Magazine L'écran Novembre 2018

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n°18

Magazine d ‘arts audivisuels - Novembre 2018 -


Édito

manny CALAvERA

Rédacteur en chef

Aussi sûrement que l’hiver vient, nous sommes de retour ! Pas forcément pour vous jouer de mauvais tours (quoique), mais nous sommes bien là, prêts à rempiler pour un an supplémentaire en votre compagnie ! Les inscriptions sitôt achevées, nous voilà en route vers nos prochaines aventures éditoriales à caractère cinéphilique et vidéoludophilique (oui, ça n’existe pas, et alors ?). Mais pour cela, il nous faut bien sûr nous atteler à notre moisson annuelle de nouvelles âmes, celles de braves et fiers bénévoles prêts à s’investir sans retenue dans notre action associative... Vous êtes intéressés ? Vos potes sont intéressés ? WELCOME ! Promis, on s’occupera bien de vous, et votre intégration est garantie sans bizutages ! D’ailleurs, on pourra pas nous reprocher de ne pas avoir fait bonne figure, lors des rendez-vous associatifs qui ont eu lieu en septembre et octobre derniers. Frais et motivés, nous nous sommes installés avec un plaisir non dissimulé sur l’université Jean Jaurès et les allées Jules Guesde dans l’espoir de vous rencontrer, fidèles lecteurs, à l’occasion des Journées d’Intégration, du Forum des Associations au Mirail et de la Place des Étudiants traditionnellement organisée par la Semaine de l’Étudiant (au passage, un grand merci à tous les organisateurs de tous ces événements) ! Bref, tout ça pour dire : REJOIGNEZ-NOUS ! Faut dire qu’on ne manque pas de travail ! Outre nos traditionnels magazines composés par la plume aiguisée de nos rédacteurs, les articles en ligne se multiplient, au gré de nos envies mais aussi de nos expéditions festivalières. Et la rentrée a été l’occasion de nous investir dans deux festivals assez fournis en films passionnants et en rencontres enrichissantes. Le

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Fifigrot d’abord, qui s’est déroulé du 14 au 23 septembre dernier et qui fêtait sa septième édition, mais surtout la première depuis la disparition du très regretté Christophe Salengro, leader adoré de la présipauté du Groland, que son peuple pleure encore (la rédaction de l’Écran se joint à la douleur de la nation grolandaise). Puis s’en est suivi le festival Cinespaña, 23ème du nom (déjà), du 5 au 14 octobre. À chaque fois, nos équipes étaient sur place, et nombres d’articles ont été publiés sur notre site : que vous ayez ou non assisté à ces superbes événements, n’hésitez pas à aller lire ces quelques lignes sur notre plate-forme (toujours www.asso-lecran. fr), afin de découvrir des long-métrages qui sortent un peu (beaucoup ?) de l’ordinaire – et qui valent sacrément le détour. Et comme si cela ne suffisait pas, l’on entame cette année des actions inédites ! Et pas des moindres, puisque l’on a pour ambition d’organiser, au fil de la saison 18/19, trois Nuits du Cinéma en partenariat avec le Centre d’Initiatives Artistiques du Mirail ! C’est une grande fierté pour nous de reprendre ces événements et de parvenir à faire revivre ces rendez-vous plébiscités par tous les cinéphiles noctambules de l’université, et nous espérons que vous serez nombreux à venir découvrir le programme que l’on vous réserve pour ces nuits blanches inoubliables. Le premier de ces trois rendez-vous aura lieu le jeudi 6 décembre prochain, pour une Nuit consacrée à la folie rebelle des sixties ! Ne le ratez pas ! Entre les festivals qui nous attendent cette année, nos bonnes résolutions événementielles et la pléthore d’articles que l’on prépare, autant se le dire : Cette année s’annonce exaltante !

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© flickr.com

Photo couverture : pexels.com Chef rédacteur : Manny Calavera Chef éditorial : Doriane Job Rédacteurs : Eye In The Dark, The Watcher, le Comte Gracula, Aeryn, Supertramp, Stella Correctrice : Adeline Dekockelocre


éditorial

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. Box-office :

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Mission : Impossible Fallout de Brad Bird (2018)

Barry, jamais sans mes Emmys de Bill Hader (2018)

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. Le Ring :

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. Rétrospective :

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Je ne suis pas un homme facile de Eléonore Pourriat (2018)

. Assassin’s Creed et « l’historically accurate » Quand le dixième art mélange réalité et fiction

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. Denis Villeneuve

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À NE PAS LouPER

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par Stella

Call the Midwife d’Heidi Thomas (2012)

© IMDb.com

Sommaire

PRENEZ PLACE

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BOX-OFFICE

Critique

© 2018 Paramount Pictures.

CRITIQuE BOX-oFFICE Mission : Impossible Fallout de Brad Bird - juillet 2018 La saga Mission : Impossible, initialement conçue comme un exercice de style confié à des réalisateurs différents, nous revient avec un sixième opus qui clôture un arc débuté par Brad Bird en 2011 avec l’épisode 4 Protocole Fantôme et est la suite directe du Rogue Nation. On retrouve donc l’équipe maintenant fixe de Hunt (Tom Cruise), Benji (Simon Pegg), Luther (Ving Rhames) et Faust (Rebecca Ferguson) à la poursuite des « Apôtres » le groupe d’espions renégats anciennement connus sous le nom de « Syndicat » dirigé par Solomon Lane (Sean Harris), arrêté lors du dernier opus. Ils détiennent 3 boules de plutonium utilisables pour devenir

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des bombes nucléaires et comptent les utiliser pour provoquer une crise mondiale qui devrait découler sur une paix universelle (« Plus grande est la souffrance, plus grande est la paix. » est leur mantra). Mais, la CIA ne leur fait pas confiance et les force à travailler avec leur agent nettoyeur Walker (Henry Cavill). Christopher McQuarrie, scénariste depuis l’épisode 4 et déjà réalisateur du 5 termine de donner à la saga l’aspect « série » du matériau de base (Mission : Impossible est l’une des séries les plus populaires et les plus longues de la télévision américaine). Créant un univers cohérent avec des seconds rôles récurrents et qui évoluent (Alec Baldwin par exemple), Mission Impossible : Fallout réussit le pari très audacieux de proposer une alternative crédible à James Bond mais également aux blockbusters de l’été dopés au Marvelerie Disney. Que ce soit sur le terrain de l’action, de l’exotisme, ou de la continuité, tout fonctionne, dans une cohérence étonnante pour une saga de cette longueur. La réalisation offre des cadrages larges pour des scènes de combat ultra-musclées nous permettant d’apprécier la puissance physique de H. Cavill, définitivement fait pour incarner Superman. McQuarrie fait aussi le choix d’offrir au spectateur son lot de plans iconiques, mais se permet aussi des plans plus humoristiques en clin d’œil à la série TV d’origine. Cet « humour de série TV » loin

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de desservir le film, nous offre des personnages lumineux, optimistes sans être naïfs. On notera en passant que les personnages féminins sont, comme à leur habitude, exceptionnellement bien écrits et notamment celui de Julia (Michelle Monaghan), qui passe de femme en détresse à survivante et femme d’action avec une backstory pleine de bons sentiments sans être niaise (et ça fait du bien). Cruise fait le bon choix de donner à son public ce qu’il attend sans trop forcer le trait : la Force Mission Impossible est une équipe et doit travailler comme tel. Ainsi chacun a une importance capitale sur la résolution de l’intrigue qui, malgré une écriture improvisée durant le tournage, se tient bien et réussit à surprendre, malgré sa rapidité et son côté un peu convenu. La conclusion du film permet de clôturer des intrigues laissées en plan depuis le 3 et d’ouvrir la voie à un épisode 7 qui devrait voir le retour de Jeremy Renner, indisponible lors du tournage pour cause de guerre intergalactique dans Avengers 4. La force du film – et finalement la force de Cruise, producteur depuis le premier film – est de nous donner un produit neuf, palpitant et surtout différent des standards actuels des films d’action avec un matériau de base pourtant vieux de 52 ans et un premier film réalisé en 1996. Les références sont ainsi très nombreuses, à la limite


du fanservice, mais que les fans, justement, de la série sauront grandement apprécier. Mission : Impossible est un exemple de ces sagas qui s’adaptent à leur époque, en actualisant systématiquement son propos : les antagonistes de MI6 n’appartiennent à aucun pays, à aucune religion, ne défendent ni capitalisme, ni communisme. C’est un réseau de terroristes, diffus, des déçus du système presque sans visages, nihilistes (donc décrits comme anarchistes pour les ricains qui n’ont jamais lu Bakounine) jusque dans leur perception du monde. Viennent en contrepoint des personnages d’un autre âge (Tom Cruise continue d’assurer lui-même ses cascades, à maintenant 50 ans), idéalistes, un peu surhumains – mais la licence n’est pas connue pour son réalisme et ce n’est pas ce qu’elle propose. Loin d’être ringard, MI6 est dans la continuité de l’aventure Mission : Impossible. On sort de la séance heureux et pleins d’élan, un peu étonnés de ce film très feel good, en espérant revoir l’IMF au plus vite sur nos écrans… Cher lecteur, chère lectrice, soyons honnêtes (pour une fois) : cette critique dithyrambique a été écrite par deux fans pur jus des films d’espionnage et de Mission : Impossible qui ont, avant ce visionnage, regardé l’intégralité de la saga (oui oui, même le 3). Alors, rien que pour vous, nous avons écrit un dossier entier sur Mission : Impossible, les films, que vous pourrez retrouver très bientôt sur notre site !

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© 2018 Paramount Pictures. All rights

- Aeryn et The Watcher


BOX-OFFICE

Critique © Imdb.com

CRITIQuE

BOX-oFFICE 2 Barry, jamais sans mes Emmys

de Bill Hader, 2018 - 30 minutes, 8 épisodes (saison 1) Barry c’est l’histoire d’un scénario absurde qui rencontre votre jeudi soir. Vous n’avez rien de prévu, vous travaillez demain, vous n’avez ni le temps, ni l’envie de vous lancer dans un monument du cinéma de 3h ou de regarder la dernière série torture-porn à la mode. Vous cherchez une sitcom, mais quelque chose d’un peu différent, loin des nerds en chaleur et des délires entre colocataires. Laissez-moi vous présenter Barry. Barry est un ancien Marine devenu tueur à gage, louant ses services à qui a les moyens de payer par l’intermédiaire de son seul et unique « ami », Monroe Fuches. Un jour, alors qu’il doit remplir un contrat pour le compte de la mafia tchétchène, Barry pousse les portes du cours de théâtre professionnel de Gene Cousineau et se prend à rêver de devenir acteur, lui aussi…

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délice, toujours juste dans le ton, même quand la situation dégénère et qu’un peu d’humour semblerait déplacé, et Paula Newsome, dans le rôle du détective Janice Moss, preuve s’il en est qu’on peut donner des rôles fantastiques et complexes à des femmes de plus de 30 ans. Ces deux récompenses jettent un éclairage appréciable sur cette série assez confidentielle en cette période, où sous prétexte de parler de sujets graves ou de faire ressentir des émotions aux spectateurs, les séries versent sans cesse dans le spectaculaire, que ce soit par la torture psychique ou physique des personnages. Barry parle de drames humains de façon bien plus subtile et où chacun de nous peut s’identifier. Le tour de force de la série est de réussir à faire d’un scénario absurde un tout incroyablement cohérent, sans jamais en faire un prétexte. Les histoires des personnages s’entrecroisent – pas toujours de manière heureuse pour ces derniers – et tout finit par se lier dans un final tragique, à l’instar du Macbeth répété par Barry et Sally (Sarah Goldberg), love story un peu bancale du personnage principal. Si l’on devait souligner un des points faibles de la série, ce serait le faible développement des personnages du cours de théâtre que fréquente Barry : alors que la série nous les présente comme une véritable porte de sortie pour Barry,

Impossible pour moi de vous en dire plus à ce stade car ce serait gâcher la surprise : sachez seulement que vous retrouverez pêle-mêle tout le long des 8 (trop courts) épisodes de la saison 1, des enquêtes de police, des histoires de cœur et d’anciennes amitiés et que vous verrez la mafia tchétchène sous un autre jour. Barry est surtout une série qui navigue parfaitement entre humour noir et drame humain et où les personnages sont plus complexes qu’ils n’y paraissent. La série traite ainsi de situations tragiques, avec gravité et de façon parfois inattendue (voir l’excellentissime épisode 7 « Loud, Fast, and Keep Going », qui je le dis sans ambages, m’a fait pleurer avec Barry). La série a remporté deux Emmy Awards en septembre 2018 : le premier « Meilleur acteur dans une série comique » pour Bill Hader (Saturday Night Live, Vice-Versa, Crazy Amy, La Nuit au Musée) dans le rôle de Barry Berman / Barry Block et le second « Meilleur acteur dans un second rôle dans une série comique » pour Henry Winkler (Arrested Development mais surtout Happy Days, dans le rôle de Fonzy) pour le rôle de Gene. Si effectivement ce sont les deux personnages les plus touchants de la série, je garde une affection particulière pour Anthony Carrigan, dans le rôle de Hank, le bras droit du chef de la mafia, dont chaque intervention est un

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ils ne sont finalement qu’une toile de fond pour introduire les relations entre Barry, Sarah et Gene. Les amateurs de The Good Place apprécieront tout de même la présence de D’Arcy Carden, un peu effacée mais présente. Barry n’est ni une comédie, ni un drame, ni une série policière : c’est avant tout une histoire humaine où les aspirations de chacun pourraient être les nôtres. Bon visionnage !

© Imdb.com

- Aeryn


Chronique

© Ubisoft

Assassin's Creed et « l'historically accurate »

Quand le dixième art mélange réalité et fiction L’historically accurate, c’est respecter un contexte historique, de manière plus ou moins réussie, dans lequel notre jeu se place (ex : les costumes d’époque, les repères historiques etc.) On pourrait traduire cela par “historiquement précis” L’art cherchera à jamais à briser les règles du réalisme et à franchir les limites de la réalité. Considéré par les plus ambitieux comme le dixième art, le jeu vidéo a toujours souhaité prendre une entière liberté sur le mélange réalisme-fiction, et cela, dès sa naissance. Ainsi, on verra sortir énormément de jeux inspirés de faits réels. Des jeux vidéo de guerre (Medal of Honor, EA, par exemple) aux jeux qui recréent des univers historiques (Ryse : Son of Rome, Crytek, 2013), rien ne manque. Cependant, derrière une volonté (plutôt honnête) de « faire vivre au joueur quelque chose de vrai, de réel» se cache une

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variation précise de l’expression réalisme historique. Assassin’s Creed (Ubisoft) est une des licences qui tentent le plus de s’inspirer de faits historiques. Dans cette saga, on a l’habitude d’être projeté dans un contexte historique où Ubisoft tente (tant bien que mal) d’y faire rentrer sa petite querelle assassin-templier. On notera donc un conflit entre deux organisations qui prônent la paix sur Terre, mais de manières différentes. Leur lutte est au centre de l’intrigue de chaque jeu, et on s’attend la plupart du temps à jouer un assassin. Souvent ça marche plutôt bien. Presque comme Adibou, on apprend en s’amusant (sauf que là, il faut rappeler que les thèmes ne sont pas aussi joyeux !). Dès Assassin’s Creed 2 (2009), on retrouve des personnages célébrissimes comme Léonard de Vinci ou Machiavel. Ils sont tous liés à notre cher Ezio Auditore (protagoniste), d’une manière ou d’une autre. Car oui, ces personnages sont peut-être là pour aider le joueur à se sentir complètement plongé dans cet univers, mais ils sont aussi utiles pour la légitimité de l’histoire. Beaucoup de personnages secondaires ont la capacité d’aider le personnage principal dans sa quête contre les templiers. C’est d’autant plus utile que l’on y croit. On peut très bien voir le capitaine Edward Kenway (Assassin’s Creed 4 : Black Flag, 2013) naviguer avec des pirates aussi connus que Barbe Noire ou Mary Read (aka James Kidd). On pourrait aussi citer les séquences hors de l’Animus qui se sont multipliées depuis Assassin’s Creed : Brotherhood, et qui contribuent à cette idée de réalité. (On rappelle que l’Animus est la machine permettant aux employés d’Abstergo (une société fictive du jeu) d’explorer les souvenirs de leurs ancêtres, assassins ou templiers, afin d’obtenir le maximum d’informations sur leur conflit). Mais, faire un jeu avec un contexte historique si présent, ça suppose aussi quelques risques. On peut facilement jouer au « trouve l’erreur ! » dans Assassin’s Creed : Unity (2014), qui traite des événements de la Révolution Française. Assez ironique, d’ailleurs, car c’est une « union des bretons indépendants » (UBIsoft) qui a créé et développé le jeu. Bien sûr, il s’agit souvent d’anachronismes : le drapeau tricolore de manière légale est accepté une décennie après les événements relaté dans Unity ; La Marseillaise ne sera pas universellement connue avant la fin de la Révolution etc... Des petites erreurs qui sont le prix à payer pour rendre la Révolution aussi française que possible. Un risque à prendre pour rendre le jeu suffisamment « référencé » auprès des joueurs non français.

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Mais voilà, on espère beaucoup de la volonté d’Assassin’s Creed de s’élargir vers la Grèce Antique . Assassin’s Creed Odyssey, comme son prédécesseur (Assassin’s Creed Origins, 2017), pourrait s’annoncer comme une pause nécessaire dans l’histoire scénaristique de la saga (on pensera donc à l’opposition des organisations des assassins et des templiers, qui sont complètement fictives). Cela permettra aussi de se reconcentrer sur sa dimension de l’historically accurate. En effet, exclure ce conflit parfaitement fictionnel pourrait permettre aux joueurs de mieux s’immerger dans le jeu. Ainsi, cela permettrait au jeu de mieux représenter l’environnement historique de chaque époque. Les critiques sur Assassin’s Creed Odyssey, déjà sorti depuis quelques semaines, sont prometteuses. On espère redécouvrir le talent d’Ubisoft pour recréer des époques de manière riche et précise.

© Ubisoft

– Supertramp


RING

Critique

© Imdb.com

LE RING Je ne suis pas un homme facile de Eléonore Pourriat - avril 2018

Les rédacteurs de l’Écran sont des professionnels du divertissement intellectuel avec des qualités littéraires impressionnantes. En conséquence, il ne faut absolument pas tenter de reproduire ou d’imiter le contenu de cette chronique. L’Homme qui a vu l’Homme, Le Ringer sachant ringer, l’athlète de la raclette, The Watcher affronte sur son bien-aimé Ring La Seigneuresse des bons vivants, la Reine des féminazguls, l’Impératrice des soirées crêpes, Le Comte Gracula sur le film Je ne suis pas un homme facile d’Eléonore Pourriat dans lequel un homme se retrouve dans un monde parallèle où la domination féminine est partout. LET'S FIGHT...

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The Watcher : Ce film est la quintessence de la tentative de domination des esprits du complot féministe mondial. Une bluette avec un filtre snapchat de SF “retournement de construction sociale”, les mecs jouent des tafioles, les meufs des goudous hommasses sans charmes …

Le Comte Gracula : Forcément dès qu’on sort du PMU et des femmes à poil on vous perd, l’inconvénient d’avoir plus de poils de couilles que de neurones. Ce film est trop gentil avec vous, il faudrait vous enfermer et c’est déjà vous donner trop d’importance que de faire un long-métrage autour de vous.

The Watcher : Trop gentil ? Autour de vous ? Ce film ne parle que de vous : même dans le monde “inversé” où les femmes sont les dominantes, on ne voit que vos soucis, en agissant comme des hommes, vous reconnaissez comme c’est pénible d’être un homme aujourd’hui. Le personnage soi-disant principal incarné par Vincent Elbaz n’est qu’un faire-valoir pour Marie-Sophie Ferdane qui phagocyte les intrigues autour de sa petite personne et ses problèmes d’auteur en panne et de célibataire en manque. Le Comte Gracula : Faire-valoir ? J’aimerais bien être un faire-valoir comme ça “et voilà que je fais ce que je veux, et voilà que l’univers tourne autour de moi, et bouhou les femmes sont méchantes parce qu’elles veulent toutes me mettre dans leur lit mais à leurs conditions et sans que je puisse me comporter comme un connard”. Même une huître a plus de problèmes existentiels que cet homme. Surtout qu’il finit par avoir la fille. Le lesbianisme politique, y a que ça de vrai !

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The Watcher : Le lesbianisme, tant que ça me coûte pas 9,99 € par mois ça me va. Plus sérieusement, que la fille parte avec lui prouve bien que vous êtes des faibles puisque à situation inversée on s’en sort mieux que vous. Malgré ce point, les situations sont grotesques, on dirait des enchaînements de témoignages d’un tract d’Osez le féminisme joué par l’intersyndical des intermittents du spectacle. Le Comte Gracula : Je ne peux nier le mauvais jeu d’acteur-trice global, mais les seules qui ressortent sont des femmes donc descend de tes petits poneys. Quand au “mieux que vous”, je signale que Monsieur est un abruti sans profondeur qui n’utilise même pas l’avantage stratégique qu’il pourrait avoir de connaître l’ennemi de l’intérieur et passe son temps à se plaindre de ne plus être en position de dominant. Heureusement qu’elle est un personnage à peu près doué de morale, parce que sinon on ne s’en sortait pas.

The Watcher : Hey, respecte Mon petit Poney : Equestria a plus de cohérence que ce faux téléfilm qui prouve que Netflix ne doit rien produire en France. Mes yeux saignent encore de Marseille.

Le Comte Gracula : Fifty shades of Grey a plus de cohérence que ce film. C’est un moucheron sur le pare-brise de l’existence des féministes, et si ce film te paraît trop dur avec les pauvres hommes sans défense, on vous coupera facilement les bourses avec des couteaux à beurre.

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RÉTRO

Critique

© Laurence Cendrowicz - Neal Street Productions

CRITIQue

rétroSPECtIvE Call the Midwife

de Heidi Thomas - 2012 à aujourd ’ hui Larmes, sang, cris, pleurs, religion, crasse, vie, mort. Les sages-femmes nous prennent la main pour remonter le temps. Call the Midwife est une série britannique de Heidi Thomas, diffusée depuis 2012, comptant sept saisons actuellement. On y suit l’histoire de la sagefemme Jenny Lee lorsqu’elle arrive dans un couvent de l’Est londonien à la fin des années 1950. Elle découvre la réalité de son métier, mais aussi la pauvreté, la souffrance, et la violence. Et nous aussi.

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Cette série est tout ce qu’il y a de plus britannique. Le ton est très particulier, jamais dans l’apitoiement ou le surjeu. La voix off, qui est celle de Jenny plus âgée (la série est d’ailleurs basée sur l’autobiographie de Jennifer Worth), insère une touche de mélancolie mélangée à de l’espoir. Les épisodes se concentrent à chaque fois sur deux situations, généralement des grossesses mais également de maladies, les sagesfemmes étant aussi infirmières.

naissance, avec des résistances de certaines et le soutien d’autres. Le fait que beaucoup d’hommes ne soient présents qu’en tant que love interest est inhabituel, surtout qu’ils restent des personnages récurrents seulement parce qu’ils ont des liaisons amoureuses avec les héroïnes (sauf Fred le factotum du couvent. Mais Fred est génial.). Les histoires présentées à chaque épisode sont à chaque fois des prétextes pour développer d’autres points, liés aux personnages principaux ou à des faits de sociétés. Manque de confiance en soi, crise existentielle, adultère, épidémie, violence conjugale, violence infantile, racisme… La série n’est pas légère. Mais on en revient au ton : même s’il est possible que vous versiez une larme devant un épisode, vous ne devriez pas finir trop déprimé en fin de visionnage.

On suit également ces femmes, ces soignantes, qui consacrent une grande partie de leur temps à leur quartier. On les voit dépasser leurs peurs, leurs problèmes familiaux, rencontrer l’âme sœur, trouver la foi. On s’attache à ces personnages, qui sacrifient leur vie pour en faire naître d’autres. Il n’y a cependant pas que des femmes dans cet univers. Un certain nombre d’hommes sont présents, la majorité ayant à la fois un rôle professionnel et de love interest.

Comme The Crown, les épisodes sont longs (50 minutes en moyenne) et tout y est soigné. Les décors sont réalistes à défaut d’être beaux (en même temps un quartier pauvre de Londres à la fin des années 1950, fallait s’y attendre) ; les costumes vont de l’informe au magnifique (encore une fois, c’est dû à l’époque) ; et vous devriez avoir envie de boire une tasse de thé au couvent de Saint Nonnatus avec les sœurs, puis un verre avec les sages-

La place des hommes est d’ailleurs un point intéressant. En effet, on est devant une série de sages-femmes, qui est donc centrée sur les femmes, accoucheuses comme accouchées. Les hommes sont exclus des naissances, par la plupart des mères et des maïeuticiennes. Un des enjeux sera d’ailleurs leur introduction dans les salles de

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femmes en vous préparant à aller danser. Call the Midwife n’est pas « un chef-d’œuvre ». Ce n’est pas « la meilleure série de tous les temps ». C’est cependant une très bonne série d’hiver, que vous aurez envie de continuer sous votre plaid avec une bonne tasse de thé. Vous voudrez suivre Jenny, Trixie, Cynthia et Sœur Evangelina dans leurs tournées, connaître leurs histoires, sauter sur votre vélo pour aider une naissance, mettre en place les paravents pour les auscultations hebdomadaires et, qui sait, peutêtre que cela déclenchera des vocations ?

© Imdb.com

- Le Comte Gracula


Tu as du retard sur ta lecture cinéphile, sériephile, gamophile ?!

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LGDC

par Stella

Š Gage Skidmore

Denis villeneuve


voyage à l'aveugle chez Denis villeneuve Regarder un film de Villeneuve, c’est un peu comme être assis à l’arrière de ce taxi d’Un 32 Août sur Terre, sillonnant le désert de Salt Lake City sans destination, si ce n’est une indication au chauffeur de quitter la route et de continuer un peu plus loin dans l’océan de cailloux blancs. Au cœur de ce premier long métrage, on trouvait ainsi déjà un tourment que le cinéaste ne cessera de ressasser par la suite : le vertige face à l’inconnu. On ne sait jamais trop où Villeneuve va nous emmener. Difficile, déjà, de cerner son parcours cinématographique : celui qui gagnait en 1991 un concours de reportages pour la télévision québécoise est devenu aujourd’hui un des rares « auteurs » à s’imposer à Hollywood. Dans sa carrière, il jongle tranquillement avec les genres, du road movie sentimental aux thrillers psychologiques et jusqu’à la science-fiction, même si tous ses films sont un peu un mélange de tout cela. Mais si Villeneuve déroute, c’est surtout par son habileté à perdre ses personnages, et le spectateur avec, dans les méandres de ses films. Avec ses thrillers Prisoners, Sicario, et Enemy, il crée des univers emplis d’obscurité. S’il ne fait pas nuit, une pluie battante cache le soleil. Il y a des tunnels creusés sous les villes et des trappes secrètes dans les maisons. À la lampe torche ou sous de faibles néons, les personnages tâtonnent, et il se crée vite comme une angoisse face à ce qui est tout près, mais que l’on ne voit pas. Les murs peuvent cacher des cadavres, les boîtes en cartons des serpents, une forêt tranquille des tueurs d’enfants. Il y a ainsi une scène dans Sicario à la tension extrême, où l’équipe de policiers en opération dans un cartel mexicain se retrouve coincée au milieu d’un embouteillage, tout en sachant que des tueurs se cachent quelque part dans la foule anonyme des voitures. Cette pénombre, tous les personnages de Villeneuve y sont plongés, d’une manière ou d’une autre. Leur fardeau, ce n’est pas tant de ne rien voir, mais plutôt de ne rien savoir du destin dans lequel ils sont pris. Les héros de Villeneuve, en effet, sont tous en quête de comprendre une dimension cachée de leur existence, et c’est là leur plus grand tourment. Dans Incendies, un frère et une sœur transportent avec eux une enveloppe contenant le secret de leur famille, mais ils ne peuvent pas l’ouvrir avant d’avoir retrouvé leur père pour la lui restituer. Le père détruit de Prisoners torture inlassablement l’homme qui sait peut-être où se trouve sa fille disparue, mais celui-ci reste muet. On ne révèle pas à la policière de Sicario, envoyée en opération secrète à la frontière mexicaine, la mission exacte qui lui a été attribuée, alors même que son équipe se confond peu à peu avec les tueurs qu’elle est censée pourchasser. La linguiste de Premier Contact désespère de comprendre le langage de deux êtres extraterrestres descendus sur Terre, qui

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ont manifestement quelque chose à lui annoncer… Villeneuve est un habile conteur, et le spectateur est aussi aveugle que ses personnages grâce à une narration fragmentée tout sauf omnisciente. L’« ici et maintenant » devient une prison obscure où le dehors, l’avant et l’après sont des mystères inatteignables. Ellipses et ambiguïtés mélangent les points de vue (Enemy) et même les temporalités (Premier Contact), si bien qu’on ne sait plus, parfois, si l’on regarde le passé ou le futur, le bon ou le mauvais. La mise en scène enferme les personnages, qui semblent avancer vers un destin que, naïvement, ils ignorent. La ville d’Enemy est ainsi suffocante, enveloppée d’un épais brouillard, et la teinte jaunâtre qui colore le film lui donne un air hors du temps, comme si les personnages étaient enfermés dans une vieille photo se désagrégeant un peu plus à chacun de leurs pas. Ainsi laissé seul face à une machine scénaristique dont il ne connaît pas les rouages, le spectateur est contraint de replacer une à une les pièces du puzzle. Cette impression de construire le film pendant qu’il se déroule, de participer à lui créer un sens, est l’une des choses que je préfère dans le cinéma. Il n’est pas étonnant que Villeneuve soit un grand amateur de la musique de Radiohead (magnifique ouverture d’Incendies) dont les mélodies et les rythmes opaques se révèlent petit à petit au fur et à mesure des écoutes. Dans tous les genres cinématographiques auxquels Villeneuve s’est essayé, cette même angoisse revient toujours : celle d’être un humain perdu dans l’immensité vertigineuse du monde. Le besoin de connaissance qui anime les personnages transparaît aussi dans la dimension ludique qu’il donne à ses films, pour que le spectateur lui aussi apprenne, cherche, théorise. Premier Contact, à ce titre, est une belle introduction… à la linguistique. Peu banal pour un film de sciencefiction. - Stella

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' - Top 5 du Redac’ -

© Imdb.com

1. Prisoners (2013) Enquête sur un enlèvement où les prisonniers ne sont pas ceux que l’on croit 2. Enemy (2013) Jake Gyllenhaal face à son double 3. Premier Contact (2016) Théories de la linguistique avec des aliens 4. Sicario (2015) Opération à la frontière mexicaine aux airs d’Apocalypse Now 5. Incendies (2010) Tragédie grecque au Moyen-Orient

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À ne pas louper

- L’ABC La 27e édition du Festival International Séquence Court-Métrage se déroulera du 21 au 25 novembre à Toulouse et en Occitanie. Comme chaque année, plus de 130 courts venant de divers pays seront projetés à l’ABC, cinéma partenaire de l’événement, ainsi que dans d’autres salles de la région. Que ce soit dans le genre de la fiction, de l’animation ou du documentaire, le festival propose de découvrir sur grand écran, des productions riches et éclectiques qui n’ont rien à envier au format long.

- Théâtre de la Cité -

- Université Toulouse – Jean Jaurès -

La Théâtre de la Cité (TNT), en association avec la Cinémathèque de Toulouse, organise un ciné-concert autour du film Salomé (Charles Bryant, 1923). Film hollywoodien muet des années 20 à l’esthétique empruntée à l’Art Nouveau anglais et aux influences russes, période de l’avant-garde, cet ovni cinématographique, adapté de la pièce éponyme d’Oscar Wilde, sera projeté le 27 novembre à 20h30. La présence du musicien Florent Paris et ses expérimentations sonores amèneront à la séance une dimension des plus étranges.

Dans le cadre de la 20e édition du Festival Danses et Continents noirs, l’UT2J en association avec l’APCA-Compagnie propose une projection du film documentaire Fugitif, où cours-tu ? (Nicolas Klotz et Elisabeth Perceval, 2018), adapté de l’œuvre éponyme de Dénètem Touam Bona, le 6 novembre à 17h30. La séance sera suivie d’une discussion avec les réalisateurs et l’auteur du livre autour du thème de cette édition « Corpus Africana » et des questions qu’il soulève sur la diversité culturelle artistique et la lutte contre les discriminations.

1 Rue Pierre

Maison de la recherche (amphi F417)

>>

www.sequence-court. com

>>

theatre-cite.com

>>

www.jamescarles.com/ centre/festival

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13 Rue Saint-Bernard

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- Cinéma -

Les Veuves

(thriller, drame) de Steve McQueen, sortie le 28 novembre

Avec Viola Davis, Michelle Rodriguez, Elizabeth Debicki…

Le réalisateur de 12 Years a Slave (Oscar du meilleur film, 2014) revient dans les salles obscures avec un nouveau film, Les Veuves (Widows) adaptation cinématographique de la série britannique éponyme. Veronica, Linda, Alice et Belle se retrouvent liées par une douleur commune après que leurs époux respectifs ont été tués lors d’un braquage qu’ils avaient eux-mêmes commandité. Les quatre veuves vont alors décider de s’unir pour finir le travail inachevé et ainsi payer les dettes laissées par les défunts.

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- Séries -

Tell Me a Story

(thriller psychologique) de Kevin Williamson Saison 1, 31 octobre, CBS All Access

Le scénariste de la franchise des Scream et créateur de séries TV (Dawson’s Creek, The Vampire Diaries, The Following) revisite les contes pour enfants qui, on le sait bien, ne sont pas si innocents que ce qu’on nous a fait croire durant notre tendre enfance, dans une version moderne et dark. Adaptée d’un format espagnol et prenant place dans un New York contemporain, cette nouvelle production américaine mélange plusieurs contes et exploite le côté horrifique et délicieusement macabre des récits originels.

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- Jeu Vidéo -

Fallout 76

(action, RPG), sortie le 20 novembre - PC // PS4 // ONE

Sixième opus de la série de jeux éponyme, Fallout 76 vous propose d’incarner l’un des premiers habitants à sortir de l’abri 76 après les explosions des bombes nucléaires survenues 25 ans plus tôt. Vous avez donc pour mission de rebâtir un monde en ruines. Grande nouveauté de la licence : le jeu est exclusivement multijoueur avec malgré tout, une mise à disposition de serveurs privés à une date ultérieure.

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Les pépites du 7ème art selon nos Rédacteurs EYE IN THE DARK  : We Need to Talk about Kevin Lynne Ramsay (2011) Stella : Zodiac - David Fincher (2007) Le comte Gracula  : Wet hot american summer, - David Wain (2001) SuPERTRAMP : The Rain - Jannik Tai Mosholt et Esben Toft Jacobsen (2018) Aeryn : Ipcress Danger Immédiat - Sidney J. Furie avec Michael Caine (1965) The Watcher : Blue Steel - Kathryn Bigelow avec Jamie Lee Curtis (1989)

- Eye In The Dark


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