auprès de ta femme. Moi, je les traverse, et au sein de ce monde bruyant je suis seule et triste. Mais souvent au milieu de la foule ton image m’apparaît, et, comme une céleste révélation, me remplit de force et d’espérance. Alors je songe aux jours de bonheur qui nous réunissent, et je les vois si purs, si enivrants, que je me soumets à les acheter au prix des peines et des fatigues de ma vie présente. Oh ! je les achèterais au prix de mon sang, et je ne croirais pas les avoir trop payés ! « Parfois, au milieu d’un bal splendide, abrutie en quelque sorte par l’ennui de la représentation, une circonstance légère, un son, le parfum d’une fleur, me réveille et me ranime tout à coup ; frappée d’une émotion inexplicable, il me semble que je viens d’entendre ta voix ou de respirer tes cheveux ; je tressaille, mon cœur bat avec violence, c’est comme si j’allais mourir. Alors je m’enfuis, je m’enfonce dans l’ombre des jardins, et je vais pleurer de souffrance et de bonheur dans notre cher pavillon. Quelquefois par de violentes aspirations je voudrais franchir l’espace et suivre ma pensée qui s’élance vers toi ; mon désir devient un feu qui consume ma poitrine, la force me manque. J’accuse le destin qui nous sépare ; prête à renier mon bonheur, je pleure et je perds courage. Mais alors je descends dans le caveau, et, sur la tombe qu’autrefois je te fis élever, je pleure de joie et je 263