Malot-Kalbris

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– C’est fini, dit-elle faiblement. Je m’assis près d’elle et tâchai de lui faire comprendre qu’il fallait marcher encore. Elle était comme une chose inerte, ne me répondant pas, ne m’écoutant pas ; ses mains seules semblaient encore vivantes, elles brûlaient comme des charbons. Au bout de quelques minutes, la peur commença à me prendre ; personne ne passait ; je me relevai pour regarder au loin ; rien que ces deux lignes de pierre et au milieu la neige blanche. Je la priai, la suppliai de se relever ; elle ne me répondit pas. Je voulus la porter, elle se laissa faire ; mais au bout de quelques pas, je fus obligé de me reposer : je ne pouvais pas. Elle se laissa glisser à terre. Je m’assis auprès d’elle. C’était fini ; il fallait mourir là. Sans doute, dans son accablement, elle avait conscience de notre position, car elle se pencha contre moi, et doucement de ses lèvres glacées et tremblantes, elle m’embrassa. Cela me fit monter les larmes aux yeux et mon coeur se serra. J’espérais cependant que les forces allaient lui revenir, et que nous pourrions continuer ; mais elle ne fit pas un mouvement ; les yeux clos, elle se laissa aller contre moi ; si elle n’avait pas été secouée par un tremblement saccadé, j’aurais cru qu’elle était morte. Deux ou trois passants, surpris de nous voir ainsi 251


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