Fill-in Magazine #4

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Magazine Photo N째4 - Janvier 2012

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édito Voici finalement le quatrième numéro de Fill-in Magazine ! Quelques mois de retard et de grandes interrogations plus loin, le revoilà donc, fidèle au poste, et plus déterminé que jamais. Vous avez été très nombreux à nous envoyer vos photos pour participer à ce numéro, ce qui témoigne d’une envie partagée de continuer l’aventure. L’équipe Fill-in vous présente donc ses excuses pour l’attente et en profite pour vous souhaiter une excellente année 2012 pleine de photographie ! Dans ce numéro, Tania Koller nous emmène pour une balade au japon à travers un reportage pas tout à fait comme les autres. Elle y aborde sa découverte du pays et de ses liens avec le baroque. Nous partons ensuite pour deux exposez-vous dans l’univers de la «Photo Mobile», ou comment les mobiles et autres appareils nomades remplacent parfois l’appareil photo pour capturer les scènes de la vie quotidienne. Bonne lecture, L’équipe Fill-in

sommaire P.03 : Reportage Fill-in - Japon & baroque P.26 : Exposez-vous : Amo Passicos P.36: Exposez-vous : Cécile Peyre P.44 : Les photos des lecteurs P.54 : Coups de coeur

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REPORTAGE

LE JAPON ET LE BAROQUE

REPORTAGE

GREAT LAKES 3


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Le Japon est baroque déjà par sa forme en croissant, son caractère insulaire et l’inconfortabilité du territoire qui sont les indices fards des terrains de prédilection du baroque. Il faut qu’il y ait risque pour qu’il y ait vie, ou survie hyperbolique. Il est un surplus de signes. Tout est signe! J’avais relu L’empire des signes avant de partir, mais les intuitions du corps dans l’espace sont irremplaçables.

our ce numéro, nous avons choisi de vous faire partager un reportage pas comme les autres. Il s’agit d’une balade intime autour des notions du Japon et du baroque. Ce que les historiens de l’art appellent «  baroque  » se caractérise par des thèmes comme l’illusion, la métamorphose, les courbes, le foisonnement du décor et l’ouverture sur l’infini.

Les rues sont propres, trop propres, kitsch. Par moments, on pourrait presque se croire dans des rues allemandes ou suisses, ce genre de paysage qui provoque chez moi,normalement, une sorte de malaise. Mais au Japon, il suffit de lever les yeux : la lecture se fait de bas en haut. Et dès qu’on lève les yeux, des habitations hétéroclites, des petites allées de minuscules immeubles (en largeur, mais très haut) chargées de signes, reliées par des guirlandes de fils électriques. Quel chaos dans l’ordre, c’est magnifique! Des juxtapositions de systèmes différents, d’éléments hétérogènes où tous coexistent paisiblement et où chacun participe à l’enrichissement de l’ensemble.

Le Japon m’a fascinée, car j’y ai retrouvé les indices propres au baroque. L’art baroque reste intimement lié au désir, alors bonne promenade.

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Le Japon et le Baroque _ Tokyo _ Tania Koller

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Photo 1 & 2 : Dans les rues de Détroit, Michigan (USA) Jeremy Barré

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Le Japon et le Baroque _ Kyoto _ Tania Koller

Tout est comme ça là-bas, double. On est tout le temps happé par cet aller-retour entre deux choses en suspension, entre l’image et la signification, entre le visible et l’invisible, entre le mou et le solide (pour la nourriture). D’ailleurs, pour revenir sur un indice du baroque, la nourriture Japonaise est inventive autant par son aspect que par son expérimentation gustative.On est bel et bien sur un territoire baroque, comme le décrit Dominique Fernandez dans le croissant

baroque.

Revenons à une autre question qui m’a intéressée: leur rapport à la nature et aux paysages. Les jardins. La notion de nature est forte pour comprendre le Japon. Par chance, avant de partir, je suis tombée sur une petite trouvaille:

Introduction à la culture japonaise d’Hisayasu Nakagawa. « Qu’est-ce qu’on appelle la nature ? - C’est le nom de ce principe d’équilibre, de ce mouvement harmonieux. Qu’estce qu’on appelle le principe d’équilibre ? - On peut répondre que c’est le mouvement spontané d’une énergie active qui produit l’avancement ou la régression, parfois à petits pas, parfois à grands pas  ». On voit ici une application de la nature au sein de la lecture et de l a formation de leur propre histoire. Il n’y a jamais de rupture comme chez nous, de table rase du passé. On est en présence d’un tissu sans fin qui formerait des plis successifs et différents, au fur et à mesure du terrain rencontré.  Le principe universel reste le mouvement spontané des choses. Il n’y a ni commencement ni fin. C’est la force avec laquelle des éléments se forment

« On est tout le temps happé par cet aller-retour entre deux choses en suspension, entre l’image et la signification, entre le visible et l’invisible, entre le mou et le solide... »

J’ai rarement vu un peuple avec un tel raffinement, avec un tel, comment pourrait-on dire? regard. Ils ont un sens de l’esthétique affûtée. Nous sommes happés, immergés dans cet espace qui semble être naturel pour eux. Ce n’est pas une question d’esthétique ou de beau. Finalement, ça ne relève pas d’un style, on peut aimer ou non les styles japonais. L’esthétique japonaise, c’est l’équilibre. Que ce soit dans leurs signes ou par tout ce qu’ils aménagent, tout est équilibré dans l’espace. C’est prodigieux.

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Le Japon et le Baroque _Kyoto_Tania Koller

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avec spontanéité. La vérité réside dans ce surgissement spontané et naturel. Il semblerait que pour comprendre le Japon, il faille rentrer dans ces notions qui nous semblent lointaines et incompréhensibles, voire empreintes d’un kitsch zen vu de l’occident. Sur place, on se rend compte qu’il ne s’agit pas de maniérisme, mais bel et bien encore une fois de baroque. Ils croient naturellement en une puissance interne liée à la nature des éléments. Ils sont shintoïstes et bouddhistes, il n’y a pas de doctrine, le sentiment religieux s’exprime par l’accomplissement des rituels. Après l’envahissement du cerf luxembourgeois dans mon environnement proche au cours de l’année, en passant par les cerfs côtoyés à Belval,

je me suis retrouvée dans le parc de Nara. Au cœur de la ville, de nombreux cerfs Sika erraient en liberté. Je me suis un peu sentie suivie de l’Est au Grand Est. Une autre découverte qui semble confirmer la force de la nature et le caractère sacré, qui pourrait se rapprocher de l’animisme africain, croyance que tout est dans tout et que chaque chose vivante est esprit : le livre de Murakami, Kafka sur le rivage. Je n’avais jamais lu un livre comme celui-là. C’est justement proche de ce que l’on pourrait, nous, considérer comme de la science-fiction ou du surréalisme. Mais qui pour eux n’est certainement pas cela, mais plus du sacré à l’état brut, sauvage.

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Je ne sais pas trop comment l’expliquer et surtout si je le vends bien. Mais cela m’a aidé à percevoir le Japon dans ces porosités incommunicables. Un pays qui entretient toujours l’équivoque. Ce que je trouve intéressant, c’est le lien avec Kafka. On pourrait faire un parallèle entre la métamorphose et le livre de Murakami qui aborde les thèmes du double, de la métamorphose et de la projection. Rien que le titre évoque ou invoque un univers. Kafka sur le rivage, au sud de la frontière, à l’ouest du soleil, on reste suspendu... Autre chose étrange, leurs temples suspendus tenant sur pilotis, comme des nacelles ou vaisseaux en apesanteur. Des cubes agencés qui s’enroulent et se déplient, avec la

même fluidité que le morceau de tissu en amont, s’adaptant au milieu, se métamorphosant. Espace gigogne qui se plie et se déplie sur le même modèle que leurs costumes traditionnels prenant la forme des corps suivant un rituel orchestré et transmis de génération en génération. Le corps, figure centrale, semble être libre de ses mouvements, de ses actions, mais ce n’est qu’une feinte. Lorsque l’on fait glisser un pan, comme si on tournait une

« On est en présence d’un tissu sans fin qui formerait des plis successifs et différents au fur à mesure du terrain rencontré. »

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« Lorsque l’on fait glisser un pan , comme si on tournait une page, et qu’on accède à un autre espace - un balcon  qui fait tout le tour du bâtiment, soulignant sa forme carrée, qui n’est rien d’autre en réalité, qu’un cercle, forme parfaite - on tourne autour, on perd la tête.  » Retrouvez ce reportage, sur fill-in.fr

Le Japon et le Baroque _ Tokyo_ Tania Koller

page, et qu’on accède à un autre espace  -  un balcon qui fait tout le tour du bâtiment, soulignant sa forme carrée, qui n’est rien d’autre en réalité, qu’un cercle, forme parfaite - on tourne autour, on perd la tête - ( clin d’oeil à la ronde et à l’étourdissement qui sont des motifs chers au baroque ). On perd la tête : pourquoi  ? Pour se déposséder de notre corps, pour accéder à l’essence qui est l’esprit. On s’assoit par terre, et de là, un tout petit peu surélevé, on admire le jardin zen.

homme prend son rôle très au sérieux. Il participe à l’illusion, il en est l’orchestrateur caché. Où sont passées les traces de sa présence, des pas, peut-être ? Pas de couture, il n’y aurait plus de spectacle. Il s’agit d’une science illusionniste. Sur cette étendue de sable, des rochers ( de grosses pierres choisies ) minutieusement agencés. L’enjeu le plus profond est de tendre vers un équilibre. Ce qui rend la tâche d’autant plus difficile est qu’il n’y a pas qu’un seul point de vue. Le déplacement du corps autour de ce carré clôturé suppose une multiplication des points de vue possibles (dans ce carré finit un équilibre infini). C’est le terrain de jeu du pluriel, dans ses interprétations multiples. Et c’est d’ailleurs de ça qu’il s’agit : c’est un dispositif à faire faire des expériences personnelles. Une

Étendue de sable soigneusement balayée. La vision même de ce sable ratissé en ligne d’une régularité impressionnante vaut une digression baroquisante. On s’imagine l’homme, qui, à l’aube, ratisse ce sable, dessine des lignes ondoyantes chaque matin avec application. Cet

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«De temps à autre, de vieilles pancartes publicitaires à peine lisibles et rongées par le temps me rappellent que cette zone était bien vivante…»

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« C’est le terrain de jeu du pluriel, dans ses interprétations multiples. Et c’est d’ailleurs de ça qu’il s’agit : d’un dispositif à faire faire des expériences personnelles... C’est une balade baroque ( ponctuée de points de repères comme le sont ces îlots ). La représentation indique le chemin à prendre. N’est-elle pas un amoncellement d’îles, un archipel en miniature? »

invitation à la rêverie ou plutôt à la méditation intérieure. Loin de la récupération en miniature que l’on peut voir dans nos boutiques françaises avec lesquelles est vendu également l’outillage, le balai en miniature. C’est en réalité plus complexe et savant que ce que l’on croit à première vue. D’ailleurs, la miniature est peut-être un élément clef. C’est curieux que le corps soit défendu de circuler dans le

Ce qui est intéressant, c’est ce rapport au temps qui transforme la forme et qui crée l’illusion dont j’ai été victime. C’est la nature même qui semble générer des formes ou des signes, ici différents d’ailleurs, et qui provoque ce caractère sublime et unique du bonsaï. Une fois encore, on se garde bien de montrer les coutures (auxquelles j’ai eu accès pour comprendre).

paysage. La projection mentale dépend de cette frustration. Peut-on dire que l’expérience même du paysage est plus envisageable et plus directement ressentie par l’esprit ? Servant de champs d’évasion, de puits à l’imaginaire. L’imaginaire est ce qui fait que l’homme peut fuir la réalité et par là même voyager. C’est une balade baroque ( ponctuée de points de repères comme le sont ces îlots). La représentation indique le chemin à prendre. N’est-elle pas un amoncellement d’îles, comme un archipel en miniature ? Ce carré imaginaire se surnomme Terra incognita. Oeuvrer pour l’incertain, travailler pour l’inconnu, semble signifier ceci. Allons plus loin... encore plus loin.  Qu’est ce que c’est sinon une projection mentale, l’expérience d’être nousmêmes les auteurs de notre paysage imaginaire? Utopie ou réalité ?

Ces arbres, - qu’on a du mal à nommer « arbre » - ces bonsaïs sont torturés, contraints, écartelés. Ne sontils pas les attributs des figures représentantes de l’âme baroque ? Ces arbres semblent convulsés de douleurs. Je les entendais crier telle une sculpture du Bernin. Par une beauté sublime qui fait appel à un au-delà plus symbolique, plus transcendantal, les bonsaïs sont pour moi les plus belles sculptures faites par la main de l’homme. Je synthétiserais ma vision du Japon en utilisant une expression que j’adore de Dominique Fernandez. Il emploie en parlant de Federico Fellini : Toujours excessif, Parfois horripilant, Jamais mou.

Une dernière découverte pour la fin. Après avoir recomposé un paysage en recourant à la métaphore, ils calquent leurs visions à la nature. Il suffit de regarder un bonsaï pour voir, un bel exemple de domination de la nature. Ce fut pour moi une découverte. Je ne savais absolument pas que ça désignait une espèce de marque déposée. L’arbre , (peu importe son essence, pin parasol ou hêtre) une fois sculpté par l’homme, au moyen de bout de bois et de corde, leur donne la direction à prendre. Des nœuds se forment (par le même procédé qu’une greffe) et une fois que le temps a servi de révélateur (par un travail qui se réalise de génération en génération), le bonsaï semble être d’une tout autre nature.

Tania Koller

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EXPOSEZ-VOUS !

AMO PASSICOS

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’est en recevant ses photos pour la rubrique des lecteurs du dernier magazine Fill-in que nous avons découvert le travail d’Amo Passicos. Au delà de la qualité indéniable de ses clichés, une particularité : elle travaille exclusivement avec son Mobile ! Il n’en fallait pas plus pour nous donner l’envie de consacrer les deux exposez-vous de ce numéro à cette pratique qui se répend comme une trainée de poudre dans le monde de la photo. Ces petits appareils que l’on balade beaucoup plus facilement que nos bon vieux boîtiers allient praticité, simplicité, créativité et deviennent à n’en pas douter les témoins privilégiés de notre quotidien. Que cette nouvelle pratique plaise ou non aux puristes, il semblerait qu’il faille à présent compter sur les mobiles dans la photographie !

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Pourriez-vous vous présenter en quelques mots ? Je vis en France, dans un village du sud, je suis maman et manager de groupes de filles plus ou moins énervées. Depuis quand pratiquez-vous la photographie ? Intensivement depuis un an et demi. De manière totalement épisodique auparavant. Si vous deviez citer UN photographe qui vous inspire particulièrement, qui serait-il ? Je ne suis pas inspirée par le travail d’autres pour la simple raison que je ne suis pas fan de photographie, ce qui peut paraitre paradoxal. Je ne passe pas des heures dans les salles d’exposition, je n’ai pas de formation académique et pas de clé pour appréhender le travail des autres. Je tout de même vais en citer 3 (2+1, je triche à peine), qui n’ont rien à voir et qui me touchent pour des raisons différentes. Hilla et Bernd Becher pour leur travail documentaire sur les bâtiments industriels, dont les photos m’impressionnent, par leur précision systématique. Mais également pour le fait que c’est un travail de couple indissociable du début à la fin. Ils ne font qu’un dans leur art. Nobuyoshi Araki pour sa poésie, la tragédie évoquée dans ses images, la maladie, le deuil, les bombardements. Tout ce qui est sous-jacent dans ses photos, que ce soit sa propre histoire ou celle du Japon. Avec quel matériel travaillez-vous ? Avec un iphone 4, toutes mes images sont prises et traitées sur l’iphone. Parfois j’utilise un ipad, avec les même applications de base, pour un confort visuel et épargner mes yeux qui fatiguent vite. Faites-vous également de la photo classique «matériellement» parlant, ou le mobile fait-il partie intégrante de votre travail ? J’ai petit à petit laissé tomber mon Canon numérique, tout simplement pour une question de facilité. Porter le Canon, se balader avec est une contrainte, alors que l’iphone entre dans la poche et qu’il est discret. Je n’aime pas être vue quand je prends une photo, je n’ai jamais aimé ça, je veux me fondre dans la scène, voler des moments. J’ai également un Holga, posé sur une étagère, je le regarde plus que je ne m’en sers. Mais je sais qu’un jour je reviendrai à l’argentique et que j ‘installerai une chambre, il me faut juste encore un peu de temps pour me lancer et investir un espace. 29


Mon mobile ne me quitte plus, il est partout avec moi, il n ‘y a pas un jour sans que je prenne des photos avec. Cet appareil ne me sert d’ailleurs pas du tout à téléphoner, j ‘ai une sainte horreur des conversations téléphoniques.

Comment vous est venue cette envie d’utiliser cet objet à priori non conçu pour cette pratique ? Je n’en ai aucune idée, d’autant que je n ‘ai jamais pris de photos avec mes téléphones précédents. Mais à partir du moment où j’ai commencé, c’est devenu une véritable drogue. J’ai installé tout un tas d’applications, une boulimie, pour ne plus me servir que de 3 principales et transposer la boulimie sur le nombre de clichés que je prends.

Quel est votre rapport à l’appareil ? Sortez-vous avec pour faire de la photo ou témoigne t-il simplement des hasards du quotidien et de vos rencontres. Il ne me quitte plus, il est partout avec moi, il n ‘y a pas un jour sans que je prenne des photos avec. Cet appareil ne me sert d’ailleurs pas du tout à téléphoner, j ‘ai une sainte horreur des conversations téléphoniques. Comment définiriez-vous votre travail ? Pour le moment assez brouillon et impulsif, je tente de me dompter, de produire des séries cohérentes, mais je n‘arrive pas à m’y résoudre donc je m’éparpille. Si quelqu’un peut m’aider à le définir, c’est avec grand plaisir que je l ‘écouterais ! Contrairement à pas mal d’utilisateurs d’iphone je ne suis pas à la recherche du plus gros bidouillage possible, je ne suis pas graphiste, de temps en temps je manipule une image par jeu, mais je me rends vite compte que je suis loin du niveau de ceux qui s’en sont fait une spécialité. Recadrer, ajuster les contrastes, c’est là que s’arrête généralement mon travail de retouche.

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Si vous deviez choisir un seul de vos clichés ? «Darkened Sea» un des tous premiers, je ne connaissais rien aux réglages de l’application utilisée, il est donc en basse définition et par conséquent très peu exploitable. Mais j’ai une tendresse particulière pour lui du fait de ses imperfections et du sujet. Qu’aimez-vous dans la photographie ? Quels sont vos petits plaisirs ? L’excitation de regarder les clichés à la fin de la journée, les trier, jeter ceux qui ne raconteront jamais rien, tenter de faire parler les autres en les améliorant, les recadrant. Parfois il y a une bonne surprise que je vais avoir envie de partager.

Retrouvez Amo Passicos sur son site Internet : www.melle-amo.fr

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EXPOSEZ-VOUS !

CÉCILE PEYRE

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our ce second «exposez-vous» consacré à la photograhie mobile, nous avons souhaité vous faire découvrir l’univers de Cécile Peyre, Jeune parisienne de 31 ans qui ne quitte jamais son mobile ! Son travail témoigne de son quotidien, de ses rencontres et des surprises que peut nous réserver la vie. Une illustration parfaite de ce lien très particulier entre le ou la photographe et son mobile...

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Pourriez-vous vous présenter en quelques mots ? J’ai 31 ans, je travaille dans la production cinéma à Paris. Depuis quand pratiquez-vous la photographie ? A 16 ans, j’ai hérité d’un vieux Canon AE1 de mon oncle. Et j’ai découvert la photographie en bidouillant. Mais je n’ai jamais pratiqué sérieusement. Disons que j’expérimentais et que par ce biais j’avais très envie de partager mes émotions. Je me suis ensuite orientée vers le cinéma documentaire, une autre manière de raconter des histoires. C’est alors que j‘ai commencé à travailler avec un réalisateur qui ne se séparait jamais de sa petite caméra numérique et filmait la magie du quotidien. Au même moment, j’ai éprouvé moi aussi le besoin de consigner les instants précieux, comme un journal intime. Et c’est vers la photographie que je me suis tournée. Avez-vous une anecdote concernant vos débuts dans la photo ? Je me souviens avoir été saisie en faisant développer ma première pellicule. Se trouvaient encore dans l’appareil les dernières photos qu’avait prises mon oncle avant de mourir. Des photographies de voyage, de paysages lointains. J’ai eu l’impression un instant qu’il était encore près de moi et regardait par-dessus mon épaule. Si vous deviez citer UN photographe qui vous inspire particulièrement, qui serait-il ? Au risque de paraître un peu classique, je citerais Willy Ronis pour la poésie et l’humanité qui se dégagent de son travail. Et puis il y a quelque chose de l’ordre du documentaire dans sa démarche. Chaque photographie me raconte une histoire. Et même si il « aide » parfois le destin, il parvient à saisir la justesse de l’instant. Pour moi, un très grand Monsieur de la photographie. Avec quel matériel travaillez-vous ? Je travaille principalement avec l’application hispstamatic pour iphone. C’est le traitement de l’image qui m’a convaincu. Les différents filtres permettent un rendu très onirique.

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Faites-vous également de la photo «classique» ou le mobile fait-il partie intégrante de votre travail ? Je fais peu de photo « classique ». J’ai un réflex numérique que j’utilise très occasionnellement lors de mes voyages. Peut-être car je n’en maîtrise pas toutes les subtilités… Ce que j’aime travailler avec le mobile, c’est un rapport très spontané, instinctif à la prise de vue. L’appareil est discret, je l’ai toujours à portée de main. Il y a peu de réglages possibles, hormis le choix de la pellicule et de l’objectif, ce qui me permet de me concentrer sur les cadrages et de saisir les instants sur le vif. Comment voyez-vous la photo traditionnelle ? Imaginez-vous y venir plus tard ? Je vois la photographie traditionnelle comme une démarche légèrement différente peut-être plus structurée et pensée. Le mobile est dans l’instantanéité. Avec les différentes applications proposées, les photos sont traitées à la prise de vue. La réalité apparaît sublimée, immédiatement. C’est donc un formidable terrain de jeu car les résultats sont très rapidement satisfaisants. Et en même temps, cela m’a donné envie de me remettre à l’argentique. Pour passer dans une autre temporalité mais aussi pour développer le champ des possibles. Travailler sur la profondeur de champs, l’obturation, la vitesse et laisser moins de prises au hasard. J’aimerais aussi apprendre à retoucher moi même mes images. Quel est votre rapport à l’appareil ? Sortez-vous avec pour faire de la photo ou témoigne t-il simplement des hasards du quotidien et de vos rencontres ? C’est un rapport assez addictif car il m’accompagne partout ! Et ce sont les hasards du quotidien et de mes rencontres qui m’offrent des sujets de photographie.

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« C’est un rapport assez addictif car il m’accompagne partout ! Et ce sont les hasards du quotidien et de mes rencontres qui m’offrent des sujets de photographie. »

Et puis il me semble qu’il y a quelque chose d’universel, sur la maternité qui s’en dégage. La photographie de l’arcen-ciel a été prise, depuis la fenêtre de son appartement, quelques minutes après une pluie violente. Pour moi ces deux images se font écho. Qu’aimez-vous dans la photographie ? Quels sont vos petits plaisirs ?

Comment définiriez-vous votre travail ? Ce sont des instantanés tirés de mon quotidien, au gré de mes balades : portraits d’amis mais aussi d’inconnus au détour d’une rue, d’un concert, d’un marché. Détails d’un ciel, d’un paysage. Tout ce qui me procure des émotions. Je photographie pour « me souvenir » donc j’essaie d’être au plus près de la sensation, et de retranscrire une atmosphère vécue que ce soit par le cadrage, les effets de lumière, le jeu des couleurs.

J’aime beaucoup cette illusion de pouvoir arrêter le temps, retenir l’instant. J’aime aussi cette possibilité qu’offre la photographie de partager la mémoire d’une émotion. Il y a d’abord le petit plaisir qui vient avant même d’appuyer sur le déclencheur. Cet angle de vue, ce détail, cette expression de visage que l’on est seul à avoir entrevu et que l’on s’apprête à saisir. Puis la magie de la découverte. S’apercevoir que la photo est juste, au proche de ce que l’on a ressenti ou au contraire découvrir une toute autre réalité.

Si vous deviez choisir un seul de vos clichés, lequel serait-il ?

Autre chose que vous souhaitez aborder? Un coup de cœur, pour Sandrine Derselle, une photographe belge que j’ai découverte lors de mes vagabondages sur Internet. Pour découvrir son travail : http://bullesdevie4.hautetfort.com/

Je choisirai celui de la jeune femme à l’enfant. Il s‘agit d’une amie très proche que j’ai photographiée alors que je la découvrais maman pour la première fois. C’est une photographie qui m’apaise, pleine de douceur et de sérénité.

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LES PHOTOS DES LECTEURS

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StĂŠphane Anthonioz - le fils de l homme http://stephane.montaf.com/

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Monsalves Munoz Aura

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Cedric Lange www.cedriclange.com

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Monsalves Munoz Aura

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Benjamin Becker http://www.benjaminbecker.fr

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BenoĂŽt Chevrier http://www.paragraphic.fr

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COUPS DE COEUR

LES BEAUX LIVRES PROTEST, DE HENRI CARTIER-BRESSON, JOSEF KOUDELKA, RENÉ BURRI, MARC RIBOUD, COLLECTIF DE PHOTOGRAPHES Les récents événements dans le monde arabe nous rappellent le pouvoir de la protestation populaire. Voici un livre unique de 256 pages et de 200 photographies couvrant 65 ans de rébellion à travers le monde. Ce qu’Henri-Cartier Bresson appelait « le moment décisif de l’Histoire. »

Éditeur : La Martinière Parution : 29 Septembre 2011 Pages : 256

LA SOUFFRANCE ET LA JOIE DE LA LUMIÈRE ALEX WEBB Voici la première monographie consacrée à Alex Webb, membre de Magnum et pionnier de la photo couleur. Ce livre présente certaines de ses photos les plus emblématiques, prises aux quatre coins du monde. Reconnu comme l’un des pionniers de la photographie en couleur en Amérique depuis les années 70, Webb a toujours souligné l’importance de la lumière et de la couleur dans son travail.

Éditeur : Textuel Edition Parution : 17 SEPTEMBRE 2011 Pages : 204

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ASMARA DREAM, DE MARCO BARBON, CRISTINA ALI FARAH Ce livre est né du désir d’évoquer l’atmosphère caractéristique d’Asmara, la capitale de l’Érythrée. Réalisées entre 2006 et 2008 avec un appareil Polaroid SRL 690, les photos de Marco Barbon insistent sur l’idée d’une suspension du temps et de l’histoire, entre un passé colonial, qui a laissé des traces profondes sur la physionomie de la ville, et un présent qui semble immobilisé dans une attente sans fin.

Éditeur : Filigranes Editions Parution : Juin 2009 Pages : 96

CHRONIQUES BRÉSILIENNES JOSÉ MEDEIROS Né en 1921 à Térésina, dans le Nordeste du Brésil, José Medeiros fut, sans conteste, l’un des maîtres du photojournalisme brésilien au XXe » siècle. Son œuvre, riche de près de 20 000 clichés conservés à l’Instituto Moreira Salles de Rio de Janeiro, met en scène le « Rio Bossa Nova » des années 40-50, ses paysages urbains, ses plages, ses palaces, ses fêtes (...)

Éditeur : Hazan Edition Parution : Septembre 2011 Pages : 250

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VOUS Dans le numéro de Mai 2012 :

RENDEZ-VOUS SUR FILL-IN.FR POUR PROPOSER VOTRE REPORTAGE

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S!

Remerciements : Amo Passicos : www.melle-amo.fr Cécile Peyre

Les photographes sélectionnés Stéphane Anthonioz : http://stephane.montaf.com/ Benoît Chevrier : www.paragraphic.fr Cedric Lange : www.cedriclange.com Benjamin Becker : www.benjaminbecker.fr Monsalves Munoz Aura Un nouveau concours sera organisé pour le prochain numéro. Surveillez la rubrique magazine !

Rédaction Fill-in : Tania Koller Baptiste Galea Jeremy Barré

Retrouvez les articles et les reportages sur fill-in.fr L’équipe Fill-in recherche des passionnés de photo qui souhaitent rejoindre le projet. Si vous êtes intéressé(e), n’hésitez pas à nous contacter.

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