La mobilité en Ile de france

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Dossier spécial Île-de-France

an. « C’est aberrant de ne pas avoir prévu de mieux couvrir les coûts », répète à l’envi Valérie Pécresse, présidente de la région Ile-de-France et d’IdFM. L’autorité organisatrice des transports franciliens a fini par obtenir, bien après le lancement du projet, un poste d’observateur au sein de la SGP. Quoi qu’il en soit, « les recettes commerciales des gares iront dans les caisses de la SGP pour gager ses emprunts », explique Bernard Cathelain, membre du directoire de la SGP.

Quinze tunneliers fin 2019

Pour répondre aux critiques de Valérie Pécresse, Thierry Dallard, président de la SGP, a proposé à Matignon un certain nombre de réaménagements de certaines gares pour faire baisser les coûts de construction et de maintenance, et augmenter leur valorisation. La SGP cherche à maîtriser ces coûts pour mieux faire face à certains postes de dépenses, ceux laissés de côté comme les interconnexions, et aux inévitables aléas techniques, dans un soussol francilien déjà bien occupé (gare de La Défense), ou fragilisé par les carrières et autres marnes argileuses. En tout cas, le chantier du Grand Paris Express bat son plein avec une activité d’une ampleur inédite. À la fin 2019, dix tunneliers de plus seront entrés en action, s’ajoutant aux cinq déjà à l’œuvre (deux pour la SGP, trois pour la RATP). La SGP ouvre les vannes avec 3,9 milliards d’euros de dépenses grâce à un recours à l’emprunt de 3,3 milliards, en partie gagé sur des recettes fiscales locales. De quoi donner le vertige. Même à des partisans du projet comme le sénateur des Hautsde-Seine Roger Karoutchi (LR) : « 700 millions d’euros sont prélevés chaque année, et ce n’est pas pour une courte période… et il n’est pas certain que les coûts n’explosent pas ! » l 36

Grand Paris Express

En attendant les résultats de l’audit PWC « Nous attendons pour l’été les résultats d’un audit commandé à PricewaterhouseCoopers (PWC), qui va nous permettre de voir si on a bien fait les choses et d’affiner le planning ainsi que les coûts ligne par ligne. Il sera soumis au conseil de surveillance de la SGP en juin ou en septembre », expliquait Thierry Dallard lors d’une visite du chantier de la ligne 16, début mars. On le voit, le président du directoire de la SGP procède par petites touches pour parvenir à faire accepter par des élus très chatouilleux un très probable étirement du calendrier de mise en service du Grand Paris Express. Ce scénario satisfait au moins la Fédération nationale des travaux publics, favorable à ce que le chantier soit lissé. En réalité, la SGP joue avec cet audit une part de sa crédibilité future quant à sa capacité à tenir les délais qui seront calés avec le gouvernement dans les mois qui viennent. D’où cette démarche assez nouvelle lancée avec PWC en novembre 2018. « Il s’agit de nous aider à caler les plannings et à lisser le lancement des appels d’offres, explique la SGP. Car cela ne sert à rien de lancer quatre ou cinq marchés en même temps, si les entreprises ne sont pas capables d’y répondre. À quoi bon afficher des dates de réalisation si elles ne sont pas tenables. » L’objectif affiché par le chef d’orchestre de la construction du GPE est d’avoir lancé tous les marchés d’ici les JO. La SGP est également très attendue sur sa faculté à contenir les coûts de ce chantier, qui ont déjà largement dérapé, comme l’a souligné la Cour des comptes fin 2017. D’ores et déjà, Thierry Dallard a échafaudé des scénarios, soumis fin 2018 à Matignon pour réduire de 10 % le coût du chantier, soit une économie de 2,6 milliards d’euros. Recours à la conception-réalisation Parmi les solutions envisagées, le recours pour les lignes dont les marchés n’ont pas encore été attribués (comme les 15 est ou 15 ouest), à la construction de lot par conception-réalisation, où les groupements de travaux publics réalisent eux-mêmes les études et la construction. Ce qui implique au passage de casser les contrats d’ingénierie déjà attribués, moyennant une probable indemnisation, et que les ingénieries rallient éventuellement les groupements. Le gain attendu se chiffre en temps gagné et donc en coûts contenus. Autres pistes, plus techniques : revoir l’organisation des travaux de certaines gares, comme celle de Saint-

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Descente de la roue de coupe du tunnelier sur le site de la future gare d’Arcueil-Cachan, en février dernier. La SGP doit économiser 2,6 milliards d’euros sur l’ensemble de ses chantiers.

Maur-Créteil, dont la construction a déjà pris six mois de retard. Plus systématiquement, utiliser, comme sur la ligne 16, du béton fibré qui permet l’économie de milliers de tonnes d’acier. « À la clé, 200 000 à 600 000 euros d’économie au kilomètre », chiffre Bernard Cathelain, membre du directoire de la SGP. Et ce n’est pas tout ! Il y a aussi des propositions moins consensuelles, comme des modifications de tracés (15 est, 15 ouest, 18), de la localisation des gares et de leurs accès. La suppression de l’interopérabilité des lignes 15 sud et 15 est à Champigny (Valde-Marne), encore en discussion, permettrait ainsi de réduire le coût des travaux. Certains proposent aussi de transmettre la facture de certaines gares ou équipements techniques à la RATP ou à la SNCF, ou encore au promoteur d’EuropaCity pour la gare de Gonesse, si ce projet parvient à se réaliser. Un an après les premiers arbitrages rendus par le Premier ministre, Edouard Philippe, l’audit de PWC devrait relancer la polémique, avant, il faut l’espérer, de déboucher sur un phasage crédible.

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