Eclectiques - Freelance France Japon #2 > Au delà des clichés

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On a tout de suite fait appel à une ambulance, et le petit traversier local (mot québécois : en France, on parle de ferry) fit un détour pour venir me chercher sans frais. Attaché à une civière, j’ai été amené à un hôpital sur une île plus grande à proximité. C’était un week-end prolongé où de nombreux festivals étaient organisés, d’où de nombreux accidents. L’infirmier en salle d’urgence avait les mains pleines, et aucune fissure d’os n’était visible en rayons X. Je suis donc rentré à Tokyo béquilles sous le bras, fauteuil roulant sous les fesses. Là, on m’a diagnostiqué (grâce à d’autres radiographies, des IRM et, pendant qu’on y était, des tomodensitogrammes du cerveau) avec une fracture du bassin et une déchirure majeure d’un muscle de la jambe. J’ai été hospitalisé sur place. Comme un fou qui s’interne lui-même à l’asile, ou l’apprenti d’un Sesshin de méditation Zen, je n’ai pas quitté cet hôtel pendant 3 semaines. Au sous-sol se trouve un Health Club gratuit, avec de jolies masseuses/formatrices à perte de vue. Le nom de ce club exclusif est la Rehabilitation Room (salle de rééducation). Deux fois par jour j’y reçois des massages avant de subir une torture sadique. Heureusement, les assurances ont tout payé, sinon j’aurais peut-être réfléchi à deux fois avant de commencer ce rituel. La rééducation

a ses avantages et ses inconvénients. Du côté positif, j’ai utilisé des muscles que je n’avais jamais utilisés auparavant. Du côté négatif, j’ai utilisé des muscles que je n’avais jamais utilisés auparavant. Évidemment, on ne veut pas qu’ils s’atrophient. Dans le monde de bodybuilding (musculation), on dit : « No pain ; no gain » (« il faut souffrir pour être beau »). Moins on en dit, mieux ça vaut. J’avais des raisons de persévérer. Les quelques fois où je me suis cogné l’orteil, mes testicules sonnaient comme une cloche de temple. J’ai utilisé une canne pendant une semaine après être sorti de l’hôpital, pour susciter la pitié… autrement dit pour obtenir un siège dans le train. Je n’en avais vraiment pas besoin pour me déplacer. Elle était également pratique pour accrocher les gros colis sur la poignée. Je n’étais pas censé mettre de poids sur la jambe jusqu’à ce que l’os cicatrise. Maintenant, je vais beaucoup mieux. Je peux même courir sans que mes neurones se surexcitent. Ce clip vidéo est le résultat de cette aventure. La suite du tournage après ma chute a été effectuée par des amateurs, mais je me suis occupé du montage. Le résultat est une vitrine sur un festival Japonais local sans les aspects commerciaux.

Ushima, Le fossé © Michael Goldberg 78 - F r e e l a n c e F r a n c e J a p o n -


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