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MOUSTAPHA FALL SAKARYA BSB >

En février vous étiez apparu hésitant, timoré. Vous en rendiez-vous compte ? Après coup. Quand je sortais je me demandais : mais pourquoi ne suis-je pas plus agressif ? Mais cette barrière a disparu. Alors que vous ne comptez que quatre sélections, les circonstances ont fait de vous un élément clé de la réussite des Bleus. Comme l’avez-vous vécu ? J’en ai conscience mais j’essaye de ne pas y penser. Sinon c’est là que je réfléchis trop. Je ne dois pas me poser de questions. Ça fait plaisir bien sûr. Je m’y attendais un peu parce que sans les joueurs Euroleague il y a peu d’intérieurs qui peuvent prétendre à ce poste. Quand tu as des responsabilités il faut prendre plaisir à ça. L’été dernier vous aviez eu l’occasion de venir à l’INSEP pour le début de la préparation à l’EuroBasket, le temps de faire constater votre blessure au pied. Étaitce un premier contact avec les Bleus qui a compté dans votre intégration ? Je ne m’étais pas entraîné. Cet été ça ne compte pas. J’ai juste fait des photos. En novembre j’ai vraiment commencé à voir ce que Vincent Collet voulait. Faute de temps il essaye de ne pas nous surcharger de façon à ce qu’on assimile ce qu’il demande. Il est très précis, pointilleux. Les fenêtres FIBA ont fait couler beaucoup d’encre notamment quant à la gestion des joueurs qui pourraient ne pas faire partie de l’effectif à la Coupe du Monde. Cette problématique semble cependant éloignée des préoccupations des joueurs. Qu’en est-il ? Il y a deux façons de le prendre. Soit tu estimes que tu es un bouche trou et résultat tu n’as pas envie, tu n’as pas de motivation. Soit tu te dis que tu fais ce que tu as

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à faire et qu’on ne sait jamais ce qui peut se passer. C’est cet état d’esprit qui règne dans le groupe. À quel moment de votre carrière avezvous pensé à la possibilité de devenir international ? Honnêtement simplement lors de ma dernière année à Chalon. Et je ne réfléchis pas forcément à l’avenir. Je laisse les choses se dérouler naturellement. Pourtant vous semblez avoir une idée bien précise de votre gestion de carrière… Aussi, c’est vrai. Quand je dis que je ne réfléchis pas trop, c’est pendant la saison, après un match. Ensuite quand j’ai les offres sur la table je regarde quelles sont

Kevin Séraphin n’avait pas encore signé mais j’avais vu que le troisième pivot jouait 7-8 minutes. Ça ne me plaisait pas. Pour l’instant ça marche bien à Sakarya donc je suis content. En cours de saison des rumeurs ont fait état d’un intérêt du Real Madrid à votre égard. En voyant les blessures frapper certaines équipes, la perspective de signer en Euroleague vous a-t-elle traversé l’esprit ? Ça m’arrive d’y penser. Parfois je me dis que je me verrais bien ici ou là. Quand les rumeurs circulent ça te fait réfléchir mais quand tu es sous contrat, les buyouts sont souvent très élevés. Il y a eu des contacts avec le Real Madrid qui s’est

“ÇA M’A BEAUCOUP TRAVAILLÉ. UN AUTRE NOM D’EUROLEAGUE J’AURAIS MOINS HÉSITÉ. MAIS LÀ... BARCELONE, C’EST QUELQUE CHOSE.” mes meilleures opportunités et je sélectionne. Et moi ce que j’aime, c’est jouer. Est-ce pour cette raison que vous avez privilégié l’offre de Sakarya, en Turquie, plutôt que celle du FC Barcelone ? Quand tu as du retard il faut le rattraper. Ok tu t’entraînes mais l’expérience tu la prends sur le terrain. Tous les vices que les anciens peuvent avoir tu ne l’apprends pas qu’en les regardant. Je voulais jouer en Espagne ou en Turquie, les deux meilleurs championnats à mes yeux. J’ai eu une possibilité à Barcelone mais les conditions ne me plaisaient pas spécialement, aussi bien au niveau des clauses que du temps de jeu. Donc j’ai choisi une étape intermédiaire. Dire non au Barça vous a-t-il perturbé ? Ça m’a beaucoup travaillé. Un autre nom d’Euroleague j’aurais moins hésité. Mais là… Barcelone, c’est quelque chose. Le GM a été honnête en parlant à mon agent en lui expliquant que nous allions partager le poste de pivot à trois. Ante Tomic était là,

renseigné sur les conditions. Mais ils ont eu des contacts avec d’autres pivots, ces clubs travaillent sur des listes très larges. Dire non au Barça et au Real en l’espace de quelques mois, vous auriez été un cas unique… Oui c’est sûr. Mais vu leurs blessés, je pense que j’aurais dit oui si l’arrangement avait été trouvé avec mon club. Votre début de saison en Turquie vous a-t-il conforté dans votre idée que vous pouvez rapidement jouer en Euroleague ? Je n’avais pas de doutes par rapport à ça. Mais j’étais blessé cet été et cela voulait dire rater une bonne partie de la préparation. Des clubs comme le Barça n’ont pas le temps d’attendre des joueurs blessés et qui en plus n’ont rien prouvé. Cela m’a aidé dans ma réflexion. Aujourd’hui je pense être capable de jouer en Euroleague. Est-ce la vérité ? On verra ça un jour ou l’autre.

Presses Sports / Argueyrolles

À quoi ressemble votre quotidien à Sakarya ? Ce n’est pas très différent de ma vie à Chalon. Je m’entraîne beaucoup, sinon je suis tranquillement posé chez moi. Des trucs basiques. Si je veux faire quelque chose je peux aller à Istanbul. Avec 8 équipes sur place j’y suis presque tous les week-ends. Sakarya est un petit club et le standing n’est pas éloigné de ce que j’ai connu en France. Sur quel point avez-vous évolué sur place ? J’ai beaucoup eu l’opportunité de travailler sur mon physique. Je me suis renforcé du bas comme du haut du corps. Nous avons un très bon préparateur physique qu’on voit presque tous les jours. Il ne nous lâche pas, même quand tu n’as pas envie. Techniquement également j’ai l’occasion d’évoluer. Est-ce parfois pesant de ne jouer qu’un match par semaine ? Je ne vais pas mentir : c’est la dernière fois que je signe dans un club qui ne joue pas de Coupe d’Europe (il explose de rire). Les semaines sont vraiment très longues ! Si l’ambiance est parfois volcanique en Turquie pour certaines rencontres, la réalité du championnat est souvent très différente. Qu’en est-il exactement ?

C’est vrai que certaines salles sont très vides. D’ailleurs les meilleures ambiances je les ai connues contre des clubs moins connus. Les fans des grosses équipes attendent les grosses affiches et les derbys. Vous étiez dominateur lors de votre dernière saison de Pro A. Quel accueil vous ont réservé les défenses turques ? Dès le premier match j’étais automatiquement trappé. Impossible de scorer, je ne faisais que des passes… Le fait que je n’aille pas à Barcelone a beaucoup fait parler… Comme je ressortais bien les ballons l’approche a changé. J’ai pu jouer plus de un contre un. J’ai fait des cartons et bim ils sont revenus à des prises à deux. J’ai un peu tout vu. Ce rôle central en attaque, quand avezvous commencé à pleinement l’assumer ? Encore une fois c’est à Chalon. A Antibes je commençais à être efficace mais le créateur c’était Tim Blue. Il avait les ballons et je tournais autour. A Chalon j’avais les ballons en post-up, je ressortais pour les autres. J’ai vu que j’étais un point d’ancrage, qu’on me ciblait et que je pouvais apporter à l’équipe au-delà du scoring. C’est un processus. A chaque fois que tu rajoutes quelque chose à ton

Seskim / Panoramic

Vincent Collet a déclaré qu’une des grandes différences entre les matches de novembre et ceux de février c’était vous et votre approche des matches. L’avez-vous également ressenti ? En novembre c’était la première fois que je venais en Équipe de France. Je devais m’adapter aux systèmes de Vincent Collet, j’étais en mode où je réfléchissais à chaque fois au lieu de jouer spontanément. Je me suis moins pris la tête en février, d’autant que je savais que j’aurais un rôle important avec l’absence de Louis Labeyrie et Edwin Jackson. La transition était plus facile et surtout je me sens mieux physiquement.

jeu tu franchis les étapes. Quand j’ai commencé à m’entraîner avec les pros j’avais vraiment du mal. Et puis j’ai été plus à l’aise. Ensuite j’ai vu que je pouvais dominer. Je devenais plus confiant. Et là j’ai commencé à envisager des choses.

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