La gazette de la
lucarne
15 mars 2013 2 €
n 57 o
La Lucarne des Écrivains, 115 rue de l’Ourcq, 75019 Paris – tél. : 01 40 05 91 29 – http://lalucarnedesecrivains.wordpress.com
Chers amis de la Lucarne, Si la célébrité peut arriver (La descente de l’Olympe, p. 12), elle est loin d’être un rêve partagée par tous. La plupart d’entre nous espèrent plutôt une certaine reconnaissance de leurs actes et de leur être. Cette forme pourtant réduite de la gloire est déjà un accomplissement, à l’image de ce lecteur qui permet une survivance de l’œuvre écrite et de son auteur (Rallonge, p. 1). Mais ne nous y trompons pas : tous succombent et meurent, parfois dans des conditions étonnantes eu égard à leur renommée (Le crépuscule des vieux, p. 1011), et nos propres vies, en attendant la sortie des artistes, sont remplies d’humbles joies et de malheurs discrets (p. 4 à p. 8). Lumière fugace, gloire du matin (Matinale, p. 9) : profitons ensemble de ces rares moments de bonheur tranquille et, sans se soucier du lendemain, aimons tout : la gloire, les déboires, les amis, les étrangers et le soir. Jean-Baptiste Féline P. S. : Pour aider La gazette de la lucarne à rester dans la gloire, parlez-en autour de vous, offrez des numéros, sollicitez des abonnements et continuez à nous envoyer vos écrits ! Merci. Nouveau site ! Voir ci-dessus.
Rallonge Paul Desalmand Eduardo Filipe a.k.a. Sama
Éditorial
s e r i o b é d t e e r i Glo
C
hacun, au moment où il écrit, pense à un lecteur, même quand il s’en défend. Le mien trouve mon livre plusieurs dizaines d’années après ma mort, dans un grenier, plutôt en province, ou chez un bouquiniste, ou dans le salon d’un ami, de toute manière, par hasard. Il a ouvert le livre comme ça, plus ou moins par désœuvrement, et, brusquement, l’électricité passe. Il reçoit une petite secousse et accroche, trente secondes, dix minutes, plus, cela n’a pas d’importance, il accroche. Pendant un temps, je revis. Il a perçu un être de chair même si celui-ci n’a plus de peau sur les os, avec sa sensibilité, son intellect, son esprit, appelez ça comme vous voudrez. Je dis « il », mais il peut s’agir d’une femme, je l’imagine plutôt jeune, mais il peut être vieux. Le détail ne compte pas. L’essentiel tient dans cette résurrection où, tandis que je suis déjà en train de me dissoudre dans le grand tout, quelqu’un me prolonge. Cette idée d’une survie, un peu à l’image du feu que l’on
entretenait et que l’on se transmettait autrefois, n’est pas spécialement originale, je l’accorde, mais qu’importe, elle est vraie. Le rêve d’une gloire, si minime soit-elle, remplace la vertu consolante des religions qui inventaient de belles fables pour faire admettre aux hommes l’insupportable, l’idée que, de tout ce qu’ils ont vécu, espéré, construit, il ne restera rien. Cette foi dans un sursis qui peut se prolonger longtemps, même quand il s’agit d’une gloriole réduite à quelques-uns, est un ersatz de ces métaphysiques rassurantes, un succédané du paradis. Toi, belle jeune fille qui, attirée par mon titre, après m’avoir extirpé du fouillis d’un brocanteur, me feuillettes, mes vieux os, du fond de leur tombeau, te saluent.