grand théâtre magazine n°01 - Le minimalisme

Page 35

20 Na 18 : ex tio Min n du pos al ima G as sud itio all lism n i Ta ati -es su ery  : Sp q r Si t t s , u Ai n ac u a le e W o M s, d vec mi gap e. L i ei n we iya ont 150 im ore ght i, L jim Ha œ alis . P . O ee a, A eg uv me rem bje Uf ni ue res en iè ct., re an sh Y d . Ka ang ’ar Asie po , R tis or ei tes , Na a ito uss i ,

DO SSIER MIN IMALISME

afin de dilater les intervalles selon des ondes sinusoïdales, technique intensifiée avec la mélodie râga, à l’occasion de sa rencontre avec le chanteur Pandit Prân Nath en 1967. La même année, Philip Glass est sous l’influence indienne du sitariste Ravi Shankar. La progression de figures répétitives (1,2 / 1,2,3 / 1,2,3,4,…) consiste à s’appuyer sur l’intervalle afin de prolonger par variation la répétition des notes. La partition de Einstein on the Beach en donnera la quintessence. En 1964, Reich collabore à la première de In C de Riley, considérée comme une œuvre fondatrice du minimalisme répétitif. Chacun Dance de Lucinda Childs, Philip Glass et Sol Lewitt. DR d’eux développe des techniques, notamment à partir de bandes magnétiques. Avec le phasing (déphasage), Steve Reich pratique le décalage de deux motifs répétitifs avant de revenir à l’unisson. Là encore, c’est par un intervalle de temps que se révèle la variation au cœur d’un invariant. Ce qui se passe, c’est le déplacement de l’écoute, l’attention se portant vers ce qui arrive aux sons, imperceptiblement. Ces compositeurs n’auront de cesse de confronter l’héritage du dodécaphonisme à la musique extra-occidentale de l’Inde à l’Afrique, ou encore à celle d’un troubadour SDF des rues de Manhattan dont l’apprentissage musical débuta dans une réserve indienne Arapahu du Wyoming, Moondog, déclaré fondateur du minimalisme par Glass et Reich. Mais il n’y a pas que des structures, il y a aussi des règles appelées « task », tâches omniprésentes dès les premières expériences de la danse postmoderne : travailler sur des formes élémentaires, le plus souvent quotidiennes, et une observation assidue du mouvement tel qu’il est. Ces tâches anticipent l’art conceptuel : l’idée devient une machine de l’art… à l’infini, voire irrationnelle. Faire avec ce qu’on a, un corps et toute chose : en observant le comportement des animaux dans des zoos pour Simone Forti, la façon de marcher d’un quidam pour Yvonne Rainer, ou comment provoquer la danse d’un « mouvement ordinaire ». La danse a à faire avec la physicalité d’un corps dans son environnement, tout comme dans les arts plastiques. Pareil en musique : la partition ne détermine plus l’œuvre et son exécution, les règles sont des séries d’indications ou d’orientations non circonscrites. La Composition 1960 n°10 de La Monte Young a pour règle : « tracez une ligne droite et suivez-la » : ligne musicale, sonore, poétique, plastique ou chorégraphique laissée à son effectuation et en aucun cas anticipée. Les règles comme les structures sont des puissances. Aussi rigoureux, acétique, impersonnel que soit le courant minimaliste, il aura paradoxalement œuvré à la reconquête concrète du corps. L’expérience sensible du temps et de l’espace sont sollicitées de façon radicalement différente en requérant toute l’attention sur du minimal, un intervalle entre structure et vide. Rien à voir avec la devise de Ludwig Mies van der Rohe, Less is more, il ne s’agit pas de réduire les procédures et les matériaux pour obtenir des effets maxima. Il s’agit de considérer un principe d’égalité entre toutes les syntaxes, ou comment des combinaisons élémentaires de n’importe quelle expérience artistique interdit toute autorité disciplinaire. Entre mathématique et quotidien, contrepoint et marche, structure et corps, l’expérience devient une correspondance et l’équivalent d’une autre, à la condition d’éliminer le superflu que la répétition rend possible. La dernière partition de John Cage, dont l’œuvre est de plus en plus considérée comme une source incontournable du minimalisme, incarne idéalement le désir d’infini par combinaison du minimum. Sur l’orgue de l’église Saint-Burchardi de Halberstadt la partition de huit pages de Organ²/ASLSP (As SLow aS Possible) est jouée depuis 2001 au rythme d’une note par an et ainsi pendant 639 ans. La vie, là et imperceptible, en équilibre dans le silence entre deux notes. Dans l’intervalle, l’art à l’infini, et au-delà de 2640, année où la pièce cessera d’être jouée.

33


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.