George R.R. Martin [LeTronedeFer00]Le Chevalier Errant - L'壬F Lige

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ŕ C’est à ser Eustace qu’il te faudrait poser la question, l’Œuf. » Dunk pensait connaître la réponse, mais elle n’était pas forcément du genre que le petit aurait envie d’entendre. Il a désiré un château dont la poterne soit surmontée d’un lion, mais il n’a obtenu pour toute récompense que des tombes au milieu de buissons de mûres. Quand vous avez engagé par serment votre épée à quelqu’un, vous avez promis de le servir et de lui obéir, de vous battre au besoin pour lui, pas de fourrer le nez dans ses affaires ou de contester ses allégeances... mais toujours était-il que ser Eustace ne l’en avait pas moins floué comme un parfait couillon. Il m’a bel et bien dit que ses fils étaient morts en combattant pour le roi, et il m’a fait en plus accroire que la rivière lui appartenait. La nuit les surprit dans le Bois de Wat. La faute en revenait à Dunk. Il aurait dû rentrer directement, par le chemin pris à l’aller, tandis qu’il avait préféré passer par le nord afin de jeter un nouveau coup d’œil au barrage. Il avait vaguement dans l’idée d’essayer de le démolir à mains nues. Mais il se trouva que les Sept et ser Lucas Double-Flandrin ne poussèrent pas l’obligeance aussi loin. Lorsqu’il finit par y arriver, Dunk découvrit les lieux gardés par une paire d’arbalétriers sur les justaucorps desquels était cousu l’emblème à l’araignée. L’un d’eux s’était commodément assis pour laisser ses pieds nus tremper dans l’eau volée. Dunk l’aurait de grand cœur étranglé rien que pour cela, mais l’homme les entendit venir et récupéra son arme en deux temps trois mouvements. Son camarade eut encore plus vite encoché un carreau et paré à toute éventualité. Le mieux que put faire Dunk fut de les foudroyer d’un renfrognement menaçant. Après cela, il ne lui restait rien d’autre à accomplir que de revenir sur ses pas. Il était loin de connaître aussi bien les parages que ser Bennis ; et quelle humiliation ç’aurait été pour lui que de se perdre dans un bois d’une aussi médiocre étendue que celui de Wat ! Vers l’heure où ils retraversèrent la rivière avec moult éclaboussures, le soleil flottait déjà presque au ras de l’horizon, et les premières étoiles commençaient à poindre, escortées par des nuées d’insectes. Une fois au sein de la noirceur élancée des troncs, l’Œuf retrouva sa langue. -185-


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