice Jacquet, le Parc enchanté, Qui trop embrasse et la Catherinette, une chanson sur laquelle nous reviendrons, sont également de sa main. Elle régla toutefois d’autres titres à l’instar de Rose et poète, fantaisie de Paul Ferrier, musique de William Marie, créée le 1er avril 1909 au Cercle littéraire et artistique. Puis, le 20 avril 1909, une évocation des saisons de l’année « en quatre danses charmeresses » au Five o’clock du Figaro. Aux premiers rangs se trouvaient : le prince et la princesse Nashimoto, cousins de l’empereur du Japon, des ministres, des ambassadeurs, etc. Il n’est donc pas besoin de dire que les apparitions d’Antonine seront très suivies

par les carnets mondains. Au reste, les parcourir permet de s’assurer qu’elle ne chôma pas.

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sujet en 1898, fera un travail énorme, incessant, passionné. Cependant, le répertoire restait monotone. Sans entrer dans les détails, puisque les causes sont variées, disons simplement que Gailhard et ses bailleurs de fonds (gens du monde, financiers, industriels) privilégiaient l’art lyrique au détriment de la danse. Par ailleurs, la plus grande part des recettes était fournie par les abonnés peu enclins à goûter les nouveautés. Certes, Faust, Don Juan, Samson et Dalila, les Huguenots, le Cid… comportaient des parties dansées, mais des semaines entières pouvaient s’écouler sans qu’aucun ballet ne soit affiché. En conséquence, n’étant pas une personnalité banale, comme une poignée de ses camarades, Antonine multipliera les activités hors de l’Opéra à commencer par la composition de ballets d’après ses propres livrets.

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