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problématique : l’outil culturel est au service du renouveau urbain, ils sont aux deux extrêmes. A travers le développement d’entreprises appartenant au champ de la création, il s’agit de favoriser l’émergence d’une « atmosphère créative », destinées à construire des villes dont le dynamisme est marqué par l’existence d’une « classe créative ».36 Recomposer un patrimoine et une attractivité par le monument, c’est donc bien ce sur quoi Bilbao a misé avec le musée Guggenheim : faire de lui un symbole, une force commerciale, un flagship. Un mono‐élément qui diffuse l’attractivité escomptée aux vues des chiffres : pour 135 millions d’euros investit dans le musée, 735 millions sont engendrés pour être ensuite réinvestis ( Les Echos, 1er décembre 2005). Mais ici, à Nantes, Saint‐Nazaire, le contraire opère : construire un archipel par le renforcement de potentiels en présence. Un monument immatériel.
L’investissement se fait sur l’intervention qui va révéler, sur un temps long. C’est cette pratique du « monument dispersé » comme le nomme Jean Blaise, que nous allons décrire pour comprendre les spécificités d’une politique culturelle made in Nantes.
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De l’événement au monument, une temporalité de la festivalisation Même si Nantes possède les emblèmes d’un fort équipement culturel ‐ un opéra, un orchestre national, un conservatoire national, un centre chorégraphique national, des scènes nationales, un théâtre universitaire ‐, ce sont les initiatives qui sont plutôt porteuses du projet culturel. Des initiatives devenues des modèles internationaux et qui rejaillissent sur l’identification d’une force nantaise. Les « folles journées », journées de démocratisation de la musique classique dans l’espace public s’exportent aujourd’hui à Lisbonne, à Tokyo ou encore à Bilbao. Des connexions internationales s’opèrent par le simple fait de mettre une ville à l’honneur, de créer des échanges sur les devenirs des villes portuaires, comme c’est le cas dans le cadre des « Allumés » (fig 39). Ces festivals sont les monuments itinérants de la métropole. Ils imposent des modèles qui se déplacent. En s’inscrivant dans des lieux, ils irriguent et se ramifient à chaque édition des festivals. L’initiative crée une descendance, comme celle du Lieu Unique. Des interventions de Royal Deluxe, spectacle de rue, est né le projet permanent des Machines de L’île. Deux points capitaux réunissent toutes ces manifestations : 36
FLORIDA Richard, The Rise of the Creative Class : And how it’s transforming Work, Leisure, Community and Everyday Life, New York, Basic Books, 2002