Le Bonbon Nuit - 83

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Le Bonbon Nuit → 05/2018

Le 13 avril dernier, le Petit Palais donnait une soirée en honneur des peintres hollandais. Ce qui se présentait comme un moyen de sensibiliser un public à une exposition a finalement tourné comme toutes les tentatives de sortie culturelle un vendredi soir : un apéro. Dj set, queue au bar et décor mirifique, tout ce qu’il fallait pour intégrer le Panthéon des soirées stylées, aux côtés de gens stylés, avec un but un peu plus stylé que celui consistant simplement à s’enivrer – n’oubliez pas, c’était dans un musée. Vendredi, 13 avril. Il est presque 20h. Le soleil se couche sur Paris, tandis que les âmes de fêtards s’éveillent. Le week-end, communément vécu comme une libération des chaînes du travail, permet aux êtres humains de lâcher prise, de s’adonner à des activités divertissantes et de déconnecter leur bulbe – pour le peu qui correspondent à une frange confortable de la population. Ainsi, tout ce temps rendu disponible par l’absence d’obligations lucratives ouvre la voie à des sorties culturelles, l’entretien de sa vie sociale ou même les deux à la fois pour les plus audacieux. Malheureusement, les moments passés avec ses amis se révèlent souvent être un gouffre aussi bien financier que physiologique ; on donne son accord pour déguster une bière, on finit le lendemain avec un mal de crâne équivalent à 15 heures d’écoute de Despacito, les poumons atrophiés, la carte bancaire en situation critique. Aucune pensée intellectuelle ne transite par le cerveau – sauf celle de la culpabilité d’avoir passé un énième week-end à jouer avec ses points vie et ses responsabilités. Je répète : cette description correspond à la vie de quelqu’un de plutôt aisé, vivant plutôt en Occident. Si vos valeurs ne correspondent

pas à celles d’un rythme capitaliste teinté d’hédonisme 2.0, passez votre chemin. Ce qu’il y a d’extraordinaire avec Paris, c’est bien cette cohabitation inédite entre une offre culturelle foisonnante et un esprit festif frénétique. Le problème est que pour profiter de l’un, il faut sacrifier l’autre. Et le dilemme revient chaque semaine : faire la fête ou stimuler sa matière grise ? Toutefois, les promoteurs culturels ont toujours plus d’un tour dans leur sac et, pour éviter ce genre de choix cornélien, pensent des liaisons entre des univers artistiques aux codes différents, afin de faire tout plein d’heureux. C’est ainsi que des événements comme celui de ce vendredi 13 prennent vie. Le Petit Palais, institution mythique, s’est donc allié à Trax Magazine, fer de lance de la presse électronique française, pour une soirée encore plus inédite que ce festival réunissant K’Maro, Tragédie et les L5. Parce que bon, ils sont bien sympas avec leur revival des 90’s mais en attendant, il y a des gens qui proposent des choses visionnaires, comme inviter un artiste à mixer pour promouvoir une exposition sur les figures hollandaises de la peinture. Je vous l’accorde, on frôle le même niveau d’excitation que la sortie de l’album posthume de David Bowie ou du vote Macron au second tour de la présidentielle – non pas contre le FN, mais par conviction. De cette façon, Trax nous montre que ce qu’il y a de super beau dans l’art, c’est l’absence de frontière, et qu’en 2018 nous pouvons nous vanter d’écouter de la techno dans un musée bâti en 1900, à l’occasion d’une Exposition universelle. Pour toujours plus de sensations et de stories Instagram stylées. J’y suis donc allée avec tout

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