paperJam economie & finances mai 2013

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actualité ÉCONOMIE & politique entreprises place financière

Le 4 avril 2013

Le 9 avril 2013, à Londres

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Photo : Licence C.C .

Le 2 avril 2013, à Villeneuve-sur-Lot

Première secousse

Deuxième secousse

Le très rural département du Lot-et-Garonne (en France) est devenu le mardi 2 avril l’épicentre d’un séisme affectant l’ensemble de la planète finance. Bien sûr, le Luxembourg n’a pas été épargné. Mais rembobinons. Le 4 décembre 2012, le site d’information Mediapart indiquait que le ministre du Budget français possédait un compte bancaire en Suisse. L’intéressé démentait alors avec véhémence. Mais trois mois plus tard, devant l’avancée de l’enquête, il devait, depuis son fief électorat de Villeneuve-sur-Lot, finalement admettre l’existence de ce compte à l’étranger (il aurait en fait été déplacé de la Suisse à Singapour). « J’ai informé les deux juges que j’avais d’ores et déjà donné les instructions nécessaires pour que l’intégralité des actifs déposés sur ce compte, soit environ 600.000 euros, soit rapatriée sur mon compte bancaire à Paris. » Il n’en fallait pas plus pour que médias et politiques de tout poil – à Paris bien évidemment, mais aussi à Bruxelles – se déchaînent sur le secret bancaire. Le Luxembourg devenait ainsi victime collatérale de la polémique. Un brin d’ironie pour le Grand-Duché : la dernière fois que Jérôme Cahuzac y a fait le buzz – c’était en octobre 2010 –, il était question de son amendement au projet de budget 2011 pour proposer un impôt sur le revenu des Français de l’étranger.

Deux jours à peine après les révélations de Jérôme Cahuzac, un consortium américain de journalistes d’investigation et 36 médias internationaux annonçaient à grand fracas avoir débusqué de vastes réseaux de transactions internationales opaques passant par des prétendus paradis fiscaux. Des noms allaient être cités et des têtes coupées. Au jour où nous partons sous presse (19 avril), les Offshore Leaks (appellation donnée en référence aux documents officiels américains partagés en ligne à partir de 2006) n’ont toutefois pas vraiment fait de vagues pour ce qui concerne les personnes physiques ou morales. Mais dans un contexte de recherche de sources de recettes publiques, de lutte contre l’évasion fiscale et après l’affaire Cahuzac, le feu a vite pris et les regards se sont vite tournés vers les centres financiers internationaux, parmi lesquels figure le Luxembourg évidemment. Le débat sur le secret bancaire et les paradis fiscaux en Europe refaisait alors surface dans la presse européenne. À Bruxelles, à la question de savoir si le Luxembourg était, oui ou non, un paradis fiscal, le porte-parole de la Commission européenne, Olivier Bailly, répondait que les règles d’échange d’informations sur les comptes bancaires des clients des banques devaient s’appliquer dans tous les États membres. « Nous essayons plus de définir des pratiques qui seraient illégales qu’un terme qui cristallise les tensions et les incompréhensions. » La pression sur le gouvernement luxembourgeois était de plus en plus palpable.

Le secret va tomber, c’est dit Luc Frieden ouvrait ce mardi 9 avril une conférence de l’Association luxembourgeoise des fonds d’investissement (Alfi). Le sujet du jour : la stratégie de la place financière en Europe et dans le monde. Mais personne n’entendait vraiment ce qu’il disait. Tout l’auditoire pensait alors à l’interview du ministre, publiée dans l’édition dominicale du Frankfurter Allgemeine Zeitung, et en particulier à une phrase : « La tendance internationale va vers un échange automatique d’informations bancaires. Nous n’y sommes plus strictement opposés. » La brèche était ouverte. Les médias et les politiques européens s’y engouffraient. C’était dit. Le secret bancaire luxembourgeois disparaîtra sous peu. Ne reste plus que l’Autriche à faire de la résistance. À cette date cependant, les modalités et l’agenda du passage à l’échange automatique d’informations fiscales n’étaient pas connus. On apprenait néanmoins que l’interview accordée au journal allemand avait été réalisée le 2 avril, soit avant l’affaire Cahuzac et le feu de paille des Offshore Leaks. Le ministère des Finances n’aurait donc pas succombé directement à la pression consécutive à ces deux événements, mais commençait simplement à lâcher du lest parallèlement au commencement des négociations avec l’IRS sur Fatca et face à l’échec de l’accord Rubik qui coupait court à l’éventualité d’un réseau de traités bilatéraux d’accords fiscaux. Mai 2013 —

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