Revue UFA 6/2011

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GESTION et organisé de la promotion en magasin pour le lait équitable. Faircoop n’a pas fait d’investissements mais a négocié des sous-traitances pour la collecte, la mise en briques, le stockage et le transport vers les points de vente. Faircoop a engagé un commercial, qui travaille à mi-temps, payé proportionnellement au volume vendu, et une secrétaire, qui organise la présence des producteurs en magasin et gère l’administration cou-

rante. Les membres du conseil d’administration s’engagent concrètement et travaillent pour Faircoop au sein des dicastères marketing, finances, vente, etc. Par exemple, quand il va négocier avec les acheteurs, le commercial est toujours accompagné d’un membre du comité. Selon Monsieur Massoz, c’est un argument très important de discuter directement avec un producteur, parce que lui seul peut expliquer les coûts de production de manière crédible, et la philosophie de la démarche.

Les difficultés de départ Les producteurs sont lents à convaincre. Ils craignent au départ d’aller faire la promotion sur les points de vente. Aucune laiterie belge n’a accepté de mettre le lait en brique sous la marque Fairebel, même si le produit était payé un prix couvrant la marge. Les consommateurs ont dénoncé le fait que la marque utilise les couleurs du drapeau belge mais que le lait effectif dans la brique peut être luxembourgeois. Selon Erwin Schöpges, «on est conscient du problème que ça pose pour notre image, et on a dû s’expliquer avec les organisations de consommateurs. Mais en fin de compte, ils ont bien compris notre philosophie et nos difficultés, et maintenant on a surmonté cette grosse difficulté.» Les grands distributeurs n’ont pas tous joué le jeu, et ne présentent pas le produit de manière totalement satisfaisante en magasin. A noter que ni Aldi ni Delhaize (le principal grand distributeur belge) n’ont accepté de prendre le Fairebel en magasin.

Les limites La promesse est uniquement sur la rémunération équitable du producteur. A la fois c’est un point fort, parce que le message est simple, à la fois l’argument peut s’affaiblir avec le temps ou être concurrencé facilement par une marque concurrente. Selon nous, la pression politique est un soutien très important du travail de l’agent commercial. Sans pression politique, il est probable qu’il serait beaucoup plus difficilement écouté par les acheteurs des grands distributeurs belges. A noter que le nombre de membres est limité si on veut garder les 10 cts/litre. En effet, le montant des ventes dépend du volume total vendu, qui peut stagner en fonction de la collaboration des grands distributeurs. La motivation des grands distributeurs n’est pas très forte (marge à peine supérieure à celle réalisée sur les laits premier prix), à long terme elle dépend de ce qu’apportera au grand distributeur les actions de promotion directes en magasin sur les ventes de lait.

Quelque part, vendre du lait équitable n’est que le passage à l’acte de la revendication d’un prix équitable.

A une époque où le marché du lait reste sous pression, cette initiative courageuse et innovante mérite d’être saluée, même si le modèle marketing choisi a ses limites et ne va pas résoudre tout d’un coup.

Les bonnes idées La marque Fairebel est strictement propriété des membres de Faircoop et se distingue clairement de la marque de l’EMB (autonomie de gestion et de décision). Le modèle de Faircoop reprend celui de l’énergie verte: pas d’investissements au départ dans une usine ni dans du matériel, pas de coûts de collecte du lait. Les investissements sont le fonds de roulement, le marketing et le salaire du commercial, et sont couverts par les parts des coopérateurs (subventionnées par le ministère wallon de l’agriculture). Le produit est un lait UHT: 180 jours de conservation donc il n’y a pas d’invendus (on ne produit que ce qu’on a déjà vendu). REVUE UFA · 6 2011

Résultats économiques Fin mars 2011, 450 producteurs se sont affiliés à la coopérative Faircoop. En 2010, première année de fonctionnement, une part va rapporter environ 25 euros. Pour un coopérateur qui détient en moyenne 25 parts, cela représente un montant de 625 euros. Le lait est acheté brické sorti d’usine au prix nécessaire pour que le producteur qui a livré le lait soit payé au prix du marché. Le consommateur paye en magasin 90 cents, ce qui correspond à un prix du lait payé au producteur de 40 cents/litre (prix jugé équitable sur la base d’une large enquête européenne sur les coûts moyens de production). 䡵

Auteure Dominique Barjolle, Institut des décisions environnementales, ETH Zürich, SOL B7 8092 Zurich

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