Platon-Phedon

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déjà demandé, et l’autre jour encore Évènos1, quelle idée tu as eue, depuis que tu es ici, de composer des vers, toi qui jusque-là n’en avais point fait de ta vie. Si donc tu tiens à ce que je puisse répondre à Évènos, quand il me posera de nouveau la question, car je suis sûr qu’il n’y manquera pas, apprends-moi ce qu’il faut que je lui dise. – Eh bien, Cébès, répondit Socrate, dis-lui la vérité, que ce n’est pas dans le dessein de rivaliser avec lui ni avec ses poèmes que j’ai composé les miens, car je savais bien que ce n’était pas chose aisée, mais que c’était pour éprouver le sens de certains songes et que, pour acquitter ma conscience, je voulais m’assurer si c’était bien ce genre de musique qu’ils me prescrivaient de cultiver. Voici en effet de quoi il s’agissait. Souvent, dans ma vie passée, j’ai eu la visite du même songe ; il apparaissait tantôt sous une forme, tantôt sous une autre, mais il me disait toujours la même chose : « Socrate, fais œuvre de poète et cultive la musique. » Et moi, jusqu’ici, je croyais que c’était précisément ce que je faisais qu’il m’encourageait et m’excitait à

homérique à Apollon. Les préludes étaient, à proprement parler, des vers d’introduction à un poème ou à la célébration d’une fête religieuse. 1 Évènos de Paros, sophiste et poète, enseignait la vertu pour cinq mines (Apologie, 20 b). Il avait, d’après le Phèdre (267 a), inventé de nouvelles figures de rhétorique.

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