PROGRAMME
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RENCONTRES NATIONALES DU LOGEMENT ET DE L’HABITAT
VENDREDI 8 NOVEMBRE 2013 AUBAGNE ESPACE DES LIBERTÉS
un événement organisé par
en partenariat avec
et avec la participation de
www.hqbconseil.com.
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Déroulement de la journée
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Résoudre la crise du logement: 1 an après le coupe d'envoi
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Présentation des intervenants
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Le Pacte du Logement
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Refonder le système national du logement, par Jean-Pierre Lévy
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Territorialiser la lutte contre le mal-logement, par Christophe Robert
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Logement, habitat et service public, quelles perspectives?
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Présentation des intervenants, La conférence de consensus à Lille
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Politique sociale ou service public, quel cadre juridique?
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Les outils de régulation du marché locatif privé, par Jean-Philippe Brouant
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Habitat et service public pour la CGL
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De l'urbanisme à l'habitant, fiscalité et foncier
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Fiscalité et prix du logement, par Vincent Renard
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Economie et immobilier, par Vincent Renard
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Débat des Laboratoires d'idées
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Présentation des intervenants
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L'observatoire de l'action publique, Fondation Jean-Jaurès
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Politique du logement: et les investisseurs institutionnels? Terra Nova
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Notions de confort, par Patrick Amico
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Oser l'habitat participatif
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Présentation des intervenants
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De l'expérimentation à l'institutionnalisation, par Camille Devaux
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L'habitat participatif dans les politiques de l'habitat en région Paca
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Mieux coopérer pour un autre habité
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Habitat et économie sociale et solidaire
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La chambre régionale d'ESS Paca et l'habitat
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De l'expérimentation à la démonstration, par Michel Gontard
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Ville, habitat et écologie: des solutions à portée de main
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Présentation des intervenants
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ALUR, pour l'accès au logement et à l'urbanisme rénové, par Guy Lemée
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Crise et mal-logement: la "vulnérabilité résidentielle" par Yankel Fijalkow
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L'avenir des centre-ville
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HLM et ville durable
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Repères bibliographiques
BIENVENUE Les premières Rencontres Nationales du Logement et de l’Habitat ont été lancées en février 2011 par une démarche de concertation citoyenne dont l’initiative se poursuit aujourd’hui. En 2013, après leur contribution au débat national sur la trans i t i o n é n e rg é t i qu e « Habitat et transition énergétique : innover autrement face à la crise du logement » puis la manifestation culturelle pendant les Rencontres de la photographie en Arles, sur le thème « Images du logement social » dans l’été, les Rencontres Nationales du Logement et de l’Habitat tiendront leur 3e édition aujourd’hui à Aubagne. Comme chaque année, sont réunis professionnels et experts, opérateurs et bailleurs, élus locaux et nationaux, responsables associatifs et syndicaux, habitants et citoyens, pour débattre ensemble des avancées face à la crise et de leurs limites, mais surtout des perspectives. A travers une réflexion sur le service public, sur la ville et l’écologie, sur le d é ve l o p p e m e n t d e l’habitat participatif, le programme s’attache aux sujets clés du débat public.
une journée organisée par
La Communauté d’Agglomération Pays d’Aubagne et de l’Etoile en partenariat avec
ICF habitat SEM Vilogia-Rhône-Méditerranée La Région Paca Le Conseil Général des Bouches-du-Rhône et avec la participation de
Cabinet HQB CRESS Paca Habitat et Avenir Fondation Copernic l’AITEC Fondation Abbé Pierre Fondation Jean Jaurès Terra Nova la CNL la CGL Maltae ADIL 13 AR HLM Paca Corse Maison de l’Architecture et de la Ville
2013RNLH3
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10h en plénière salle Stéphane Hessel Résoudre la crise du logement : 1 an après le coup d’envoi !
11h en plénière salle Stéphane Hessell Logement, habitat et service public : quelles perspectives ? 11h50 atelier A salle Hessel A
Politique sociale ou service public, quel cadre juridique ? 11h 50 atelier B salle Hessel B
De l’urbanisme à l’habitant, fiscalité et foncier
12h30 en plénière salle Stéphane Hessell Débat des Laboratoires d’idées Suivi du lancement du réseau des services-publics de l’habitat
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15h en plénière A salle Stéphane Hessel Oser l’habitat participatif ! 15h45 atelier salle Hessel A
Mieux coopérer pour un autre habité 15h45 atelier salle Hessel B
Habitat et économie sociale et solidaire
15h en plénière B salle Simone Veil Ville, habitat, écologie : des solutions a portée de main ? 15h45 atelier salle Hessel C
L’avenir des centre-ville 15h45 atelier salle Simone Veil
HLM et ville durable
16h45 en plénière salle Stéphane Hessel Conclusion, en plénière
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résoudre la crise du logement : un an après le coup d’envoi
10h en plénière Marie-Noëlle Lienemann Sénatrice de Paris, Ancienne Ministre du Logement Christophe Robert Délégué Général adjoint de la Fondation Abbé Pierre Daniel Fontaine, Maire d’Aubagne, Vice-Président du Conseil Général des Bouches-du-Rhône Eddie Jacquemart Président de la CNL Jean-Pierre Levy Géographe, Directeur de recherches au CNRS Bernard Coloos Directeur à la Fédération Français du Bâtiment, Professeur à Sciences Po Animé par David Chiousse Directeur du service Logement à Aubagne !
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Christophe Robert
Marie-Noëlle Lienemann
est Délégué général adjoint de la Fondation Abbé Pierre au sein de laquelle il a notamment en charge, depuis 2007, la coordination du rapport annuel sur l’état du mal logement en France. Docteur en sociologie, il a auparavant exercé pendant 10 ans une activité de chercheur dans un bureau d’études à Paris dans les domaines de l’habitat, de la politique de la ville ainsi que sur les thèmes de l'exclusion et du développement culturel. Il est également membre du Comité d’évaluation et de suivi de l’Anru (Agence Nationale de Rénovation Urbaine), de la Commission nationale consultative des gens du voyage, de la Commission nationale Solidarité et Renouvellement urbains (Sru), du Comité de suivi de la mise en œuvre du droit au logement opposable et de l’Observatoire Nationale de la pauvreté et de l’Exclusion Sociale (Onpes).
Ancienne ministre et ancienne vice-présidente du Parlement européen, elle est depuis 2011 sénatrice de Paris. Elle siège au Bureau de la Haute assemblée comme Secrétaire ainsi qu’à la Commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire. Elle est membre du bureau National du Parti socialiste et anime le club Gauche Avenir qui milite pour le rassemblement de la gauche. Elle préside la fédération nationale des Coopératives HLM qu’elle représente au Conseil National de l’Habitat. Normalienne supérieure diplômée de l'ENS Cachan, elle est professeur de Physique-Chimie. Auteure d’une quinzaine de livres, elle a notamment fait paraître en 2005 Le Scandale du logement, en finir avec l’indignité de la République, aux éditions Jean-Claude Gawsewitch.
Daniel Fontaine
Jean-Pierre Lévy
Daniel Fontaine est maire d’Aubagne (47 000 habitants) et vice-président du conseil général des Bouches-du-Rhône, délégué au logement et à l’habitat. Il est également vice-président de la communauté d’agglomération du Pays d’Aubagne et de l’Etoile (104 000 habitants), délégué aux transports. Depuis 2009, ce territoire a notamment mis en place la gratuité des transports publics.
est géographe, directeur de recherche CNRS et directeur du Laboratoire architecture, ville, environnement (LAVUE, UMR 7218). Il a consacré une grande partie de ses recherches aux questions d’habitat et de peuplement urbain, aux pratiques sociospatiales des espaces urbains. Ses recherches les plus récentes portent sur la modélisation de l’impact de l’offre de logement sur les transformations de l’occupation globale des parcs de logement, et sur les consommations énergétiques domestiques. Il a publié en 2010 Écologies urbaines (codirigé avec Olivier Coutard, chez Anthropos) et Élire domicile. La construction sociale des choix résidentiels (codirigé avec Jean-Yves Authier et Catherine Bonvalet, aux Presse universitaires de Lyon).
Bernard Coloos
Eddie Jacquemart
est Directeur aux affaires économiques, financières et internationales, Fédération Française du Bâtiment, Professeur associé à Sciences-Po. Bernard Coloos est Directeur aux Affaires Économiques, Financières et Internationales de la Fédération Française du Bâtiment depuis 1996. Il a été Chargé du bureau des Études économiques à la Direction de l'Habitat et de la Construction de 1990 à 1994 et Directeur de l’Observatoire Immobilier et Foncier du CFF. Titulaire d’une maîtrise de Droit privé et d’un doctorat de 3ème cycle en sciences économiques, il est également professeur associé au Master Aménagement et Urbanisme à l’IEP Paris. Il est l’auteur de nombreux articles sur les questions immobilières notamment et de plusieurs ouvrages dont Habitat et Villes aux éditions de l’Aube, paru en 2010.
est Président national de la Confédération Nationale du Logement, responsable du pôle d’activité Europe et Internationale. Pour lui, les HLM, où il a découvert la salle de bain, sont un symbole du progrès social qu'il faut défendre. Il rencontre la CNL en 1995 en créant une amicale HLM dans la banlieue lilloise. Depuis 2006, il s'intéresse aux questions du logement des pays voisins et depuis 2009, représente la CNL au Bureau de l’IUT (International Union of Tenants – Union internationale des locataires).Expert-comptable, il a travaillé en cabinet pendant dix ans avant de devenir conseiller financier d'une grande fédération d'associations dans le secteur médico-social où il a pu observer et accompagner des associations très diverses; puis directeur administratif et financier dans une association nationale.En 2013, suite au 50e Congrès National, il est élu président national de la CNL.
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Repères: les pistes du pacte du logement Les 26 et 27 mai 2011, à Aubagne, se sont tenues les Premières Rencontres Nationales du Logement et de l’Habitat sur le thème : « 5 ans pour résoudre la crise du logement ». Durant deux jours, près de 300 participants – élus, responsables associatifs, syndicalistes, citoyens engagés mais aussi professionnels et experts – ont travaillé ensemble, en mêlant la compétence et la volonté, l’humilité et le courage de se confronter, en citoyens, à ce sujet qui nous concerne tous et qui ne dépend que de nous. A l’issue de ces travaux, il apparaît clairement que sortir de la crise du logement est devenu un enjeu politique central de la mandature qui s’annonce. C’est le sens de la charte des Premières Rencontres Nationales du Logement et de l’Habitat. Elle se compose de 9 pistes d’actions. Simples, elles sont nos repères, les clés de nos analyses et l’expression de nos attentes.
- Elargir les espaces de citoyenneté pour une plus grande appropriation démocratique du logement et de la mixité sociale - Prioriser la réhabilitation comme facteur essentiel pour la qualité de vie et la réduction des charges - Inventer un service public qui garantisse et sécurise le droit au logement - Dégager les moyens pour construire plus et moins cher - Prendre des mesures efficaces pour réduire le taux d’effort des ménages - Construire des logements de qualité pour répondre aux besoins de chaque territoire - Généraliser l’accès du 1% à tous les salariés, du public comme du privé pour répondre à leurs besoins - Revenir à une politique d’aide à la pierre ambitieuse en faveur du logement social - Créer une nouvelle fiscalité volontariste et incitatrice régulant les prix et libérant le foncier
Depuis, les RNLH on lancé le coup d’envoi des 5 ans pour résoudre la crise du logement, lors des 2e Rencontres il y a tout juste un an, le vendredi 9 novembre 2012. 6
Refonder le système national du logement
Les propositions qui ont émergé dans la campagne permettent-elles un véritable règlement des questions de mal-logement ? Pas sans une refonte des socles de la politique nationale du logement.
par JEAN-PIERRE LEVY ET MARIE-HELENE BACQUE
Partons de la proposition suivante : pour domicilier les pauvres et garantir un toit aux mal-logés ou sans-logis, il faut que le parc de logement soit le plus ouvert possible, que tout logement construit ou libéré puisse être considéré comme un logement social potentiel, que le choix résidentiel devienne une réalité, qu’un logement libre, quel qu’il soit, où qu’il se trouve, soit accessible sans discrimination de condition sociale ou de revenus. Principe utopique ? Vision démagogique impensable dans une société inégalitaire ? Nous ne le pensons pas. Nous pensons même que c’est la complexité de la question du logement qui commande aujourd’hui la prise en considération de ces principes simples. De quelle situation partons-nous ? Un constat semble s’imposer aujourd’hui dans les médias et discours politique, celui d’une crise quantitative du logement : le nombre de logements libérés ou construits en France ne suffirait pas à loger l’ensemble des ménages en attente d’un logement ou mal logés. Les données produites par la fondation abbé Pierre évoquent en effet, en 2007, l’existence de 100 000 personnes sans domicile fixe, près de 300 000 privés de domicile personnel et hébergés, 100 000 encore vivant dans des campings. Au total ce sont trois millions de personnes qui vivent en France dans des conditions de logements difficiles. Bien sûr, ces données recouvrent des situations très contrastées. Pour certains, il s’agit d’errance urbaine, de foyers d’accueil transitoire ou de nuits dans la rue. Pour d’autres, elles signifient l’hébergement chez des proches ou des tiers. Elles concernent aussi des familles logées dans des domiciles exigus, parfois une simple chambre sans confort voire insalubre, ou des ménages en difficulté occupant des logements dégradés en accession à la propriété nécessitant une intervention publique à court terme. Ces chiffres sont alarmants par leur ampleur et semblent, en première approche, appeler à une politique de construction massive afin que chacun puisse trouver un toit décent. Pour autant, le problème se réduit-il à une insuffisance de logements sociaux ? La question de l’accès au logement n’est pas nouvelle et perdure depuis près de vingt ans en France. En surgissant brutalement dans le paysage national des années quatre-vingt, alors que le sentiment général était que la question du logement était quantitativement résolue, elle a provoqué interrogations et incompréhension. La précédente crise du logement était celle de l’après-guerre que les politiques publiques ont traitée à coup de constructions massives dans le contexte de croissance économique des Trente Glorieuses. Jusqu’au milieu des années soixante-dix, ce sont plus de 500 000 logements qui étaient construits chaque année, la plupart publics et financés avec le soutien de l’Etat. Cette réponse était à la hauteur des enjeux. Quantitative elle a donné les résultats escomptés : une amélioration constante du parc immobilier, une réduction sensible des secteurs insalubres et, surtout, un logement décent
à coût abordable pour l’immense majorité de la population française. Mais elle a également eu les contre effets que l’on sait : un financement du logement segmenté selon les revenus des ménages, des constructions top hâtives pour perdurer, une densification des secteurs urbains périphériques sans une véritable politique urbaine d’accompagnement et, à terme, la concentration de populations modestes, étrangères ou fragilisés dans des logements et des zones devenus le symbole de l’exclusion sociale. La concentration territoriale de la pauvreté s’est réalisée en phase avec le développement de la précarité et de la flexibilité dans la société depuis la fin des années quatre-vingt. Mais la politique nationale du logement a, durant cette période, prolongé une orientation qui reposait sur le diagnostic des années soixante-dix -une crise quantitative résolue- et sur le désengagement public de la construction au profit du recours à l’aide à la personne que l’on espérait de moins en moins coûteuse et sur l’unification du système de financement de logement social pour palier aux effets pervers de ségrégation. On sait combien ces orientations ont été inefficaces. Le désengagement de l’Etat a laissé le champ libre à la promotion privée, les aides aux logements ont explosé (48 % des locataires en bénéficient), la part du logement n’a cessé de s’accroître dans les budgets des ménages, laissant pour compte une part croissante de la population. C’est à la « politique de la ville » qu’a été déléguée la mission d’intervenir dans le domaine résidentiel dans une perspective de développement territorial, en favorisant les quartiers où se cumulaient les stigmates sociaux. Cette politique a été tiraillée entre deux orientations contradictoires : produire du développement local en s’appuyant sur les potentialités des habitants ou transformer les quartiers par la recherche d’une aléatoire mixité sociale. D’une certaine manière la question du logement s’est donc dédoublée en se territorialisant. À l’Etat la gestion, la budgétisation des financements et la programmation nationale de l’offre ; aux collectivités locales le soin d’agir directement sur la géographie de la politique nationale d’offre. De la même façon, si les émeutes de l’automne 2005 avaient focalisé l’attention sur la dimension spatiale de la question du logement, il semble bien que l’hiver 2006 l’aura éloignée d’une dimension trop territoriale pour la recentrer sur un problème d’offre. Pour autant, les schémas proposés pour la résoudre restent inscrits dans les logiques quantitatives d’après-guerre. Ils mettent en avant, de façon récurrente, la nécessité de construire des logements sociaux pour les plus pauvres au sein d’un système de financement du logement que le développement de la précarité a contribué à segmenter à nouveau. Or, nous ne sommes plus dans les années soixante. Si les constructions
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massives avaient alors permis de résorber la crise de l’offre, c’est que le rythme de construction de l’époque suffisait à lui seul à prendre en charge le flux continu de demandeurs de logements. Les rythmes de construction étaient tels que les nouvelles demandes étaient rapidement prises en charge par les nouveaux logements. La situation actuelle est toute autre où, faute de perspectives résidentielles, les déménagements annuels dans le logement social n’excèdent pas 10 % des ménages occupants. Le parc immobilier français compte plus de 31 millions de logements et croît d’environ 1% par an depuis vingt ans. En moyenne, depuis les années 2000, on construit en France environ 300 à 400 000 logements et les deux dernières années auront été records depuis trente ans. Le nombre de logements sociaux tend lui-même à augmenter, même s’il oscille toujours autour de 40 000 unités nouvelles par an. En tout cas, sa part au sein du parc total croît régulièrement : aujourd’hui ce sont plus de 40 % des locataires qui occupent un logement social. Pour autant, ces chiffres sont dérisoires au regard de l’offre en logement offerte chaque année en France. Car en moyenne, ce sont plus de 2,5 millions de logements qui sont “ mis ” sur le marché chaque année, La construction neuve ne représente qu’une infime partie de cette offre, les trois quarts étant dû aux libérations des logements suite à un déménagement. Ainsi, chaque année, les déménagements permettent de loger dix fois plus de ménages que la construction neuve, y compris dans le parc social où les ménages sont globalement plus stables que dans le parc privé. La construction neuve apparaît alors davantage comme une variable d’ajustement permettant de répondre aux effets démographiques de formation de nouveaux ménages, de variations de stock de logements provoquées par les destructions ou les fusions de logements, qu’une véritable politique de création d’offre permettant de “ fluidifier ” un marché immobilier tendu. Dans ce contexte, une politique intensive de constructions de logements sociaux, même si elle s’avère nécessaire, apparaît décalée par rapport aux enjeux quantitatifs du mal logement. Il semble difficile d’évoquer l’existence d’une crise de l’offre immobilière lorsque plus de deux millions de logements sont libérés chaque année et que 300 à 400 000 sont construits. Pour quelles raisons ces millions de logements mis sur le “ marché ” chaque année n’accueillent-ils pas les sans domicile ou les foyers en situation résidentielle précaire ? Comment 100 000 HLM annuels pourraient-ils résoudre le problème du mal logement, si 2,5 millions n’y sont pas parvenus ? L’équation semble davantage relever d’une question de distribution et de répartition des logements disponibles que de construction neuve.
Ces mécanismes n’entrent pas en adéquation avec l’évolution d’une société précarisée et insécurisée par un marché de l’emploi dans lequel la flexibilité s’est imposée comme une norme dominante. On comprend les raisons pour lesquelles les laisser pour compte ne peuvent accéder au marché du logement. Mais le problème va bien au-delà des exclus du marché du travail et concerne peu ou prou l’ensemble des ménages ne pouvant accéder à la propriété. Car les bailleurs, inquiets par le développement de la précarisation, se trouvent aujourd’hui en position d’exiger des garanties d’autant plus contraignantes que le logement sera cher. Pour la grande majorité de la population disposant d’un emploi, il devient difficile de louer un logement si l’on ne dispose pas de réseaux sociaux ou familiaux stables. Sans emploi, cela devient une mission impossible. A cela s’ajoutent les effets de la discrimination ethnique, dans le parc privé comme dans le parc social. Si crise du logement il y a, elle relève davantage d’une perte de confiance entre bailleurs et locataires sous les effets de la précarisation de la société et de formes larvées de discrimination, que d’un manque de construction de logements. Dans ce contexte, une relance de la location s’avère nécessaire, mais elle loin d’être suffisante Diverses solutions ont d’ailleurs déjà été proposées pour enrayer ce mécanisme. Les premières concernent des mesures de défiscalisation afin d’encourager les promoteurs à construire des opérations en location. C’est notamment cette logique qui a été mise en œuvre en 2003 avec “ l’amortissement de Robien ”. Nombreuses sont les associations qui ont dénoncé un système à guichet ouvert qui favorise le secteur de la construction sans agir réellement sur les hausses des loyers et les coûts du foncier (rapport 2006 de la Fondation abbé Pierre). D’autres propositions cherchent à moduler les loyers du parc social en fonction de l’évolution des revenus des habitants, afin d’encourager la mobilité des locataires et accroître l’offre (Anne Laferrère, Le Monde Economie du 11/10/2005). Certains encore vont même jusqu’à proposer d’accélérer les mesures d’expulsion en remettant en cause la trêve hivernale qui protège les locataires débiteurs, afin d’encourager des propriétaires rassurés à louer plus facilement leur logement (Etienne Wasmer, Le Monde du 11/01/07). Enfin, de plus en plus nombreux sont les économistes qui accusent les aides aux personnes d’encourager l’inflation des loyers.
Ces propositions ont en commun de s’attaquer à la question de l’offre en contraignant davantage les locataires. Elles n’abordent l’accès au logement des plus pauvres qu’à travers le développement d’un secteur spécifique (centre d’hébergement, logement social, etc.). Aucune ne l’envisage par un accès généralisé au secteur “ de droit commun ” ouvert aux plus Les causes de cette inégale répartition sont multiples. La fragiles comme à l’ensemble de la population, qu’il relève du première, sans doute la principale, est le soutien dont a secteur public ou du secteur privé. bénéficié l’accession à la propriété ces vingt dernières années qui a assumé près des trois quarts de l’augmentation des Nous pensons à l’inverse que le contexte actuel impose qu’après résidences principales. En contre point, les choix résidentiels avoir été quantitative puis territoriale, la politique nationale du des locataires se sont resserrés, surtout s’ils n’ont pu emménager logement s’inscrive dorénavant et résolument dans une logique dans le parc social dont la croissance a couvert la quasi-totalité d’économie sociale (sociale ? ). Nous préconisons la création de l’augmentation du patrimoine locatif français. Les tensions d’un contrat de confiance renouvelé offrant des garanties sur le marché du locatif s’exacerbent donc provoquant une conjointes aux locataires et aux propriétaires, bailleurs sociaux hausse sensible et rapide des prix des loyers, dans le privé (+ 4 % ou privés. Un tel contrat a pour objectif premier de considérer n 2005), comme dans le secteur social (+2,9 %). l’accès au logement des plus fragiles sur le même plan que
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l’ensemble de la population, sans les rendre nécessairement offertes par l’ensemble du parc immobilier en location. dépendants de mécanismes de constructions de logements qui L’intégration dans un logement ordinaire des plus exclus n’en leur seraient spécifiquement destinés. serait qu’accélérée, tous logement leur étant ainsi potentiellement accessible. L’ensemble des ménages aidés Cette proposition repose sur le constat que, d’un point de vue pourraient ainsi, comme tout un chacun, élaborer des choix quantitatif, les constructions et les déménagements sont à résidentiels en évitant sans aucun doute le recours aux même de créer une offre de logements accessibles à la grande marchands de sommeils ou la location de logements majorité des ménages, mais que la nature de cette offre est inconfortables voire insalubres. pourtant discriminatoire pour les familles étrangères, les ménages aux faibles revenus ou ceux ne pouvant répondre aux En d’autres mots, cette mesure permettrait de poser la question garanties de plus en plus contraignantes exigées par des bailleurs du mal logement en des termes larges et non plus à partir du craintifs. D’ailleurs, la récente prise en charge par l’Etat des nombre de place dans les centres d’hébergement ou les foyers cautions demandées aux jeunes ménages en difficulté montre d’accueil, du rythme de constructions de logements sociaux. Le que les pouvoirs publics commencent à prendre conscience du caractère social du logement ne serait plus déterminé par le problème. Mais nous sommes encore loin du compte. statut du logement mais par les caractéristiques de son occupant. Tout logement vide, construit ou libéré, serait Le moyen le plus efficace pour mettre en place un tel contrat de susceptible d’être un logement social potentiel durant la durée confiance serait, nous semble-t-il, que la totalité du loyer d’un d’occupation d’un ménage aidé. Ce dernier pourrait ainsi ménage aidé, quelque soit le logement occupé et sa localisation, déménager dans le parc immobilier sans être contraint par des soit prise en charge par l’Etat, le locataire étant redevable de sa politiques d’offre restrictives et des attributions discriminatoires. quote-part (loyer déduit des aides) au Trésor Public. Le locataire Le choix résidentiel serait érigé en norme commune et partagée. aurait ainsi un toit garanti et le propriétaire un loyer assuré. Cette mesure nécessite évidemment la mise en place Les avantages attendus d’une telle mesure sont multiples. Elle d’accompagnements. Elle implique d’abord que tout ménage permettrait d’accroître sensiblement l’offre locative et de faire aidé soit prioritaire dans l’attribution d’une location. Ainsi, le baisser sensiblement le coût des loyers. D’une part, les locataires droit au logement opposable prendrait tout son sens sans être aidés pourraient être plus mobiles car moins contraints par la cantonné au non-accès à un secteur très particulier du parc structure d’une offre spécifique, ce qui permettait de fluidifier immobilier. Si, en première logique, elle n’apparaît pas plus le marché du locatif, tout logement leur devenant ainsi coûteuse que le système actuel, elle appellera vraisemblablement accessible ; d’autre part les propriétaires garantis mettraient plus à développer les aides au logement, celles-ci devant concerner facilement leur bien en location ; enfin, les promoteurs seraient un plus grand nombre de bénéficiaires. Dans le même temps, inciter à construire des opérations locatives à coût abordable y elle devrait conduire l’Etat à intervenir sur le système national compris dans les secteurs les plus stigmatisés. La question du du logement de façon plus efficace, en l’incitant au contrôle des mal logement pourrait y trouver une réponse, car moins augmentations des loyers tout en tenant compte des variations cloisonnée et dépendante de création d’offre adaptée à telle ou géographiques des valeurs foncières. telle catégorie de population, mais reposant sur les possibilités
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Territorialiser la lutte contre le mal-logement
Dans un contexte de crise économique et de dégradation sociale majeure, la Fondation Abbé Pierre a publié son 18e rapport dénonçant une situation sur le front du logement qui ne cesse de se tendre et un enracinement du mal-logement dans les territoires. Christophe Robert plaide ici pour une approche territorialisée de la lutte contre le mal-logement, qui dépasse enfin le stade des mesures éparses et simplement correctives.
par CHRISTOPHE ROBERT
La situation sur le front du logement ne cesse de se tendre et les alertes de se multiplier : recrudescence des personnes isolées, des jeunes et des femmes seules à la rue, sollicitations toujours plus importantes des dispositifs d’aide, montée des impayés de loyers et de charges, durcissement sur le front des expulsions locatives qui atteignent des records historiques (plus de 118 000 décisions d’expulsion en 2011, dont 12 000 qui ont été mises en œuvre avec le concours de la force publique)… Sur la période récente, la crise économique n’a fait qu’aggraver les difficultés de ceux qui étaient déjà en grande précarité, et fragiliser de nouveaux pans de la population, y compris parmi les classes moyennes. Le logement, une source croissante d’exclusion et de précarité La crise du logement à laquelle nous sommes aujourd’hui confrontés sévit depuis plus de 15 ans, alimentée notamment par une construction insuffisante et inadaptée aux ressources des ménages, et par une véritable flambée des coûts du logement (les prix de l’immobilier ont doublé en 10 ans [1], les loyers ont augmenté de près de 50 % dans le parc privé [2] et les charges de 60 % [3]). Le cercle des victimes de la crise du logement n’a cessé de s’élargir, touchant désormais 10 millions de personnes à des degrés divers. Parmi elles, 3,6 millions sont mal logées : des personnes sans abri à toutes celles qui ont recours à la « zone grise » du logement (caves, parkings, cabanes, campings à l’année, hébergement chez des tiers…), auxquelles s’ajoutent tous les ménages contraints de vivre dans des logements inconfortables ou surpeuplés. Le logement est devenu un puissant facteur d’exclusion, et génère de nouvelles inégalités. Des politiques publiques mal calibrées Ce qui est particulièrement préoccupant dans la période actuelle, c’est de constater que les politiques du logement ne sont plus calibrées pour faire face à ces problèmes – et que ce sont nos concitoyens les plus fragiles qui sont les premiers touchés par l’affaiblissement des mécanismes de protection : saturation des dispositifs d’accueil d’urgence (avec un appel sur deux au « 115 » qui reste sans réponse et jusqu’à trois appels sur quatre à l’été 2013 [4]), réduction des aides accordées par les Fonds de solidarité logement (FSL) de certains départements [5], diminution du pouvoir solvabilisateur des aides personnelles au logement (APL) [6], allongement de la liste des ménages reconnus prioritaires au titre du droit au logement opposable (DALO) qui dépassent les délais d’attente réglementaires sans relogement de la part des préfets [7] (plus de 40 000 ménages aujourd’hui)… Tout se passe désormais comme si les amortisseurs sociaux étaient à plat. Cette situation exige un changement de braquet radical. On ne peut plus faire comme si le problème du logement ne
concernait qu’une poignée de personnes très exclues, pour lesquelles quelques mesures correctives suffiraient. Le logement est devenu un problème de société majeur, les situations de mallogement étant à l’origine de véritables dégâts sanitaires et sociaux : saturnisme, échec scolaire, renoncement aux soins, réduction des dépenses alimentaires… La crise du logement pénalise aussi les parcours de vie des personnes, compliquant l’insertion des jeunes, bloquant les projets, entravant les mobilités résidentielles et professionnelles. Pour une approche territorialisée du mal-logement Prendre la pleine mesure de la crise du logement exige de se pencher sur son ancrage et son enracinement dans les territoires. Cette approche territoriale a parfois été négligée par les politiques nationales, dont l’attention s’est concentrée sur les zones de marchés très tendus (Île-de-France, Provence-AlpesCôté d’Azur...). Si ces dernières sont évidemment touchées par les manifestations les plus criantes de la crise du logement, il n’en reste pas moins vrai que le mal-logement est une réalité qui se décline sous des formes différentes sur l’ensemble du territoire national : dans les grandes métropoles aux secteurs résidentiels touristiques ou frontaliers, dans les zones en déclin industriel ou démographique, dans les villes moyennes, petites, et même dans les zones rurales détendues confrontées à des conditions de logements dégradées. Dans ces différents territoires, le mal-logement se manifeste sous des formes spécifiques et d’intensité variable, que la Fondation Abbé Pierre donne à voir dans son rapport annuel. À partir des données de l’enquête Logement de 2006 (dont on ne peut que regretter le caractère daté), des manifestations territorialisées du mal-logement ont pu être mises en lumière, renvoyant à des réalités souvent bien plus complexes que les représentations binaires entre secteurs tendus et détendus. Ainsi, les ménages confrontés à un effort financier excessif pour se loger sont proportionnellement moins nombreux à Paris (5 %) que dans les grandes villes à bas prix (où 27 % des ménages sont concernés, du fait notamment de la précarité de leurs ressources). Ces chiffres montrent non pas que les prix du logement sont plus accessibles dans la capitale, mais plutôt que, dans un contexte d’offre insuffisante, les marchés fonctionnent comme une véritable centrifugeuse qui sélectionne les ménages les plus solvables et rejette les autres (en l’occurrence les ménages pauvres et modestes) vers des territoires de plus en plus éloignés des centres – ou les contraint, pour pouvoir rester dans ces villes chères, à accepter des conditions de logement dégradées (21 % des ménages à Paris sont en situation d’inconfort ou de surpeuplement, contre 7 % si l’on considère l’ensemble du territoire national). L’analyse territorialisée du mal-logement, dans sa complexité et la variété de ses formes, constitue aujourd’hui un impératif pour
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pouvoir agir efficacement sur ses causes. De même, il est indispensable de se pencher sur la question des inégalités entre territoires – inégalités que la crise économique risque encore d’accentuer dans les années à venir. À cet égard, les zones urbaines sensibles, devenues de véritables territoires de relégation pour les ménages pauvres et modestes, montrent bien que lorsque les inégalités sociales et territoriales se télescopent, la situation devient particulièrement inquiétante. Agir pour l’égalité des territoires : quelles solutions ? Si la question de l’égalité des territoires semble figurer au rang des priorités pour le nouveau gouvernement (comme en atteste la création du ministère de l’Égalité des territoires et du logement), de nombreuses questions restent en suspens sur les moyens effectifs de sa mise en œuvre. Quels outils territorialisés pour appréhender la réalité locale du mal-logement ? Quels moyens humains pour l’action publique territoriale, sachant que celle-ci a été extrêmement fragilisée sous l’effet de la RGPP [8] ? Dans un contexte de restrictions budgétaires, il est impératif de réaffirmer le rôle de l’État en tant que garant de la solidarité nationale, pour que les territoires d’exclusion et les citoyens les plus fragiles ne soient pas sacrifiés sur l’autel de la rigueur. Face à ces constats, la Fondation Abbé Pierre ne cesse de le répéter : il faut produire massivement des logements économiquement accessibles partout où les besoins se manifestent, et mieux les répartir au sein des bassins d’habitat. Or, si les objectifs globaux du gouvernement sont bons (500 000 logements par an, dont 150 000 logements sociaux, pendant 5 ans), les conditions de leur mise en œuvre ne semblent pas aujourd’hui réunies : les chiffres des mises en chantier sont en berne (346 000 logements en 2012) et beaucoup reste à faire pour adapter l’offre produite à la demande sociale et territoriale. Une simulation réalisée pour le dernier rapport de la Fondation montre ainsi que la programmation actuelle de logements sociaux dans les programmes locaux de l’habitat (PLH) des 30 plus grandes agglomérations françaises est loin de permettre d’atteindre les objectifs fixés. Pour que ces agglomérations (qui recouvrent 48 % de la population des aires urbaines) soient en phase avec les objectifs du gouvernement, il faudrait qu’elles augmentent de 24 % leurs objectifs actuels [9] ! La production doit, par ailleurs, contenir un important volet d’intervention en direction du parc privé. En partant du
principe que le logement social n’est pas en mesure de répondre seul à l’ensemble des besoins sociaux et que le marché locatif privé est aujourd’hui déconnecté des réalités socio-économiques d’une partie croissante de la population, plusieurs axes doivent être menés de front. Un ambitieux programme de conventionnement du parc privé avec les propriétaires (particuliers ou institutionnels) s’impose. Parallèlement, un dispositif efficace de régulation des loyers doit être instauré, permettant de susciter des baisses sur les territoires les plus exposés à la flambée des prix [10]. Ces dispositions doivent être couplées avec un ambitieux programme de rénovation thermique et de lutte contre l’habitat indigne, mais aussi de mobilisation des logements ou locaux vacants. C’est à ces diverses conditions que pourrait s’enclencher une modération des loyers et donc une amélioration significative de l’accessibilité du parc privé aux plus modestes. Une telle perspective, associée à une action de lutte contre la précarité énergétique, devrait permettre de redonner du souffle (et, par là même, du pouvoir d’achat) aux ménages, tout en améliorant l’efficacité des aides personnelles au logement. L’effectivité de cette politique dépendra étroitement de la volonté et de l’engagement durable (financier mais pas seulement) de l’État et de l’ensemble des acteurs investis dans le champ du logement : acteurs économiques, élus locaux, organismes de logement social, propriétaires, associations… Mais ne nous voilons pas la face : il faudra du temps avant que de telles dispositions portent réellement leurs fruits. Or, ceux qui souffrent aujourd’hui du mal-logement ne peuvent plus attendre. Il y a donc urgence à tout mettre en œuvre pour loger ou héberger dignement chaque personne en difficulté, et éviter à d’autres la perte de leur logement, en développant des politiques de prévention dignes de ce nom. La loi sur le logement et l’urbanisme qui vient d’être adoptée à l’Assemblée nationale et qui sera débattue au Sénat en octobre (pour une adoption définitive au début de l’année 2014), tout comme la loi destinée à approfondir la décentralisation, sont très attendues. L’occasion d’un traitement global et systémique de la question du logement pour lutter contre les exclusions sociales et territoriales se présente enfin. Nous ne devons pas manquer ce rendez-vous pour établir les bases d’une sortie de crise, en gardant en mémoire la priorité qui doit être donnée aux plus fragiles.
Bibliographie Fondation Abbé Pierre. 2013. L’État du mal-logement en France, 18e rapport annuel. Disponible en ligne à l’adresse suivante : http://www.fondation-abbe-pierre.fr.... Robert, Christophe et Vanoni, Didier. 2007. Logement et cohésion sociale. Le mallogement au cœur des inégalités, Paris : La Découverte.
politiques publiques) a engendré une diminution des moyens humains et financiers de l’État local qui a eu des répercussions significatives dans la conduite des politiques locales de l’habitat (en matière d’observation territoriale, d’instruction des dossiers, de soutien aux collectivités locales – notamment en ingénierie dans le cadre des délégations de compétences des aides à la pierre). Par ailleurs, la restructuration des administrations déconcentrées dans le domaine du social a complexifié le paysage institutionnel et la mise en œuvre des projets des associations en direction des personnes vulnérables. [9] Et encore, ce chiffre ne vaut que si l’on intègre les PLS (logements financés par un Prêt locatif social) ; sans compter les PLS, l’effort supplémentaire à fournir s’élèverait à 80 %. Rappelons que si le PLS renvoie effectivement à des besoins en logement intermédiaire dans certains territoires, il ne constitue pas une réponse sociale aux ménages modestes et fragiles. À titre d’exemple, un PLS de 65 m² en première couronne parisienne est loué hors charges à 800 euros par mois, ce qui exclut de fait la quasi-totalité des demandeurs de logements sociaux. [10] De ce point de vue, l’encadrement des loyers prévu dans le projet de loi récemment déposé par Cécile Duflot (loi ALUR (Accès au logement et un urbanisme rénové)) constitue un changement politique majeur : il part, en effet, du principe que le marché seul ne s’autorégule pas de façon satisfaisante et qu’il est donc nécessaire d’encadrer les loyers dans les secteurs tendus. Pour autant, dans sa version actuelle, le dispositif envisagé présente d’importantes limites : en dehors des petites surfaces susceptibles de renvoyer à des catégories de population disposant de ressources modestes, l’essentiel des baisses escomptées devrait concerner les logements aux loyers les plus chers (c’est-à-dire les loyers supérieurs de plus de 20 % à un « loyer médian » fixé par territoire), lesquels sont largement occupés par des personnes aux ressources élevées. Les loyers les plus bas (inférieurs au « loyer médian minoré ») pourraient, quant à eux, faire l’objet de rattrapages…
Notes [1] Source : Insee, Indices notaires-Insee, France métropolitaine. [2] Source : Olap, loyers moyens dans 11 agglomérations de province. [3] Source : données Pégase. [4] Baromètre Fnars, auprès des services du « 115 » de 37 départements. [5] Plafonnement des ressources des ménages éligibles ou des loyers pris en charge par la garantie, limitation des sommes impayées couvertes, renvoi vers d’autres dispositifs quand cela est possible (Loca-pass, garantie des risques locatifs (GRL)). [6] Depuis 2002, la distribution des APL s’est resserrée autour des ménages disposant de faibles ressources, sachant que plus de la moitié des ménages allocataires avaient des revenus qui les plaçaient sous le seuil de pauvreté en 2010. Sont désormais exclus de l’APL : une personne isolée dès qu’elle perçoit 1,08 SMIC net (contre 1,11 en 2002), un ménage monoactif avec deux enfants dès qu’il perçoit 2 SMIC net (contre 2,06 en 2002), un ménage mono-actif avec cinq enfants dès qu’il perçoit 2,44 SMIC net (contre 2,55 en 2001). [7] C’est-à-dire trois à six mois selon les territoires pour être reconnu prioritaire au titre du DALO, puis trois à six mois supplémentaires (encore selon les territoires) pour se voir proposer une offre de logement. [8] La réduction des dépenses publiques prévue par la RGPP (Révision générale des
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logement, habitat et service public : quelles perspectives
11h en plénière Magali Giovannangeli Présidente de l’Agglomération Pays d’Aubagne et de l’Etoile Michel Fréchet Président de la CGL Stéphane Peu Président de Plaine Commune Habitat Caroline Lucats Directrice de l’habitat de Lille Animé par David Chiousse Directeur du service Logement à Aubagne !
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Magali Giovannangeli Professeure d’espagnol, elle est élue conseillère municipale d’Aubagne en 1989 à 22 ans. Nommée adjointe au maire en 1995, puis première adjointe en 2001, elle devient Présidente de l’Agglomération du Pays d’Aubagne et de l’Etoile en 2011. Personnalité reconnue du mouvement altermondialiste, elle participe depuis 2001 aux Forums sociaux mondiaux. Elle est une des fondatrices du « réseau international de villes pour l’émancipation humaine et de genre ». Elle co-écrit en 2012, avec le philosophe Jean-Louis Sagot-Duvauroux Voyageurs sans ticket, une expérience sociale à Aubagne, qui raconte l’expérience de la gratuité des transports mise en œuvre depuis mai 2009 sur les 12 communes de l’agglomération.
Michel Fréchet Instituteur pendant 12 ans puis psychologue scolaire, il est durant cette période militant syndicaliste actif au SNI puis au SGEN-CFDT. De 1989 à 1995 il est élu conseiller municipal de Nanterre et administrateur à l’OPHLM, tout en militant activement à la CGL à laquelle il adhéré en 1990. D’abord président de l’Union Départementale de la Commission Départementale de la CGL 92 qu’il a créée en 1992, il devient président de la CGL Nationale en 2005. Depuis la fin des années 2000 il est membre du Conseil National de l’Habitat, du Conseil National de la Consommation, de la commission Nationale de Concertation, administrateur de l’Agence Nationale de l’Habitat et membre du comité de suivi de la mise en œuvre du droit au logement opposable.
Stéphane Peu Maire-Adjoint de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) depuis 1995, en charge du logement jusqu’en 2002 puis de l’habitat et de l’urbanisme. Vice-président de l’agglomération Plaine Commune en charge de l’aménagement et de l’urbanisme, Stéphane PEU a été à l’initiative en 2005 de la création de l’Office Public Plaine Commune Habitat - qu’il préside depuis -, né de la fusion de deux SEM et des trois OPH de La Courneuve, Pierrefitte et Saint-Denis. Plaine Commune Habitat a un patrimoine aujourd’hui de près de 18000 logements répartis sur 7 villes de l’agglomération. Egalement à l’origine en 2007 de la naissance de la Coopérative d’Accession Sociale à la Propriété –qu’il préside depuis permettant à de nombreux locataires modestes d’accéder à la propriété en toute sécurité financière. En 2013, il est à l’origine de la création de BâtiPlaine (1ère Société Anonyme de Coordination) avec I3F pour répondre aux ambitions de construction du CDT de Plaine Commune. Parallèlement à ses responsabilités locales, il est depuis 2005 Vice-président de la Fédération Nationales des Offices Publics de l’Habitat et membre du Comité Exécutif de l’Union Sociale de l’Habitat
La conférence de consensus sur le logement à Lille Entre fin 2011 et début 2012, un jury citoyen composé de membres des instances de la démocratie participative s'est réuni afin de produire un avis sur la question suivante: "Le logement, service public ou politique sociale?" Qu'est ce qu'une conférence de consensus? Une conférence de consensus est une méthode de consultation qui consiste à faire auditionner des experts par un jury de citoyens, qui doit élaborer des préconisations à destination de l’institution organisatrice à l’issue des débats, de manière totalement indépendante et objective. Cette démarche de concertation citoyenne s’inscrit pleinement dans les objectifs d’innovation de la méthode participative lilloise, et de son adaptation aux évolutions participatives. Comment s'est déroulée la démarche? 21 membres des conseils de quartier, du Conseil Lillois de la Jeunesse, du Conseil Lillois des Ainés, du Conseil des Résidents Etrangers Lillois et du Conseil Communal de Concertation ont travaillé sur ce thème pendant 5 mois à partir de la question suivante : « la question du logement doit elle être traitée par la création d’un service public du logement ou dans le cadre d’une politique sociale essentiellement centrée sur le traitement des exclusions ? » Après une formation initiale sur les enjeux du logement, le groupe a auditionné des experts et des témoins. Le jury citoyen s’est ensuite réuni à 8 reprises entre décembre 2011 et février 2012 pour analyser les auditions et débattre. Le groupe a rendu son avis et ses préconisations aux élus le 19 mars 2012
Présentation synthétique de l'avis rendu Les fondamentaux repris dans l'introduction posent que :
le droit au logement est un droit fondamental le logement est un enjeu essentiel de notre société pour un service public local du logement bâti autour de 7 missions principales Mission 1: accueillir la demande: guichet unique afin de répondre à tous les problèmes et interrogations rencontrées par les citoyens concernant le logement Mission 2: attribuer les logements : c'est être transparent sur l'attribution des logements au regard des citoyens Mission 3: Réguler : encadrer le prix des logements, mettre en place un observatoire des prix des loyers et pouvoir moduler finement les taxes locales, en étroite collaboration avec l'enemble des acteurs locaux, régionaux et nationaux. Mission 4 : Planifier: La planification des constructions doit se faire au niveau supracommunal ou régional (communauté de communes, communauté urbaine...) Mission 5 : Construire, rénover l'ancien: les politiques de logements doivent intervenir sur les manques du marché public, contraindre les constructions et la rénovation Mission 6: Gérer: maitriser l'ensemble des aides financières à un niveau plus local et ainsi décentraliser ce service pour une meilleure efficacité Mission 7 : Observer et évaluer : C'est vérifier la pertinence de l'offre et de la demande, comptabiliser les logements vacants, observer les politiques locales…
La Ville de Lille a pris position sur cet avis, l'a porté à la connaissance de la Communauté Urbaine dans le cadre des discussions sur le programme local de l'habitat, et dans le débat national.
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Politique sociale ou service public, quel cadre juridique ?
11h50 salle Hessel A Jean-Philippe Brouant Maitre de Conférence en Droit Public à la Sorbonne Grands Témoins Michel Fréchet Président de la CGL Gérard Rampal Adjoint au Maire d’Aubagne délégué au logement !
Jean-Philippe Bourant
Maître de conférences à l’Ecole de droit de la Sorbonne (Université Paris 1). Il codirige le SERDEAUT (Sorbonne Etudes et Recherches en Droit de l’Environnement, de l’Aménagement, de l’Urbanisme et du Tourisme). Ses enseignements et recherches portent sur les politiques publiques dans le champ du logement, de l’urbanisme, de la cohésion territoriale et de la décentralisation. Parmi ses publications: Le DALO (direction), Les Cahiers du GRIDAUH, La documentation Française, 2011, 162 p. Intercommunalité et habitat: les communautés au milieu du gué (direction), Les Cahiers du GRIDAUH, La Documentation française, 2006, 108 p. Le maire au nom de l’Etat: contribution à l’étude du dédoublement fonctionnel, La Documentation française, 2005, 144 p. Responsable des commentaires et annotations de droit public pour le Code de la construction et de l’habitation publié aux Editions Dalloz (depuis 2000)
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Les outils de régulation du marché locatif privé Les études consacrées à l’interventionnisme local dans le domaine du logement se concentrent généralement sur la question du logement social. Il est vrai que les dispositifs juridiques sont prioritairement dédiés à ce type d’intervention. Pour autant, le parc privé de logements, à savoir les logements occupés par leurs propriétaires et les logements locatifs qui ne font pas l’objet d’un conventionnement à l’aide personnalisée au logement (APL), représente plus des quatre cinquièmes du parc de résidences principales. L’importance quantitative de ce parc, sa diversité, son rôle dans la mobilité résidentielle justifient amplement que l’on s’attarde sur les outils d’intervention et de régulation dont disposent les collectivités territoriales. par JEAN-PHILIPPE BROUANT Au préalable, un détour historique nous paraît nécessaire pour tenter de comprendre les raisons qui expliquent la discrétion du législateur, et de la doctrine, sur ce point. Les premières modalités d’intervention publique prennent la forme de pouvoirs de police en vue de garantir la sécurité et salubrité des immeubles. La loi du 13 avril 1850 sur les logements insalubres met en place un corpus de règles sommaires. Dans les communes où le conseil municipal le jugeait nécessaire, une commission, nommée par lui, visitait les locaux signalés comme insalubres, proposait les moyens de parer aux dangers qu’ils présentaient, et le conseil municipal, sur le rapport de cette commission, prescrivait les réparations nécessaires et interdisait même, si besoin, l’habitation des maisons et des appartements malsains. Au nom du respect de la propriété privé, la mise en œuvre de ce dispositif s’avérait délicat . La grande loi d’hygiène publique du 15 février 1902 reconnaît aux maires un véritable pouvoir de police en matière de salubrité des immeubles selon une procédure très proche de celle actuellement définie aux articles L. 1331-26 et s. du Code de la santé publique. En dehors des pouvoirs de police, l’intervention financière des collectivités publiques ne sera envisagée qu’à partir de la loi du 30 novembre 1894 dite Siegfried relative aux habitations à bon marché. Le législateur fixe cependant une double limite à l’intervention publique. Son champ d’application est restreint aux seuls logements destinés aux familles modestes. Les mesures prises ne peuvent être qu’incitatives et présentent donc un caractère facultatif. Les lois ultérieures amplifieront la capacité d’intervention publique en la cantonnant toutefois au caractère social des logements en question. On le voit, cette logique de spécialisation repose en grande partie sur la volonté de respecter le principe de la liberté du commerce et de l’industrie et de ne permettre une intervention publique qu’en cas de carence manifeste de l’initiative privée. C’est cette considération essentielle qui expliquera que, pendant très longtemps, le logement privé restera une « affaire privée ». Les premières brèches émaneront du pouvoir central dans le cadre de circonstances exceptionnelles ; la première guerre mondiale conduira le gouvernement à établir un moratoire sur les loyers en 1914, qui sera généralisé par une loi du 9 mars 1918 . Cet encadrement des loyers sera maintenu par différentes législations jusqu’en 1948.
La politique nationale de blocage des loyers sera en partie levée par la loi n°48-1360 du 1er septembre 1948 ; pour les constructions réalisées postérieurement à l’entrée en vigueur de loi, les loyers sont désormais fixés librement. En revanche, pour le parc existant, la loi prévoit un rattrapage régulé des loyers en autorisant une hausse régulière et raisonnable. En compensation, la loi instaure l’allocation de logement familiale (ALF), premier système d’aide personnelle au logement. Ces dispositifs dont l’objet d’un encadrement national ; toutefois la loi autorise le préfet, dans des limites fixées par décret, « à adapter par arrêté certains correctifs aux conditions locales». L’ordonnance n°45-2394 du 11 octobre 1945 prévoit toute une série de dispositions autoritaires dont la procédure de réquisition des logements vacants ou insuffisamment occupés. Cette procédure relève de la compétence de l’Etat mais associe également les communes. Celles-ci sont tenues de dresser un fichier des locaux d’habitation vacants, inoccupés ou insuffisamment occupés. Surtout, l’Etat encouragera plus fermement la construction de logements privés par le bais d’aides financières. Une loi n °50-854 du 21 juillet 1950 prévoit l’instauration de primes annuelles « en vue d’encourager la construction d’immeubles à usage principal d’habitation ainsi que les travaux ayant pour objet d’accroître la surface ou la capacité de logement des immeubles existant ». A cette prime est associé un prêt spécial garanti par l’Etat et distribué par le Crédit foncier de France. Des mesures fiscales incitatives – exonération de l’impôt foncier, réduction des droits de mutation – sont instaurées en faveur des constructions nouvelles. Enfin des dispositifs visant à promouvoir le développement et la qualité du parc existant de logements privés sont adoptés. La loi n°70-1283 du 31 décembre 1970 crée l’Agence nationale d’amélioration de l’habitat (ANAH) qui se substitue au Fonds national d’amélioration de l’habitat géré par le Crédit foncier de France. Le socle de l’interventionnisme public en faveur du logement privé sera ainsi posé. Il se caractérise par son aspect essentiellement incitatif et la place réduite qu’il réserve au profit des collectivités territoriales. Qu’en est-il du cadre actuel, tel qu’il devrait notamment évoluer au fil des textes en cours de discussion ?
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Les collectivités territoriales – principalement les communes et pouvoirs en matière de lutte contre l’insalubrité. intercommunalités – disposent d’outils leur permettent Même si la loi interdit la division d’immeubles bâtis en vue de d’intervenir au titre de trois finalités différentes. la location lorsque les locaux sont insalubres, impropres à l’habitation ou ne répondent pas aux critères de décence – et 1) Le contrôle de la qualité des logements que cette interdiction est pénalement sanctionnée (art. L. Une des premières modalités d’intervention vise à faire en sorte 111-6-1 CCH), le maire ne disposait jusqu’à présent, d’aucun que les logements mis sur le circuit locatif répondent a minima mécanisme d’information sur ce point et ne pouvait donc aux critères de décence posés par les textes. intervenir suffisamment en amont. La loi n°2006-685 du 13 Au titre de l’action préventive, on peut signaler le dispositif de juin 2006 relative au droit de préemption et à la protection des déclaration préalable de mise en location. L’article 48 de la loi locataires en cas de vente d’un immeuble a prévu l’obligation de Engagement national pour le logement de 2006 a prévu la porter à la connaissance de la commune toute aliénation possibilité pour les communes et communautés de plus de 50 d’immeuble dans son entier et en une seule fois. Cette 000 habitants de se porter candidates pour expérimenter la disposition doit permettre à la commune d’intervenir afin possibilité de soumettre toute nouvelle mise en location d’un d’éviter une « vente à la découpe ». Elle peut en effet utiliser son logement situé dans un immeuble de plus de 30 ans à une droit de préemption urbain « pour assurer le maintien dans les obligation préalable de déclarer la mise en location ; pour ce lieux des locataires » (art. L. 210-2 c. urb.). La loi ALUR devrait faire la collectivité devra délimiter les secteurs ou, au sein de ces renforcer ce contrôle puisque l’intercommunalité ou la secteurs, les immeubles pour lesquels cette obligation est commune pourront imposer, dans les zones qui présentent une instaurée. Un certain nombre de communautés ou de villes proportion importante d’habitat dégradé ou susceptible de le (Portes du Hainaut, Valenciennes, Dunkerque, Nantes, devenir, une autorisation préalable aux travaux conduisant à la Tourcoing…) ont testé ce dispositif. Le bilan relatif à cette création de plusieurs locaux d'habitation dans un logement expérimentation n’a, hélas, pas fait l’objet d’une publication. existant. Pour autant, le législateur a décidé de généraliser ce système La loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové étend dans le projet de loi Accès au logement et urbanisme rénové également les modalités d’intervention des collectivités (ALUR). L’intercommunalité ou, à défaut, la commune territoriales dans le traitement des copropriétés dégradées. Les pourront instituer des zones de déclaration de mise en location. programmes locaux de l’habitat (PLH) devront obligatoirement En dehors de ce contrôle, il faut rappeler qu’en matière de préciser des actions de prévention, d’accompagnement ou de logement décent, les compétences du maire se limitent à un requalification des copropriétés en difficultés. Cette prise en pouvoir d’alerte. En effet celui-ci, tout comme certaines compte sera facilitée par l’instauration d’un registre associations représentatives de défense des droits des locataires, d’immatriculation des copropriétés à destination totale ou peut saisir les organismes ou services payeurs de l’allocation partielle d’habitation. Par ailleurs, le maire ou le président de logement familiale ou de l’allocation de logement sociale s’il a l’EPCI ont la capacité de saisir le juge afin de déclencher une connaissance de l’existence de logements non décents. Ces procédure d’alerte ainsi qu’en vue de la désignation d’un organismes sont habilités à faire vérifier sur place si le logement administrateur provisoire. Les autorités locales disposent répond aux caractéristiques de décence. On peut préciser que également désormais d’outils diversifiés en vue du redressement dans le cadre de la non-décence, le juge peut être saisi par le de la situation de ces copropriétés (opération de requalifications locataire qui peut réduire le montant du loyer ou en suspendre dégradées, présidence de la commission relative au plan de le paiement jusqu’à l’exécution des travaux (art. 20-1 loi n sauvegarde, possibilité d’exproprier les parties communes, etc.). °89-462 du 6 juillet 1989). Dans la continuité de la loi du 16 décembre 2010, la loi de 2) Le contrôle sur les modes de location des biens modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation Le parc privé situé sur le territoire communal ou des métropoles tend à concentrer l’intervention sur l’habitat intercommunal peut tout d’abord, même dans les zones dégradé au profit des métropoles. Dans ces dernières en effet, tendues, être touché par les phénomènes de non-location liés à les compétences relatives à « l’amélioration du parc immobilier des stratégies spéculatives. Depuis 1998, il existe une taxe sur les bâti » et à la « réhabilitation et résorption de l’habitat insalubre » logements vacants. Les communes – et les communautés depuis sont exercées par la métropole « en lieu et place des communes 2012 – dans lesquelles cette taxe ne s’applique pas ont la membres » (cf. projet de loi de modernisation de l’action possibilité de voter une taxe d’habitation sur les logements publique territoriale et d’affirmation des métropoles). Il s’agit vacants (art. 1407 bis CGI). A l’issue de la loi pour l’accès au d’une compétence exclusive dont l’exercice n’est pas logement et un urbanisme rénové, les communautés subordonné à la reconnaissance d’un intérêt métropolitain . délégataires des aides à la pierre ont la possibilité d’obtenir, au La loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové devrait titre des compétences optionnelles, la délégation par l’Etat de la renforcer les pouvoirs locaux de police en matière de lutte mise en œuvre de la procédure de réquisition avec attributaire contre l’habitat indigne. Elle fait du président de l’EPCI prévue aux articles L. 642-1 et s. du CCH. Cette option – l’autorité qui pourrait concentrer l’essentiel des pouvoirs subordonnée à l’accord de l’Etat - est bien évidemment actuellement dispersés entre le maire et le préfet. Le texte également ouverte au profit des métropoles de droit commun autorise en effet les maires à transférer au président de l’EPCI – ainsi qu’à celles de Paris, Lyon et Marseille (cf. projet de loi de sous réserve d’un accord unanime – leurs pouvoirs de police modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation spéciale en matière de fermeture des établissements recevant du des métropoles). L’exercice de cette compétence se fait « au nom public (art. L. 123-4 CCH), sécurité des occupants d’immeubles et pour le compte de l’Etat ». collectifs à usage d’habitation (art. L. 129-1 et s. du CCH) et Dans certaines grandes agglomérations, il existe une forte bâtiment menaçant ruine (art. L. 511-1 et s. du CCH). Si l’EPCI demande pour la location de courte durée qui répond aux concerné est également délégataire des aides à la pierre, alors le besoins touristiques ou professionnels (stages, formations, préfet est en droit de transférer au président de l’EPCI ses déplacements….). Ce type de location offre une grande marge
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de manœuvre aux propriétaires puisque si le bien n’est pas affecté à la résidence principale du locataire, il est régi par les dispositions très souples du code civil . Dans les zones tendues, la multiplication de ces locations contribue à limiter l’offre d’habitations principales et à déséquilibrer le marché du logement. On estime ainsi qu’à Paris, en cinq ans, près de 20.000 logements ont été soustraits du marché locatif traditionnel. Dans certains arrondissements (notamment dans le centre et l’Ouest de Paris), les locations meublées touristiques peuvent représenter jusqu’à 20% de l’offre locative. De plus, les prix constatés sont proches de ceux du secteur hôtelier, soit un niveau compris entre le double et le triple des prix des locations traditionnelles. La mise en location d’un meublé de tourisme est soumise à une simple obligation de déclaration en mairie (art. L. 324-1-1 du code du tourisme) dont l’omission ne fait l’objet d’aucune sanction particulière. La loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové impose également aux propriétaires une déclaration sur l’honneur attestant du respect des obligations légales. Deux instruments juridiques paraissent pouvoir être mobilisés. D’une part dans toutes les communes, la transformation d’une habitation en un « meublé de tourisme » pourrait s’analyser comme un « changement de destination » au sens du code de l’urbanisme qui requière l’obtention d’une déclaration préalable aux termes de l’article R. 421-17 du code de l’urbanisme. Parmi les différentes destinations mentionnées par l’article R 123-9 du code, on trouve bien « l’habitation » distingue de « l’hébergement hôtelier ». Pour autant, le meublé de tourisme relève-t-il de cette dernière catégorie ? On peut en douter au vu de la jurisprudence existante qui exige deux critères : le caractère temporaire de l’hébergement ainsi que l’existence de services qui « caractérisent l’activité d’un service hôtelier ». Cette deuxième condition fait manifestement défaut dans le meublé de tourisme. Certes la ville de Paris a inséré dans son PLU une disposition précisant que la location meublée de courte durée était assimilée à de l’hébergement hôtelier mais il n’est pas certain que cette précision suffise à régler le problème. D’autre part, certaines communes peuvent utiliser le mécanisme de l’autorisation de changement d’usage mentionné à l’article L. 631-7 du CCH. Dans les communes de plus de 200 000 habitants et celles des trois départements de la petite couronne autour de Paris toute transformation de locaux à usage d’habitation à un autre usage est soumis à autorisation administrative du maire. La loi fait rentrer dans la catégorie des « locaux destinés à l’habitation », entre autres, les « locaux meublés donnés en location dans les conditions de l’article L. 632-1 » du CCH, c’est-à-dire les meublés qui constituent la « résidence principale » du locataire. On peut donc en déduire qu’un meublé touristique ou affecté à la location de courte durée ne constitue pas un local d’habitation et que la transformation – et non la création – d’une habitation nécessite une telle autorisation. C’est d’ailleurs sur ce fondement que la ville de Paris a obtenu la condamnation à amende de différents bailleurs de meublés touristiques . La loi ALUR envisage de compléter le régime du changement d’usage en s’intéressant notamment aux locaux meublés loués de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage : ce type de location peut faire l’objet d’une autorisation temporaire dont le régime est défini par délibération du conseil municipal ou par l’organe délibérant de l’EPCI si ce dernier est compétent en matière de plan local d’urbanisme. Enfin on peut également s’interroger sur la question de la sous-
occupation de certains logements dans les zones tendues. Si on dénombre en France 7% de logements vacants en 2010 (2,3 millions de logements), les résidences secondaires représentent 9% du parc (3,1 millions en 2010). Sur Paris c’est tout de même 6% du parc soit presque 81 000 logements… Une note du conseil d’analyse économique de février 2013 indiquait que la croissance du parc de logement a été entièrement absorbée depuis 1968 par l’augmentation du nombre de résidences secondaires et de logements vacants : 14,3% du parc en 2009 contre 5.6% en 1968 . Revenir aujourd’hui au taux de 1968 serait équivalent à libérer 120 000 logements. Faudra-t-il mettre en place un contrôle du degré d’occupation d’un logement privé ? Un tel dispositif existe dans le parc locatif social puisque la loi du 25 mars 2009 autorise un organisme d’HLM à proposer au locataire un nouveau logement adapté en cas de sous-occupation (L. 442-3-1 CCH). Il est théoriquement applicable à l’ensemble du parc locatif puisque subsistent dans le CCH les dispositions de l’ordonnance du 11 octobre 1945 permettant aux communes d’établir un fichier des locaux vacants, inoccupés ou insuffisamment occupés (art. L. 621-1 CCH) et de contrôler, par un système de déclaration, la mise en location uniquement au profit des personnes justifiant d’une occupation suffisante. 3) Le contrôle sur les niveaux de loyers pratiqués Dans les territoires où les loyers sont élevés, les collectivités peuvent tout d’abord intervenir pour soulager financièrement les locataires. Le Conseil d’Etat dans son arrêt du 29 juin 2001 commune de Mons en Baroeul, a pu légitimer la mise en place par cette commune d’une « allocation municipale d’habitation » estimant que celle-ci répondait à un intérêt public local . Ce système d’aides personnelles locales se retrouve dans certaines collectivités ; à Grenoble par exemple où une allocation, de 50 à 100 euro mensuels, concerne les ménages habitant dans le parc privé et à très bas niveau de ressources ; la ville de Niort a également mis en place en 2002 une telle allocation qui comprend une allocation forfaitaire versée à chaque foyer fiscal sous réserve de remplir les conditions de revenu et une aide facultative à vocation sociale intervenant en complément des dispositifs existants (FSL, etc.). Depuis la loi du 13 aout 2004 Liberté et responsabilité locale, les communes et communautés peuvent apporter des compléments à l’aide personnalisée au logement prévue à l’art. L. 351-1 du CCH versée aux locataires ou aux propriétaires accédants sous conditions de ressources (art. L. 312-2-1) ; tout le risque ici est bien évidemment d’alimenter la surchauffe des loyers. Il faut néanmoins souligner le décalage croissant qui existe entre les montants des allocations nationales et les niveaux de loyers pratiqués, obligeant les locataires à un « taux d’effort » de plus en plus important. Qui plus est, et comme l’a souligné la Cour des comptes dans son rapport de 2007, le découpage retenu en trois zones géographiques pour apprécier la diversité des niveaux de loyers est trop fruste et ne permet pas de tenir compte, au sein d’une même zone, des disparités locales entre centre et périphérie ou encore entre différents quartiers d’une même commune. Aussi nous parait-il urgent d’imaginer un dispositif législatif permettant aux communes et communautés victimes de distorsion trop fortes de pouvoir réclamer – par une forme de droit d’interpellation du gouvernement – une révision du zonage opéré. Les niveaux de loyers excessifs et les taux d’effort trop important pour les ménages peuvent conduire à des impayés et des procédures d’expulsion. Les collectivités territoriales sont de
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plus en plus impliquées dans les processus de prévention des expulsions et la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové confirme cet engagement. Dans chaque département devra être rédigé une charte pour la prévention des expulsions – validée par le comité responsable du plan départemental d’action pour le logement des personnes défavorisées. La loi impose également l’obligation de créer dans chaque département une commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives (CCAPEX). Ensuite les collectivités peuvent intervenir en encourageant la production de logements à loyers maîtrisés. Dans ce cadre, le mécanisme des clauses anti-spéculatives, surtout utilisé pour l’accession sociale à la propriété, pourrait être mobilisé (par ex la charte des promoteurs utilisée par la mairie de Saint-Ouen évoque l’accession et précise qu’il « sera demandé aux investisseurs de s’aligner autant que possible sur les montants des loyers encadrés »). Notons en revanche que les collectivités n’ont aucune prise sur les mécanismes fiscaux d’aide à l’investissement locatif. Ces dispositifs, qui représentent un coût important pour les finances publiques - 1 167 Millions d’euro en métropole en 2012 d’après le projet de loi de finances pour 2013 – ne bénéficient qu’aux territoires « tendus » délimités par arrêté ministériel . Outre que cette politique de zonage est critiquable dans la mesure où il existe des distorsions fortes vis-àvis de la réalité des marchés locaux, les collectivités n’ont aucun moyen de régulation quant au développement de ces produits sur le territoire. Le « dispositif Duflot », issu de l’article 80 de la loi du 29 décembre 2012, offre aux préfets des pouvoirs étendus puisqu’ils peuvent minorer les plafonds de loyers pour les adapter aux marchés . Il aurait été logique de transférer ce pouvoir au profit des communautés délégataires des aides à la pierre. Les collectivités peuvent préférer s’appuyer sur les dispositifs de conventionnement par le biais de l’ANAH, avec ou sans travaux, qui permettent de bénéficier d’exemptions fiscales sur les revenus tirés de la location dès lors que le propriétaire s’engage à louer le logement à des loyers encadrés. Les collectivités – délégataires ou non des aides à la pierre – ont la possibilité d’accompagner financièrement ces dispositifs ; la communauté de Morlaix par exemple accorde une prime forfaitaire de 1 000 euro si le propriétaire s’engage dans un conventionnement social et sous réserve que le logement atteigne au minimum la classe E du diagnostic de performance énergétique. La communauté du Grand Lyon accorde une prime complémentaire au conventionnement ANAH de 1000€ en cas de conventionnement intermédiaire (20% en dessous du loyer libre), 2000€ si le conventionnement est social (40% en dessous du loyer libre) et 3000€ lorsqu’il est très social (50% du loyer libre) ; cette prime est doublée si le logement est performant énergétiquement (classe A, B ou C). Certaines collectivités ont conçu un « package » autour du i.
ii.
iii.
« Jusqu’à 1850 aucune mesure n’est prise pour assurer l’hygiène du logement. On a le respect le plus absolu de la liberté individuelle dès que l’usage qu’on fait de cette liberté ne porte aucun préjudice aux tiers. Si j’habite un logement malsain, cela ne nuit qu’à moi-même ; l’intervention administrative est inopportune. On se départit un peu, mais très peu de ce respect en 1850. Il subsiste entier à l’égard de ceux qui habitent leur propre maison ; les hygiénistes appellent cela « la liberté du suicide ». Ce qu’on veut seulement protéger, avec des précautions infinies pour ne pas porter atteinte à la propriété, ce sont les locataires de logements insalubres ». H. Berthélemy, Traité élémentaire de droit administratif, Paris 1901, p. 341 Cette loi permettait d’exonérer certains locataires modestes du paiement de leurs loyers, les propriétaires étant indemnisés par l’Etat. Les conditions de mise en œuvre de cette indemnisation ont donné lieu à un contentieux dont le célèbre arrêt du 3 novembre 1922 Dame Cachet, relatif au pouvoir de retrait d’une décision individuelle créatrice de droits. Ces législations sont, pour Léon Duguit, autant d’illustrations de la conception de la « propriété fonction ». Elles traduisent le fait que « le propriétaire urbain est chargé de remplir une fonction sociale indispensable bien plutôt qu’il n’est investi d’un droit intangible et discrétionnaire. […] Les baux à loyer ne sont pas des contrats purs et simples ; ils forment dans leur ensemble un véritable système légal, un système de droit objectif ; ils sont le support d’un service d’utilité publique, sinon d’un véritable service public ; et le législateur a certainement le droit et le devoir d’intervenir si les
conventionnement ANAH visant à garantir le propriétaire sur l’ensemble des aspects de la location ; c’est le cas de Paris avec le système « Louez solidaire » ou encore la Communauté d’agglomération de Grenoble avec le « Loca++ » dont les primes varient de 5300 à 6100 euros par logement. Dans le prolongement de ces incitations fiscales, il nous paraît nécessaire de réfléchir à l’introduction d’un peu plus de souplesse dans les exemptions accordées par les collectivités territoriales. Actuellement, les constructions à usage d’habitation bénéficient d’une exonération de deux ans de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) (art. 1383 CGCI) voire d’une exonération quasi permanente dans certaines zones ou pour certains types de logements (HLM) ; pourquoi ne pas autoriser les communes à exonérer de TPFB les propriétaires s’engageant à louer leur bien à un loyer encadré ? Enfin, en dehors des mécanismes incitatifs, dans quelle mesure les collectivités territoriales peuvent-elles intervenir sur les niveaux de loyers pratiqués ? Une première modalité, prévue par la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, réside dans la mise en place des observatoires locaux des loyers. Ces observatoires sont chargés de recueillir des données relatives aux loyers sur une zone géographique déterminée et de mettre à la disposition du public des résultats statistiques représentatifs sur ces données. Leur constitution sera obligatoire dans les zones tendues ; dans les autres zones, les observatoires pourront être créés à l’initiative des collectivités territoriales, des communautés ou de l’Etat. La loi a prévu la présence de représentants des EPCI dotés de PLH exécutoires au sein des organes dirigeants de ces observatoires. Dans les zones tendues, la loi a instauré un dispositif d’encadrement des loyers ; le préfet sera chargé de fixer annuellement par arrêté, et sur proposition des observatoires locaux des loyers, un loyer médian défini par référence à un prix au mètre carré de surface habitable, par type de logement et par secteur géographique. Le projet de loi avait prévu que les EPCI comprenant des territoires situés dans des zones tendues ne pouvaient conclure une convention de délégation des aides à la pierre que s’ils exerçaient la compétence d’encadrement des loyers et disposaient, à cette fin, d’un observatoire des loyers. Toutefois, l’Assemblée nationale a jugé préférable de ne pas adopter, en raison de la nouveauté du dispositif, la délégation de compétence d’encadrement des loyers aux EPCI qui reste donc de la seule compétence de l’Etat. Il nous semble qu’il aurait été judicieux de permettre à l’Etat d’inclure cette option dans le cadre des conventions de délégation sans en faire une compétence obligatoire. La fixation d’un niveau de loyer médian sur un territoire donné est en effet une question éminemment locale dont ne sauraient être exclues les collectivités territoriales.
circonstances l’exigent ». L. Duguit, Traité de droit constitutionnel, tome III, 1930, p. 669. Sur cette question voir C. Logéat, Les biens privés affectés à l’utilité publique, l’Harmattan, 2011. Selon des modalités propres à chaque régime de métropole, ces compétences peuvent éventuellement être redistribuées en direction des échelons infra-métropolitain. v. cf. D. Gadeix, Locations meublées de courte durée. Lepoint sur la pratique, ANIL Habitat actualité, Mai 2011 vi. CE 9 mars 1990 SCI Le littoral, Rec. 1043 vii. Cf. TGI Paris 9 août 2012, n°12/54776, CA Paris 4 sept. 2012, n°11/58295. AJDI 2012, p. 676. viii. Les notes du conseil d'analyse économique, n° 2, février 2013. Alain Trannoya et Étienne Wasmerb. Comment modérer les prix de l'immobilier ? ix. CE 29-6-2001 no 193716, Cne de Mons-en-Baroeul : Lebon p. 298, AJDA 2002 p. 42 note Y. Jégouzo x. Sur cette question : cf. J.-Ph. Brouant, « Communes : surveillez votre tension ! », obs. sous CE, 23 janv. 2013, A.J.D.I., n°5,mai 2013, p. 365 et s. iv.
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Cf. Décret n°2013-517 du 19 juin 2013 et circulaire NOR ETLL1314991C du 26 juin 2013 Les zones tendues sont définies en référence à l’article 232 du code général des impôts relatif à la taxe sur les logements vacants.
Habitat et service public pour la CGL
A l’image des grands services publics que la France a mis en place (SNCF, EDF, GDF, Education Nationale, Sécurité Sociale, Santé, Justice…), le service public du logement proposé par la CGL sera une structure nationale qui dépendra de l’autorité publique(Etat, collectivités territoriales, collectivités locales). Il sera subdivisé en structures régionales qui pourront elles-mêmes déléguer une partie de leurs compétences à des structures intervenant sur des bassins d’habitat. Il aura vocation à intervenir dans les domaines de la construction, de la gestion des logements loués, de leur financement, de leur implantation sur le territoire, de la
gestion du foncier et de l’étude des besoins de la population. Il devra intégrer l’habitat public, encadrer et réguler l’habitat privé, les entreprises distribuant les crédits destinés à la production de logements, les organismes du 1% logement, un observatoire de l’habitat permettant de connaître les besoins de la population et être géré directement par l’Etat dans le cadre d’une structure ayant le statut d’un service public. Les personnels de cette structure seront des fonctionnaires.
Initiative des RNLH
pour un réseau des services-publics de l’habitat Un premier rapport qui synthétise les travaux existants sur le sujet est en préparation:
contactez-nous pour y contribuer! inscrivez-vous pour le recevoir!
A PARAÎTRE: Habitat et Transition énergétique
aux éditions l’harmattan
Le 25 avril 2013, les RNLH organisaient à l’Assemblée Nationale le colloque « Habitat et transition énergétique: innover autrement face à la crise du logement » dans le cadre du grand Débat National sur la Transition Energétique. Un ouvrage prolonge la réflexion en quatre moments: défi stratégique, citoyenneté écologique, outils stratégiques, habitat écologique, à travers les nombreuses contributions de: Patrick Amico, Nacima Baron, Fateh Belaïd, Hervé Bramy, Dominique Braye, François Brottes, Bernard Coloos, Carole Delga, Karima Delli, Pierre Doubovetzky, Amélie Flamand, Michel Fréchet, Magali Giovannangeli, Daniel Goldberg, Michel Gontard, Razzy Hammadi, FrançoisMichel Lambert, Jean-Pierre Lévy, Marie-Noëlle Lienemann, Anne Querrien, Constantin Petcou, Doina Petrescu, Laurence Raineau François Rochon, Nadine Roudil, Jacques Salvator, Roseline Sarkissan, Julien Touati
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De l’urbanisme à l’habitant, fiscalité et foncier
11h50 salle Hessel B Vincent Renard Economiste, Directeur de recherche au CNRS Grands Témoins Stéphane Peu Président de Plaine Commune Habitat Jean-Claude Aznavour Expert-Evaluateur, directeur de LexaSud !
Vincent Renard
Economiste, directeur de recherches au CNRS, spécialisé dans les questions d’ économie foncière et immobilière. Il est actuellement conseiller à la direction de l’IDDRI , Institut du Développement Durable et des Relations Internationales, rattaché à Sciences Po Paris Fondateur et longtemps animateur avec Joseph Comby de l’Association des Etudes Foncières ( ADEF) , qui publie la revue éponyme, il a développé des analyses comparatives d’économie urbaine et d’économie foncière et immobilière, d’abord avec les principaux pays européens, puis mené des missions de coopération et de consultant dans un certain nombre d’ autres pays, en particulier dans plusieurs pays d’ Amérique Latine, surtout Colombie, Mexique, Chili et Brésil, puis dans les pays « en transition », en particulier la Russie,l’Ukraine et la Chine. Il effectue des missions pour l’ OCDE, l’ Union Européenne, la Banque Mondiale, la CEPAL et différents gouvernements et collectivités locales françaises et étrangères. Il enseigne actuellement à l’ Institut d’Etudes Politiques de Paris ( master Urbanisme, Immobilier et Développement Durable) et à l’ Ecole Nationale des Ponts et Chaussées (mastere Urbanisme et Maitrise d’Ouvrage Urbaine) et ponctuellement dans plusieurs écoles et universités françaises et étrangères. Il appartient à sept comités de rédaction de revues en France, Grande Bretagne et Espagne.
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Fiscalité et prix du logement
La fiscalite foncière et immobilière peut-elle avoir un impact sur les prix fonciers ? Cette question ressemble à une énigme tant sont divers les paramètres à prendre en compte pour esquisser une réponse. Surtout, on verra que s’interroger sur la régulation des prix par la fiscalite permet une lecture utile d’un dispositif qui n’a pas cet objet.
par VINCENT RENARD
Le premier enjeu est bien sûr de préciser la forme de fiscalité foncière que l’on interroge, fiscalité sur la détention, sur la mutation, etc. Vient ensuite celle du ou des objectifs poursuivis par l’impôt considére . On peut d’emblée souligner ici que la re gulation des prix fonciers est rarement le premier d’entre eux. Le premier objectif, toujours et partout, depuis des siècles, est un objectif de rendement. C’est d’ailleurs le cas pour n’importe quel impôt, foncier ou non. L’impôt foncier et immobilier vise donc d’abord à remplir les caisses publiques, et tout particulièrement celles des collectivités locales. La base fiscale correspondante peut en effet difficilement être délocalisée... Il jouera aussi bien souvent un rôle annexe d’incitation : à un usage conforme aux règles d’urbanisme par exemple, ou pour encourager un propriétaire foncier à construire son terrain ou à le mettre sur le marché. On lui attribuera aussi souvent un rôle de contribution à l’équité distributive, via la récupération, par la collectivite , de plus-values qui ne doivent rien à l’action du propriétaire. Ces divers objectifs ne sont par ailleurs pas toujours compatibles, ils peuvent même être explicitement en contradiction. Un impôt incitatif, visant par exemple à favoriser la construction d’un terrain constructible, verra son succès mesuré par la perte de rendement, puisqu’il disparaîtra de la base taxable dès lors qu’il remplit son objectif incitatif : c’est « l’impôt qui mange son assiette », mal aimé de l’administra- tion des Finances. C’est dire que l’objectif éventuel de régula- tion des prix n’apparaît que par défaut. L’impôt récurrent sur la détention permettrait pour finir, en théorie, de lutter contre la volatilite des marchés, en calmant la surenchère sur des biens pour lesquels il faut ensuite payer de façon récurrente (point de vue notamment défendu, depuis plusieurs années maintenant, par l’OCDE – voir OCDE, 2012). Pour peu qu’on puisse en mesurer effectivement les effets... Pour complexifier encore un peu la donne, la notion « d’incidence » de l’impôt foncier, c’est-à-dire ici sur la détention, est particulièrement délicate à mettre en évidence pour répondre aux deux questions : qui paie cet impôt ? Est-il équitable ? Question très présente dans la littérature anglo-saxonne, mais finalement peu explorée en France. Lorsque l’impôt foncier et / ou immobilier est considére dans sa composante « taxe sur le logement » (taxe d’habitation en France, « council tax » en Angleterre, « property tax » aux Etats Unis), qui procure des revenus substantiels, il est régressif, dans la mesure où le « service logement » représente une part décroissante de la dépense avec le niveau de revenu. Mais si on insiste sur la composante « taxe sur le capital immobi- lier » (foncier bâti en France, « property tax » aux Etats Unis), il devient, à l’inverse, un impôt progressif, dans la mesure où le revenu du capital constitue une part du revenu qui croit avec le niveau de ce dernier. Si, enfin, on considère la part de l’impôt qui repose sur la terre stricto sensu (le foncier non bâti en France, la « site value tax » en Nouvelle Zélande ou en
Australie), la fiscalité foncière est alors équitable par construction, dans la mesure où elle frappe un « enrichissement sans cause » qui résulte de l’action publique (le fait d’octroyer des droits à construire). Difficile donc de tirer une conclusion forte de ces quelques éléments, sans analyser les tenants et les aboutissants d’un tel impôt et les caractéristiques de sa mise en œuvre. Ce sera particulièrement le cas en France où l’ensemble de la fiscalite foncière et immobilière résulte d’une accumulation et d’une sédimentation qui, jointes à la rarete et l’insuffisance des évaluations, rend l’analyse difficile. Taxer les plus-values se révélerait-il plus simple ? En théorie, une telle taxe pourrait être satisfaisante sur le plan de l’équite , du moins lorsqu’elle ne pourrait pas être répercutée sur l’acheteur. Cela n’est possible que dans un marché stabilisé. La réalitéést autre d’une façon générale. Les marchés fonciers et immobiliers sont, depuis maintenant plusieurs décennies, soumis à des fluctuations croissantes, certains parlent de bulles, et le comportement des acteurs du marché par rapport aux cycles (le « market timing ») joue alors un rôle croissant. En matière de fiscalité des plus-values, cette évolution conduit à des comportements différenciés bien connus. Soit, sur un marché tendu, le vendeur peut répercuter le montant de l’impôt, ce qui se traduit in fine par une hausse des prix ; soit, sur un marché baissier détendu, l’impact maintes fois observé en est l’accroissement de la rétention, qui n’était certes pas un objectif du dispositif. On reconnaît la polémique qui s’est développée depuis maintenant deux ans sur la réforme de la taxation des plus-values (et la durée de détention nécessaire à son extinction). Plus généralement, l’impôt sur les transactions, très répandu à travers le monde, répond pour l’essentiel à une commodite administrative. Il est plus facile de tirer sur ce qui bouge, la transaction en fournit l’occasion, même si cela ne fait pas grand sens économique, comme l’observait déjà Ricardo il y a plus de deux siècles en qualifiant les impôts sur les transactions comme l’exemple même de l’impôt anti-marché. Terminons d’un mot sur le cas français, pour souligner l’instabilite et la complexité du système, qui en interdit à la fois l’efficacite et l’évaluation (et notamment son impact sur les prix). Le peu révolutionnaire Conseil Constitutionnel, dans un avis au vitriol du mois de décembre 2012 commentant la réforme de la taxation des plus-values qui sera mise en œuvre à partir du 1° Septembre, conclut, après une série de critiques de fond, que ce dispositif « serait entaché d’inintelligibilité ». Pauvres contribuables, si l’on peut dire.
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Economie et immobilier
Comment parvenir au « choc de simplification » dans un contexte d’hypertrophie législative et règlementaire ?
par VINCENT RENARD
Cette année 2013 présente sur les sujets traités quelques caractéristiques fortes. En premier lieu la conjoncture est marquée par une crise significative dans la production de logements neufs, dans les différents segments et dans un nombre significatif de « zones tendues ». Les chiffres glo- baux ambitieux annoncés par la ministre seront difficiles à tenir. Sur le plan législatif et réglementaire, la production de textes nouveaux apparait devoir être considérable, depuis la « première loi Duflot » sur la « mobilisation du foncier public en faveur du logement » 2012 jusqu’à la deuxième loi Duflot « logement et urbanisme », ou loi « ALUR » en passant par les ordonnances en cours de préparation, sans oublier les lois préparées par la ministre de la décentrali- sation, au nombre de trois, et bien sûr le projet de loi de finances pour 2014, qui a toujours une grande importance sur nos sujets Il n’est pas question dans ce bref texte d’analyser l’ensemble, nous voulons seulement pointer ici quelques lignes de force, des points problématiques, et aussi quel- ques absents dans le débat. Nous nous efforcerons aussi d’y intégrer quelques éléments d’analyse économique pour évaluer les règles de droit au regard de leur impact écono- mique. Avant d’entrer dans le vif du sujet, il peut être utile de donner quelques éléments résumés sur la conjoncture sur les marchés du logement, qui peuvent expliquer en partie les volontés qui animent les auteurs des textes. Le point crucial est la très forte hausse des prix qui est intervenue depuis 2008 sur les marchés du logement, dépassant le doublement dans un certain nombre de zones tendues, alors que la hausse des prix n’atteignait pas 10 % en 6 ans. Le retournement des marchés est annoncé par un certain nombre d’acteurs depuis plusieurs années, en particulier depuis 2008 et l’éclatement de la « bulle des subprimes » aux États-Unis. Il n’en a rien été. Les baisses qui ont pu se produire ici ou là se sont limitées à quelques points, certaines zones ont continué à monter, le prix du m2 à Paris est actuellement supérieur à 8200 euros par mètre carré. Beaucoup annonçaient l’effondrement du nombre de transactions, celui-ci a certes diminué mais dans des proportions modestes. Et la baisse des taux d’intérêt, dont il n’est pas certain qu’elle se poursuive, a incontestablement soutenu la demande de crédit. Le parallèle avec la sortie de la bulle de la fin des années 1980 ne tient donc pas sur le plan économique. Un fait préoccupant est lié à l’investissement locatif, avec une baisse de 6,2% sur les douze derniers mois, et le difficile décollage de l’investissement Duflot, malgre le renforcement de son caractère attractif pour l’investisseur. Ces éléments tendent à aggraver le déséquilibre entre l’offre et la demande locative, dont la part importante en France est une cle des politiques du logement. Cette question de la relance de l’offre et –espère t-on – de l’assouplissement induit sur les marchés du logement est donc de celles qui irrigue l’ensemble des textes proposés. A ce jour, force est de constater que l’évolution de la production de logements neufs reste loin de l’objectif annoncé de 500 000 logements neufs, il semblerait que l’on soit plutôt sur un rythme actuel voisin de 300 000 logements neufs. Comment créer un « choc d’offre » ?
1. Un premier pas sur le foncier : la « petite loi Duflot » du 18 Janvier 2013 Cette loi pour la mobilisation des terrains publics veut promouvoir la relance de la mise sur le marché de terrains publics peu ou mal utilisés, qu’il s’agisse de collectivités publiques ou de grands établissements publics dépendant de l’États, avec une possible décote pour la construction de logements sociaux. Il s’agit certes d’un gisement qui reste substantiel, mais ce devra être la poursuite d’un effort entamé depuis une vingtaine d’années, les difficultés y restent présentes, et on peut aussi être conscient que les « bijoux de famille », casernes de centre ville ou gares centrales désaffectées, ont rencontré la demande depuis quelque temps. Et l’invocation répétée de la caserne Reuilly à Paris ne suffit pas à structurer une politique d’offre. Reste aussi à maitriser le calcul de la décote, sous la responsabilité du Préfet. Difficile enjeu pour des entités déja très endettées, soumises à des injonctions de rentabilite ... Au-delà des péripéties de cette loi, processus engagé dans la précipitation, enrayé par le conseil constitutionnel, et l’affichage d’une liste de terrains publics « disponibles », largement erronée ou falsifiée, cette loi peut contribuer à accélérer un peu la mise sur le marché de terrains publics, mais elle ne devrait pas bouleverser les équilibres. Plus significative pourrait être la publication d’ordon- nances « pour accélérer la construction de logements » qui a été approuvée par le gouvernement au mois de Juin. Le recours aux ordonnances, qui peut ne pas enthousiasmer ceux qui sont attachés à une saine vie parlementaire, répond à l’évident objectif d’aller vite pour relancer la construction. Au-delà de classiques assouplissements (règles sur les parkings, possibilités de surélévation etc), deux éléments peuvent attirer l’attention. C’est d’abord l’instauration d’une procédure d’aménagement intégrée rapide, la « PIL », et c’est aussi et surtout une véritable guerre qui est engagée contre les « recours abusifs ». Il y a un léger paradoxe à voir une ministre « verte » attaquer frontalement la possibilité de faire des recours. France Nature Environnement ne s’y est pas trompé en indiquant que ce dispositif « pourrait profiter en retour à des affairistes de l’immobilier, et pourrait servir d’épouvantail et empêcher d’agir ceux qui n’auraient pas les moyens financiers suffisants ». Ceci posé, il y a là véritablement un problème considérable de multiplication des recours, parfois certes pour des raisons indéfendables, par exemple pour négocier un retrait, mais le plus souvent pour exploiter les infinies sophistications de codes de l’urbanisme, de la construction ou de l’environnement devenus obèses, impossibles à connaitre dans le détail et parfois contradictoires. Cette vulnérabilité du droit est un problème considérable, et la prolifération actuelle de tex- tes n’est pas de nature à la réduire. Là encore, le double objectif de réduction de la durée des contentieux et de lutte contre les recours malveillants est clairement légitime mais délicat à gérer, et ce ne sera pas la première tentative de cette nature. L’analyse des précédents mérite d’être faite. Une autre ordonnance doit avoir pour objet « l’incitation à la densification, en facilitant la construction de logements dans les
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zones tendues ». On rejoint là une préoccupation ancienne, depuis la «lutte contre le mitage » de la fin des années 1970 jusqu’aux préconisa- tions du « Grenelle de l’environnement », en passant par la loi SRU sur la solidarite et le renouvellement urbain. Cette volonté répétée n’a atteint que très partiellement sa cible, et les études montrent bien la poursuite de l’étalement urbain, en particulier par des ménages à faibles ressources. Une des clés d’une telle politique serait sans doute une politique foncière forte, faute de laquelle le fonctionnement des marchés fonciers poursuivra sa fonction de centrifugation sociale, en contradiction avec les thèmes centraux du « développement durable ». 2. Vers la « grande » loi Duflot pour l’accès au logement et un urbanisme rénové Ce texte est important, il a des ambitions larges, il comporte déjà près d’une centaine d’articles et il est l’objet de près d’un millier d’amendements. Il sera vraisemblable- ment présenté à la session extraordinaire du Parlement au mois de Septembre. Autant dire qu’il serait bien hardi d’en proposer une analyse précise, on voudrait seulement ici en souligner quelques traits centraux et quelques unes des réactions qu’il a suscitées. L’ambition en est résumée par la ministre : « loi de progrès social, qui consacre des droits nou- veaux, adaptée aux nouvelles réalités, qui permettra de réguler les marchés, de protéger les citoyens, loi d’intérêt écologique majeur, qui attaquera la question de l’étale- ment urbain, et l’artificialisation des sols, une loi juste qui va mettre de la sérénité dans les rapports entre locataires et propriétaires, etc ».. La partie consacrée au logement est particulièrement importante, traitant des copropriétés, de l’habitat « indigne », de la performance énergétique du parc privé, l’accueil et l’hébergement, l’attribution des logements sociaux, et la modernisation des acteurs du logement locatif social. Vaste programme donc, dont la mise en musique pro- met d’être complexe, et on ne voit pas encore poindre le « choc de simplification ». Cette loi est importante, complexe, elle touche à de nombreux domaines. Gageons que, entre les centaines d’amendements et les nombreux décrets d’application, une longue période d’instabilité juridique s’ouvre. Une interrogation centrale est celle de savoir si cette loi, entre l’encadrement des loyers, la garantie universelle des risques locatifs et la nouvelle régulation des professionnels de l’immobilier, permettra de faire baisser les loyers et les prix immobiliers, alors que la production de logements neufs parait en panne. C’est un point crucial pour la Ministre qui met au premier plan l’objectif de faire baisser la charge du logement (« favoriser l’accès de tous à un logement digne et abordable »). La loi traite également des documents d’urbanisme, et la lutte contre l’étalement urbain. D’autres chapitres de cet ouvrage traiteront précisément ces questions. Nous conclurons ici notre propos en soulignant quelques points qui nous paraissent cruciaux. La première question, essentielle, est celle de la gouvernance. Le mille-feuille politico-administratif a été cent fois dénoncé, mais on a rajouté entre temps l’échelon de la métropole, et on se dirige vers la généralisation du PLUI, le plan d’urbanisme intercommunal, tandis que le permis de construire resterait au niveau de la commune. Redoutable difficulté dans un contexte où les intercommunalités sont d’une extrême diversite , dans leur dimension, leurs attributions et plus encore leur compétence technique, encore aggravée dans le cas emblématique de l’ile de France. Et l’articulation entre le
document d’urbanisme et l’autorisation individuelle est une question centrale. Il y a là une difficulté majeure, liée à notre pathologie du pouvoir communal qui reste un tabou. La ministre de la décentralisation a éte claire en déclarant : » le maire gardera le permis de construire. C’est un engagement que j’ai pris devant le premier ministre et le président de la République ». Le problème reste donc entier. Une seconde difficulté, de nature juridico économique, tient à la possible divergence entre deux des objectifs poursuivis par les politiques publiques. Le premier objectif repose sur la volonté affirmée, à travers notamment un certain assouplissement des règles et une offensive pour la limitation des recours des tiers contre les autorisations individuelles, de dynamiser la construction de logements dans le territoire, en particulier dans les zones tendues. On comprend bien que ce sont là des conditions nécessaires pour s’approcher de l’objectif de construire 500 000 logements nouveaux chaque année en répondant aux besoins des populations. Mais on doit aussi être conscient qu’une telle volonté va à contre courant des évolutions actuelles où la grande majorité des construc- tions neuves, dans les grandes agglomérations, se produit dans des périphéries de plus en plus en plus lointaines. Le succès d’une telle politique pourrait passer par une poli- tique foncière forte, allant bien au-delà des quelques dispositions sur la mobilisation du foncier public ou l’uti- lisation du droit de préemption. Un préalable serait une réforme foncière d’ensemble, incluant en particulier une dimension fiscale, fiscalité annuelle, fiscalité de l’aménagement et fiscalité sur les plus-values. Mais ce sera pour une autre fois... On peut aussi souligner la quasi absence de la dimension fiscale. Elle est cruciale. L’urgence serait d’harmoniser, comme en Grande Bretagne par exemple, le contexte fiscal et les règles d’utilisation des sols. Ils sont largement indépendants en France, qu’il s’agisse de la fiscalité fon- cière classique, de la fiscalité des plus-values ou de la fiscalité de l’acte de construire. Cette harmonisation pour- rait être un puissant facteur d’une politique de développement urbain.
Source : Annuaire du Gridauh 2013, Droit de l’aménagement, de l’urbanisme et de l’habitat. Jean Bernard AUBY(2013), Droit de la ville. Du fonction- nement juridique de la ville au droit à la ville, Lexis Nexis, Paris, 2013. Gérard BAUER et Jean Michel ROUX (1976), La rurbanisation ou la ville éparpillée, Éditions du Seuil. Jean Charles CASTEL (2010), Ville dense, ville diffuse ; les deux faces de l’urbanisation, Études Foncières, n°147, Octobre. Eric CHARMES (2011), La ville émiettée ; essai sur la clubbisation de la vie urbaine, PUF, La ville en débat. Gilbert Emont (2012), Logement, pronostic vital engagé, Economica, coll. L’immobilier en perspective, préface de Guy Marty. Revue Études Foncières (2010), La densification en débat ; effet de mode ou solution durable, dossier coordonné par Eric Charmes. Revue Esprit, Janvier 2012. Dossier « le logement au cœur de la crise », coordonné par Vincent Renard Informations sociales, « Le coût du logement », n° 155, Septembre 0ctobre 2009, coord. Nadia Kestermann. Guillaume Poitrinal (2012), Plus vite. La France malade de son temps, Grasset, Paris. Vincent Renard, Urbanisme : alléger le poids des contrain- tes, Le moniteur des travaux publics. 6 Avril 2012. Vincent Renard, La ville saisie par la finance, Le Débat, n° 148, Janvier Février 2008.
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déb 12h30 en plénière
Jean-Pierre Troche Président de l’AITEC Michel Maso Directeur de la Fondation Gabriel Péri Patrick Amico Animateur de Habitat et Avenir Christophe Robert Délégué général adjoint de la Fondation Abbé Pierre Animé par David Chiousse Directeur du service Logement à Aubagne !
1ères Rencontres en 2011 Jean-Pierre Troche, Denis Burckel, Michel Maso
Lors de la première édition des RNLH les 26 et 27 mai 2011, un grand débat des think tank avait été organisé autour de Denis Burckel pour Terra Nova, Michel Maso de la Fondation Gabriel Péri et Jean-Pierre Troche représentant l’AITEC. Vous pouvez retrouver les actes de ce débat dans l’ouvrage “5 ans pour sortir de la crise du logement” accessible en ligne sur le site www.crisedulogement.fr
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bat Jean-Pierre Troche
Jean-Pierre Troche, président d'honneur de l'AITEC, est urbanistes spécialiste des politiques publiques de l'habitat et du développement durable urbain au sein du bureau d'étude Ville et habitat; Il anime en particulier de nombreux PLH, appuie les acteurs nationaux du logement et réalise des missions internationales sur ces sujets. Crée en 1983 l'AITEC rassemble des professionnels , urbanistes chercheurs expert dans la volonté de développer une expertise citoyenne aux cotés des mouvements sociaux . L'aitec participe donc à la construction d'une expertise ancrées dans les luttes sociales et à la formulation de propositions alternatives Dés sa fondation l'AITEC a travaillé sur des sujets comme le foncier, le droit à la ville et au logement.
Michel Maso Michel Maso est directeur de la fondation Gabriel Péri depuis juillet 2006. Auparavant, il était directeur de cabinet de Robert Hue et secrétaire national du PCF. Il est historien de formation et a exercé en tant qu'enseignant pendant plusieurs années.
Patrick Amico Ingénieur et urbaniste diplômé de l'Ecole Nationale des Ponts et Chaussées (1979), mais aussi géographe, aménageur. Il a débuté sa carrière en bureau d'études et au sein de cabinet d'élu, puis à la SCIC (Société Centrale Immobilière de la Caisse des Dépôts) de 1981 à 1998, où il y a occupé diverses fonctions opérationnelles et managériales en matière de construction et de gestion immobilière. Directeur des constructions au plan national à partir de 1998 à la SNI, puis Directeur de la SNI Sud Est jusqu'en fin 2009. Il a largement participé à la réorganisation du Groupe dès 1999, et à ses orientations stratégiques par la suite. Président du Directoire d' ICF Sud Est Méditerranée depuis 2010 (ESH), Il est membre du Comité de Direction du Groupe ICF Habitat.
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Fondation Jean-Jaurès: un observatoire de l’action publique L’Observatoire de l’action publique mène un travail de réflexion autour de la modernisation et de l’efficacité de l’action publique. L’Observatoire de l’action publique mène un travail de réflexion autour de la modernisation et de l’efficacité de l’action publique. L’action publique est indispensable non seulement pour veiller à l’organisation des rapports marchands dans la société, mais aussi pour les réguler, les orienter et les adapter aux conditions mêmes de la vie en société : garantir la satisfaction des droits, des libertés et des besoins de chacun comme de chaque collectivité, développer des solidarités économiques, sociales, territoriales, générationnelles, temporelles, écologiques, promouvoir l’intérêt général. En croisant les regards et en mutualisant les bénéfices des expériences fructueuses, notamment européennes, l’Observatoire souhaite faire analyses et propositions pour améliorer la qualité du service, simplifier les procédures, évaluer les mesures, optimiser les dépenses, afin de remettre l’usager au cœur des
politiques publiques. A travers ses initiatives publiques (débats, publications, réactions) et sur invitation (auditions, séminaires, tables-rondes), l’Observatoire de l’action publique vise à réexaminer chacune des formes de l’action publique à tous les niveaux - local régional, national, européen – afin de la relégitimer. En même temps, l’action publique n’est pas vertueuse par nature. L’Observatoire de l’action publique sera particulièrement vigilant à l’égard de toute forme de dérive ou d’abus. Relégitimer l’action publique implique qu’elle soit responsable et exemplaire. L’Observatoire de l’action publique est co-dirigé par Pierre Bauby, chercheur et universitaire, et par Françoise Castex, députée européenne, présidente de l’Intergroupe services publics au Parlement européen.
Politique du logement : et les investisseurs institutionnels ?
Pour faire face à la crise du logement et rattraper le retard pris dans la construction au cours de la décennie précédente, les mesures prises ces derniers mois vont dans le bon sens mais ne suffiront pas à atteindre l'objectif de 500 000 logements construits chaque année. Pourtant, un levier puissant reste à actionner : la contribution des investisseurs institutionnels, en mobilisant l'épargne défiscalisée en faveur du logement intermédiaire. Cette note du pôle Logement de Terra Nova propose ainsi de conditionner les avantages fiscaux accordés aux gestionnaires d'épargne salariale, de sociétés foncières bénéficiant de la transparence fiscale et aux assurances à la détention de logements intermédiaires ou de parts de sociétés agréées se concentrant sur cette activité, à hauteur de 1,6 % de leurs actifs sous gestion. Cette mesure, neutre budgétairement pour l'Etat et indolore économiquement pour les acteurs concernés, permettrait la construction de 250 000 logements en cinq ans. Le rythme de construction nécessaire pour résorber le déficit de logements en France a été évalué par de multiples experts, et repris dans le programme du candidat-président François Hollande, à 500 000 logements par an. Pour atteindre cet objectif, le gouvernement de Jean-Marc Ayrault a déjà pris un certain nombre de mesures, pour la plupart d’entre elles préconisées dans un rapport de Terra Nova de juillet 2011[1]. Cependant, l’évolution récente de la construction éloigne le pays très nettement de cet objectif. En revanche, un levier puissant n’a pas encore été actionné : la contribution des investisseurs institutionnels. Il possède un avantage précieux en ces temps de gestion rigoureuse : sa neutralité budgétaire pour l’Etat. Les mesures prises ces derniers mois doivent être, dans l’immédiat, complétées par le retour des institutionnels dans le logement. Les mesures de ces derniers mois : utiles mais insuffisantes Le décret du 21 juillet 2012 prévoyant l’encadrement de l’évolution des loyers dans le parc privé a donné le premier
signal d’une volonté politique de contenir les prix du logement et de préserver le pouvoir d’achat des locataires, en attendant la détente induite par une augmentation du volume de construction des logements neufs, nécessairement plus longue à mettre en œuvre. La loi « mobilisation du foncier public et obligations de production de logement social », promulguée début 2013, prévoit deux dispositions facilitant l’offre : le renforcement des obligations de construction de logements sociaux de l’article 55 de la loi SRU ; la mise à disposition de terrains publics. La loi de finances pour 2013 inclut des mesures destinées à fluidifier le marché des immeubles et à impulser la construction de logements neufs. Le renforcement de la taxe sur les logements vacants facilitera la remise sur le marché de logements aujourd’hui inhabités. Le nouveau dispositif « Duflot » d’incitation fiscale à l’investissement locatif des particuliers a le mérite d’exiger des contreparties sociales au coût budgétaire qu’il représente.
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La fixation de la TVA à 5 % pour la construction de logements sociaux, annoncée le 21 mars, devrait permettre de soutenir l’effort des HLM. Ces mesures vont dans le bon sens, et elles ont été prises dans un contexte d’argent public rare. Elles seront cependant insuffisantes pour rattraper le retard pris dans la construction de nouveaux logements au cours de la décennie précédente. Et, elles ne permettront pas d’atteindre l’objectif de 500 000 logements construits chaque année. Or il y a urgence ! Le retour des institutionnels : un enjeu social en mobilisant l’épargne défiscalisée pour le logement intermédiaire Dans ce contexte, l’implication des investisseurs institutionnels dans le logement constituerait un puissant levier au service de l’effort de construction. Le Premier Ministre l’a, au demeurant, évoqué au congrès de l’Union sociale pour l’habitat fin septembre 2012. Plusieurs points éclairent cet enjeu. D’abord, le gouvernement a déjà mobilisé davantage l’épargne défiscalisée pour soutenir le logement : le relèvement du plafond du livret A dont les fonds financent les HLM va dans ce sens. Ne faut-il pas passer en revue l’ensemble des produits destinés à collecter l’épargne des Français et bénéficiant d’avantages fiscaux pour obtenir, en contrepartie, une implication de leur part dans l’effort de construction ? Ensuite, la production de logements intermédiaires est devenue marginale au cours de la dernière décennie[1]. Elle n’est plus véritablement un objectif de la politique du logement. Or, dans les zones tendues, le décalage entre les loyers sociaux, même les loyers PLS[2], et les loyers du secteur privé s'est fortement accru (plus de 10 euros/m2 et par mois à Paris). Ceci crée un écart infranchissable pour certains ménages, réduisant les sorties du parc HLM et limitant les parcours résidentiels. Recréer un « tiers secteur » rendrait plus facile le parcours résidentiel et libérerait des logements en HLM. Une offre locative plus adaptée serait proposée aux « classes moyennes », les contraignant moins à arbitrer en faveur d’une accession coûteuse, mais aujourd’hui alternative parfois inévitable, à un logement locatif privé trop cher. Plus globalement, ce type d’offre peut avoir un effet d’atténuation sur l’évolution des loyers privés. Enfin, les investisseurs institutionnels qui détenaient un million de logements dans les zones tendues au début des années 1990 en possèdent désormais moins de 100 000. La faiblesse de la rentabilité des logements (entre 2,5 % et 3 % net) est l’explication la plus fréquemment avancée. Un nouveau mécanisme consisterait à introduire, au sein de l’actif des institutionnels bénéficiant d’avantages fiscaux importants, des seuils minima de détention en zone tendue de logements à loyers intermédiaires entre des loyers PLS et des loyers privés, avec plafonds de ressources des locataires. Pour faciliter la gestion et tenir compte de la clarté demandée par certains investisseurs étrangers, ces seuils pourraient être respectés à travers la participation dans des sociétés spécialisées en logements intermédiaires et ayant été préalablement agréées par l’Etat. Le calibrage du mécanisme doit tenir compte de deux facteurs. Le premier est son impact sur la construction de logements. Pour que l’effort soit à l’échelle des besoins de logements, une participation des investisseurs institutionnels à hauteur de 10 % de la production neuve semble un objectif raisonnable, soit 50 000 logements par an ou 250 000 logements en cinq ans. Si on considère qu’un logement intermédiaire est financé pour moitié par des fonds propres, pour moitié par un prêt, et que son coût moyen est de 200 000 €, il faut mobiliser 100 000 € de fonds propres par logement. Le besoin d’investissement ressort donc à
25 Mds € en cinq ans pour 250 000 logements[3]. Le deuxième facteur est d’ordre économique pour les institutionnels : la moindre rentabilité supposée des actifs de logement ne doit pas inciter les investisseurs à renoncer à leur avantage fiscal. La perte de rentabilité due à la détention de logements intermédiaires atteint un maximum de 3 % par an : c’est par exemple la différence entre le rendement de l’immobilier de bureaux (5,5 % à 6 %) et de l’immobilier de logements (2,5 % à 3 %). Encore faut-il préciser que la perte de rentabilité due aux logements intermédiaires peut être très faible : par exemple, le rendement des contrats d’assurance – vie est en 2012 peu différent de la rentabilité de l’immobilier de logements. Un impact financier soutenable et un intérêt économique réel pour les institutionnels De quels véhicules parlons-nous ? Et quels sont les volumes d’actifs sous gestion ? Les trois véhicules gérant un actif significatif et bénéficiant d’avantages fiscaux conséquents sont les instruments de « pierrepapier », l’épargne salariale et les assurances, notamment celles qui gèrent des risques longs comme l’assurance-vie. Les outils d’investissement immobilier ayant obtenu la transparence fiscale qui les exonère du paiement de l’impôt sur les sociétés[4], comme les SIIC[5], SCPI[6] et OPCI[7], gèrent environ 160 Mds € d’actifs. L’épargne salariale qui, malgré le réajustement récent des contributions sociales qui lui sont appliquées, continue de bénéficier d’avantages fiscaux importants relatifs à l’exonération de l’impôt sur le revenu pour le salarié et de l’impôt sur les sociétés pour l’employeur, gère 90 Mds € d’actifs. Les sociétés d’assurance, et notamment celles qui gèrent un risque long comme l’assurance-vie, et dont le statut d’exonération fiscale vient d’être préservé dans la loi de finances pour 2013, gèrent 1 320 Mds €. Les institutionnels concernés gèrent donc environ 1 570 Mds € au total. L’investissement en logement intermédiaire estimé à 25 Mds € en cinq ans (voir ci-dessus) représente ainsi au plus 1,6 % des fonds gérés. La réduction de la rentabilité des fonds gérés atteindrait 0,08 % à terme de cinq ans, avec les hypothèses les plus défavorables à l’investissement logement (cf. annexe - voir la note en version PDF). Enfin, c’est sans compter avec la créativité urbaine des opérateurs (optimisation du foncier d’opérations tertiaires ou commerciales ; reconversion de bureaux obsolètes en logements) et la diversification des risques que représente l’investissement logement. Notre proposition consisterait à conditionner les avantages fiscaux accordés aux gestionnaires d’épargne salariale, de sociétés foncières bénéficiant de la transparence fiscale et aux assurances. Cette condition serait remplie par la détention en 2017, avec montée en charge progressive et programmée, de logements intermédiaire ou de parts de sociétés agréées se concentrant sur cette activité, à hauteur de 1,6 % de leurs actifs sous gestion. Cette mesure est neutre budgétairement pour l’Etat, économiquement indolore pour les acteurs concernés et rétablirait le lien fort qu’il est nécessaire de réaffirmer en ce début de quinquennat entre fiscalité et intérêt général. [1] Même si le prêt locatif intermédiaire (PLI) existe toujours et que certains dispositifs de l’Agence nationale de l’habitat préservent la construction de logements intermédiaires. [2] Prêt locatif social [3] Avec des garanties apportées par les collectivités locales, le taux d’emprunt pourrait être supérieur et donc le besoin de fonds propres sensiblement plus faible. A noter, en revanche, que les investissements en immobilier tertiaire limitent généralement l’emprunt à 30 %. [4] A condition de distribuer une fraction importante de leurs revenus et plus-values [5] Sociétés d’investissement immobilier cotées [6] Sociétés civiles de placement immobilier [7] Organisme de placement collectif en immobilier
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Notions de confort
La transition énergétique concerne l’habitat en général, tout en devant s’appliquer à chaque logement en particulier. Loin de porter uniquement sur les opérations à venir - cette précision n’est pas si évidente - elle nous appelle à penser l’évolution d’un parc extrêmement divers, tant par son état et les caractéristiques propres aux bâtiments mêmes, que par son statut d’occupation et les modalités du financement de son entretien, quand ce n’est pas également celui de sa construction ou de son rachat.
par PATRICK AMICO
La transition énergétique concerne l’habitat en général, tout en devant s’appliquer à chaque logement en particulier. Loin de porter uniquement sur les opérations à venir - cette précision n’est pas si évidente - elle nous appelle à penser l’évolution d’un parc extrêmement divers, tant par son état et les caractéristiques propres aux bâtiments mêmes, que par son statut d’occupation et les modalités du financement de son entretien, quand ce n’est pas également celui de sa construction ou de son rachat. Avant même de songer à définir la transition énergétique en tant que telle, on voit d’emblée que son domaine d’application pose question, autant qu’est évident l’étendue du public concerné - l’ensemble de la population. La raison voudrait alors opposer à ce trop plein de complexité une solution générique, suffisamment simple pour embrasser d’un coup l’étendue du problème, au risque de tomber dans la tautologie. « Tout ce qui fait baisser la consommation d’énergie est un pas de plus vers la sobriété énergétique ». Mais pour reprendre la phrase d’Umberto Eco : « A tout problème complexe, il existe une solution simple et elle est mauvaise. » (Le Pendule de Foucault). Changer sa chaudière pour un modèle plus économique n’isole pas sa maison ; le progrès calorique se dissipe de la même façon. Or, l’ordre parfaitement judicieux des travaux n’y suffira pas, puisque toute consommation est d’abord celle des habitants, qui ne sont pas d’abord là pour entretenir des locaux, mais pour vivre chez eux. Comment sortir de cette alternative stérile, qui oppose à un problème technique trop complexe, le comportement des gens ? En matière d’habitat, une solution peut être trouvée en isolant une grande partie du questionnement, à travers le cas d’un bailleur social. Il s’agit ainsi de positionner le sujet sur un parc précis quoique hétérogène, mais occupé par des locataires, dont le rapport au logement s’inscrit très largement selon un modèle intégré d’économie sociale et solidaire, fortement institutionnalisé. Le « comportement des gens », est pris globalement, la diversité des pratiques ayant été analysée en tant que telle, dans le chapitre précédent (voir l’article d’Amélie Flamand) ICF Habitat dispose d’un patrimoine d’immeubles, du petit collectif à la maison individuelle, en passant par la cité jardin et l’ensemble HBM, des années 1920 aux derniers programmes inaugurées les semaines passées ; sur un territoire très étendu, puisque historiquement développé à proximité des gares. On y retrouve toutes les modalités de chauffage : d’abord en terme de réseau individuel et collectif, mais aussi de combustible, gaz, électricité ou fioul, du système le plus élémentaire à la centrale la plus high-tech. Chaque situation y devient ainsi spécifique. Il revient toutefois au gestionnaire d’entretenir et d’améliorer
l’ensemble simultanément. Outre les aspects juridiques précis (procédures de labellisations spécifiques etc.) et des politiques dédiées déclinées selon les différents publics (aides soumises à des conditions d’éligibilité etc.), la mise en œuvre de la transition énergétique chez ICF se pose ainsi globalement. Notons que dans cette perspective, les habitants ne sont pas secondaires, ils n’ont pas disparus de l’analyse. A l’origine de la création du modèle HLM, ils sont les bénéficiaires d’une certaine conception du droit au logement. C’est d’ailleurs de leur point de vue qu’il est le plus pertinent d’entrer dans le sujet. Certainement bien plus qu’ailleurs, on attend d’abord d’un logement social un refuge. Le locataire ne se situe pas dans une démarche de constitution de patrimoine, mais de qualité d’usage. D’abord, un lieu qui inspire la sécurité, qui marque la coupure d’un environnement extérieur à l’ambiance parfois peu amène. Un lieu où l’on se sente bien, dans lequel est possible le retour sur soi-même et ses proches, son fonctionnement et son identité ; la part personnelle du quotidien, les moments intimes et familiers, laissés à la discrétion de chacun. Tant de choses, si essentielles, supposent calme et sécurité, un espace accueillant et chaleureux. Pour tout cela, il vaut mieux avoir bien chaud et disposer de tous les appareils facilitant les tâches quotidiennes. La règle était simple, ces dernières décennies un meilleur confort se mesurait par la quantité d’énergie supplémentaire consommée, on ne raisonnait pas en terme de dépense. Par exemple, les habitudes vestimentaires ont pu évoluer. Alors qu’on portait un sweat-shirt en intérieur, il n’est pas rare de préférer une tenue plus légère, un simple tee-shirt en automne. Dans un autre registre, aérer régulièrement les pièces en ouvrant les fenêtres un moment est aujourd’hui reconnu largement comme une bonne pratique. Mais couper le chauffage pendant l’opération n’a encore rien d’automatique. Ces deux exemples définissent le confort comme la disparition des contingences de gestion du logement, plutôt qu’un attribut propre à un espace ou un objet. Cette forme de confort dans le logement simplifie, facilite la vie quotidienne. Une autre forme de confort vient en complément, elle développe d’autres dimensions. A travers les équipements électroniques, l’habitation se connecte au Monde. Branchés en permanence ou à recharger régulièrement, ces équipements perdent très rapidement leur caractéristique luxueuse. Ils s’installent en outils standard et à certains égards nécessaires, puisqu’ils permettent, voire sont la condition, pour demeurer en phase avec le mode de vie présent, que ce soit dans les relations sociales ou dans l’accès à l’information. Or le principe de fonctionnement de ces appareils n’a pas changé depuis l’innovation de la télécommande dans le « confort ménager » : la
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fonction veille est généralisée, le programme économique correspond surtout à une sous-utilisation. Les fonctionnalités se cumulent au détriment de leur lisibilité. La compatibilité des produits entre eux, contrevenant à la concurrence, n’est pas recherchée. C’est pourquoi les gains de conforts passent par une accumulation de matériels, parfois redondants, se traduisant par une forte hausse de la consommation d’électricité. Par voie de conséquence, l’augmentation de la consommation énergétique s’est insinuée en condition du confort. Faire des économies passe par changer ses façons de vivres, en rognant précisément sur ce qui les a améliorées. Posée en ces termes, l’équation est logiquement sans solution pour les locataires HLM, l’argument
d’un renchérissement de la valeur de l’immeuble, par l’isolation par exemple, étant hors sujet. La banalisation de la consommation énergétique constitue donc une première difficulté, dont la résolution dépend d’un locataire, que le bailleur, pour être efficace, doit accompagner sans avoir à se positionner comme une autorité source de contraintes. Il faut ajouter à cette première dimension du confort perçu, assez commune à tous les locataires, un facteur de variation très important, dont il est délicat de tenir compte : l’écart entre la température réelle et la température ressentie. Aujourd’hui, la norme est unique, la mesure météorologique stricte de référence reste pourtant bien abstraite. Limité à cet indicateur, il s’ensuit
La transition énergétique de l’habitat concevoir les outils sociaux et spatiaux
Social Comportement des habitants pratique
confort écologie
Transition Energétique Spatial Chaque logement technique
de l’Habitat Comment généraliser les pratiques écologiques sans nuire au confort ?
Comment générer des procédés techniques complémentaires ?
Identification des mécanismes obsolètes inverser la culpabilisation, valorisation des démarches vertueuses reformulation de l’équation de l’écologie comme contrainte d’usage
Cf = ! !! − !! ! le niveau de confort (Cf) est fonction de la consommation d’énergie (ce) moins les contraintes d’usages (cu)
Transition des modes de faire Innovation méthodologique évolution des concepts
à la transition énergétique comme condition de confort
!! Cf = !! + !! = ! +! ! ! !! le niveau de confort (Cf) est la somme de la performance énergétique (pe), qui est fonction de la consommation énergétique (ce) rapportée à l’efficacité énergétique (ee), et de la qualité d’usage (qu) qui est fonction de niveau d’équipement (E)
une grande perte d’appréciation du contexte. Au lieu de spécifier un milieu et son climat, la température donne une référence sans distinction, qui neutralise d’autres données pourtant significatives. Une même température mesurée simultanément dans un calme absolu à Menton et sous un mistral de quatre-vingt-dix kilomètres heures à Avignon rend égales deux journées incomparables… Maintenir 19°C par temps frais mais ensoleillé, n’a rien à voir avec la lutte contre les bourrasques toute une journée. Inversement, préserver la fraîcheur des pièces dans le Sud de la France ou les régions continentales représente un véritable enjeu, dès lors qu’on souhaite éviter la généralisation des climatiseurs. L’environ-
Température conventionnelle perçue ! nouvel indicateur
Dispositif européen, national localisé ! territoires
Economie sur la production sur la consommation ! efficacité du passif
nement, du point de vue climatique local, renouvelle donc l’approche du confort. Intégré comme une donnée de contexte, il indique là où des améliorations sont possibles et les précise ; le caractère normatif des interventions les plus pertinente sur les logements partant de critères de confort a priori, est relativisé au profit d’une spécification des priorités – au-delà d’une simple hiérarchie dans la liste générale des qualités attendues d’un logement. Jusqu’à maintenant, l’entrée du bailleur sur les économies d’énergie était d’un autre ordre. Consistant essentiellement dans des montages complexes, comme les contrats de
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performance énergétique, elle visait à répondre à de grands objectifs. Définis à l’échelon national ou européen, les opérateurs contribuaient à leur déclinaison en tant qu’agents, via l’accès à des fonds dédiés selon des critères précis, souvent très techniques. Le principe d’une démarche proactive par rapport à l’environnement n’était pas l’intention, puisqu’il s’agissait surtout d’intégrer une variable de plus – l’environnement – dans un esprit analogue à la prise en compte de l’accès des personnes à mobilité réduite ou de la sécurité des ascenseurs. Toutes ces incitations ou obligations représentent donc une réponse, mais limitée. Concrètement, cela se traduit essentiellement par une « technologisation » du système, qui peut aller jusqu’à poser des alternatives relativement inopérantes. D’une part : « Jusqu’où perfectionner les chaudières, leur adjoindre des systèmes extrêmement sophistiqués ? » et de l’autre « A partir de quand décide-t-on de travaux d’isolation ? ». On peut considérer que les possibilités ne s’opposent pas mais se complètent. Cependant, les deux questions se fondent uniquement sur une sophistication technologique des solutions déjà existantes, ne faisant que reposer le problème dans les mêmes termes ; les gains en efficacité, productivité, s’avérent fatalement de plus en plus marginaux. De la même manière qu’en reconsidérant la perception de la température, on change l’approche du chauffage domestique, différencier les méthodes classiques d’intervention des bailleurs par territoire représente une piste pour de nouveaux progrès. Mais au préalable, la nature des objectifs doit être redéfinie. Deux exigences peuvent être mises en avant : la passivité des bâtiments et l’entretien des systèmes de chauffage. En raisonnant d’emblée sur la passivité des bâtiments, on a l’avantage considérable d’être certain d’aller dans le sens de la sobriété énergétique. Sur un plan pratique, l’isolation par l’extérieur constitue une modalité d’intervention dont l’efficacité immédiate et sur la longue durée semble, dans la plupart des cas, à retenir malgré les difficultés qu’elle peut poser en terme de maintien de la qualité architecturale, et parfois de coût. Les travaux extérieurs préservent le confort des locataires, traitent plus aisément les ponts thermiques et portent presque simultanément sur l’immeuble entier tout en ravivant sa façade, soulignant ainsi le lien entre l’image et la qualité du logement. Pour ce qui est du chauffage, des possibilités existent pour maximiser l’efficience des systèmes actuels, sans recourir à une technologie particulièrement pointue, dont la plus-value est mal connue faute de recul. L’enjeu principal porte donc sur la transition progressive du parc existant, plutôt que sur un effort supplémentaire sur la construction, qui servirait de fer de lance pour une généralisation a posteriori sur les bâtiments les plus
anciens. Ces deux objectifs doivent progressivement se rendre plus visibles au locataire, qui reste le bénéficiaire des économies d’énergie, au travers d’actions de sensibilisation, voire de la sensibilisation, dans les documents courants afférents à la gestion de l’immeuble et des logements. Au lieu de mener de grandes campagnes dissociées de la vie quotidienne de l’immeuble, il est plus utile de faire évoluer les quittances, la relation avec les gardiens et les agents chargés de la gestion locative, pour intégrer la transition énergétique dans toutes les tâches et les gestes de la vie quotidienne des résidences. Actuellement, cette dimension, pourtant décisive dans l’appropriation des enjeux par les habitants, reste encore peu développée. Mais toute cette réflexion ne prend son sens qu’à raison des moyens financiers supplémentaires, compte tenu de l’équilibre déjà fragile des opérateurs de logement social. La pratique de la transition énergétique chez ICF Habitat est un exemple dont on peut tirer plusieurs conclusions d’ordre général, quant à la mise en œuvre de la transition énergétique. Elle met en exergue le rôle très important de la technique dans ce domaine, bien que la situation actuelle en matière de consommation énergétique dépend de multiples facteurs de tous ordres. Lesquels renvoient au confort, à la relativité de sa perception, à la fois dans le temps et dans la diversité des pratiques habitantes. S’il a fallu peu de temps pour élever le niveau d’exigence des locataires en matière de confort, suivant l’amélioration historique des conditions d’habitations depuis les quarante dernières années, l’idée que ce confort peut être retrouvé autrement que par la consommation énergétique semble affaire de plus long terme. Pourtant, la simple variation d’un degré dans une pièce a des conséquences énergétiques très lourdes. Nous sommes tous conscients que la meilleure économie d’énergie est avant tout celle qui permet d’en éviter toute consommation, et nous savons bien que c’est la consommation d’eau chaude et de chauffage qui concentre le cœur de la consommation d’énergie. Mais face à ces généralités et malgré la longue durée de vie d’un logement, les situations sont à la fois diverses et complexes et ne seront jamais traitées globalement, une fois pour toutes. En conséquences, les réponses seront multiples, alternant entre progression technologiques et recherche de passivité. Cette seconde voie me paraît toutefois primordiale. Il n’y a pas de démarches contradictoires en la matière, puisqu’on s’inscrit là dans une démarche de longue haleine, qui nécessitera autant de persévérance que d’argent, sur des territoires au pluriel. Les comportements individuels en seront changés.
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oser l’habitat participatif
15h salle Hessel Colette Charriau Conseillère Régionale Paca déléguée au Logement Camille Devaux Urbaniste, Lab’Urba - Institut d’Urbanisme de Paris Animé par Pia de Quatrebarbes Journaliste à l’Humanité Dimanche !
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Camille Devaux
Colette ! Charriau
Lors des élections régionales de 2010, Colette Charriau a été élue conseillère régionale EELV (04) et le Président de la Région lui a confié la délégation au logement et à l’habitat. C’est à ce titre qu’elle représente la Région et fait entendre une voix nouvelle et forte au Comité Régional de l’Habitat. Dans ce Comité, comme aussi dans les différentes instances de pilotage et de suivi des projets de développement de l’habitat et du foncier, elle entend défendre une nouvelle politique publique régionale plus sociale et plus écologiste, en cohérence avec le renouveau de l’action publique nationale dans ces domaine. Egalement adjointe au maire de Digne, déléguée à l’urbanisme, elle allie ainsi une expérience de terrain, d’action politique de proximité à une vision stratégique régionale d’avenir construite autour de la nécessaire régulation collective de l’usage des sols. De formation supérieure dans le domaine de l’aménagement du territoire, elle a occupé différents postes de chargés de mission sur ces politiques auprès de collectivités locales. Elle fait ses classes militantes à la Jeunesse Rurale Chrétienne et acquit, par ailleurs, une solide expérience professionnelle et bénévole dans le champ de l’économie sociale et solidaire
Camille Devaux achève une thèse au Lab’Urba, à l’Institut d’Urbanisme de Paris, portant sur l’émergence et l’intégration de l’habitat participatif à l’action publique. Elle interroge alors les modalités selon lesquelles cette initiative habitante a progressivement suscité l’attention des décideurs et en particulier les collectivités et les organismes d’Hlm jusqu’à faire l’objet d’un article du projet de loi pour l’Accès à un Logement et un Urbanisme Rénové (Alur). Elle s’intéresse également à la mise en œuvre opérationnelle des projets à partir de plusieurs études de cas et met en débat les relations entre habitants et professionnels de la production de l’habitat. BACQUE M.-H., D’ORAZIO A. et al. (2010), « Habitat coopératif : une troisième voie pour l’accès au logement » in Territoires, n°508, mai, pp 24-37 CARRIOU C., RATOUIS O., SANDER A., 2012, « Effervescences de l’habitat alternatif », in Métropolitiques, 11 janvier DEVAUX C. (2013, à paraître), « L’entrée en politique de l’habitat participatif : révolution ou révélation des représentations et des pratiques ? », in BONNEVAL L., ORTAR N. (dir.), Titre à venir, Journée Jeunes Chercheurs du REHAL, ENS Lyon-LSH, 2012, L’Harmattan DEVAUX C. (2012), « De l’expérimentation à l’institutionnalisation : l’habitat participatif à un tournant ? », Métropolitiques, 23 janvier DEVAUX C., (2011), LOURIER V. (FNSCHLM), et al. (USH), Accompagner les projets d’habitat coopératif et participatif, Ed. FNSCHLM et USH, 160 p., février
De l’expérimentation à l’institutionnalisation : l’habitat participatif à un tournant ?
Les projets d’habitat participatif, encore au stade de l’expérimentation, sont de plus en plus médiatisés et se professionnalisent. Camille Devaux décrit les prémisses de l’institutionnalisation de ce mouvement, condition indispensable pour que ce modèle connaisse une plus large diffusion.
par CAMILLE DEVAUX
Aujourd’hui, en France, le nombre de projets d’« habitat participatif » engagés est d’environ 200 [1]. Ce nombre contraste avec le nombre de projets aboutis, évalué à une vingtaine. Toutefois, l’habitat participatif sort du strict cercle des initiés pour interpeller les acteurs institutionnels de la production de l’habitat, que sont notamment les collectivités locales et les organismes d’HLM. L’habitat participatif peut-il les conduire à repenser leur conception de l’habitat et la mise en œuvre des politiques qui y sont liées ? Est-il voué à « mourir de lui-même » ou à s’institutionnaliser [2] (Comeau 2004) ? Des intérêts bien partagés L’argumentaire des groupes d’habitants, comme celui des partenaires sollicités – collectivités et organismes d’HLM –, est éclairant. Il touche d’abord les relations de voisinage, à l’échelle du quartier comme de l’immeuble. D’une part, l’engagement des futurs habitants dans des projets à l’échelle du quartier offrirait des perspectives de redynamisation. D’autre part, les relations entre les habitants, nouées préalablement à l’emménagement, réintroduiraient du lien social, des solidarités, et permettraient d’enrayer d’éventuels conflits. Le partage
d’espaces (salle commune, buanderie, atelier, etc.) est présenté comme un moyen pour chaque ménage de réduire la surface de son logement et le coût afférant, pour une qualité de vie jugée meilleure. Les organismes d’HLM présument une gestion facilitée de ces ensembles, dont le coût lui-même pourrait être réduit, puisque les habitants souhaitent en assurer une partie (par exemple, les aménagements extérieurs, de petits travaux, etc.). Les partenaires comme les groupes mettent également en avant l’adéquation entre offre et demande de logement, et son corollaire supposé – meilleure appropriation – puisque les ménages définissent eux-mêmes le programme architectural. Enfin, la connaissance développée par les futurs habitants dans le domaine écologique et leur engagement dans des modes de vie respectueux de l’environnement séduit les partenaires. De façon générale, les innovations – terme employé par les partenaires – proposées par les groupes sur le plan de la participation, du collectif, des équipements, de l’architecture sont au cœur de l’intérêt des partenaires et un moyen de valoriser leur image et leur activité.
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Un mouvement médiatisé et en voie de professionnalisation L’habitat participatif fait aujourd’hui encore figure d’expérimentation et apparaît essentiellement porté par des ménages militants, éloignés du citoyen lambda, qui agissent en « entrepreneurs politiques » légitimant leur cause sur le plan symbolique « par la référence à des valeurs affirmées (intérêt général, justice, service public, solidarité) » (Garraud 2010). La sociologie des groupes dont le projet a pu aboutir dessine un profil-type de ménage : temps pour s’investir durablement, compétences techniques (urbanisme, architecture, droit, finances, etc.), compétences en communication, sens du politique et de la négociation… L’enjeu principal auquel est alors confronté l’habitat participatif est celui de sa démocratisation. De précédents travaux ont montré que la diffusion de l’habitat participatif est conditionnée par une forte médiatisation et une professionnalisation du mouvement, en interne d’une part, et en lien avec les acteurs institutionnels de la production de l’habitat d’autre part (Devaux 2010). La première condition semble plutôt satisfaite. En effet, un basculement s’est opéré dans le traitement médiatique de l’habitat participatif. Confiné à des sphères restreintes au milieu des années 2000, on observe depuis plusieurs mois sa forte montée en puissance dans la presse d’information générale et la presse professionnelle [3], ce qui contribue à amplifier l’intérêt des acteurs institutionnels et accélérer l’entrée de l’habitat participatif dans le champ des politiques publiques. En effet, dans les processus de mise à l’agenda, « le rôle des médias, en particulier, est fondamental » (Muller 2009, p. 32). La deuxième condition, la professionnalisation du mouvement, paraît, quant à elle, amorcée. En témoigne la fréquentation des Rencontres nationales de l’habitat participatif de novembre 2010 [4] : plus de 30 élus ou représentants de collectivités et 60 « professionnels » de la construction étaient présents, sur un total de 400 participants. La catégorie des « professionnels » regroupe les promoteurs (sociaux essentiellement) et les architectes, ainsi qu’un nouvel acteur : l’accompagnateur de groupes d’habitants, dont l’ambition est explicitement de professionnaliser le mouvement. Cette figure recoupe, en partie, celle du « groupe de “professionnels de la participation” » (Blondiaux 2008), tout en intégrant des compétences spécifiques à la production de l’habitat. Aussi, des profils variés constituent ce nouveau corps professionnel : architectes ou ingénieurs (souvent jeunes) ; spécialistes de la construction écologique ; anciens « aventuriers du quotidien » (Bidou 1984), animateurs d’Ateliers populaires d’urbanisme œuvrant au nom d’une militance « reconvertie » ; nouveaux militants de l’économie sociale et solidaire ; universitaires ; etc. Aussi composite que soit cette figure, elle concourt à une démocratisation des démarches, en offrant un appui aux groupes d’habitants. Un soutien de plus en plus marqué des acteurs institutionnels Toutefois, l’une des questions-clés est celle de la nature et de la pérennité de l’engagement des acteurs institutionnels comme de ces nouveaux professionnels, qui dépend encore du rôle des acteurs du mouvement, qui, tels des « groupes d’intérêt », se perfectionnent dans leur apprentissage du fonctionnement des cercles de la décision, pour « situer leur action le plus en amont possible du processus décisionnel » (Muller 2009). En ayant
entrepris la rédaction du Livre blanc de l’habitat participatif, argumentaire destiné aux collectivités, ils sont fidèles au rôle des « entrepreneurs politiques » qui « consiste à formuler le problème dans un langage recevable par les élites politiques et donc à traduire le langage de la société dans le langage de l’action politique » (Muller 2009, p. 31). Le recul manque encore pour se prononcer sur leur influence dans la décision, mais leur entrée sur le terrain du « militantisme institutionnel » (Politix 2005) est incontestable [5]. Cette entrée est, pour une large part, à l’origine de l’inscription d’actions en faveur de l’habitat participatif dans le Programme local de l’habitat (PLH) de certaines des plus importantes collectivités de France (Grand Lyon, Grenoble-Alpes Métropole, Communauté Urbaine de Strasbourg, Paris, Grand Toulouse, etc.), mais aussi du lancement d’appels à projets sur des terrains préalablement identifiés, permettant ainsi aux groupes d’habitants d’accéder au foncier [6]. Le « réseau national des collectivités en matière d’habitat participatif » s’est constitué en novembre 2010, à l’initiative de la Communauté Urbaine de Strasbourg et de la ville de Montreuil. Il rassemble aujourd’hui une quinzaine de collectivités [7], qui ont signé une charte en novembre 2011 à Grenoble et se donnent pour ambition « de créer une plateforme d’échanges entre les collectivités qui sera dédiée au partage des expériences et des outils en matière d’habitat participatif » [8]. Ce réseau est un exemple de « la mise en place de coopérations institutionnelles autour de problèmes partagés » (Douillet 2005). Quant aux partis politiques, Europe Écologie–Les Verts (EELV) apparaît comme un « porteur » (Chateauraynaud 2011) privilégié, au niveau local comme au niveau national. Les députés Yves Cochet, Noël Mamère et François de Rugy ont déposé en décembre 2009 une proposition de loi en faveur du « développement d’un tiers secteur de l’habitat participatif, diversifié et écologique ». L’habitat participatif figurait en bonne place dans le programme des candidats EELV aux élections cantonales de mars 2011. De plus, au sein des régions comme des intercommunalités, historiquement, ce sont le plus souvent des élus EELV qui se sont saisis de la question. Cela s’explique, en partie, par la forte présence dans ses instances décisionnelles de militants de l’habitat participatif venant du « terrain ». Ceuxci peuvent se prévaloir de leurs pratiques associatives antérieures, qui constituent autant de ressources mobilisables dans la sphère politique ? Ce lien au terrain érige les militants au rang de « gatekeeper » [9] (Boullier 1989) – littéralement, « celui qui ouvre les portes ». Ceci étant, le Parti Socialiste (PS) s’est également saisi de la question : elle figure dans son programme pour les élections présidentielles de 2012, ainsi que dans l’accord PS–EELV, qui stipule : « nous testerons de nouveaux modes d’habitat participatif, grâce notamment à l’instauration d’un statut juridique de la coopérative d’habitants » [10]. De plus, une proposition de loi « visant à faire du logement une priorité nationale », émanant des sénateurs membres du groupe PS, apparentés et rattachés, dont un titre porte sur les « coopératives de logement », doit entrer prochainement en discussion. L’article 31 propose notamment l’instauration d’un label « logements coopératifs et solidaires ». Concernant les professionnels de la construction, l’Union sociale pour l’habitat, par le biais de la Fédération nationale des sociétés coopératives d’HLM, a entamé une réflexion sur son engagement dans les projets, présentée en mars 2011 dans un
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guide intitulé « Accompagner les projets d’habitat coopératif et participatif », transmis à l’ensemble des organismes d’HLM. Certains d’entre eux – une dizaine – sont actuellement engagés dans des opérations. La clé du développement des projets est, à présent, dans leurs mains. Si l’habitat participatif bénéficie aujourd’hui de multiples « fenêtres d’opportunité » – montée en puissance des préoccupations environnementales, « impératif délibératif » (Blondiaux & Sintomer 2002), crise du logement aiguë –, son institutionnalisation n’est pas encore assurée. Seuls la mise en œuvre des politiques énoncées et le maintien d’une dynamique propre aux habitants pourront y concourir.
Bibliographie Bidou, Catherine. 1984. Les aventuriers du quotidien. Essai sur les nouvelles classes moyennes, Paris : Presses universitaires de France. Blondiaux, Loïc. 2008. Le nouvel esprit de la démocratie, Paris : Seuil. Blondiaux, Loïc et Sintomer, Yves. 2002. « L’impératif délibératif », Politix, n° 57, p. 17-36. Bonnin, Philippe (dir.). 1983. Habitats autogérés, Paris : Éditions Syros. Boullier, Dominique. 1989. « Du bon usage d’une critique du modèle diffusionniste : discussion-prétexte des concepts de Everett M. Rogers », Réseaux, vol. 7, n° 36, p. 31-51. Chateauraynaud, Francis. 2011. Argumenter dans un champ de forces. Essai de balistique sociologique, Paris : Éditions Petra. Comeau, Yvan (dir.). 2004. « Innovations sociales et transformations des conditions de vie ». Actes du colloque tenu à l’université Laval, le 16 avril 2004, Cahiers du CRISES, collection Études théoriques, Montréal. Devaux, Camille. 2010. L’habitat participatif : conditions pour un développement, Institut d’urbanisme de Paris, mémoire de master 2 sous la direction de Jean-Claude Driant. Politix. 2005. Dossier « Militantismes institutionnels », n° 70. Douillet, Anne-Cécile. 2005. « Fin des logiques sectorielles ou nouveaux cadres territoriaux ? », in Douillet A.-C. et Faure A. (dir.), L’action publique et la question territoriale, Grenoble : Presses universitaires de Grenoble, p. 271-279. Garraud, Philippe. 2010. « Agenda politique », in Boussaguet L., Jacquot S. et Ravinet P. (dir.), Dictionnaire des politiques publiques, Paris : Presses de Sciences Po. Muller, Pierre. 2009. Les politiques publiques, Paris : Presses universitaires de France.
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[1] L’ADESS (Association pour le développement de l’économie sociale et solidaire), une association de Brest, a engagé début 2011 un recensement des projets d’habitat participatif en France. Début décembre, elle en a dénombré plus de 250. Ce recensement comprend également les réalisations d’habitat autogéré des années 1970-1980. Pour plus de précisions, voir Philippe Bonnin (1983). [2] Ce sont les deux aboutissements possibles de l’innovation sociale tels que définis par Yvan Comeau. Nous considérons, en effet, que l’habitat participatif est une innovation sociale, sur le plan de l’objet et du processus. [3] Quelques parutions récentes : « Habitat participatif : l’engagement des collectivités », in LeMoniteur.fr, 28 novembre 2011 ; « L’habitat participatif a son réseau de collectivités », in Localtis.info, 24 novembre 2011 ; « Osez l’habitat participatif », in Mediapart, 23 novembre 2011 ; « Coopératives d’habitants, une utopie urbaine », in Rue 89 Lyon, 22 novembre 2011. [4] Depuis 2007, les acteurs du mouvement se réunissent lors de rencontres nationales annuelles, conçues comme des lieux d’échange et de partage d’expérience. Les Rencontres de 2010, qui se sont tenues à Strasbourg, ont marqué un tournant dans l’histoire du mouvement, en raison notamment de leur importante fréquentation et de la diversité des publics. [5] On peut citer l’exemple de l’association lyonnaise Habicoop, qui met en œuvre une vaste stratégie de lobby auprès des parlementaires notamment, afin d’obtenir les aménagements juridiques nécessaires à l’avènement du statut de coopérative d’habitants. [6] La ville de Grenoble (en 2009 et 2011), la Communauté Urbaine de Strasbourg (en 2009 et fin 2011) et la ville de Lille, en partenariat avec Lille Métropole et la Société d’économie mixte Soreli (en octobre 2011), se sont engagés dans cette démarche. La ville de Paris prévoit le lancement d’une démarche similaire en 2012 (démarche annoncée dans le PLH 2011-2016). [7] Les premiers signataires de la charte sont les villes de Besançon, Bordeaux, Grenoble, Lille, Montreuil, Paris, Rennes, Saint-Denis et Strasbourg, les communautés urbaines d’Arras, du Grand Lyon et du Grand Toulouse, ainsi que les régions Îlede-France et Rhône-Alpes. [8] Communiqué de presse de la ville de Montreuil : « Montreuil : des collectivités s’organisent pour promouvoir des projets d’habitat participatif », 9 juin 2011. [9] « Ceux qui peuvent ainsi se trouver à la charnière de plusieurs univers et qui possèdent, de ce fait, un stock important de ressources mobilisables sont amenés à jouer un rôle-clé, connu sous le nom de « gatekeeper », qui permet de fermer ou d’ouvrir les connexions nécessaires » (Boullier 1989, p. 47). [10] Extraits de l’accord PS–EELV : « 2012-2017 : socialistes et écologistes, ensemble pour combattre la crise et bâtir un autre modèle de vivre ensemble », p. 21.
L’entrée de l’habitat participatif dans les politiques de l’habitat en question pour la Région Provence Alpes Côte d’Azur
COLETTE CHARRIAU: « Actuellement, nous observons une vraie dynamique partenariale avec les organismes de logement social, l’EPF, et les réseaux d’habitants. Nous souhaitons davantage mobiliser les collectivités locales et les sensibiliser aux soutiens de ces démarches expérimentales et innovantes, à la fois sociales, écologiques et économiques. La Région est aux côtés de ces partenaires pour les accompagner » Depuis une dizaine d’années, les projets d’habitat participatif se développent dans de nombreuses régions, portés par des associations locales, qui souhaitent promouvoir la participation des habitants dans la production de logement. Les enjeux associés à ces projets ont conduit les collectivités locales, et notamment la Région Provence Alpes Côte d’Azur, à s’interroger sur leur traduction dans le champ de leurs interventions en termes d’habitat et d’aménagement du territoire. L’étude menée par la Région visant à mettre en valeur les enjeux relatifs à l’habitat participatif lancée en janvier 2012 a permis de répondre à cette interrogation. Une phase de recherche d’expériences comparables et de visites de terrain a permis de mieux appréhender l’évolution du contexte national en matière de structuration de réseaux et d’initiatives en faveur de la reconnaissance de l'habitat participatif dans les politiques locales de l'habitat. Une réunion d’échanges a été organisée le 1er juin 2012 réunissant environ 150 personnes (dont des représentants de collectivités locales, des associations d’habitants, des structures d’accompagnement, des bailleurs sociaux, de l’établissement public foncier (EPF PACA), et des sociétés d’économie mixte). Cette forte participation a démontré l’intérêt croissant des partenaires locaux pour les projets d'habitat participatif. A l’issue de cette démarche, la Région a souhaité s’engager dans le réseau national des collectivités locales en matière d'habitat participatif et a formalisé son adhésion via une délibération du Conseil Régional du 29 juin 2012 approuvant la charte d’orientation du réseau. Des collectivités locales déjà impliquées et une reconnaissance législative en cours : Ce réseau a été créé à l’initiative de la Ville et de la Communauté urbaine de Strasbourg, par onze collectivités, le 19 novembre 2010, au Parlement Européen, durant le forum des Ecoquartiers et les Rencontres Nationales de l’Habitat Participatif. Il rassemble aujourd’hui une quarantaine de collectivités locales, dont les communes de Bordeaux, Grenoble, Lille, Paris, Toulouse, et Montpellier, et leurs communautés urbaines, et les Conseils régionaux: Ile-de-France, Rhône-Alpes. La force d’interpellation du réseau a montré son efficacité ces derniers mois ; une délégation du réseau National des Collectivités pour l’Habitat Participatif a été associée à la concertation menée par le Ministère du Logement et de l’Egalité des Territoires de décembre à mars 2013 dans le cadre de la loi « Accès au Logement et Urbanisme Rénové ». Afin d’inscrire cette démarche des collectivités locales dans la
durée, les membres du réseau ont fait le choix de se structurer en association ; celle-ci continuera à favoriser les échanges d’expériences et d’outils entre collectivités et sera l’interface privilégié du Ministère de l’Egalité des Territoires et du Logement sur cette question. Le discours de Cécile Duflot, Ministre de l’Egalité des Territoires et du Logement, aux rencontres Nationales de l’habitat participatif à Grenoble le 16 novembre 2012 marque également un tournant dans la reconnaissance de l’habitat participatif comme un mode de production du logement à part entière. Extrait du discours : « La politique du logement ne pourra jamais se réduire à une vision gestionnaire et technique. Aussi brillante soit-elle. Pour se renouveler, elle a besoin de prospectives, d’anticipation, et aussi d’espoir. Pour penser l’avenir de l’habitat, et la ville de demain, nous avons besoin de créativité et d’inventivité. » La mise en œuvre d’une politique régionale au service de l’innovation sociale : Dans ce contexte, les expériences des autres collectivités, notamment les Régions, l’évolution du contexte national, et les attentes des partenaires de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur, ont conforté la nécessité de préciser l’intervention de la Région pour accompagner le développement de l’habitat participatif en région. Face aux difficultés croissantes que rencontrent les ménages de Provence-Alpes-Côte d’Azur pour se loger, l’habitat participatif peut proposer des réponses innovantes, fondées sur une conception d’un urbanisme économe en ressources foncières et énergétiques. La Région reconnait les valeurs et les objectifs portés par les projets d’habitat participatif répondant à des enjeux d’intérêt général : - Rompant avec l’individualisme et le rôle passif du consommateur de logement, l’habitat participatif est facteur de lien social, et d’entraide, qui lui donnent une dimension d’utilité sociale. - Il témoigne de la nécessité d'un lien social renouvelé, d'apport de mixité dans la ville, tant interculturelle qu’intergénérationnelle ; - Il revêt un enjeu de mutualisation des coûts et des espaces (foncier, construction, consommations...) ; - Il concourt à l'insertion d'enjeux d'économie sociale et d'activités économiques (mixité fonctionnelle) ; - Il constitue un moyen de réguler les prix des marchés immobiliers dans la mesure où le logement est considéré comme un milieu de vie, de création de sens et de solidarités
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plutôt que comme un objet d’accumulation patrimoniale et spéculatif. - En s’appuyant sur des initiatives citoyennes, l’habitat participatif favorise le développement durable des territoires, et participe à l’attractivité du logement collectif. De nombreux projets promeuvent un habitat durable qui intègre pleinement la dimension environnementale. - L’habitat participatif met à contribution l’imagination collective pour trouver des alternatives et faire évoluer le mode actuel de production de la ville et d’aménagement des territoires. Afin de compléter son cadre d’intervention régional sur l’habitat et le logement, adopté par délibération du Conseil régional n° 10-1550 du 10 décembre 2010, la Région a souhaité préciser ses axes d’intervention en matière de soutien aux projets d’habitat participatif via une délibération du 28 juin 2013. Elle définit les priorités d’action suivantes : - accompagner les collectivités locales dans la reconnaissance de l’habitat participatif dans leurs politiques locales de l’habitat, - favoriser la mixité sociale et intergénérationnelle des projets, en soutenant la production de logements sociaux, - soutenir des projets exemplaires en matière de qualité environnementale des bâtiments et d’économie d’énergie, de production de déchets, et de prélèvement de ressources naturelles. La politique régionale en matière d’habitat participatif vise à
accompagner le développement de projets d’habitat participatif à vocation sociale sur le territoire régional et à répondre aux besoins des territoires et des acteurs locaux en termes d’accompagnement technique et financier, à chaque étape des projets (études et réalisations). En complémentarité avec la future loi ALUR, la Région Provence–Alpes-Côte d’Azur, en tant que membre du réseau national des collectivités locales en matière d’habitat participatif, propose de jouer un rôle de relai de l’information et d’interface en direction des collectivités locales de son territoire intéressées par la thématique. Dans ce cadre, elle souhaite animer un réseau régional des collectivités locales afin de les accompagner dans la reconnaissance de l’habitat participatif dans leurs politiques locales de l’habitat, notamment via les Programmes Locaux de l’Habitat et le développement d’actions spécifiques (appel à projets, montage d’opération dans le cadre de zone d’aménagement concerté). D’autres partenaires seront également associés tels que l’Etablissement Public Foncier, les opérateurs de logement social, et notamment l’Association Régionale Hlm, les CAUE, la Fédération des Entreprises Publiques Locales, celle des Promoteurs Constructeurs, la DREAL (en lien avec les démarches d’animation menées dans les cadre des appels à projets Ecoquartier et Agenda 21), la Fondation Abbé Pierre. L’expérimentation d’un réseau régional des habitants initiée par la Région doit permettre le développement de groupes projet dans un contexte où l’information du grand public est une condition essentielle au développement de projets.
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a
Mieux coopérer pour un autre habité
15h45 salle Hessel A Odile Jacquemin Architecte-Urbaniste, MALTAE Bernard Oliver Président de l’AR-HLM Paca Corse
Bernard Oliver
Odile Jacquemin
Président de l’Association Régionale HLM Paca Corse. Ancien Chef d'entreprise et ancien élu de la ville de Marseille, Bernard Oliver est Président de l’Association Régionale des HLM Paca Corse depuis onze ans et Secrétaire Général de la FNAR (Fédération Nationales des Associations Régionales), après avoir présidé notamment l’OPH de Marseille. Membre du comité exécutif de l’Union Sociale pour l’Habitat (USH), il préside le bureau d’étude de l’union Habitat et Territoires Conseil (HTC), l’ESH Famille et Provence et sa Coopérative, ainsi que l’Observatoire Immobilier de Provence. Il est également membre du bureau du Conseil Economique et Social de la Région Provence Alpes Cote d’Azur.
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Urbaniste architecte, docteur en histoire culturelle, directrice de « Mémoire à lire, Territoire à l’écoute », association d’éducation populaire au service d’une « culture du territoire partagé(e) ; administrateur de Terre de Liens PACA. Après avoir contribué à la mise en place des CAUE et dirigé pendant dix ans celui de l’Aveyron, O.J. a créé en 1995 « Mémoire à lire, Territoire à l’écoute » pour y développer le métier d’historien des territoires. Elle traite des sujets de l’eau, du patrimoine industriel, du paysage habité, de l’agriculture et du littoral... Elle propose une méthode basée sur le croisement des regards, le principe de substituer à l’état des lieux un état des liens et l’emboîtement de l’histoire longue et de l’histoire du temps présent pour ouvrir à la prospective. Elle a contribué à la mise en place de l’association Terre de Liens en région PACA et a rejoint les commissions Communication et Collectivités du mouvement. Histoire d’un paysage littoral, de 1748 à nos jours, MALTAE, à paraître août 2012 Projet urbain et paysage littoral, Quel projet pour la ville et sa rade ?, 2008 Territoires littéraires, des îles à la ville, MALTAE, 1998 Eaux et fontaines du Var, Edisud 1996
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habitat et économie sociale et solidaire
15h45 salle Hessel B Thibault Pourbaix CRESS Paca Michel Gontard Président de Vilogia-Rhône-Méditerranée
Michel Gontard Président de Vilogia-Rhône-Méditerranée, ancien chef d’entreprise dans le secteur du bâtiment, Michel Gontard a exercé de nombreuses responsabilités syndicales et associatives dans le département du Vaucluse et en région PACA. Il est le président de Vaucluse-Logement, de la coopérative Axédia et du Pôle Logement et Foncier de l’UPV/Medef 84. Economiste et Historien de formation, il est Professeur Honoraire de la Northeast Louisana University aux Etats-Unis.
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Thibault Pourbaix Chargé de mission du Pôle Développement et Territoires de la Chambre Régionale de l’Economie Sociale et Solidaire Paca (CRESS Paca) Le 10 octobre dernier en partenariat avec les RNLH, les CRESS Paca et Languedoc Roussillon ont organisé une journée d’échanges et de réflexion à Nîmes sur l’articulation entre habitat et économie sociale et solidaire.
La chambre régionale d’économie sociale et solidaire Paca s’engage en 2013 pour le logement
La CRESS Paca est une organisation régionale, sous forme associative, qui fédère et représente les acteurs de l’Economie Sociale et Solidaire (ESS). Elle agit dans la transversalité et assure des missions de structuration, de représentation, de promotion, de formation et de développement économique au service de l’ESS. La stratégie globale de la Chambre Régionale élaborée par ses membres adhérents se structure autour de 4 axes : - L’organisation de la représentation des acteurs de l’ESS en région - La structuration de l’offre de soutien à l’entrepreneuriat de l’ESS en région - Le développement de la coopération interentreprises - Le renforcement des compétences des salariés et des bénévoles œuvrant dans les entreprises de l’ESS L’Économie Sociale et Solidaire rassemble des entreprises engagées dans des réalités socio-économiques qui donnent la priorié à des objectifs autres que le profit et fait coexister une pluralité de ressources : marchandes, bénévoles, publiques et privées. Privilégiant l’action collective, elles prônent majoritairement des statuts spécifiques pour garantir la lucrativité limitée de leur objet social : associations, coopératives et mutuelles. L’ESS en PACA c’est : Plus de 49.300 établissements ayant une activité économique (avec ou sans salarié) Plus de 17.400 établissements employeurs Plus de 161.880 salariés soit 10% de l’emploi total régional (privé et public) 3,87 milliards d’euros de salaires bruts distribués, soit 8,5% des salaires bruts versés en région (Indicateur Insee dénomme masse salariale brute. Hors charges patronales). Source : Observatoire Régional ESS - CRESS PACA, d’après Insee Sirène - juin 2012, Insee Clap 2010
2013, une articulation spécifique avec la thématique Logement-Habitat : En partenariat avec la MACIF Provence-Méditerranée, partenaire technique et financier de la chambre régionale, la thématique du Logement et de l’Habitat constitue l’une des priorités d’action de la CRESS PACA pour cette année 2013. Ainsi, une rencontre interrégionale – CRESS PACA et CRESS Languedoc-Roussillon - dédiée au logement et à l’habitat s’est tenue en date du 10 octobre 2013, à Nîmes. Celle-ci s’est inscrite dans une actualité législative particulière : Ainsi le projet de Loi ESS du Ministre délégué à l’Economie sociale et solidaire et à la consommation a été présenté au conseil des ministres le 24 juillet 2013 et le vote à l’assemblée est prévu en fin d’année 2013. Ce projet de loi se propose notamment d’inscrire les politiques publiques de l’Économie sociale et solidaire dans la durée en structurant le réseau des CRESS pour assurer la coordination territoriale de l’ESS. Par ailleurs, le projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi ALUR, est examiné par les députés depuis quelques semaines. Ce projet de loi tend à favoriser des relations apaisées entre propriétaires et locataires ou encore à
soutenir l’expérimentation de nouvelles formes d’habitat. C’est bien la convergence entre ces 2 projets de loi qui interpellent les acteurs de l’ESS, particulièrement attachés à la gestion démocratique de nos entreprises, à la mise en œuvre de démarches socialement innovantes au service des territoires et des citoyens ainsi qu’à la promotion du mieux-vivre ensemble et de la mixité sociale. Les intervenants des tables rondes ont eu l’occasion de rappeler que l’ESS est d’ores et déjà présente dans le domaine de l’habitat, avec ses spécificités, mais que son action est peut-être encore méconnue du grand public. Cette journée a donc permis de faire valoir ces actions à forte valeur ajoutée mais surtout d’être force de propositions pour aller plus loin dans cette logique de rééquilibrage des rapports de force entre les différents acteurs du logement et de l’habitat en France. La CRESS PACA et la thématique « Logement-Habitat » : - Organisation d’un séminaire inter-régional : 70 personnes, Nîmes, 10/10/2013 : partenariat avec : Habitat et Humanisme, Amallia, MACIF, Caisse des dépôts, acteurs de l’habitat participatif. - Participation à la réunion de présentation de la politique régionale en matière d’habitat participatif, Hôtel de Région PACA, 09/07/2013 - Financement de 3 opérations Microprojets (financement FSE + Région PACA) dédiées au Logement et à l’Habitat : Microprojet « Soutien à l’émergence d’un mode d’habitat écologique et solidaire : l’habitat groupé » - Association Regain - Marseille – financement 22.861 € ; Microprojet « Solidaire par-dela le travail » - Association FAPIL - Marseille - financement 7.621 € ; Microprojet « Préfiguration d’une action d’auto réhabilitation accompagnée de logements – Association Centremploi - Salon de Provence – financement 19.485 € - Relais d’informations pour les acteurs régionaux de l’ESS engagés dans des actions dédiées au logement et à l’habitat (ex : Coordination Régionale Habitat Participatif en PACA) : newsletter L’Etoile, www.sagess.pro, www.cresspaca.org, partenariat privilégie avec La Marseillaise. - Relais d’information et promotion de la finance solidaire: l’accès au logement (et son accompagnement social) est une des réalisations majeures de la finance solidaire (en 2012, 4400 nouveau bénéficiaires furent accompagnés vers l’accès au logement - source : Zoom sur la finance solidaire – Finansol – édition sept 2013).
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De l’expérimentation à la démonstration
La réflexion que je développe ici prolonge un débat organisé à l’Assemblée Nationale ; et, parce que le lieu emblématique : disons qu’elle essaiera de conjuguer « la Vertu » prônée par Robespierre avec « l’Audace » exhortée par Danton, puisque la transition énergétique est consubstantielle de « la Révolution » écologique ! par MICHEL GONTARD Trop souvent, on réduit le sujet à sa dimension technique, qui consiste dans le domaine de l’habitat, à mieux isoler les bâtiments et moderniser, dans un esprit high-tech, les équipements producteurs d’énergie. Or l’ingéniosité n’a rien d’audacieux, si elle ne fait que sophistiquer un modèle appartenant au passé. De même, rien n’est moins vertueux que d’appliquer doctement des normes arbitraires, quelle que fût leur origine. Participer à la révolution écologique, ce n’est pas attendre d’être obligé d’appliquer ce qui vient d’en haut, ni de suivre, même avec conviction, ce qui se fait à côté ; il s’agit au contraire d’essayer d’anticiper une situation dont on ne possède aujourd’hui qu’une représentation théorique, faite de dates assorties d’objectifs chiffrés, se mesurant en unités peu conventionnelles : volumes de gaz, dépenses d’énergies rapportées à l’heure ou à la surface. Autant de repères qui parlent des activités humaines parmi lesquelles le fait d’habiter. Toutefois, convenons qu’avec de telles unités de compte, il n’est pas étonnant que le citoyen s’en approprie si peu spontanément les enjeux ; les quatre exemples qui suivent le montreront. Mais ceux-ci permettront surtout de présenter une démonstration à mon sens plus essentielle. La transition énergétique est possible dans la mesure où à l’échelle régionale d’un bailleur social, nous avons réussi à intégrer la dimension environnementale dans les quatre grandes configurations d’opérations de notre secteur d’activité : accession sociale, programme locatif en énergie positive, puis rénovation en site occupé et rénovation en quartier sensible. Si les projets ont pu bénéficier de subventions, il faut toutefois rappeler qu’elles viennent en complément d’un financement sur fonds propres, in fine, assumé par des locataires aux revenus modestes. Ces aides ne sont donc pas à considérer comme un argument pour reléguer le logement social dans un modèle d’habitat à part, mais comme un argument montrant qu’avec une enveloppe adaptée, la performance énergétique est garantie. Si le logement social le réussi, le secteur libre ne peut que s’en inspirer : « Res Non Verba »... La résidence de « la Magnanerie » à Jonquières (Vaucluse), premier projet à énergie positive en région Paca, a ceci de remarquable que l’intention initiale n’était pas d’atteindre ce niveau de performance. Le bâtiment d’origine a été conçu en vue de souscrire aux critères de la très haute performance énergétique (label THPE), correspondant à une économie d’énergie d’au moins 20% supplémentaires aux normes de la RT 2005, c’est à dire les niveaux d’exigences de la réglementation thermique énoncés dans le Grenelle de l’environnement. Cependant, parce que nous portions déjà la transition énergétique par un programme progressif des normes pour la construction neuve, l’étape 2020 devint notre défi, avant même la mise en œuvre de la RT 2012 Notamment avec la prise en compte du confort d’été, autrement dit l’alternative à la climatisation pour maintenir une température confortable, et
un accompagnement explicite d’une évolution des pratiques au quotidien, comme le détail des factures. Or, l’opération de la Magnanerie a su franchir le saut de l’énergie positive, l’objectif de la RT 2020. Jusqu’où faut-il le voir comme un quasi imprévu, jusqu’où faut-il le voir comme une innovation ? La construction est à la fois qualitative, pensée pour les usages autant que pour les performances énergétiques. La structure en bois adossée à des éléments en béton forme un quartier de maisons en bandes, où l’agencement de chaque logement a été réfléchi en fonction de l’ensoleillement, mais aussi d’une accessibilité pour tous en rez-de-chaussée. Au cœur de l’îlot, un ensemble semi-collectif, composé de duplex surmontant les garages. Une forte densité, qui optimise l’urbanisation du sol, et minimise les pertes énergétiques, a été choisie sans introduire de promiscuité entre les habitants, mais plutôt une proximité de quartier, animant la vie quotidienne d’un espace résidentiel différent des lotissements pavillonnaires. Le programme n’a rien de commun avec les grandes passoires énergétiques qui constitue aujourd’hui les stigmates du logement social. Ainsi le projet architectural ne dépasse pas les deux étages et les maisons ont des toits. Au cours de la mise en œuvre du projet, compte tenu des grandes surfaces de toiture sans obstacle que permettent les maisons en bandes, la faible inclinaison que suppose l’optimisation du confort d’usage jusque dans les combles, et les pants orientés au sud, certes dans l’axe de la parcelle mais surtout dans celui du soleil, l’idée est venue d’étudier l’installation d’une centrale photovoltaïque. Ainsi le bâtiment devenait sans difficulté une construction BBC (bâtiment à basse consommation), de fait à énergie positive, bien qu’en pratique le courant électrique généré soit réinjecté dans le réseau, et non pas consommé strictement sur place, conformément à la réglementation. On pourrait donc considérer que le projet d’énergie positive s’est concrétisé par accident, puisqu’il n’était pas recherché dès l’origine. Mais celui-ci a été rendu possible par une conjonction de choix qui chacun répondent au développement durable : tirer parti des atouts du site, concevoir une architecture accueillante, prévoir une bonne isolation et s’appuyer sur les connaissances nouvelles des ponts thermiques et autres astuces de l’industrie du bâtiment. Coiffer l’ensemble de panneaux solaires intervient ainsi comme la finition de la démarche, une suite logique qui découle de l’exigence écologique véritablement intégrée. Elle traduit d’ailleurs une caractéristique importante des conditions de succès de la transition énergétique : le soin apporté à tous les détails, de tous ordres. Le hameau de « la Plaine » à Monteux (Vaucluse), premier programme BBC d’accession sociale à la propriété en région Paca et parmi les premiers en France, a été livré fin 2011. Labellisé BBC effinergie et Habitat et Environnement, le projet a été primé « opération remarquable » par la Fédération Nationale des Coopératives d’HLM. Il se compose de 13 villas
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sur un foncier au COS (coefficient d’occupation du Mesure du confort thermique dans un logement BBC sol) majoré au regard du caractère à la fois Le Hameau de la Plaine à Monteux, Vaucluse écologique et social de la démarche, qui anticipait dès 2008 la norme RT2012 et permettait la Zone de confort dans le séjour durant la période la plus froide du 9 au 15 février 2012 concrétisation d’une nouvelle étape de leur parcours résidentiel, vers l’accession en maison Humidité de l’air (%) individuelle, pour des familles de la région. Ce 90! genre de logement est essentiellement perçu à travers le procédé constructif et des chiffres, les 80! mesures de consommations et de performances qui 70! ont pour but de mettre en évidence, paradoxalement, ce qui a disparu : une baisse de 60! consommation, laquelle n’a pas eu lieu de fait, puisque le bâtiment est neuf. Cette consommation 50! fait donc l’objet d’une estimation a priori, fondée sur des calculs minutieux prenant en compte la 40! localisation géographique, les caractéristiques des matériaux mais aussi une estimation du confort 30! thermique et de la composition du ménage. En effet, si une part de la consommation énergétique 20! peut être attribuée au fonctionnement basal de 16! 18! 20! 22! 24! 26! 28! 30! Température de l’air (°C) l’édifice, comme la ventilation ou l’éclairage, la plus grande part dépend de ses occupants. Un habitant Zone de confort dans le séjour durant la période la plus chaude de plus représente une douche de plus (eau du 17 au 23 août 2012 chaude), un téléphone à recharger de plus etc. C’est Humidité de l’air (%) aussi l’habitant qui choisi la température en hiver. 90! En conséquence, la pratique du logement et le mode de vie de ses résidents reste déterminant 80! quant au maintien du caractère BBC dans la pratique. Autrement dit, l’arbitrage entre la 70! recherche volontaire d’une faible consommation énergétique et ce qu’on pourrait nommer une 60! forme d’insouciance écologique et qui ne serait autre qu’un accès à un confort supplémentaire, 50! devient un point crucial. L’étude réalisée pendant un an sur trois logements par le CERQUAL 40! (certification qualité logement, délivré par l’association Qualitel) permet d’éclairer cette 30! relation. Elle porte sur trois ménages et leur maison. 20! 16! 18! 20! 22! 24! 26! 28! 30! Premier élément classique, des ampoules à basse Température de l’air (°C) consommation on été installée et chacun veille à ne source: Jean Carassus, Chantal Laumonier, Bernard Sesolis, Remi Wrona, Vivre dans un logement BBC, laisser allumée la lumière que dans les pièces Une approche socioéconomique, Retour d’expérience de la Résidence du Hameau de la Plaine à Monteux occupées. Quant au chauffage en hiver, il est réglé (Vaucluse), février 2013, étude du CERQUAL, 50p manuellement, bien que la maison soit équipée d’un programmateur. On observe ainsi la volonté de maîtriser la température à la demande, en fonction des maison située en bord d’îlot, caractérisée par un pignon aveugle besoins. Les habitants notent que leur maison conserve bien la orienté au sud, qui renforce l’exposition au soleil. L’installation chaleur, le coût en est peu élevé, ce qui leur permet de d’un climatiseur ou de ventilateurs est envisagée pour maintenir en moyenne, durant la période de chauffe, une compléter le rafraîchissement mécanique par l’ouverture des température de 21,5°C. Les spécialistes nomment cette fenêtres la nuit, lequel s’avère trop contraint. En effet, augmentation de la consommation « l’effet rebond ».Il l’éclairage public et la proximité d’une salle de danse, de même caractérise l’augmentation de la consommation d’énergie d’un que le mistral ne permettent pas de laisser grands ouverts les poste de dépense, déclenchée par une économie générée du fait volets et les fenêtres toute la nuit. d’une meilleure efficacité énergétique. Ainsi d’un point de vue général, on peut retenir de cette Le confort d’été est plus nuancé. Les résultats des mesures sont opération BBC qu’elle a été l’occasion pour les accédants de différentes d’une maison à l’autre, pourtant distantes de garantir un très haut niveau de confort. Des ajustements sont quelques dizaines de mètres uniquement et construite de façon possibles en été, certes par des techniques fortement identique. Lors de la semaine la plus chaude, dans deux cas les consommatrices. Le surcoût de l’opération, d’environ 12% de niveaux de température et d’humidité dépassent les critères de la construction, soit 6% de majoration du prix de vente, est confort pendant un peu plus de la moitié du temps. Dans le amorti par la qualité. Il est également à considérer comme un troisième cas, toutes les mesures sont supérieures. Il s’agit de la investissement pour l’ensemble des acteurs qui ont concouru
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au projet, puisque le savoir faire acquis a permis de supprimer le surcoût lors de l’opération BBC suivante. Les performances énergétiques sont conformes aux projections théoriques, mais les consommations effectives sont légèrement plus élevées que le modèle de référence. Cela s’explique par le choix des habitants de chauffer un peu plus leur logement, mais aussi par leur niveau d’équipement électroménager, qui demeure de très loin le premier poste de dépense énergétique. Les plus grandes marges d’augmentation de la performance énergétique sont probablement à chercher de ce côté là désormais. Un sujet pour l’industrie des biens de consommation qui sort du domaine du logement.
Répartition de la consommation d’énergie par poste Le Hameau de la Plaine à Monteux, Vaucluse (BBC) Comparaison de 3 logements mesures effectuées sur 10 mois (de janvier à octobre 2012) Consommations en kWhep/m2.an 180!
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La réhabilitation de la résidence « Les Alpilles » à Saint-Rémy-de-Provence (Bouches-du-Rhône) est un 100! ensemble d’une cinquantaine de logements répartis en sept bâtiments réalisés par un promoteur privé en 1963. N’ayant fait l’objet d’aucune rénovation 80! significative, tant les parties collectives et les façades que l’intérieur des logements, la résidence souffrait d’un état général très délabré : très faible isolation, 60! humidité dans certains appartements notamment. L’opération a d’abord consisté en un changement de propriétaire, puis de statut avec un conven40! tionnement HLM. Après une phase d’étude, un temps a été consacré à l’information des locataires, puisque l’opération s’est déroulée en site occupé. 20! Contrairement aux opérations de réhabilitation lourdes de certains quartiers, qui imposent fatalement des augmentations de loyer, le 0! Logement A! Logement B! Logement C! financement du projet conjugué à l’exigence de AUES! 124,94! 89,53! 121,33! maîtrise des dépenses énergétiques a été en mesure Auxiliaires ! 3,38! 3,26! 3,62! de concrétiser une baisse du loyer et des charges. Le Eclairage! 6,09! 6,18! 7,37! niveau BBC atteint offre une réduction de charges ECS ! 29,41! 36,75! 36,75! d’environ 25 euros par logement, supérieure à la Chauffage! 6,20! 15,46! 12,23! baisse de loyer consécutive du conventionnement. Ainsi sur cette opération pour schématiser, le parti AUES: autres usages d’électricité spécifique (les appareils électroménagers) Auxilaires: ventilation etc. d’une évolution vers un statut HLM a été ECS: eau chaude sanitaire comparativement moins significatif pour les source: ibid. habitants que l’effort écologique. Il s’agit donc d’un exemple intéressant pour mesurer l’importance des rénovations à visée énergétique, quelle que soit la nature des bâtiments, lorsque ceux-ci sont anciens ; relevons au environnement au sens large. passage que les travaux qui interviennent sur les extérieurs ont Confrontée à ce défi, la résidence « Fourchevieilles » à Orange pour avantage induit de redonner leur lustre aux façades, au (Vaucluse) a fait l’objet d’une lourde réhabilitation. Un profit tant des habitants que de l’espace public en général. investissement d’environ 35 000 euros par logement a été Si techniquement, une réhabilitation en site occupé suppose de mobilisé. Les loyers ont fatalement dû être révisés à la hausse réussir la concertation avec les habitants pour le meilleur d’environ 30%, mais les charges quant à elles, ont été divisées déroulement du chantier, l’enjeu d’une réhabilitation dans un par 4. Ainsi, le réinvestissement sur la résidence est immeuble vacant pose une autre question. Dans cette période considérablement amorti par les économies d’énergie qu’il de crise du logement, la vacance atteint une résidence lorsque génère, doublé d’un effet de levier symbolique. Alors que ces c’est le quartier lui-même qui décourage les candidats bâtiments d’entrée de ville donnaient l’image d’un quartier potentiels. Or un projet de réhabilitation pour un bailleur est périphérique délaissé, l’immeuble devient exemplaire et signe d’abord une un projet d’architecture, qui se prolonge l’arrivée d’une nouvelle forme d’urbanité écologique. Là où il uniquement sur les « abords du chez-soi », sans porter sur la avait été nécessaire de murer portes et fenêtres un temps, se matière urbaine en elle-même, qui reste œuvre collective. En ce construit sur elle même une ville différente et accueillante, sens, la réhabilitation d’une résidence, là où l’endroit a été, résidentialisée sans excès. L’intervention à l’échelle du bâtiment avec le temps, assimilé à un quartier difficile, a ceci de délicat est dépassée, grâce à l’apport de concepts avancés, qui donnent qu’elle doit en plus de traiter les murs, faire évoluer son une nouvelle impulsion au quartier.
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ville, habitat, écologie : des solutions à portée de main
15h salle Loucheur Emmanuelle Cosse Vice-Présidente de la Région Île-de-France déléguée au Logement Yankel Fijalkow Sociologue, Professeur à l’ENSA Paris Val-de-Seine Animé par Guy Lemée Rédacteur en chef de la lettre Habitat & Collectivités Locales!
?! Guy Lemée Il a dirigé jusqu’en 1987 une filiale spécialisée du Groupe de la Caisse des dépôts chargée d’appui et d’expertise sur patrimoine (foncier et immeubles, surtout sociaux) pour les sociétés d’économie mixte, les HLM et les collectivités locales, avant de fonder le cabinet Inventaires - 25 ans en 2012 - qui a jusqu’en 2009 compté une équipe de consultants AMO (juridique, administrative, économique) dédiée aux problématiques locales de l’habitat (notamment du logement social) et de l’aménagement. http://www.inventaires.fr Aujourd'hui, il intervient comme expert sous l'enseigne Inventaires et dirige la revue professionnelle Habitat & Collectivités Locales (http://hcl.inventaires.fr) qui propose une information indépendante aux acteurs du logement dans les territoires.
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Yankel Fijalkow
Emmanuelle Cosse Vice-Président de la Région Ile-de-France déléguée au Logement. Juriste de formation, Emmanuelle COSSE a enseigné le droit public avant de devenir journaliste en 2002. Elle a collaboré notamment à Têtu, les Inrocks, et a été rédactrice en chef de Regards. Engagée dans la lutte contre le sida depuis 1992, elle fut la première présidente d’Act Up-Paris, entre 1999 et 2001. Toujours engagée dans ce domaine ainsi que dans des projets de lutte contre la précarité, elle participe au collectif Cette France-là, qui analyse les politiques migratoires en France. Après avoir rejoint Europe Ecologie en septembre 2009, elle est élue conseillère régionale ne 2010 et est vice présidente de la région Ile-de-France, chargée du logement, de l’habitat, du renouvellement urbain et de l’action foncière. Elle est déléguée au logement et à l’habitat à Europe Ecologie-Les Verts et membre de son conseil d’orientation politique.
Yankel Fijalkow est professeur de sciences à l’Ecole Nationale Supérieure d’architecture Paris Val de Seine et chercheur au Centre de Recherche de l’Habitat, UMR LAVUE du CNRS. Il a publié les ouvrages suivants : en 2011 Sociologie du logement, Repères, La Découverte, 128p, en 2001 Sociologie de la ville, Repères, La Découverte, 128 p. (4eme édition corrigée en 2013), ainsi qu’en 1998 La construction des îlots insalubres, Paris 1850-1945. l'Harmattan, Habitat et Sociétés, 272 p. Préface de Marcel Roncayolo. Ses recherches portent sur les politiques urbaines et du logement, la construction sociale des normes d’habitat, l'histoire croisée de la santé publique et du logement, t la politique à l’égard des quartiers dégradés notamment la Politique de la ville.
l’ALUR – pour l’accès au logement et urbanisme rénové
la « grande » loi Duflot, enfin son projet, est désormais connue (1) a été examinée en commission à l’Assemblée nationale jusqu’à fin juillet. par GUY LEMÉE Au moment où ces lignes sont écrites, il ne filtre pas grand-chose des audi- tions et travaux parlementaires. On sait que les professionnels qui sont visés direc- tement, comme les agents immobiliers (2) et les syndics, essaient de ramener les mesures les concernant à moins de rigueur. Les promoteurs immobiliers (3) qui ne manquent pas de relais au Palais Bourbon se sont déclarés déçus et, avec leurs amis du Bâtiment, se concertent et n’écartent pas les « petits » propriétaires immobiliers de l’Unpi de leurs conciliabules. Interrogée par l’auteur sur ce point, la ministre répon- dait qu’elle disposait du soutien politique au plus haut niveau et que la période ne lui semblait guère propice au petit jeu de défense de certains intérêts catégoriels ! De l’autre côté, les associations manifestent – et plus encore en privé – leur déception ,souvent à l’exact opposé des profession- nels ! Au-delà de l’impossibilité de satisfaire tout le monde, il y a certainement autre chose. Vous aVez dit « concertation »? Aujourd’hui, les élites, les experts et les professionnels partagent à peu près le constat sur les difficultés du logement. Cette avancée récente doit beaucoup à Thierry Repentin, alors président du Mouvement HLM. Ce sénateur PS, ancien du cabinet Louis Besson, a su dès 2010 mobiliser et réunir la quasitotalité des acteurs. Une palette saisissante (4) : de la Fondation Abbé-Pierre aux promoteurs immobiliers et entreprises du bâtiment, en passant par le Mouvement HLM et des grandes associations d’élus locaux. Cécile Duflot, elle-même professionnelle de ces questions, a pu facilement bénéficier de cette dynamique et avoir très vite l’oreille des interlocuteurs, d’autant que beaucoup se sont trouvés confrontés brutalement aux effets de la crise ! Et ce n’est pas un secret, quelques responsables associatifs trèsimpliqués sur ces sujets étaient « proches » (5) de la ministre. La concertation a donc pu s’engager aisément dans ce cadre a priori favorable. De
telle sorte que tous ont pu se déclarer plutôt satisfaits. Hélas, de l’impression à la réalité, il y a sou- vent quelques différences que presque tous les interlocuteurs de la ministre ont décou- vertes, en particulier lors de la lecture d’une version du projet que la presse spécialisée (la lettre HCL avait sorti le document en exclusivité dès le 11 juin) avait dévoilée peu de temps avant les annonces officielles. Feinte, exagérée ou réelle, la réaction de surprise quasiment unanime, a été plutôt mauvaise, à l’aune des espoirs et des attentes nés de ces nombreuses, longues et certainement fort aimables concertations ! Moulinette parleMentaire La méthode Duflot, un échec ? Pas forcé- ment car la vraie bataille va se livrer au Parlement dès la rentrée. Une nouvelle génération de sénateurs et de députés pour- rait vouloir briller sur une thématique jusqu’alors réservée aux rares qui se dévouaient ! Les sujets ne manquent pas : comme en matière de niches fiscales, « dans chaque niche loge un molosse ! ». Le PLU inter- communal a déjà souvent été rejeté par les élus, la garantie locative universelle (qui ne figure que comme un principe dans le pro- jet) dresse déjà du beau monde contre elle... sans parler de la mécanique d’encadrement des loyers ! Surtout, au-delà de l’écume médiatique, ce projet de loi est d’une complexité technique extrême (84 articles actuellement pour finir peut-être au double !) car il touche à toute une série de points de détail ou non de nombreux textes existants qui sont impac- tés. Le logement est une thématique telle- ment « transversale ». C’est aussi que l’ar- chitecture réglementaire logement est plus une tuyauterie de type Beaubourg qu’une épure zen ! (1)www.territoires.gouv.fr/ALUR
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(2)www.jean-francois-buet.fr/ (3)www.fpifrance.fr/Upload/Article21.pdf (4)www.etatsgenerauxdulogement.fr (5)www.jeudi-noir.org/
Crises et mal-logement : réflexions sur la notion de « vulnérabilité résidentielle » Le mal-logement est présent dans le discours politique depuis vingt ans. Les cinq facteurs qui le définissent sont l’absence de logement, les difficultés d’accès, le manque de confort et l’insalubrité, les difficultés de maintien, une mobilité difficile. Dans ce cadre, la Fondation Abbé Pierre distingue le « nombre de personnes connaissant une problématique forte de mal-logement » (3,5 millions de personnes) et les « personnes en situation de réelle fragilité à court ou moyen terme » (6,6 millions de personnes). Cette définition est issue d’une longue évolution qui a conduit à séparer les causes physiques du mal-logement de celles relevant des populations. Ainsi, les populations pauvres et précaires sont considérées comme des acteurs à part entière, capables de stratégies propres par rapport aux dispositifs de l’État-providence. Mais l’observation de ces stratégies révèle surtout des situations résidentielles précaires (colocation, sous-location) qui questionnent la notion de « vulnérabilité résidentielle ».
par YANKEL FIJALKOW
Voici près de vingt ans que le mal-logement, plaie que l’on croyait écartée par la modernité, refait surface dans le discours politique. Depuis 1995, la Fondation Abbé Pierre a identifié celui-ci à cinq facteurs : l’absence de logement, les difficultés d’accès, le manque de confort et l’insalubrité, les difficultés de maintien, la mobilité difficile voire l’assignation à résidence (Fondation Abbé Pierre, 2013). Dans ce cadre, elle distingue aujourd’hui le « nombre de personnes connaissant une problématique forte de mal-logement » (3,5 millions de personnes) (ibid.:1) et celui des « personnes en situation de réelle fragilité à court ou moyen terme » (6,6 millions de personnes) (ibid.:1). Mais cette définition est issue d’une longue évolution. Ainsi, en repérant dans l’histoire du logement le processus qui a conduit à séparer les causes physiques du mallogement (habitat défectueux ou mal équipé) de celles relevant des populations (pauvreté et précarité), on comprend comment celles-ci se sont apparues comme des acteurs à part entière, capables de stratégies complexes, en lien ou en marge avec les dispositifs de l’État-providence. En établissant ces liens sur la longue durée (Fijalkow, 1998), l’observation des stratégies contemporaines (1) permet donc d’interroger la notion de « vulnérabilité résidentielle ».
devenir ministre de la Santé publique sous le Front populaire, son interrogation est restée pérenne. Même écho, un demi-siècle plus tard, lorsqu’un journaliste économique du journal Le Monde, Gilbert Mathieu, diagnostique dans son « Peut-on loger les Français ? », « une crise qui va durer » (Mathieu, 1965).
Ainsi, même si les économistes nous ont habitué au caractère cyclique des crises prolongeant le sens médical du verbe grec krinein (qui signifie « juger »), la durée de cette « crise » interroge. Sans doute, le terme permet de considérer comme pathologique une société en difficulté structurelle de loger ses membres. Mais l’élargissement considérable du concept de « crise » nécessite de l’examiner. En effet, il y aurait « crise », selon Paul Ricœur (1988), « lorsque l'espace d'expérience se rétrécit par un déni général de toute tradition, de tout héritage, et que l'horizon d'attente tend à reculer dans un avenir toujours plus vague et plus indistinct, seulement peuplé d'utopies ou plutôt d’"uchronies" sans prise sur le cours effectif de l'histoire, alors la tension entre horizon d'attente et espace d'expérience devient rupture, schisme. Je penserais volontiers que nous tenons là un concept qui, à la fois, garde quelque chose du concept existentiel trop "long" de crise, à savoir son nœud dans la temporalité humaine, et recueille les velléités de généralisation Logement : la crise éternelle des concepts "régionaux" de crise que je parcours une dernière fois en sens inverse : crise du libéralisme économique, crise des Au fil des rapports annuels de la Fondation Abbé Pierre, la fondements du savoir, crise de légitimité du pouvoir, crise progression des chiffres du mal-logement illustre autant un d'identité de la communauté, crise d'équilibre et d'intégration affinement de l’expertise qu’une « crise » de longue durée. du corps social » (ibid:13). Certes, il ne saurait en être autrement lorsque la fragilisation de la société salariale appelle le regard sur les conditions d’accès et La rupture entre l’expérience présente, le passé et la promesse, le maintien dans le logement. Mais, dès 1921, Henri Sellier apparemment intenable de l’avenir, illustre bien ce que les montrait déjà comment la crise du logement (Sellier, 1921) (2) sondages rapportent sur les relations des Français au marché du illustrait le retard de la construction destinée aux plus modestes, logement aujourd’hui : une rupture générationnelle entre augurant de la difficulté endémique et structurelle de la société parents et enfants dans l’accès au parc résidentiel, un blocage française à loger ses plus pauvres. Alors président de l’Office des mobilités résidentielles par crainte des difficultés départemental des habitats à bon marché de la Seine, appelé à économiques, la peur même de ne pouvoir supporter encore
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longtemps le coût d’un loyer ou d’un prêt immobilier. Le cantonnement dans le présent qui résulte de la pesanteur de cette « crise » s’illustre bien dans la notion de « vulnérabilité ». Ce concept fortement mobilisé depuis les années 1980 renvoie, si l’on suit la définition de l’Organisation des Nations unies, à « un indicateur de mesure de l’impact potentiel d’une catastrophe… sur un groupe, une construction, une activité, un service ou une aire géographique en tenant compte de sa nature ou de sa localisation » (ONU, 1997:5). Il exprime aussi bien l’état de faiblesse et de résistance des individus que les conjonctures et les structures productrices de risques. Cet équilibre entre structure et individu est important, car si les sujets fragiles peuvent montrer leurs capacités à réagir à des événements imprévus, et donc leur « résilience » (selon un terme importé de la littérature psychologique des années 1980), la question se pose de savoir ce que peut être une politique de la vulnérabilité qui consisterait uniquement à renforcer les filets de protection de l’État, ou à augmenter la capacité des plus fragiles à surmonter leurs difficultés (Morduch, 1994). Ce dilemme pèse lourdement sur la question du logement. Les signaux de crise semblent appeler une plus forte mobilisation financière de l’État dont les dépenses en faveur du logement n’ont guère augmenté depuis vingt ans : sur un plan quantitatif, les besoins sont estimés à plus de 500 000 logements dont la moitié de logements sociaux (Jacquot, 2002 ; Mouillard, 2007) sur la base du renouvellement du nombre de ménages, issus des mouvements de décohabitation familiale de jeunes, des divorces et des séparations. Mais la crise du logement ne frappe pas tous les groupes avec la même intensité. De 2000 à 2010, l'indice du prix des logements a augmenté de 107 % alors que les revenus n’ont évolué que de 25 % ; le logement représente près de la moitié des dépenses des ménages français les plus pauvres (premier décile) et un quart des dépenses de l’ensemble des ménages, sans tenir compte du coût des transports, souvent important lorsqu’il faut s’éloigner pour trouver un prix adapté. L’habitat social, 17 % du parc total de logement, peine à répondre aux besoins des populations pauvres. Alors que l’on construit, depuis les années 2000, une moyenne annuelle de trois cent cinquante mille logements, l’accession à la propriété mobilise l’essentiel des efforts. La part du parc locatif privé tendant à diminuer, on assiste aujourd’hui à une crise du logement locatif, accentuant la fragilité résidentielle des personnes modestes et des jeunes (Kesteman, 2010). Ainsi, depuis 2000, la demande de logement social a doublé pour atteindre plus d’un million de ménages ; on compte 3,8 millions de ménages en précarité énergétique dépensant plus de 10 % de leurs revenus pour se chauffer (contre 5,5 % pour la moyenne des Français). Mais un retour de l’État serait t-il suffisant ? D’une part, la pauvreté, la jeunesse ou la vieillesse présentent des fragilités selon des temporalités très différenciées (début dans la vie, séparation ou divorce, perte d’emploi), et selon les caractéristiques du parc de logements dont les fragilités prolongent ou se confondent avec celles des ménages, notamment dans le parc ancien. D’autre part, les pouvoirs locaux sont de plus en plus impliqués dans la régulation de l’offre locale de logement (Fijakow et Levy, 2012). Ainsi, sur le plan institutionnel, la notion de « vulnérabilité » a donné lieu au développement d’aides ponctuelles venant apporter, souvent en complément des garanties classiques, un « coup de pouce » pour réaliser un déménagement, s’installer dans un nouvel
appartement ou en colocation, régler une facture d’énergie fragilisant l’économie domestique, prendre en sous-location un « bail glissant ». Les modalités de cette politique de la vulnérabilité sont nombreuses mais les principes sont homogènes : accompagner les ménages dans leur accès à un logement indépendant, les aider à surmonter la crise en s’appuyant sur leurs capacités. De leur côté, les ménages se sont intégrés à ces dispositifs. Prenant acte de l’autonomie qui leur est demandée, ils ont développé, face à la crise, des attitudes qui oscillent de la contestation (mouvements sociaux) à la débrouille, les amenant à sortir du parc immobilier réglementé (3) par de nombreuses astuces destinées à détourner le marché et à illustrer leurs capacités de résistance voire de résilience. Mais une politique de la vulnérabilité peut-elle conforter de telles postures ? S’interroger sur la pertinence de la notion de « vulnérabilité résidentielle » devient alors capital. Cette réflexion permettra, dans un premier temps, d’étudier la manière dont s’est historiquement construit cette notion, de manière à pouvoir, dans un deuxième temps, en observer les différentes échelles aujourd’hui. À l’aune de ces éléments, l’article montrera dans quelle mesure la créativité des ménages, qui inventent de nombreuses formules alternatives pour se loger malgré la ou les crise(s) du logement, interroge la politique en la matière notamment au regard du degré de protection souhaité. L’évolution de la notion de « vulnérabilité résidentielle » La vulnérabilité résidentielle renvoie tant à la fragilité des choses (l’habitat) qu’à celle des populations. Mais ces dernières ont été tardivement prises en considération. La vulnérabilité du logement… Considérer un logement comme vulnérable implique de prendre en compte les fragilités, qui ont un impact direct sur ses occupants. Telle était l’optique des premiers rédacteurs de la loi de 1850 – premier texte relatif aux « logements insalubres » – soucieux des locaux qui « se trouvent dans des conditions de nature à porter atteinte à la vie ou à la santé de leurs habitants ». Ce texte juridique, renforçant l’expertise, demandait des critères positifs. Mais la réflexion des rédacteurs aboutit à la reconnaissance de la notion de « surpeuplement » comme indicateur d’insalubrité, mêlant étroitement les problématiques du bâti et de la population : « Il existe à Paris un grand nombre de personnes qui vivent dans des logements beaucoup trop étroits. Sans même parler des malheureux qui vivent dans des garnis affreux où la même chambre sert à plusieurs dizaines de personnes, il y a beaucoup de familles d'ouvriers et d'ouvriers aisés où père, mère, garçons et filles vivent dans la même pièce. Il est aisé de deviner les conséquences d'un tel entassement au point de vue de l'hygiène et de la morale » (Bertillon, 1881:9). Au milieu du XXe siècle, le terme « taudis » suscite un débat intéressant, dans la mesure où il départage mal les deux causalités. Selon Charles-Édouard Jeanneret-Gris (dit « Le Corbusier ») : « Le taudis est caractérisé par les signes suivants : insuffisance de surface habitable par personne, médiocrité des ouvertures sur le dehors, absence de soleil, vétusté et présence de germes morbides, absence ou insuffisance des installations sanitaires » (Fijalkow, 2006:85). Mais cette position fait l’objet
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de critiques vigoureuses comme celle d’Henri Sellier qui considère, en 1943, qu’« une maison est insalubre quand elle est construite d’une façon défectueuse, quand la protection contre les intempéries est insuffisante, quand l’ensoleillement et l’aération ne s’y manifestent pas conformément aux règles de l’hygiène, si elle est édifiée sur un terrain qui crée une ambiance défavorable et si les possibilités d’évacuation des matières usées et l’alimentation en eau potable ne sont pas parfaites. Une troisième catégorie de taudis tient à l’absence de soins et de propreté des habitants » (ibid:85). Peu après la Libération, Robert Auzelle (haut fonctionnaire du ministère de l’Urbanisme à l’époque) s’insurge contre le terme « taudis » qui exprime un « jugement de valeur ». Au terme d'« insalubrité », « trop restrictif », il préfère la notion de « logement défectueux » pour rendre compte de « l'action d'habiter c'est-à-dire la participation de l'homme à son habitation » (ibid.:86). Cette notion de « logement défectueux » connaît ainsi un certain succès pour désigner les populations qui, dans le contexte de relance de la construction publique et des normes techniques portées par les constructeurs de logements sociaux, demeurent « mal logés » et « prioritaires » pour l’attribution d’un logement social (Fijalkow, 2010). La notion montre comment la vulnérabilité du logement détermine la protection des populations. De même, lorsque, au recensement de 1962, l’absence d’éléments de confort à l’intérieur des appartements [cabinets d’aisance (WC) et installations sanitaires] permet à l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) de quantifier les populations mal logées et de délimiter l’action publique de la rénovation urbaine dans les quartiers vétustes, la fragilité englobe aussi bien l’habitant que son logement. Ce regard se perpétue ensuite autant dans les textes visant les « bidonvilles » (1964) que les centres anciens insalubres (1970). D’une part, la référence implicite à la forme (tôle, bois, matériaux de récupération) permet l’économie d’une définition des éléments constitutifs de l’insalubrité. D’autre part, la lutte contre les « marchands de sommeil » renforcée par une grille de dix-sept critères (4), s’inscrit dans la continuité des opérations de rénovation urbaine des années 1950-1970, auxquelles on reproche une déstructuration urbaine, l’éviction de populations pauvres et leur relogement fréquent dans les zones périphériques (Coing, 1966). Ainsi, les enquêtes sociologiques fondées sur des données qualitatives définissant le « sous-habitat » s’attachent aux « immeubles vétustes voués à la démolition », aux « logements-taudis insérés dans le marché noir du logement insalubre pour travailleur immigré ou dans "les îlots insalubres" (aucun confort, pas d’eau, ni de W.-C., appartement délabré, immeuble promis à la démolition, etc.) » (Castells et al., 1978:9). Les immeubles vétustes, les hôtels meublés garnis ou foyers pour immigrés ou pour Français, l’habitat de fortune, les macro- ou microbidonvilles, les logements de chantier, sont avant tout techniquement vulnérables.
2008). Ainsi, les dénombrements qui varient en fonction des méthodologies d’enquête s’appuient tous sur une dissociation entre les personnes et l’habitat. De la même façon, l’orientation en faveur de la réhabilitation du patrimoine ancien par les propriétaires privés, soutenus par l’action publique, autorise un autre regard sur le mauvais logement. Lorsque, en 1986, l’État, soucieux de libérer les loyers sous le coup des lentes évolutions fixées par la loi de 1948, établit les nouvelles règles en deçà desquelles un logement pourrait, en respectant des normes minimales d’habitabilité, être libéré de la loi et rejoindre le marché libre, il prend en compte les caractéristiques des populations vulnérables (faibles revenus, personnes âgées et handicapées) à protéger, leur présence impliquant l’impossibilité de sortir du champ protecteur de la loi de 1948. Si ce dispositif légitime la « réhabilitation » des bâtiments anciens, c’est-à-dire leur intégration à la modernité marchande, les populations non protégées par la loi, qui, souvent, ont contribué à la croissance urbaine en restant dans ces quartiers encore marginaux, sont rejetées vers le marché. Ainsi, les mal-logés, sont-ils à la fois les extranuméraires de la société salariale (Castel, 1995) et du marché du logement. Pour les repérer, les premiers rapports de la Fondation Abbé Pierre, à partir de 1995, s’appuient assez largement sur les critères de l’INSEE, et ce malgré leur insuffisance : installations sanitaires dans les logements, degré de peuplement des logements. Mais ces éléments, utilisés par les collectivités locales dans le cadre de la rénovation urbaine et des opérations de résorption de l’habitat insalubre, sont peu adaptés à l’identification des personnes. À l’inverse, le concept « d’habitat indigne » qui s’attache aux risques encourus par les populations vivant dans les immeubles insalubres, les immeubles menacés de ruine et ceux présentant un risque d'exposition à une intoxication par le plomb (Bouché, 1998), utilement complété par la notion de « logement décent », exprime, par sa connotation humanitaire, un attachement à la reconnaissance de la personne (5). Non seulement il autorise une judiciarisation des actions mais encore il s’inscrit résolument dans la volonté d’identifier un sujet, un individu acteur. Toutefois, d’une part, les personnes les moins socialement pourvues ne peuvent se saisir de leurs droits sans le soutien des associations, d’autre part, si la notion de « vulnérabilité » court le risque de « handicaper » les personnes, le danger est aussi de considérer leur vulnérabilité indépendamment du contexte économique localement situé, en fonction des caractéristiques du bâti et de l’emploi local. Les situations de vulnérabilité
Ce détour historique montre que les situations de vulnérabilité résidentielle s’attachent autant aux lieux qu’aux populations et aux contextes. On peut résumer le propos par le tableau ci-après qui illustre les différents types de vulnérabilités, liées au cadre bâti, aux populations et aux contextes immobiliers locaux, et qui a permis d’élargir considérablement le champ de la …ou celle des habitants vulnérabilité résidentielle par rapport au mal-logement tel que Ce n’est qu’au tournant des années 1980 que les situations de défini par la Fondation Abbé Pierre. vulnérabilité résidentielle sont progressivement prises en compte, indépendamment du bâti. On le doit d’abord à la D’une part, les lieux vulnérables ou rendant vulnérables sont, notion de « sans domicile fixe » qui affleure au début des années malgré une longue histoire, peu connus. La définition de 1980 pour désigner et tenter de comptabiliser une population l’habitat indigne donnée par la loi du 25 mars 2009 (6) davantage caractérisée par sa visibilité dans l’espace public que correspondrait à six cent mille logements, soit un million de par des pratiques homogènes en termes d’insertion sociale, personnes. Ce chiffre est minimal car on reconnaît aussi professionnelle, voire résidentielle (Damon, 2002 ; Brousse, souvent que le parc ancien construit avant 1948 (un tiers du
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parc) peut être qualifié de « passoire thermique », dans laquelle trébuchent près de quatre millions de ménages en difficulté de paiement. De la même façon, la présence de plomb dans les peintures de logements anciens concerne huit cent soixante-dixhuit mille logements, dans lesquels des cas de saturnisme infantile se révèlent envisageables (7). Ces deux exemples illustrent les difficultés de repérage et de dénombrement sachant que, en temps de pénurie, les arrangements entre particuliers l’emportent par rapport aux normes d’hygiène que les pouvoirs publics peinent à faire respecter malgré les plans d’éradication de l’habitat indigne. La location de caves, de placard, de parkings, d’anciens locaux commerciaux aux fins d’habitation existent dans les villes aux marchés immobiliers tendus ; ils persistent grâce à la complicité tacite des parties prenantes, y compris des locataires qui n’ont pas d’autre solution. D’autre part, avec l’existence des inframarchés, on ne saurait considérer l’existence des populations vulnérables comme l’unique cause de la vulnérabilité résidentielle. Certes, les inégalités de patrimoine immobilier, qui protègent les mieux dotés, et les inégalités de parcours résidentiels (INSEE, 2011) se sont accrues. Mais le noyau dur du mal-logement comptabilisé par la Fondation Abbé Pierre (trois millions six cent mille personnes) est avant tout constitué par les populations rejetées par le marché et les secours institutionnels durables. Les premières ne trouvent aucun secours, telles les six cent quatrevingt-cinq mille personnes privées de domicile personnel, lesquelles comprennent les sans-domicile fixe, soit cent trentetrois mille individus vivant à la rue, des personnes vivant dans des abris de fortune, des bénéficiaires d’hébergement d’urgence temporaire et des occupants de chambres d’hôtel ou d’habitations de fortune (cabane, camping, mobil-home…). À ces personnes rejetées par le marché officiel (8), on peut ajouter celles qui sont partiellement acceptées dans le cadre de baux très précaires d’un an seulement, c’est-à-dire louant des appartements en meublé (cent soixante-treize mille personnes), celles qui n’ont droit qu’à la partie la plus dévalorisée du parc de logements, sans confort ou trop petits (deux millions huit cent mille individus), sans oublier celles qui ne peuvent que demander à être hébergées, temporairement, par des amis ou des relations (quatre cents onze mille personnes). Toutes ces situations précaires et fragiles, y compris celles des gens du voyage en difficulté d’accès à des aires d’accueil aménagées (soixante-douze mille personnes), renvoient à des mécanismes de tri résidentiel illustrant une mise à distance des populations de la part des bailleurs publics et privés ainsi que des institutions. Leur fragilité renvoie donc au contexte. En effet, ce sont surtout les contextes locaux et nationaux qui aggravent la vulnérabilité résidentielle. Ainsi, les copropriétés en difficulté, notamment dans les territoires en déclin, concernent plus de trois cents cinquante mille propriétaires occupants de logements acquis dans des immeubles connaissant de graves difficultés techniques, financières et sociales. De même, dans un contexte de pénurie et de cherté, près d’un demi-million de ménages se confrontent à des impayés de loyers. En effet, avec seulement 20 % de logements très sociaux financés [alors que 66 % des entrants en habitation à loyer modéré (HLM) en remplissent les conditions de ressource selon le rapport de la Fondation Abbé Pierre (2013)], la politique nationale reste à interroger. Ces chiffres témoignent des difficultés de
programmation, notamment aggravés lors des bouleversements que suscitent les transformations des territoires, qu’ils correspondent à des processus de déclin ou de valorisation renforçant leur attractivité et mettant en concurrence différents types d’usage du logement et de populations. Les fonctionnements des marchés du logement n’étant pas les mêmes en Île-de-France, dans les régions en déclin du Nord et dans les façades valorisées des villes situées sur l’Atlantique, on peut s’interroger sur les types de fragilité résidentielle résultant des opérations de rénovation urbaine dans le cadre de l’Agence de rénovation urbaine (ANRU – deux cent cinquante mille logements au programme 2009-2013) (9), ainsi que celle des ménages populaires dans des quartiers en gentrification, quartiers populaires qui font l’objet de l’installation de populations issues des couches moyennes et supérieures. En effet, si dans l’un ou l’autre de ces contextes on assiste à un rétrécissement de l’offre locative (de grands logements bon marché dans les opérations ANRU, de petits logements accessibles sans formalités dans les quartiers en gentrification), cela peut conduire les populations désirant demeurer au même endroit à négocier leur place, au prix même d’une diminution de leur confort (10). Les solutions individuelles à la crise du logement Au portrait alarmiste des situations vulnérables on oppose volontiers les arrangements que les ménages développent pour lutter contre la crise, notamment dans les grandes villes mondiales frappées par la crise du logement cher (11). Les commentateurs considèrent souvent ces formules comme de justes réponses résilientes démontrant la capacité des ménages à se confronter au marché. Ainsi, on dénombre, en France, deux millions et demi de personnes en situation de colocations, soit 3,7 % des ménages allocataires en France et 7 % à Paris (12). Moyennant un budget de loyer et des conditions d’accès moins exigeantes (caution) pour chacun des colocataires, cette formule permet de louer un grand appartement ou une grande maison à plusieurs, de bénéficier d’avantages économiques (eau, électricité, mobilier...) et de jouir d'un cadre de vie plus agréable. Si les étudiants sont les premiers adeptes de la colocation, les jeunes actifs, les femmes divorcées, les personnes âgées sont également concernées. Néanmoins, l’absence de cadre juridique précis fragilise les colocataires qui ne peuvent anticiper le départ d’un des membres ou son insolvabilité, notamment lorsque aucune clause de solidarité n’a été prévue. On peut ranger dans la même catégorie la cohabitation intergénérationnelle qui correspond à une offre de deux millions de logements émanant de personnes âgées en situation de sous-peuplement (après départ des enfants et du conjoint) et une demande éventuelle de deux cent cinquante mille jeunes en difficulté de logement (dont cinquante mille en Île-de-France). Bien que la contractualisation et le partage des risques semblent plus facilement mis en œuvre, la formule conduit, malgré d’autres avantages, à une amputation des conditions d’habitat (Barr y et al., 2010). À ce titre, la cohabit ation intergénérationnelle se rapproche de la location de chambre chez l’habitant, formule qui a longtemps répondu à la demande étudiante et se multiplie aujourd’hui de la part des ménages qui souhaitent alléger leur taux d’effort pour se loger. Il peut s’agir de pièces indépendantes ayant leur propre entrée, telles les anciennes chambres de domestiques ou de pièces à l’intérieur du logement. Non seulement elles sont souvent louées
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meublées, conférant à l’occupant sinon un accord verbal, un bail précaire d’un an seulement (six cents seize mille personnes dont quatre-vinq mille à Paris) (13), mais elles inscrivent le rapport social locatif dans une forme de dépendance proche de l’hébergement (Lévy-Vrœlant et Barrère, 2012 ; (Ménard et Huynh, 2010 ; Robiteau et Silvestre, 2013). Cette fragilité concerne également, selon l’enquête Logement 2006 de l’INSEE, la population des sous-locataires qui se révèle n’être composée que de dix-neuf mille ménages, dont à peine 2 % à Paris. La sous-estimation du phénomène est particulièrement surprenante, compte tenu de la demande de logements temporaires qui s’exprime sur de nombreux sites internet (14). Elle peut concerner le tourisme, des demandes de court séjour pour des stages ou des formations (Erasmus), mais aussi des demandeurs qui peinent à remplir les conditions financières (un mois de caution, une situation professionnelle stable tranquillisante pour les compagnies d’assurances à défaut d’une caution familiale). Bien que la sous-location soit soumise à l’accord du bailleur, elle est souvent pratiquée par les locataires qui, étant eux-mêmes à la limite de la solvabilité, souhaitent alléger leur charge financière. Ainsi, la sous-location à temps partagés (lorsque le locataire travaille dans une autre ville pendant la semaine, le week-end ou encore la nuit) représente, à Paris, selon les enquêtes journalistiques qui révèlent ce phénomène mondial, les trois quarts des offres étudiées en France. Cette demande précaire mal connue correspond à la location saisonnière, formule juridique qui, non seulement autorise un louage moins contraignant en termes de normes d’habitabilité (surface), mais est également mal connue sur un plan statistique. Ces trois cent mille logements, occupés, selon l’INSEE, occasionnellement pour des raisons professionnelles (par exemple, un pied-à-terre professionnel d'une personne qui ne rentre qu'en fin de semaine) sont souvent regroupés avec les résidences secondaires et représentent 9 % des logements en France soit 6 % à Paris, et sont aussi certainement sous-évalués. Il ressort du court inventaire présenté supra que toutes ces formules de logement concernent des populations précaires sur le plan de l’emploi, ayant le souci d’une localisation optimale à moindre coût dans la zone centrale des grandes villes, et donc dans un parc de logements anciens. Elles sont donc particulièrement vulnérables au contexte contemporain de redistribution sociale des villes (rénovations, gentrifications…), et à la nature du parc immobilier occupé. Les jeunes sont les plus exposés. Leur fragilité est encore augmentée par des dispositifs d’insertion résidentielle qui consistent à prolonger le provisoire sur un temps plus ou moins long. Ainsi, le champ d’application de la colocation dépend étroitement de la durée d’insertion professionnelle des jeunes, de plus en plus longue selon la conjoncture économique, ce qui accroît son champ. De la même façon, la sous-location, qu’elle soit portée par des associations mandataires ou consentie entre particuliers, consiste aussi en une limitation de l’appropriation personnelle de l’espace : on ne peut pas y apporter ses meubles et on y accède sur un temps partagé. Ainsi est-il intéressant de noter que les nouveaux rapports locatifs qui s’instaurent avec ces formules font peu de cas des normes d’habitat mises en œuvre depuis plus d’un siècle en termes de surface et d’accès aux
équipements sanitaires : comme avant 1850, l’État a peu de prise sur ces contrats entre des particuliers qui sont sortis du jeu du marché régulé et inventent de nouveaux rapports de louage et de cohabitation. Il est encore trop tôt pour désigner qui sont les perdants ou les gagnants de ces nouveaux cadres. Mais l’idéologie dominante qui s’exprime dans la presse présente souvent ces nouveaux types de locataires, colocataires ou souslocataires comme acteurs de leurs stratégies et donc résilients face à « la crise » (15). Ainsi, loin de se résigner passivement, ils doivent « accepter » avec dynamisme l’écart grandissant entre leur expérience quotidienne et leur attente d’un « vrai logement » (16), ce qui témoigne de la domination économique et symbolique qui pèse sur eux.
Conclusion Dans cet article, l’objectif était de montrer que, contrairement à l’idée répandue, la vulnérabilité résidentielle ne renvoyait pas seulement aux populations dites « fragiles » mais aussi aux contextes et aux structures du parc immobilier, y compris sur le plan physique. Cette notion s’est progressivement focalisée sur les populations au cours de l’histoire urbaine, conduisant à valoriser les diverses astuces développées par les ménages pour se loger malgré « la crise » comme des preuves de leurs compétences, de leur intelligence et de leur capacité à surmonter les contextes difficiles. Mais ces situations révèlent, au contraire, la vulnérabilité de leurs acteurs, en marge des rapports locatifs régulés par l’État et des protections qui y sont associées, y compris en termes d’hygiène. Sans doute, la France n’est pas dans le pire des mondes possibles, pour reprendre une partie du titre de l’ouvrage de Mike Davis consacré à la bidonvillisation du monde (Davis, 2006). Néanmoins, l’affaiblissement de la régulation des rapports locatifs relevant des sous-marchés colocatifs et souslocatifs constitue un signal de crise inquiétant. Si leur limitation semble difficile, leur prise en compte est essentielle, dans la mesure où le phénomène du logement vulnérable dépasse les limites du mal-logement et peut l’amplifier dans certains contextes locaux (tableau p. ). En effet, leur traitement pose la question des garanties attendues par les bailleurs et d’un droit au logement qui ne soit pas un simple droit limité à l’abri. Ainsi, une politique de la vulnérabilité visant à renforcer les populations face au risque reste à construire, assortie, sans doute, d’une réflexion sur la place des aides au logement dans ce nouveau contexte. Car si la notion de « vulnérabilité résidentielle » s’est révélée pertinente pour dépasser l’approche physique du mal-logement et identifier des populations vulnérables destinées à être dotées de moyens pour atteindre leur autonomie, les solutions diverses à la crise qui sont issues de ce principe ne sauraient aboutir à une dissolution progressive des droits et des protections. En faisant l’hypothèse que le discours en apparence généreux des « nouvelles solidarités » reflète une reconfiguration du marché du logement, la position de chercheur amène à considérer comme urgent un réexamen par les pouvoirs publics, garants des parties, des dispositifs contractuels aussi divers soient-ils.
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Notes (1) Ce matériau est issu de la veille documentaire menée depuis plusieurs années au Centre de recherche sur l’Habitat UMR LAVUE du CNRS. (2) Selon le catalogue de la Bibliothèque nationale de France, l’expression « crise du logement » apparaît dès 1912. (3) On reconnaîtra ici le modèle d’Albert Hirschman (1970). (4) Disposition du plan, densité, volume et surface des pièces d’habitation, nature de la construction et des matériaux, humidité, aération, chauffage, cabinets d’aisance, état d’entretien, ensoleillement, raccordement au tout-à-l’égout, distribution d’eau potable, installation électrique, présence de parasites et rongeurs. (5) Décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent pris pour l'application de l'article 187 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains. (6)Aux termes de la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion, « constituent un habitat indigne les locaux ou installations utilisés aux fins d’habitation et impropres par nature à cet usage, ainsi que les logements dont l’état, ou celui du bâtiment dans lequel ils sont situés, expose les occupants à des risques manifestes pouvant porter atteinte à leur sécurité physique ou à leur santé. » (7) Communiqué de presse, École des hautes études en santé publique, Institut de recherche en santé, environnement et travail, Centre scientifique et technique du Bâtiment, 2012, « Exposition des enfants au plomb et autres métaux toxiques : des données françaises inédites ».
(8) Ce qui entraîne des repositionnements sociaux, voir Dietrich-Ragon (2013). (9) Loin de minorer la crise, on peut penser que le retard du programme de l’ANRU fragilise les populations : en effet, on compte seulement 106 450 démolitions sur 140 000 prévues, ce qui renvoie directement à la situation d’attente des populations habitant dans des immeubles devant être traités. En outre, les logements reconstruits correspondent, pour 61 % d’entre eux, à des financements « Plus », et 12 % à des prêts locatifs aidés d’intégration, ce qui correspond en moyenne à des loyers supérieurs à ceux des logements démolis. Pour la compréhension qualitative des situations, voir Dietrich et Fijalkow (2013). (10) Tel semble être le résultat paradoxal de l’opération « Goutte d’Or » dont l’objectif était de réduire l’insalubrité des logements, et qui se trouve aujourd’hui confrontée à un durcissement de la demande émanant de la population voulant rester dans Paris intra-muros. (11) Une comparaison serait utile sur ce point entre Paris, New-York, Tokyo… (12) Selon le Recensement de population 2009 de l’INSEE, tableau « Répartition de la population selon le mode de cohabitation ». Le site colocation.fr enregistre trente mille nouvelles annonces chaque mois et appartager.com, cinquante mille. (13) Recensement de population, 2009. (14) Le seul site souslouer.com affiche cinq mille cinq cents offres. (15) « Gagner de l’argent grâce à son logement » titre le magazine populaire Télé Star en décembre 2012. (16) Voir la citation de Paul Ricœur au début de cet article, page 2).
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l’avenir des centre-ville
15h45 salle Hessel C Raphaëlle Segond, Architecte, Enseignante à l’ENSA de Marseille Thierry Moallic, Directeur de l’ADIL 13
Thierry Moallic Titulaire d'un DESS en Droit de la construction et de l'urbanisme, Thierry Moallic a été directeur de l'Adil de Lozère en 1997 et responsable du développement de l'Anil (agence nationale) en 2000. Directeur de l'Adil 13 depuis 2003, il vient a été nommé secrétaire général de l'Anil en mars 2013. Il est par ailleurs Vice-Président du Cercle de l’Immobilier
Raphaëlle Segond
crée son agence en 1999 à l’occasion de deux concours gagnés en cotraitance avec Rudy Ricciotti, le centre national chorégraphique d’Aix en Provence et le grand hall et le restaurant de la faculté des sciences de Luminy. Ces deux références remarquées lui donnent accès aux concours publics, à la construction d’équipements et parallèlement à celle de maisons et de petits collectifs qui assurent à l’agence un travail toujours équitablement partagé entre conception et réalisation. L’agence reste petite, souple, pour rester ouverte aux partenariats qui lui permettent de renouveler ses compétences. Artistes, urbanistes, designers, paysagistes, spécialistes lumière, façades, transports sont associés pour répondre à une plus grande diversité de projets. Depuis 2008, elle complète son expérience d’architecte par une forte implication dans des études urbaines avec notamment l’étude de la RD 559 à Six Fours, la restructuration et l’extension du centre de Roquevaire, la reconversion du site militaire du Brusc. En 2011, Elle construit avec Jean Marc Chancel l’extension du Lycée Daumier qui est distingué par le grand prix d’architecture du CAUE 13 dont le jury est présidé par François Chaslin. Depuis cinq ans, Raphaelle segond est également maître assistant associé de l’école d’architecture de Marseille et architecte conseil du CAUE des Bouches du Rhône. En 2010, elle participe à la création du think tank différent dont elle est vice-présidente.
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HLM et ville durable
15h45 salle Simone Veil André Jollivet Architecte, Président de la MVA Joël Canapa Directeur de Terres-du-Sud Habitat
André Jollivet
Joël Canapa
André Jollivet est architecte. Il est président de la Maison de l'Architecture et de la Ville depuis sa création en 2003. Il a été pendant plus de dix ans président du Conseil régional de l'Ordre des architectes. Il est lauréat du Prix du CAUE 13 pour le lycée Lucie Aubrac de Bollène et a réalisé de nombreux équipements publics. Il vient de livrer, associé à Corinne Vezzoni, le bâtiment des Réserves du Mucem.
Titulaire d’un master en sciences économiques, Joël Canapa a enseigné le renouvellement urbain au Conservatoire National des Arts et Métiers, et réalise régulièrement des interventions à Sciences-Po et donne des cours dans un master de sciences économiques à Marseille 2. Elu et formé avec Maurice Delplace, il est jusqu’en 2001 premier adjoint au maire de La Garde et depuis élu d’opposition. Conseiller régional depuis le 1er décembre 2001, viceprésident du Conseil Régional PACA de 2004 à 2010, aux côtés de Michel Vauzelle, durant cette période délégué à la solidarité, la prévention et la sécurité. Il préside le Comité de ligne « littoral Varois », qui permet aux usagers et aux associations de traiter des problèmes rencontrés, et d’améliorer les dessertes TER. Il préside également le comité exécutif du réseau REMI, réseau Euroméditerranéen des Mineurs Isolés associant des collectivités de France, d’Italie, d’Espagne, du Maroc et bientôt d’Algerie et de Tunisie et qui développe des politiques coordonnées au niveau européen pour aider les mineurs isolés, souvent en situation de grande détresse.
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Rencontres Nationales du
Logement et de l’Habitat
5 ans pour sortir de la Crise du Logement
D’abord, décrire la situation en identifiant précisément les problèmes. Puis immédiatement mettre en regard une réflexion originale, celle de la gratuité du logement et d’idée d’un service public du logement. Avec le repère analytique et l’ouverture conceptuelle, il est possible de commencer à débattre, c’est le chapitre suivant, un moment d’échanges à la recherche des repères pour sortir de la crise du logement. Mais comment classer ces repères, mettre de l’ordre dans les innombrables dimensions du logement et de l’habitat ? Trois clés sont proposées, abordées diversement par une série d’acteurs, qu’ils soient politiques, professionnels, responsables associatifs : l’habitat le cœur du sujet, la maitrise publique qui permet de construire la politique du logement et le financement de ce secteur. Sont rappelés également les principaux chiffres clés de la crise du logement, ainsi qu’une série d’éléments bibliographiques, pour aller plus loin et continuer de construire les outils de l’alternative à la crise du logement.
RNLH - HQB 1er mars 2012 152p
Didier Vanoni Christophe Robert
Logement et cohésion sociale Le mal-logement au coeur des inégalités
La Découverte novembre 2007 240 p
Hortense Soichet Antoine Choplin
Nul n'existe sans habiter quartier des Fenassiers Créaphis octobre 2012 64 p
"Aux Fenassiers" se distingue d'abord par une empreinte graphique forte, avec une typographie contrastée insistant sur un lieu. Le livre porte le nom d'un lieu dit, celui sur lequel s'est construit une cité à Colomiers en Haute-Garonne. Aux Fenassiers se distingue aussi par une durée : le temps d'un séjour sous forme de résidence d'artiste d'octobre 2011 à avril 2012. La photographe Hortense Soichet y a rencontré des habitants de la cité des Fenassiers. Les photographies et les récits des résidants racontent l'histoire de ce quartier créé dans les années 1960 et appelé à être réhabilité. Les images des espaces domestiques issus de ce travail ne laissent voir aucune présence humaine. Elles dialoguent avec les paroles des habitants et invitent à imaginer qui occupe ces lieux. Les photographies des extérieurs, prises depuis chez les habitants, donnent à voir le quartier depuis l'intérieur. Ce n'est pas véritablement un livre comme les autres : con"u par le graphiste Thomas Petitjean, c'est un ouvrage d'artiste conjugant graphisme, photographie, littérature et anthropologie urbaine : l'ouvrage laisse une large place aux images et aux témoignages des habitants et l'édition se démembre pour qu'habitants et publics puissent la lire ou l'afficher. Cet ouvrage est le deuxième d'Hortense Soichet aux éditions Créaphis ; son livre, Intérieurs, logements à la Goutte d'Or, composé de photographies accompagnées de textes de Paul Ardenne et de Yankel Fijalkow, paru en octobre 2011, a re"u un très bel accueil, et Aux Fenassiers s'inscrit dans la continuité de ce travail sur les intéreurs habités.
On peut être tenté de définir la politique foncière en transposant la définition que donne Joan Robinson de l'économie. L'objet de la science économique – dit-elle - consiste à déterminer «comment doivent être allouées des ressources rares entre des usages concurrents ». L'objet de la « science » foncière serait ainsi de permettre de fixer, soit en termes de résultats, soit en termes de méthode, comment les terrains seront alloués entre les différentes utilisations possibles. Ce seul énoncé soulève aussitôt une question centrale, qui trouve son origine dans la nature économique très particulière du «sol». Un Vincent Renard terrain n'est pas un bien économique Joseph Comby comme un autre. Tant sa nature (unique, Que sais-je ? non produit, non reproductible) que l'organisation et le fonctionnement des Les politiques foncières marchés fon-iers (condition d'atomicité, Presses universitaires de France juillet 1996 127 p transparence, éléments de monopole) interdisent d'y transposer simplement les raisonnements et les résultats généraux de la science économique. Ce n'est d'ailleurs pas d'hier que la théorie de la rente occupe une place à part dans la théorie économique. Ses pères fondateurs, de Ricardo à Maurice Allais, ont consacré des développements propres à ce facteur de production particulier qu'est la terre. Les enjeux des politiques foncières conduisent naturellement à s'interroger sur les objectifs poursuivis, qui peuvent être divers et éventuellement contradictoires, entre l'aménagement et la protection, entre la récupération des plus-values et la relance du bâtiment, la maîtrise du développement et le libre jeu du marché, etc. Il importe alors d'évaluer l'adéquation des politiques suivies au regard des objectifs qu'on leur a assignés.
Alors que la presse se fait de plus en plus l'écho des tensions du marché de l'immobilier ou du mal-vivre dans les banlieues, que le droit au logement opposable a finalement été obtenu sous la pression des associations, la question du logement apparaît encore souvent comme un domaine particulièrement com-plexe et délicat à saisir dans toutes ses composantes (finan-cières, foncières, techniques, réglementaires) et toutes ses dimensions (urbanistiques, territoriales, sociales, économiques). Cet ouvrage s'intéresse plus particulièrement à la situation des mal-logés (3 millions de per-sonnes aujourd'hui), tout en prenant acte de l'élargissement de cette crise du logement aux classes moyennes. Grâce à une approche par thèmes (logement social, structures d'hébergement et d'accueil d'urgence...) mais aussi par publics (personnes défavorisées, étudiants, ménages vieillissants...), il contribue à dresser un état des lieux de la question du logement en France. Il fait également le point sur le cadre législatif et ses évolutions et offre aux professionnels concernés un ensemble de connaissances permettant de mieux contextualiser leurs pra-tiques ou de donner une dim-ension plus stratégique à leurs interventions. Un outil indis-pensable pour les travailleurs sociaux, responsables associatifs, fonctionnaires territoriaux, chefs de projet, élus locaux qui interviennent sur les questions de logement et sont confrontés sur le terrain à une situation de plus en plus critique.
Hortense Soichet
Intérieurs Créaphis octobre 2011 176 p Les photographies de l'intérieur de 40 logements du quartier de la Goutte d'Or révèlent des manières d'exister spécifiques dans un territoire urbain en mutation et participent à une meilleure connaissance de milieux sociaux changeants par une approche anthropologique et artistique. Hortense Soichet a visité une centaine de logements dans le quartier parisien de la Goutte-d'Or, entre Montmartre et Barbès. Elle a enquêté auprès des habitants de cette « Zone urbaine sensible » (ZUS) et photographié leur « chez soi » - intérieur et objets - de manière systématique, avec un même point de vue et un même angle. Si les habitants eux-mêmes sont absents des images, ces portraits de logements révèlent des manières d'habiter spécifiques dans un territoire urbain en mutation. De courts extraits d'entretiens accompagnent les images, dont la sélection répond à des critères aussi bien esthétiques que sociologiques. Ce travail témoigne d'une intention documentaire, et rend visible un quartier de l'intérieur, en associant art et anthropologie. Le livre présente quarante logements avec sept photos chacun. Un texte du professeur et critique d'art Paul Ardenne et un texte du sociologue Yankel Fijalkow accompagnent les photographies.
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Jean-Paul Curnier
A vif Lignes éditions Léo Scheer avril 2006 128p
Jean-Claude Driant
Les politiques du logement en France La documentation française 2009 183p
Magali Giovanangeli Jean-L. Sagot-Duvauroux
Voyageurs sans ticket :
liberté, égalité, gratuité Une expérience sociale à Aubagne éditions Au diable vauvert septembre 2012 240 p
Vincent Renard Etudes foncières – n°158 Association des études foncières (ADEF) - juillet 2012
À Vif : sous ce titre, ce sont autant d’avancées dans ce qui passait pour impensable, inouï, scandaleux ou impossible à formuler, qui sont rassemblées. Il ne s’agit donc pas de portraits d’écrivains ou de penseurs mais de portraits, si ce terme convient encore ici, d’autant de pensées arrachées aux limites du pensable, avec ce qu’un tel engagement dans la recherche d’une vérité de l’homme a de terrible et d’immense pour chacun des auteurs ici considérés ; avec en somme pour chacun d’entre eux, l’écriture ou la pensée comme inséparable d’un destin, se faisant destin. La seule lecture de cette liste de nom (Artaud, Nietzsche, Bataille, Sade, Klossowski, Pasolini) évoque d’abord ceci : un accord absolu des gestes, de l’orientation et de la conclusion de l’existence avec l’intransigeance employée à formuler ce devant quoi la pensée renonce habituellement. L’impossible qui les unit se tient là, précisément : en ce lieu où ce ne sont pas les concepts ou les mots qui manquent, mais où la plupart des hommes reculent d’effroi devant ce que l’esprit s’apprête à admettre. Ce que l’on trouvera dans ce livre, c’est la
"L'exposé des enjeux, de la construction et de l'actualité des politiques du logement permet de nuancer le juge-ment sévère qui leur est gé-néralement infligé. il montre notamment qu'à l'aune de certains des objectifs pour-suivis, elles peuvent être, au contraire, extrêmement per-formantes. C'est le cas, par exemple, lorsqu'elles cor-rigent les effets des aléas conjoncturels sur le rythme de l'activité du bâtiment. C'est aussi le cas en ce qu'elles ont contribué, en trente ans, à améliorer les conditions de confort de la grande majorité des mé-nages. C'est beaucoup moins vrai lorsqu'elles tente de résoudre les problèmes de mallogement ou d'as-surer la mixité sociale dans la durée." (p169)
saisie des dépassements décisifs et jusqu’alors impensables de ce point en deçà duquel la pensée s’était tenue. Du point où la pensée fait peur, point au-delà duquel écrire est un engagement de soi dans l’inconnu, dans la plénitude et dans l’effroi. L’impossible vers quoi tous ont tendu, et dans lequel, chacun à sa manière a jeté son existence, c’est aussi celui, frontalement politique, qui a consisté (au risque du malentendu le plus profond et du rejet le plus humiliant) à condamner sans nuances le modernisme, et avec lui le progrès. Cela au nom d’une exigence qui, bien que teintée d’une inévitable nostalgie, affirme la possibilité d’une autre vision du devenir commun.
Marie-Noëlle Lienemann
Le scandale du logement Jean-Claude Gawsewitch 2005 253 p
L'élue et le philosophe racontent la gratuité des transports publics instituée depuis 2009 dans l'agglomération d’Aubagne. Expérience qui a transformé le rapport des citoyens à l’espace public, raboté les distinctions sociales et fait exploser la fréquentation des bus. « Le régime républicain se stabilise définitivement autour de l'institution de l'école gratuite, une innovation qui place la liberté politique du peuple au-dessus de la mécanique marchande. Cet optimisme démocratique est-il aujourd’hui perdu ? Avec la gratuité des transports publics, il s’agissait de proposer aux habitants du Pays d’Aubagne et de l’Étoile une mesure qui mettrait tout le monde sur un pied d’égalité, pas une mesure réservée aux plus pauvres, pas une mesure où les familles aisées ne trouveraient pas leur compte, créer une situation où les différences de revenus n’auraient plus d’importance » Quand le principe de la gratuité des transports publics est proposé aux citoyens de la communauté d’agglomération du Pays d’Aubagne et de l’Étoile, les réactions de défiance sont nombreuses. Si pour certains la gratuité est une composante essentielle de l’existence humaine, d’autres se
Au coeur des débats sur les villes et les espaces ruraux, Etudes foncières propose à ses lecteurs des analyses théoriques et pratiques qui éclairent le devenir de nos territoires. Au carrefour des disciplines, la revue associe étroitement auteurs et lecteurs issus des mondes académiques et professionnels, du privé au public. Ce faisceau de regards fait d’études foncières une revue unique en son genre : le pôle de référence, tant pour les praticiens que pour les chercheurs et les
"Si la situation n'a jamais été réellement satisfaisante, il semblait néanmoins jusqu'à présent que seule était concernée une minorité de gens, au bord de l'exclusion ou ayant déjà basculé. Pour moi, une énigme demeure. Comment expliquer la très faible mobilisation sociale et politique sur des enjeux aussi essentiels, et face à des problèmes aussi profonds? Pendant un temps, j'ai pensé que puisque 80% des Français s'estimaient satisfaits de leur logement, les difficultés des 20% restants (issus de l'immigration ou des classes populaires) passaient pour "marginales" auprès du plus grand nombre. L'histoire a montré que la misère des plus pauvres ne suffit pas, à elle seule, à mettre en marche les forces du changement. Cellesci doivent pourtant l'être si notre pays veut être à la hauteur de l'ambition républicaine qui fonde son identité. La crise actuelle contient les ferments d'une nouvelle patique, d'une nouvelle politique. Le logement peut et doit redevenir une cause d'intérêt général. nos concitoyens ne peuvent concevoir conjointement que la mondialisation rende difficile le retour au plein emploi, et q'un pays comme la France, riche et ambitieux, soit incapable d'offrir à chacun de ses habitants un logement décent en phase avec ses revenus." (p17)
demandent si elle ne dévalorise pas ce qu’elle touche – c’est gratuit donc sans valeur –, ou si elle ne conduit pas à se croire tout permis. L’expérience engagée en 2009 lève les réticences et se solde par une progression spectaculaire de l’usage des transports publics, des circulations nouvelles entre les citoyens et les territoires, le tout sans coût supplémentaire pour les habitants. Plaidoyer pour la gratuité, ce document est d’abord le récit d’une innovation politique réussie. Explorant les diverses implications de cette expérience, il propose une réflexion stimulante sur la faisabilité de politiques alternatives au tout-marchand. Il ouvre sur une pensée politique qui croise radicalité de gauche, inspiration libertaire, fécondité de l’utopie quand elle transforme la réalité. Le XXIe siècle est-il en train de défricher de nouvelles voies d’émancipation ?
étudiants Intéressés par l’aménagement et l’urbanisme. Au service des auteurs, l’équipe de Rédaction élabore la ligne éditoriale et assure les missions de production de la revue. Pour mener à bien sa mission, elle bénéficie de l’appui d’un comité de rédaction et de lecture qui réunit les meilleurs spécialistes de la question foncière.
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Regards croisés sur l'économie
Pour sortir de la crise du logement La Découverte mai 2011 287p
Comment permettre à chacun d’avoir un toit ? Qu’est-ce qui détermine les prix de l’im-mobilier ? Faut-il à tout prix inciter les Français à devenir propriétaires ? C’est à ces questions que s’attaque ce numéro de Regards croisés sur l’économie, dans une synthèse unique et accessible à tous. La crise du logement est multif-orme : envolée historique des prix, ségrégation rampante, inégalités croissantes. Le pre-mier objectif de ce numéro est d’en dresser le constat clair et rigoureux. Face à la crise, les politiques publiques restent peu efficaces : les aides aux locataires s’avèrent souvent contreproductives ; les inci-tations fiscales se multiplient sans être évaluées ; la politique de la ville est un échec. Comment sortir de cette impas-se ? Tout le monde s’accorde sur la nécessité d’augmenter l’offre de logements, mais comment construire, où, avec quels financements ? Les ef-forts ont jusqu’à présent été inférieurs aux besoins, et on a trop peu réfléchi à la façon dont un meilleur appariement entre les logements et leurs oc-cupants pourrait alléger la pres-sion foncière. Pour sortir de la crise du logement, ce numéro fait contribuer les meilleurs spé-cialistes français, qui formulent des propositions concrètes, précises et ambitieuses.
METROPOLITIQUE S Les nouvelles politiques du logement
Métropolitiques
Dossier: Les nouvelles politiques du logement Novembre 2010 – avril 2012
Bernard Coloos
Habitat et ville Editions de l'Aube 2000 435p
Fondation Abbé Pierre
Rapport mal-logement 2012 février 2012 226p
Le logement a aujourd’hui un rôle croissant dans les inégalités de patrimoine et l’on montre du doigt les difficultés récurrentes du secteur à faire face aux besoins des populations. Si cette situation de « crise » semble immémorable, les enjeux actuels sont cependant nouveaux. Du financement de la filière aux conditions de l’accès de tous à un logement, de la vocation du parc social à la relation entre ville et logement, c’est le monde du logement dans son ensemble qui est en débat. Métropolitiques ouvre un dossier pour nourrir la réflexion sur les « nouvelles politiques du logement ». Le logement est perçu comme étant en crise permanente : crise du mal-logement dénoncée à longueur de rapports par la Fondation Abbé Pierre (3,6 millions de mal logés) ; crise immobilière quand les prix baissent, déprimant un secteur économique majeur (23 % du PIB) et fragilisant des ménages endettés ; crise du logement cher quand ils montent en réduisant les possibilités d’accès au logement des locataires (27 % de hausse des loyers depuis 2000 selon l’Insee) et des candidats à la propriété (94 % de hausse des prix des logements anciens depuis 2000). Face à ces tensions, la puissance publique ne reste pas inerte : les diverses aides et avantages conférés aux producteurs et aux consommateurs de logement s’élevaient en 2009 à près de 40 mil-liards d’euros. Pourtant, rien n’y fait. La construction de nouveaux logements a atteint des niveaux record dans les dernières années sans que cela ne résolve le problème : logements peu adaptés à la demande tant en nombre de pièces qu’en localisation géographique, logements peu accessibles, du fait des prix pratiqués, que ce soit pour les
locataires du secteur libre comme pour les p r i m o - a c c é d a n t s . C ’ e st a u j o u rd ’ h u i l’ensemble du « monde du logement » qui est en question. Le système économique du logement, d’une part, fait l’objet de plus en plus d’attentions : la crise du paritarisme dans la contribution à la construction, les mutations du système bancaire (Livret A) et financier ou encore le coût croissant des exonération fiscales soulèvent des débats importants. D’autre part, la politique du logement est indissociable de celles des territoires. Or, la place des collectivités locales dans les politiques du logement reste marginale, alors même que la relation entre ville et logement est reconnue comme une clef des politiques du logement : elle engage une réflexion sur le foncier, sur les modes d’intervention des organismes de logement social, sur l’adaptabilité des normes et sur les objectifs à inscrire dans les lois et les documents d’urbanisme. Fidèle à son objectif de dynamisation des débats, au croisement des disciplines et des champs d’expertise, Métropolitiques ouvre ce dossier sur les « nouvelles politiques du logement », pour proposer un état des lieux des enjeux pointés par la recherche et faire émerger de nouvelles pistes pour les politiques à venir.
Bernard Coloos aborde ici la complexité des questions relatives à la ville et à l'habitat en présentant simultanément les connaissances disponibles et les diverses thèses en présence. L’ouvrage s’organise autour de quinze grandes questions dont l’auteur ne craint pas de présenter les incertitudes et les contradictions. Y a-t-il des besoins en logement ? Construiton trop de logements en France ? Acte II de la décentralisation : étape ou ratage ? Faut-il vendre les HLM ? À quelles conditions ? Le secteur privé peut-il faire du social ? Tous propriétaires ? Peut-on supporter les attentes largement majoritaires des Français pour le logement individuel ? La rénovation portée par l’Anru est-elle une bonne solution à la crise des quartiers HLM ? Le droit au logement opposable : est-ce possible ? Les prix immobiliers reflètent-ils les préférences des ménages ? Cycle et bulle immobilière sont-ils inévitables ? Les ménages français sont-ils trop endettés ? Faut-il faciliter l’accès de tous au crédit ? Faut-il privilégier l’aide à la pierre, l’aide à la personne ou l’arme fiscale ? Les logements vacants sont-ils oui ou non tous disponibles ? Sauriez-vous y répondre ?… Fruit de plusieurs années d’enseignement, ces questions essentielles sont davantage traitées pour en comprendre les enjeux que sur le plan des techniques propres aux économistes ou à d’autres champs. Un livre utile pour tout étudiant et professionnel de l’aménagement, de l’urbanisme et de l’habitat.
Voici 20 ans que la Fondation Abbé Pierre existe. 20 ans qu’elle travaille auprès des défavorisés pour permettre à chacun de disposer d’un toit digne et décent. 20 ans d’actions et de soutien en direction des plus fragiles, 20 ans d’observation du mallogement en France, 20 ans de propositions, de sensibilisation du grand public et de travail permanent auprès des pouvoirs publics. Et pourtant, la réalité est cruelle : la situation du logement dans notre pays s’est progressivement aggravée et les personnes en difficulté se comptent désormais aussi parmi les classes moyennes. Le problème du logement est devenu un problème majeur de société. C’est le sens du diagnostic que nous dressons, qui montre que les orientations choisies par la puissance publique ont très souvent oublié les besoins sociaux alors qu'ils auraient dé — au contraire — figurer comme les fondements de toute politique du logement… C’est injuste et incompréhensible. Et cela conduit à fragiliser ou aggraver la situation de ménages de plus en plus nombreux. Une telle dimension, atteignant l’inadmissible, a conduit la Fondation à s’engager dans une "
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Mobilisation générale pour le Logement ". Elle l’a fait en établissant une plateforme de propositions concrètes, en partenariat avec la société civile, dont les pouvoirs publics seraient bien inspirés de s’emparer. Car la France qui souffre ne peut plus attendre : lorsque près de 10 millions de personnes subissent au quotidien les conséquences de la crise du logement, les demi-mesures ne suffisent plus et c’est d’une large ambition dont nous avons besoin. Il faudra que le Président de la République élu et les futurs parlementaires sachent s’investir pleinement pour assurer à l’ensemble de leurs concitoyens de trouver un toit digne et décent, et répondant à leurs besoins. L’abbé Pierre avait coutume de dire " C’est quand chacun d’entre nous attend que l’autre commence qu’il ne se passe rien. « Alors n’attendons plus.
Confédération générale du logement
Synthèse de la pétition sur un blocage des loyers
Confédération nationale du logement
Locataires, connaissez vos droits septembre 2011 248 p
Patrick Doutreligne
Fondation Abbé Pierre
Le logement des personnes défavorisées Lamarre octobre 2000 223 p
Didier Vanoni Julien Leplaideur
Crise sociale et logement Des pistes pour y répondre Profession banlieue juin 2009 75 p
"Le blocage des loyers est devenu une nécessité. Après l’envolée de la décennie écoulée, les loyers ont atteint un niveau insupportable pour beaucoup de familles. Ainsi, avec les charges locatives et les dépenses liées au logement, la part moyenne des ressources des ménages consacrée au logement est passée de 13 % dans les années 1980 à plus de 25 % aujourd’hui. Pour les revenus modestes, cette part peut même atteindre 30, 40 ou 50 %. C’est pourquoi la CGL propose que soit mise en place une politique des loyers dans laquelle l’Etat jouerait un rôle central et moteur. La feuille de route de cette politique pourrait être la suivante : - Blocage des loyers du secteur public comme du secteur privé pendant une période d’un an, durant laquelle un bilan précis des niveaux de loyers pratiqués sur l’ensemble du territoire national par bassin d’habitat serait établi. - Puis, définition d’un niveau raisonnable de loyer de référence pour chaque bassin d’habitat qui serait la moyenne en euros par mètre carré, des loyers pratiqués dans chaque zone. - Ensuite, mise en place d’un système permettant, sur la base de ces loyers de référence, d’ajuster à la baisse les loyers pratiqués se situant au dessus du loyer de référence du bassin d’habitat. - Enfin, adoption d’un régime général d’encadrement qui deviendrait le régime légal. Consciente de la nécessité d’arrêter cette spirale des augmentations mais aussi pour affirmer que si l’on veut que chacun dispose d’un lieu d’habitation, il faut sortir de la logique du logement « produit financier » dont on recherche la rentabilité maximale, la CGL a lancé une pétition nationale demandant un décret de blocage des loyers. Cette pétition s’est faite en ligne en
utilisant les services du site internet « mesopinions.com ». Elle a pris l’aspect d’une lettre adressée à Monsieur Benoist Apparu, ancien Secrétaire d’Etat au Logement (p 3). Les personnes qui en approuvaient le contenu la signaient après avoir donné leurs noms et prénoms, leur adresse postale et leur adresse mail. Le tableau récapitulant l’ensemble des signatures par département (p 5) montre que leur origine géographique couvre l’ensemble du territoire national. Les signataires pouvaient écrire des commentaires. Ils ne s’en sont pas privés puisque sur 21 000 signataires plus de 3000 l’ont fait. Estimant qu’ils pouvaient être considérés comme représentant l’opinion que nos concitoyens portaient sur le niveau des loyers. Puis nous avons dressé la carte de leur répartition géographique (p 7), fait une analyse succinte de la première moitié de ces commentaires soit 1 501, en les répartissant dans 10 catégories thématiques (p 8). Beaucoup de ces commentaires sont révélateurs de ce que pensent et vivent nombre de nos concitoyens. Nous avons donc sélectionné ceux qui nous ont semblé les plus représentatifs et pris parti de les publier tels quels. Enfin, défendant l’idée d’un blocage général des loyers, nous faisons un ensemble de propositions pour sa mise en place."
Pour les locataires, les rapports avec leurs propriétaires restent des rapports interplanétaires. Se déplacer au milieu des lois, décrets et autres circulaires relève d’un déplacement dans la jungle au milieu des pièges inextricables. La CNL et ses militants oeuvrent en permanence pour analyser ces rapports et les rendre plus accessibles, et surtout pour que l’équilibre entre les droits des locataires et ceux des propriétaires se situent au profit des locataires. Nous ne sommes pas encore parvenus au maximum de nos ambitions, bien que nous ayons obtenu un grand nombre d’améliorations. Conscients de ces difficultés que vous pouvez rencontrer, nous éditons la présente brochure qui devrait vous aider au quotidien dans votre vie de locataire. Il s’agit d’un condensé de textes essentiels qui sont décortiqués, explicités afin de les rendre accessibles à tous. Une autre ambition de ces pages est de susciter des vocations, afin que toujours plus nombreux, les locataires viennent grossir les rangs de nos adhérents et de nos militants car c’est bien connu, plus nous serons nombreux, plus
les rapports de force joueront en notre faveur, et par conséquent en votre faveur. Ces militants sont d’ailleurs à votre disposition, si vous rencontrez des difficultés que seuls, vous ne vous sentez pas en capacité de résoudre. A cet effet, vous trouverez, à la fin de cet ouvrage la liste de nos fédérations départementales, où vous y trouverez le meilleur accueil. Un grand nombre d’entre elles tiennent des permanences, où vous trouverez des conseillers à votre écoute afin de bien vous orienter. Alors à bientôt parmi nous, pour ceux qui n’y sont pas encore, et une bonne lecture bien que nous le savons cela vous posera au début des problèmes. Mais dès que vous aurez trouvé la clé, vous constaterez que tout devient aisément accessible.
Condition première de l'insertion professionnelle et sociale, le logement est une préoccupation grandissante des responsables politiques. Le droit au logement, concept relativement récent, initié par la loi Besson, a ainsi pris une dimension toute particulière notamment depuis la loi contre les exclusions qui a renforcé les outils techniques, financiers et fiscaux à la disposition des acteurs sociaux. La connaissance de ces mesures est fondamentale pour tous ceux qui participent à la lutte contre les exclusions par l'accompagnement des défavorisés. Cet ouvrage décrit les différentes structures d'accueil et les solutions qui existent pour accéder au logement, il présente les dispositifs d'aide aux plus démunis et indique comment traiter les difficultés particulières. Faisant un point complet de l'état de la réglementation en la matière, l'auteur apporte également, en
s'appuyant sur des données statistiques, des éléments d'analyse et des pistes de réflexion sur le problème de l'habitat aujourd'hui. A noter également en fin d'ouvrage un chapitre consacré à la prévention des expulsions : toutes les étapes de la procédure et les moyens de défens des publics concernés sont mis en lumière à l'aide de schémas explicatifs. Destiné à donner des réponses aux hommes de terrain - travailleurs sociaux, associations, élus locaux, bailleurs - ce livre constitue une aide très complète pour apporter un soutien et orienter au mieux les personnes en situation précaire.
Synthèse des ateliers logement 2008 - Le département de la Seine-Saint-Denis, peut-être plus qu'un autre, subit les effets de la crise du logement. La composition de son parc de logements, sociaux et privés, et la situation socioéconomique des ménages qui y habitent expliquent notamment le nombre important de ménages mal logés que l'on y trouve. Aussi, pour aborder de façon concrète la problématique du loge-ment en Seine-Saint-Denis, Profession Banlieue a mis en place cinq ateliers de travail dont chacun des thèmes a été choisi pour les enjeux forts dont il est porteur, en termes d'analyse et de pistes de travail, pour les acteurs en
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charge des politiques publiques, qu'il s'agisse des politiques du logement et de l'habitat ou de politiques à visée plus directement sociale. Que ce soient le droit au logement opposable, la prévention des expulsions ou même l'ac-cession à la propriété, il s'agissait d'observer les outils et les méthodes expérimentés sur le terrain ainsi que les enseignements qu'il est possible de tirer des actions menées en Seine-Saint-Denis ou dans des départe-ments limitrophes.
Yankel Fijalkow
Des campements de sans-abri aux bâtiments vétustes, des cités de logement social aux lotissements pavillonnaires, la question du logement modèle profondément les villes. Quelles sont les dimensions du besoin en logement ? Comment le logement est-il produit et distribué dans les différentes sociétés ? Comment est-il devenu une " marchandise " particulière, influant sur l'intégration sociale ? Comment est-il parvenu au statut de " problème public " mobilisant l'Etat et un appareil de normes architecturales et techniques ? Quel est le rôle des associations, des collectivités
locales et des ménages ? Quelle est la fonction du logement social ? Que signifie l'incitation à l'accession à la propriété ? Comment les stratégies résidentielles des ménages, des acteurs économiques et des politiques nationales ou locales déterminent les transformations des quartiers urbains ? Que signifie " habiter " un logement et un espace urbain particulier ? En mobilisant les nombreuses recherches de sciences sociales menées sur ces questions, l'auteur offre une synthèse de ses enseignements pour différents publics. sous la direction de Jean-Yves Authier, Catherine Bonvalet et Jean-Pierre Lévy
Sociologie du logement La découverte, Repères Odile Jacquemin Catherine Berro Territoires
littéraires des îles à la ville Hyères-lesPalmiers , écrits d'une ville Mémoires à lire territoires à l’écoute, 1999
sous la direction de Olivier Coutard, Jean-Pierre Lévy
Écologies urbaines Economica, 2010
Fanny Bugeja-Bloch
Logement, la spirale des inégalités PUF, 2013, 288p
Yankel Fijalkow
Sociologie des villes La découverte, Repères
En mobilisant les résultats de nombreuses recherches sociologiques et en abordant l'évolution historique de leurs problématiques, cette synthèse de référence propose un guide pédagogique original des sources et méthodes de l'étude urbaine. Cinquième édition revue et mise à jour.
Panne de l’ascenseur social, fragilisation des pauvres, générations sacrifiées, dérive des classes moyennes : autant de ruptures qui se cristallisent dans la question du logement. Avec l’envolée des prix immobiliers et des loyers, et l’incapacité des politiques publiques à fournir des réponses efficaces à ces problèmes, le logement devient pour beaucoup une charge financière telle qu’elle contraint les modes de vie et transforme la vie sociale. Le logement entretient la ségrégation à l’œuvre. Dans la spirale des inégalités de logement, certains suffoquent, les nouveaux précaires – bas-revenus, statuts instables et une grande majorité de la jeunesse d’autres respirent, les détenteurs de patrimoine – les premiers nés du babyboom, ainsi que toutes les familles, et leurs héritiers, qui ont investi au moment
Comment mettre en scène collectivement une vision globale et partagée de l’aménagement d’un territoire ? Cette nouvelle « lecture » use de l’histoire pour associer dimensions matérielles et immatérielles et montrer comment cohabitent points de vue multiples et inverses. Elle interpelle la catégorie même de la vision et du voir. L’histoire du paysage avait pour usage de situer à La Renaissance l’invention du paysage, par le regard porté sur lui, avec la naissance de la perspective. Cette construction d’un paysage qui n’est plus issu d’une ligne de mire mais qui résulte de multiples points de vue croisés, est une proposition pour faire de ce rapport au monde fractal une (r)évolution aussi importante que la
opportun. Première analyse des systèmes de stratification sociale et générationnelle sous le prisme du logement, ce livre se fonde sur une comparaison entre la France et le Royaume-Uni et offre des clés pour comprendre un des processus essentiels de la constitution des inégalités sociales contemporaines. Sans prétendre à une visée politique, cet ouvrage propose néanmoins certains outils et certaines réflexions pour répondre aux besoins de loger le plus grand nombre dans des conditions décentes et à des prix abordables.
Élire domicile ; la construction sociale des choix résidentiels La construction sociale des choix résidentiels Presses universitaires de Lyon, 2010 Où décide-t-on d'habiter ? Comment s'opère le choix du logement du quartier, du statut d'occupation ? A ces questions de base répondent ici des chercheurs de différentes disciplines (sociologie, géographie, économie, démographie...), travaillant dans des contextes nationaux divers. Les réponses apportées, tout en soulignant le poids fort des contraintes (économiques, sociales, contextuelles...), montrent l'existence d'options mouvantes incertaines, justifiant une analyse approfondie.
Rudy Ricciotti
HQE, la hqe brille comme ses initiales sur la chevalière au doigt LeGgac Presse, 2013 Un texte rebelle face au diktat inacceptable théorisé par les technocrates à l'heure de l'environnement prétexte. Un cri de colère et de révolte. Un pamphlet brûlant et dérangeant. Une remise à plat, sans faux plis, de l'expertise environnementale et de ses génuflexions serviles. Grand Prix National d'architecture 2006, Rudy Ricciotti part en guerre contre le pervers et périlleux syndrome HQE.
naissance de la perspective. Sa portée est immense. Accueillir le point de vue de l’autre sur le même plan que le sien devrait aider à voir autrement et permettre de construire des visions collectives. Cette vision est porteuse d’autres valeurs. Elle invite à en finir avec l’hégémonie de l’œil du spectateur, positionné en haut de la pyramide du champ de vision porté sur le monde. Pratiquer l’inversion du regard invite à une refondation du monde. Elle se veut une contribution utile à l’apprentissage de la coproduction. Odile Jacquemin
Deux siècles d’histoire d'un paysage entre terre et mer Mémoire à lire, territoire à l’écoute, 2013, 400p
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Déroulement de la journée
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Résoudre la crise du logement: 1 an après le coupe d'envoi
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Présentation des intervenants
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Le Pacte du Logement
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Refonder le système national du logement, par Jean-Pierre Lévy
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Territorialiser la lutte contre le mal-logement, par Christophe Robert Logement, habitat et service public, quelles perspectives? Présentation des intervenants, La conférence de consensus à Lille Politique sociale ou service public, quel cadre juridique?
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Les outils de régulation du marché locatif privé, par Jean-Philippe Brouant
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Habitat et service public pour la CGL
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De l'urbanisme à l'habitant, fiscalité et foncier
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Fiscalité et prix du logement, par Vincent Renard
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Economie et immobilier, par Vincent Renard
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Débat des Laboratoires d'idées
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Présentation des intervenants
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L'observatoire de l'action publique, Fondation Jean-Jaurès
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Politique du logement: et les investisseurs institutionnels? Terra Nova
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Notions de confort, par Patrick Amico
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Oser l'habitat participatif
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Présentation des intervenants
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De l'expérimentation à l'institutionnalisation, par Camille Devaux
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L'habitat participatif dans les politiques de l'habitat en région Paca
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Mieux Coopérer pour un autre habité
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Habitat et économie sociale et solidaire
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La chambre régionale d'ESS Paca et l'habitat
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De l'expérimentation à la démonstration, par Michel Gontard
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Ville, habitat et écologie: des solutions à portée de main
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Présentation des intervenants
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ALUR, pour l'accès au logement et à l'urbanisme rénové, par Guy Lemée
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Crise et mal-logement: la "vulnérabilité résidentielle" par Yankel Fijalkow
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L'avenir des centre-ville
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HLM et ville durable
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Repères bibliographiques
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un événement organisé par
en partenariat avec
et avec la participation de
www.hqbconseil.com.
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un événement organisé par
RENCONTRES NATIONALES DU LOGEMENT ET DE L’HABITAT
en partenariat avec
et avec la participation de
www.hqbconseil.com.