Magazine Photo N째2 - avril 2011
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édito
En début d’année, nous avons sorti le premier numéro du eMagazine fillin. Un nouveau format, beaucoup de belles surprises. Nous aurions aimé avoir plus de temps, passer outre les maladresses du premier numéro, mais c’est toujours ainsi ! Vous aviez été nombreux a nous envoyer vos photos, à nous encourager, et à nous lire. L’équipe fill-in vous en remercie. Pour ce second numéro, nous avions annoncé un reportage sur notre retour à tchernobyl, 25 ans après la catastrophe. Entre temps l’histoire s’est tristement répétée avec le drame qui a touché le Japon le 11 mars, c’est pourquoi nous avons décidé de revoir entièrement notre copie ; Nous ne pouvions pas revenir sur les événements d’avril 1986 sans faire le parallèle avec la situation actuelle. mieux connaîtres les causes et les conséquences de ce qui s’est passé en Ukraine est sans doute l’une des clés pour comprendre la catastrophe japonnaise et ses répercutions possibles sur les populations et l’environnement. Au programme, deux exposez-vous : Transition par vincent goutal et Olivia Leriche, un duo de photographes talentueux et très prometteurs, et Ulysse Lefebvre, qui nous présente un très beau reportage sur les Roms du Kosovo. Egalement, un article sur le collectif «Tendance Floue» qui fête déjà ses 20 ans, et la découverte d’un photographe canadien étonnant, Neil Mota. Bonne lecture ! L’équipe Fill-in
sommaire P.03 : Reportage : Bons baisers de Pripiat P.22 : Exposez-vous : V.Goutal & O.Leriche P.30 : Exposez-vous : Ulysse Lefebvre P.44 : 20 ans de Tendance Floue P.52 : Photographe Canadien : Neil Mota P.56 : Coups de coeur P.58 : Les photos des lecteurs
Grande roue, Pripiat (Ukraine) - Jeremy Barré
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REPORTAGE
BONS BAISERS DE PRIPIAT RETOUR À TCHERNOBYL
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E
En ce début d’année, et alors que ce drame semblait avoir été oublié de tous, l’actualité au Japon vient nous rappeler d’une bien triste façon notre impuissance face au risque nucléaire. Les causes sont différentes, les conséquences le sont moins, mais au regard de ce qui s’est passé il y a un quart de siècle en Ukraine, n’est-il pas permis de se demander si l’accident de Fukushima aurait pu être évité ou géré différemment ? L’impact de l’explosion de Tchernobyl sur la vie de millions de personnes dans toute l’Europe ainsi que sur leur environnement n’était-il pas
n Avril 2010, une partie de l’équipe Fill-in s’était rendue dans la zone d’exclusion de la centrale de Tchernobyl pour faire le point sur la situation, 25 ans après ce qui fût l’une des pires catastrophes industrielles du 20ème siècle. 4
milieu des années 50 fut un élément aggravant dans cette réaction en chaîne, conclue par une explosion chimique qui souleva la dalle de béton de 2000 tonnes couvrant l’ensemble, et laissa le bâtiment totalement éventré. Lors de cette explosion, une énorme quantité de particules hautement radioactives sont projetées à plus de 3000 mètres d’altitude. Le tristement célèbre nuage de Tchernobyl contaminera toute l’Europe à des degrés divers. Ce sont d’ailleurs les mesures effectuées par certains pays européens qui permirent de savoir qu’un incident majeur avait eu lieu, les autorités soviétiques se refusant à communiquer sur le sujet dans les premiers jours. Dans la nuit du 25 au 26 avril, suite à cette explosion, et alors qu’une lumière bleu éclatante s’élève au dessus du réacteur, les pompiers de la petite ville de Pripiat située à 3km de la centrale, sont appelés pour éteindre l’incendie qui ravage le complexe. Mal équipés, non préparés, et inconscient du danger auquel ils font face, tous mourront de grave irradiation quelques jours plus tard dans un hôpital de Moscou. Leur tragique destin est raconté dans le livre « la Supplication » de Svetlana Alexievitch. Dans les jours qui suivent la catastrophe, tous les moyens sont mis en œuvre pour stopper la réaction qui menace encore l’ensemble du continent : 5000 tonnes de sable, d’argile, de plomb, de bore, de borax et de dolomite, sont larguées dans la brèche par hélicoptère par un millier de pilotes qui recevront tous des doses insensées de radiations. Jours et nuits, des tunnels sont creusés par 400 mineurs sous le réacteur, dans des conditions extrêmes pour y installer un système de refroidissement. Malgré tous ces efforts, une explosion nucléaire reste envisageable, près d’un mois après la catastrophe initiale. Durant plusieurs mois, plus de 600 000 liquidateurs sont chargés de nettoyer la région de toute substance radioactive. Les chiffres varient beaucoup suivant les sources, mais d’après « Union Tchernobyl » 60 000 d’entre eux mourront, 165 000 recevront des doses telles qu’ils resteront handicapés pour le restant de leur vie.
Centrale en construction, Tchernobyl (Ukraine) - Jeremy Barré
suffisamment effroyable pour que nous remettions bien d’avantage en question la sécurité dans le nucléaire civil ? Comment expliquer l’amnésie générale qui a pu conduire à cette seconde catastrophe nucléaire majeure ?
Les populations ne seront pas épargnées par la catastrophe... A Pripiat, Les événements de la nuit n’empêcheront pas la tenue d’un « marathon de la paix » le jour même, autour de la centrale, auquel participeront 900 élèves de 10 à 17 ans. A cet instant, la ville de Pripiat est déjà entièrement
Le 26 avril 1986, le réacteur N°4 de la centrale de Tchernobyl, située à une centaine de kilomètres au nord de Kiev, le long de la rivière Pripiat, qui sépare l’Ukraine de la Biélorussie, explose suite à une incroyable série d’erreurs humaines. La conception même du réacteur, datant du 5
Terrain de Handball, Pripiat (Ukraine) - Jeremy BarrĂŠ
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Bâtiment administratif, Tchernobyl (Ukraine) - Jeremy Barré
contaminée, ce dont attestent les vidéos amateurs prises puis nous rendre à Pripiat, devenue ville fantôme après son ce jour là, marquées de nombreux flashs blancs par la évacuation complète au lendemain de l’accident. Pour ce radioactivité. Le 27 avril, les habitants seront enfin évacués faire, il nous a fallu demander les autorisations nécessaires de la ville, les premiers symptômes d’irradiations sévères auprès du gouvernement ukrainien, et accepter la faisant leur apparition. Ils seront relogés non loin de là, compagnie de Youri, notre chauffeur et guide sur place. dans une zone également contaminée. « Le 27 avril, les En tout, ce sont 250 000 personnes qui Youri est Ukrainien, la trentaine, et vit dans habitants seront devront quitter leurs habitations et être un petit village, non loin de Tchernobyl. relogés. Aucun chiffre précis ne permet de enfin évacués de la Son enfance, il l’a vécue dans l’ombre de déterminer le nombre de victimes directes ville, les premiers la catastrophe. Il a vu sa région changer, ou indirectes de l’accident. Le bilan officiel se vider, puis a choisi ce job : Quelques symptômes ne fait état que de quelques milliers, jours par an, il accompagne ainsi d’irradiations certaines associations comme Greenpeace journalistes, scientifiques, personnels sévères faisant les comptent par centaines de milliers. d’associations ou moins souvent, simple leur apparition. Ils curieux, au centre de la zone d’exclusion Aujourd’hui, une zone d’exclusion d’un seront relogés non pour, dit-il, que les gens parlent de ce qui rayon de 30km autour de la centrale s’est passé ici. Nous n’en apprendrons loin de là, dans une guère d’avantage sur lui, son anglais est toujours en vigueur. Toute la région zone également est encore contaminée et le restera restant rudimentaire et notre ukrainien contaminée. » des siècles encore. C’est donc ici que tout à fait limité. nous avons souhaité nous rendre, pour témoigner de la situation près de 25 Depuis Kiev, 2h30 de route environ ans après la catastrophe. Tout d’abord, découvrir les suffisent pour rejoindre les abords de la zone d’exclusion, abords de la centrale elle même et voir l’état du fameux à 110 kilomètres de là. Difficile de savoir comment était sarcophage sensé nous protéger des fuites radioactives, la région avant la catastrophe mais durant la première 8
Terrain de Handball , Pripiat (Ukraine) - Jeremy BarrĂŠ
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partie du trajet, nous traversons de nombreux petits villages. Rapidement, la forêt se fait très dense alors que les habitations sont de plus en plus éloignées. Plus loin, apparaissent les premiers villages fantômes sur le bas côté, à peine visibles tant la nature a repris ses droits. Nous distinguons quelques façades, quelques structures en bois, ce qui reste d’anciennes rues, mais ces vestiges apparaissent et disparaissent aussitôt, cachés par la forêt qui les entoure désormais. Enfin, nous arrivons au Checkpoint Militaire. Le véhicule est alors immobilisé pour un contrôle des autorisations. Nous sortons un instant pendant que Youri s’entretient avec les soldats en armes. Nous réalisons à cet instant, qu’une fois cette barrière passée nous rentrerons dans cette zone d’exclusion sur laquelle nous avons lu tant de choses avant notre arrivée. Un mélange étrange de crainte et d’excitation nous envahie alors que nous nous interrogeons sur cette menace invisible qui hante encore la région. Après quelques minutes, Youri reprend le volant et les militaires nous laissent continuer sur la route vers Tchernobyl, à une quinzaine de kilomètre de là. En chemin, nous constatons la présence de dizaines de panneaux plantés sur le bas côté indiquant les zones contaminées totalement interdites d’accès. Nous croisons de nombreuses habitations abandonnées, quelques fermes, et plus rarement des villages entiers, évacués après la catastrophe. L’atmosphère est terriblement lugubre malgré un soleil éclatant et l’arrivée du printemps. En ce début avril, les arbres sont encore en grande partie dépourvus de feuillage ; dehors tout semble figé. Pas un bruit, pas un animal, seul ce paysage à perte de vue. Après quelques minutes, nous arrivons dans la ville de Tchernobyl, à une vingtaine de kilomètres au sud de la centrale et relativement épargnées par les retombées radioactives lors de l’accident de 1986. C’est avec étonnement que nous constatons que l’avenue principale qui traverse le bourg est loin d’être déserte. Dehors, des militaires s’activent, discutent, nettoient les routes. Quelques scientifiques en blouses blanches traversent devant nous, se rendant d’un bâtiment à un autre. Quelques boutiques sont ouvertes, des petites supérettes
depuis la catastrophe et les maisons sont inoccupées. Difficile de savoir combien de personnes vivent ici, mais entre l’hôpital, les bureaux de l’état Ukrainien, le personnel militaire et scientifique, ils doivent être plusieurs centaines à se relayer tout au long de l’année. L’état veille à ce que le personnel ne reste pas plus de quelques semaines par an sur place, mais impossible de savoir si leur présence se fait sur la base du volontariat, moyennant une prime pour le risque encouru, ou si ce relai est une obligation.
improvisées pour la plupart où le personnel semble venir se ravitailler. Les quelques carrefours que nous passons nous permettent de constater que la vie, ici se limite à cette simple artère principale, longue de quelques dizaines de mètres. Les rues adjacentes, elles, sont restées vides 10
Terrain de Handball, Pripiat (Ukraine) - Jeremy BarrĂŠ
Retrouvez cet article, les photos du reportage complet ainsi que le livre photo sur fill-in.fr
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Rapidement, nous prenons la route de la centrale, plus au nord. L’occasion d’en apprendre un peu plus sur ce complexe gigantesque dont la construction débuta en 1971.
fois à temps, se produit le 11 octobre 1991 dans le réacteur n°2, ce qui décide les autorités à fermer progressivement l’ensemble du complexe. En effet, tous sont construits sur le même modèle RBMK 1000 datant des années cinquante et dont les défauts de conception et les problèmes de stabilité représentent un risque bien trop important. Le réacteur n°1 est alors arrêté en 1991 et il faudra attendre décembre 2000 pour que le n°3 soit stoppé. Entre temps, des milliers de personnes ont travaillé dans cet environnement contaminé, moyennant un salaire bien plus important que
Le 26 avril 1986, au moment de la catastrophe, 4 réacteurs sont opérationnels et deux autres sont en construction à proximité immédiate. Le programme d’extension sera interrompu mais les réacteurs déjà en fonctionnement reprendront du service fin 1986. Ce que l’on sait moins, c’est qu’un second accident de même nature, stoppé cette
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dans le reste du pays. En 2011, il reste onze réacteurs de ce type encore en activité en Russie...
une importante structure métallique. 25 ans après la catastrophe, l’amas de béton et de métal n’est plus du tout étanche : on estime à 100m² la surface totale des ouvertures et les nombreuses infiltrations d’eau aggravent la contamination de l’environnement. Plus grave encore, le sarcophage, initialement prévu pour dix ans et à bout de souffle, menaçait de s’effondrer avec une bonne partie de la centrale avant que ne soit très récemment mise en œuvre la stabilisation de le structure existante. Plus tard, un sarcophage bien plus grand sera amené par rails autour du bâtiment, scellant le tout pour les décennies à venir. Le constat est assez alarmant... Pourquoi, malgré les risques d’un effondrement, avoir tant attendu avant d’entreprendre les travaux ? Un début de réponse nous sera apporté par une scientifique présente sur place. Durant les années 90, les flots d’argent dépensés par l’Union Européenne et la communauté internationale pour les différents projets de reconstruction, auraient été absorbés par la corruption, alors omniprésente dans l’Ukraine post-soviétique. Ce n’est qu’au début des années 2000, voyant la situation s’aggraver, que les différents pays contributeurs auraient repris les choses en mains pour faire aboutir ce projet de sarcophage. La phase de stabilisation est, semble t-il, terminée depuis peu et l’ensemble des travaux devraient se poursuivre jusqu’à 2015 avec l’installation du second édifice construit plus loin sur le site par le consortium français Novarka.
A notre arrivée sur le site, nous découvrons le bâtiment colossal qui abrite ce qui reste du réacteur n°4. Le sarcophage de béton, installé en urgence durant les jours qui ont suivi la catastrophe lui confère un aspect de blockhaus géant au dessus duquel s’élève l’imposante cheminée du réacteur. Sur la façade principale, nous découvrons la présence d’un échafaudage englobant
« Ce que l’on sait moins, c’est qu’un second accident de même nature, stoppé cette fois à temps, se produit le 11 octobre 1991 dans le réacteur n°2, ce qui décide les autorités à fermer progressivement l’ensemble du complexe. »
Réacteur n°4, Tchernobyl (Ukraine) - Jeremy Barré
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Salle de classe, Pripiat (Ukraine) - Jeremy BarrĂŠ
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Après un dernier coup d’œil sur ce bâtiment terrifiant mais dont il est difficile de détourner le regard, nous reprenons notre route pour Pripiat, à trois kilomètres de là. La ville fut fondée en 1970 pour héberger les milliers de travailleurs de la centrale. Elle tient son nom de la rivière éponyme qui coule le long du complexe. A ces débuts, Pripiat est considérée comme une ville modèle dans l’Union Soviétique : un urbanisme efficace, des installations nombreuses et de qualité (cinéma, centres sportifs, hôtels...), des logements confortables, et de bonnes infrastructures. Le matin de l’accident, un peu plus de 49000 personnes vivent paisiblement ici. Dès l’arrivée des premières équipes spécialisées, les compteurs s’affolent et lorsque l’évacuation totale est décidée, 30 heures après la catastrophe, il est déjà bien trop tard pour la population.
Les autos tamponneuses sont restées là, figées sur le sol mousseux hautement radioactif. C’est à cet endroit précis de la ville, dans ce qui devait être le tout nouveau parc d’amusement, que les doses relevées sont aujourd’hui les plus hautes (jusqu’à 600 fois les doses normales). Au centre de la ville, l’avenue Lénine n’est plus qu’un chemin de bitume craquelé au milieu de la végétation. La ville de Pripiat est définitivement morte, contaminée pour les siècles à venir, il n’en restera rien lorsque les éléments radioactif auront disparus (il faudra 900 ans pour que les
Ville fantôme évacuée en quelques heures seulement, Pripiat est souvent comparée à Pompéi pour son destin tragique et le témoignage qu’elle laisse aux générations futures. Les autorités ayant annoncé un retour sous 3 jours et souhaitant évacuer le plus rapidement possible, les habitants ont tout laissé sur place : Jouets, livres, affaires, souvenirs, bien personnels divers. Dans les appartements, tout est resté figé comme si la vie et le temps s’y étaient brusquement arrêtés. Sur la place principale maintenant gagnée par la végétation, on imagine aisément la foule se presser près du grand hôtel ou devant le cinéma. A l’intérieur, le spectacle est terrifiant : le sol est jonché de verre et de détritus en tous genres. Tout ce qui pouvait être récupéré a été arraché, puis emporté et revendu dans le pays, sans se soucier de la contamination. Au fil des années, ils se sont tous servis : pilleurs, militaires, liquidateurs - si bien que les bâtiments publics semblent avoir été soufflés par une gigantesque explosion. Dans les salles de classe et la bibliothèque, les livres sont encore posés sur les tables. Comble de l’ironie, le matin de l’évacuation, ce sont des manuels ventant les mérites du nucléaire qui était présentés en salle de physique. Dans la maternelle, les poupées jonchent encore le sol, au milieu des masques à gaz laissés là par quelque liquidateur. En ce début de printemps, la fonte de la neige accumulée sur les toits inonde la plupart des bâtiments, dont les structures ne sont plus étanches, créant de nombreuses flaques radioactives dans les étages. Le temps fait son œuvre et certains immeubles sont aujourd’hui interdits d’accès par crainte d’effondrement. Dehors, la grande roue qui devait être mise en route quelque jours après la catastrophe domine toujours la ville, rouillée et décrépie. 16
« Ville fantôme évacuée en quelques heures seulement, Pripiat est souvent comparée à Pompéi pour son destin tragique et le témoignage qu’elle laisse aux générations futures. »
Piscine Olympique, Pripiat (Ukraine) - Jeremy Barré
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plus dangereux s’épuisent et au moins 48 000 ans avant un retour à la normale). Contrairement aux abords de la centrale où un important travail de décontamination a pu rendre les opérations actuelles possibles, Pripiat n’a jamais été nettoyée. Ici le temps s’est définitivement arrêté le matin du 27 avril 1986.
tragique de la cité. Malgré tout ce que l’œil voit, malgré cette vision apocalyptique, ce sont bien les radiations qui occupent le plus l’esprit. Comment faire abstraction de ce mal invisible et omniprésent ? Il ne s’agit pas uniquement de Pripiat mais bien de toute la région. Les habitants des alentours ont appris à vivre avec ce danger, ou s’y sont résignés par manque de moyens ; ils seraient aujourd’hui près de 10 millions à vivre sur des terres contaminées. Les répercutions concrètes sur la santé des populations ukrainiennes et Biélorusses sont impossibles à connaître mais à l’évidence, elles sont dramatiques. Aujourd’hui
Dans la ville, un quart de siècle après la catastrophe, chaque coup de vent, chaque contact avec l’environnement représente un risque pour la santé. Sur place, difficile de l’oublier tant le décor nous rappelle à chaque instant le destin
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Ecole de Pripiat, Pripiat (Ukraine) - Jeremy Barré
encore, bien des enfants naissent avec des malformations ou des cancers. Jamais les gouvernements successifs des pays concernés n’ont réellement admis le lien entre ces problèmes et la catastrophe initiale. Tout comme Pripiat, les milliers de victimes directes et indirectes de l’accident ont été oubliées volontairement, y compris par la communauté internationale. Pour des pays comme la France où plus de 70% de l’électricité produite est d’origine nucléaire, il était bien plus simple de fermer les yeux sur les conséquences réelles de la catastrophe et de se contenter de l’expliquer par l’obsolescence des technologies utilisées, le manque
« Il faudra 900 ans pour que les éléments les plus dangereux s’épuisent et au moins 48 000 ans avant un retour à la normale »
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d’entretien ou encore l’absence de sécurité des centrales soviétiques. On constate d’ailleurs aujourd’hui que le discours n’a que très peu changé. L’une des première réactions, tout à fait scandaleuse, suite au drame de Fukushima n’a t-elle pas été de vanter la sécurité et la technologie des centrales Françaises ?
de 1986. La différence fondamentale entre les deux accidents tient au fait qu’elle touche cette fois une centrale occidentale, basées sur des technologies occidentales elles aussi, et dont on nous vante la sécurité depuis des décennies. Potentiellement, tous nos réacteurs sont donc aussi dangereux que ceux de Tchernobyl ; voilà la nouvelle donne ! Dans ces conditions Il sera bien plus difficile de ne pas remettre en question nos pratiques et nos certitudes…
Le drame de Tchernobyl n’a pas été suffisamment partagé par le reste du monde. L’absence totale de communication de la part des autorités soviétiques dans les semaines qui ont suivi l’événement a bloqué toute sorte de prise de conscience générale. Finalement, nous autres occidentaux, avons vécu cette catastrophe les yeux rivés sur le trajet du nuage radioactif à travers le continent, sans réaliser le mal qui s’abattait sur l’Ukraine. Aucun état des lieux indépendant traitant des conséquences globales de la catastrophe sur les populations n’a fait consensus, avant tout à cause du manque de données précises et suivies. Le
Jeremy Barré - Fill-in.fr
traumatisme a finalement été très rapidement oublié pour le plus grand plaisir des lobbys de l’industrie nucléaire qui ont continué de prospérer en vendant des dizaines de réacteurs à travers le monde. Le drame que le Japon a connu au mois de mars est tout à fait révélateur de cette amnésie générale : des centrales nucléaires construites contre toute logique sur des failles sismiques ou dans des zones sujettes aux tsunamis. Dans ce pays pourtant traumatisé par les deux bombes américaines qui ont marqué la fin de la seconde guerre mondiale, il est difficile de concevoir que de telles erreurs aient pu être commises et qu’il y ait pu avoir un tel laxisme des autorités. L’absence de ressources naturelles en quantités suffisantes pour satisfaire ses besoins en énergies et la nécessité de limiter la dépendance aux importations d’énergies fossiles ont sans doute poussé le Japon à se tourner vers le tout nucléaire en dépit des risques encourus. Même dans un pays profondément démocratique comme le Japon, il est encore difficile de savoir si toute la lumière sera faite sur les événements récents et si toutes les mesures seront prises pour que plus jamais, une chose pareille ne se produise. Que vont devenir les terres contaminées ? Quelle aide sera apportée aux populations déplacées ? Quelle transparence peut-on attendre de la communication sur les conséquences réelles de l’accident sur l’environnement ? Difficile à dire à ce jour mais il y a fort à parier que la gestion de l’après catastrophe et les discours officiels ne seront pas si différents de ceux 20
Sources et documentation : Chernobyl’s Legacy: Health, Environmental and Socio-Economic Impacts Commissariat à l’Énergie Atomique : Tchernobyl, quelques repères Galia Ackerman : Tchernobyl, retour sur un désastre Svetlana Alexievitch : La Supplication Wikipédia : Catastrophe de Tchernobyl Wikipédia : Conséquences sanitaires de la catastrophe de Tchernobyl CNRS : Tchernobyl, des réponses à vos questions
Retrouvez toutes les photos du reportage sur le site itwasadream.fr
Salle de sciences, Pripiat (Ukraine) - Jeremy Barré
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EXPOSEZ-VOUS !
VINCENT GOUTAL & OLIVIA LERICHE TRANSITIONS
U
n duo de photographes talentueux, que nous sommes ravis de vous présenter. Ils font partie des lauréats de Photos d’ Hotels, Photos d’auteurs 2011 ainsi que de la short list des World Sony Photography Awards. A suivre...
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Pourriez-vous vous présenter en quelques mots ? V/ J’ai 40 ans, je vis et travaille à Paris. O/ J’ai 34 ans, j’habite Paris et ça fait 3 ans que nous travaillons ensemble avec Vincent. Comment êtes-vous arrivés à travailler en duo pour ce projet? V/ J’avais envie de me détacher du documentaire social. Après ma série Impressions cubaines je sentais que je glissais vers un mode d’expression plus subjectif. Avec Olivia, nous partageons les mêmes goûts artistiques. Olivia portait un regard très intéressant et pointu sur la société qu’il fallait à tout prix exploiter. Nous avons d’abord tâtonné et nous nous sommes aperçus petit à petit qu’un univers se dégageait de nos photos. C’est ainsi que la série Transitions est née.
«Nous avons d’abord tâtonné et nous nous sommes aperçus petit à petit qu’un univers se dégageait de nos photos. C’est ainsi que la série Transitions est née. Comment avez-vous découvert la photographie ? V/ Mon père pratiquait déjà la photographie. C’était un amateur, mais les images que je voyais me fascinaient car j’entrapercevais un regard qui me surprenait. J’ai suivi une formation à Harvard auprès de Chris Killip et c’est ainsi que pendant des années j’ai fait du documentaire social. O/ Je n’ai pas du tout le même parcours que celui de Vincent. Jusqu’à notre rencontre, je n’avais jamais fait de photographie. De formation littéraire, j’étais plutôt tournée vers l’écriture. Toutefois, je m’intéressais à des artistes comme Cindy Sherman, Sophie Calle, Gregory Crewdson, Edouard Levé. J’étais très sensible à toutes ces images qui semblaient raconter une histoire. Ma rencontre avec Vincent a été déterminante, nous partagions les mêmes goûts artistiques et nous avions les mêmes préoccupations philosophiques. A force d’échanger nos idées, nous nous sommes mis naturellement à travailler ensemble.
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Vincent Goutal & Olivia Leriche © Transition
« la photographie c’est aussi le plaisir de pouvoir fabriquer des espaces et des situations virtuelles et de soumettre au public notre vision du monde »
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Avec quel matériel travaillez-vous ? Qu’est-ce qui a motivé votre choix ? V/ Tout d’abord, nous travaillons au moyen format en argentique pour sa finesse incomparable. Nous sommes très attachés aux détails. Les ektas sont ensuite scannés. O/ C’est une série que nous réalisons essentiellement dans des espaces clos ce qui confère à chaque image une impression de confinement. Nous utilisons des flashs afin de donner un éclairage dramatique à chaque scène.
O/ La photographie est intéressante car elle fige le temps. Comme le cinéma, elle est le médium qui se rapproche le plus de la réalité. Bien sûr, notre démarche n’est pas loin du cinéma et notre travail témoigne de notre goût pour l’esthétique du 7ème art. Mais nous aimons utiliser l’image unique, fragile, qui constitue une rupture temporelle tout en préservant une dimension narrative. V/ Je suis d’accord avec Olivia. la photographie c’est aussi le plaisir de pouvoir fabriquer des espaces et des situations virtuelles et de soumettre au public notre vision du monde
Pouvez-vous nous dire quelles sont vos “références” en matière de photographie ? V/ Etant issu du documentaire social ma première référence est Chris Killip, c’est lui qui m’a formé. Je suis d’ailleurs très sensible à la photographie anglosaxonne, à Philipp-Lorca Di Corcia, Robert Bergman, Nick Waplington. O/ Pour ma part, j’aime beaucoup Grégory Crewdson, Erwin Olaf, Jeff Wall… Ce sont tous des photographes qui ont un univers fort, dont les images ont un contenu narratif. J’apprécie particulièrement quand une photographie n’est pas loin d’un tableau, quand l’éclairage est soigné, quand les couleurs sont savoureuses.
Si vous deviez citer un photographe qui vous inspire particulièrement, qui serait-il ? O/ Jeff Wall est incontournable pour ses réflexions sur la photographie dite construite. Il y a plein de photographes que nous apprécions mais ils ne sont pas du tout une source d’inspiration. Nous nous tournons plus volontiers vers le cinéma américain pour la qualité de ses éclairages et l’atmosphère qui s’en dégage (David Lynch, Martin Scorsese, Stanley Kubrick). Et puis, il y a la peinture de la Renaissance italienne pour la beauté de ses couleurs. Les œuvres d’Edward Hoper nous inspirent aussi beaucoup… Qu’aimez-vous dans la photographie ? Quels sont vos petits plaisirs ?
Pouvez-vous nous présenter votre travail sur Transitions ? V/ Transitions, c’est l’immobilisme, le silence les lacunes, l’évasion au sein d’un monde en mouvement, bruyant et codifié. Avec Olivia, nous avons essayé de représenter des archétypes de la société capitaliste figés dans un moment où ils s’absenteraient du rôle dans lequel on les imaginerait jouer. On les a volontairement déconnectés de leur entourage qui n’apparaît plus qu’à l’état de trace ou de figuration. Nos images s’inspirent de l’iconographie
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publicitaire avec ses intérieurs essentiellement urbains propres, neufs aux couleurs chatoyantes. Transitions, ce sont des images de publicités dénaturées. Le but étant de bousculer le regard de celui qui les contemple. Comment et pourquoi avoir choisi ce travail ? O/ Nous partons du principe que le rôle de l’artiste est de parler de son temps, de proposer une lecture originale sur son époque. Nous éprouvons le besoin de communiquer nos réflexions, de partager notre imaginaire de retenir le regard d’autrui. C’est un plaisir aussi de concentrer en une image unique tout un monde dont nous sommes les auteurs. Combien de temps vous a-t-il pris? Comment travaillez-vous vos mises en scène? V/ Cette série nous a pris trois ans. Chaque photo demande un travail préalable de réflexion. Les idées surviennent comme des fulgurances quand on visite des lieux ou quand on évoque des situations. Notre substrat créatif se trouve dans notre environnement. Nous sommes toujours en alerte. La télévision, la littérature, le métro, le cinéma, la peinture et même les catalogues de décoration, tout nous inspire !
«Nous imaginons un scénario puis nous plantons le décor. » O/ Quand nous avons une idée, nous en discutons puis souvent nous rédigeons les principaux éléments qui donneront corps à la photo. Nous imaginons un scénario puis nous plantons le décor. Parfois, nous le construisons avec des panneaux, du papier peint, des meubles que nous louons. Souvent, nous nous mettons nous-mêmes en scène, parfois nous faisons appel à des amis. Nous guidons nos modèles en leur donnant quelques pistes, mais rien n’est imposé. Nous comptons beaucoup sur l’improvisation, les idées de dernière minutes. Le shooting peut durer longtemps car nous attendons que le charme opère. Nous traquons une absence réelle de la part du modèle, un moment de relâchement, de flottement. V/ Le travail autour de la lumière est important. Notre éclairage est dramatique et intime. Nous utilisons beaucoup le clair-obscur afin de donner une touche subjective et inquiétante à la scène. Le spectateur doit avoir l’impression d’être le témoin d’un moment intime. 26
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Vincent Goutal & Olivia Leriche © Transition
«Notre série implique aussi une interrogation sur l’image donnée. Jusqu’à quel point est-elle réelle ? L’appareil photo est-il dans la mesure de nous montrer la réalité si ce n’est la vérité ? »
www.vincentgoutal.com 28
Je trouve qu’il y a une ambiguïté intéressante dans vos images, le décor, la mise en scène sont minutieusement élaborés et pourtant les personnes semblent être plongées dans un état introspectif. Est ce que vous êtes fascinés par l’espace propre a la photographie qui fige un mouvement, une scène en un instant ?
V/ Moi j’aime bien la scène d’anniversaire car nous nous sommes beaucoup amusés à dresser ce chat survolté au milieu de tous ces ballons. Et la suite ? Préparez-vous une autre série ? V/ Oui, nous sommes en train de réaliser une série dans la même veine. Nous avons aussi plein d’autres projets en tête.
O/ Transitions comme son nom l’indique est à la lisière de quelque chose. C’est un espace d’expression entre l’hypermatérialisme de la société contemporaine et le rêve. Bien sûr, la photographie nous fascine car elle a le pouvoir de figer des instants que l’on ne voit pas. Montrer ces icônes du capitalisme -dont l’essence est la productivité et le mouvement,- les représenter dans un moment d’intimité, d’abandon, c’est assez jouissif.
Un coup de coeur ou une dernière remarque ? O/ La photographie française est pleine de bonnes surprises. Nous avons rencontré des personnes passionnée qui déploient beaucoup de moyens pour faire connaître de jeunes artistes comme Alain Bizotti qui a créé le prix Photo d’Hôtel Photo d’auteur, Cyril Deflandre avec La Nuit de la Photographie Contemporaine.
V/ La photographie est fascinante car elle s’impose au regard. Nous essayons avec nos images de retenir l’oeil du spectateur et de lui proposer un espace de réflexion.
V/ Il y a aussi des photographes qui nous interpellent et que nous apprécions beaucoup comme Nicolas Wilmouth ou Jean-Pierre Attal.
O/ Notre série implique aussi une interrogation sur l’image donnée. Jusqu’à quel point est-elle réelle ? L’appareil photo est-il dans la mesure de nous montrer la réalité si ce n’est la vérité ? Nous pensons que le médium photographique déforme nécessairement le réel et qu’il y a toujours un parti pris lors du déclenchement de l’appareil. Aujourd’hui n’importe qui est assailli d’images jusque dans son espace intime. Ces images infiltrent l’inconscient car elles sont si nombreuses que l’on n’a plus le temps d’y réfléchir.
Tania Koller
V/ Nous avons joué sur cette notion du temps dans Transitions en arrêtant l’action sur des personnages que l’on est habitué à voir en mouvement. Nous nous sommes amusés à bousculer l’imagerie populaire. Nous avons superposé à un monde qui se veut parfait et bien codé des signes d’un autre ordre comme pour le pervertir, le fendiller. Si vous deviez choisir un seul de vos clichés dans cette série, lequel serait-il ? Pourquoi ? O/ C’est une question difficile car nous aimons chaque photo. J’ai une affection particulière pour le bébé devant l’écran de télévision. Je trouve que cette image représente bien l’impact des médias dans notre quotidien. C’est une photo un peu triste car cette petite fille ne semble manquer de rien dans cet intérieur tout doré sauf de présence parentale. Claire Chazal semble toute puissante. C’est un clin d’œil aussi à l’univers de Lewis Caroll que j’adore :la petite fille semble sur le point d’être emportée dans un monde virtuel. 29
EXPOSEZ-VOUS !
ULYSSE LEFEBVRE ROMS DU KOSOVO : EUROPÉENS MALGRÉ NOUS
D Ulysse © Fushë Kosovë, 2010
ans un pays comme le Kosovo, aux allures de protectorat occidental, l’atmosphère européenne si particulière dans le centre ville se retrouve également chez les roms de la banlieue de Pristina. Peuple de voyageurs, bien que sédentaires, ils appartiennent comme partout à une minorité exclue. En discutant avec eux, du gamin de douze ans au vieillard radotant, il est frappant de constater à quel point les langues étrangères sont pratiquées et combien les souvenirs de voyages à l’ouest sont nombreux. C’est que l’immense majorité de ces gens ont vécus dans divers pays de l’Union Européenne. Certes, il s’agit parfois de quelques jours ou semaines ; mais très souvent, ce sont des années passées dans un coin d’Europe occidentale à travailler discrètement après avoir trouvé, enfin, un logement décent. Quant aux plus jeunes, certains ont passé les trois quarts de leur courte existence dans ces pays et en ont pris la langue comme mode d’expression maternelle. Ils s’en sont appropriés la culture, la façon de penser mais aussi le confort de vie « à l’occidentale ». Même si le décor semble parfois bien loin de nous, leurs difficiles conditions de vie ne doivent pas éluder leur intégration dans un grand ensemble européen tel qu’on peut l’imaginer au XXIe siècle. Il s’agit bien ici de gens ayant connu l’intégration européenne, parfois durant des décennies, avant d’être renvoyés dans l’urgence dans un ghetto qui n’était plus le leur, s’entendant dire qu’il était temps de rentrer « chez eux ». Ulysse Lefebve
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Ulysse © Chavo revient de seize ans en Europe occidentale. Il redoute la fin de sa dernière boite d’antidépresseurs, prescrits en Belgique mais introuvables au Kosovo. Fushë Kosovë, 2010
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Pourriez-vous vous présenter en quelques mots ? Je m’appelle Ulysse et j’ai 28 ans. J’aime vadrouiller à droite, à gauche, peut-être est-ce pour ça que je suis géographe de formation, avec la montagne comme terrain de jeu, pardon, d’étude. La plupart des sciences humaines m’intéressent (j’ai pas mal étudié l’histoire et les lettres) et j’apprécie particulièrement de les croiser avec ce que je peux voir au théâtre, au cinéma ou même en concert pour donner du concret aux questions que je me pose. Depuis quand pratiquez-vous la photographie ? Laissez-moi compter….au moins….pfiou, un an et demi ! Désolé, pas plus ! Je n’ai pas d’anecdotes sur mon « premier Leica » dont j’aurais hérité alors que je savais à peine marcher. Non, juste une espèce de nécessité récente de ramener des images pour raconter des histoires, peutêtre en me rendant compte de mes limites à l’écrit.
«Je tiens aussi à dire combien je trouve que l’essor des « webzines » est particulièrement adapté au monde de la photo.» Comment avez-vous découvert la photographie ? Quand on voyage, même un peu, on a envie de ramener des images de son périple. Comme tout le monde, j’ai ramené des photos de voyage. Et puis je me suis rendu compte que ces images ne parlaient qu’à moi, n’exprimaient rien de plus qu’un vécu que moi seul connaissais mais qui ne transparaissais pas ; comme quand vos amis s’endorment devant vos photos de voyage et regrettent de vous les avoir réclamées ! En plus, il n’y avait pas de réelle cohérence dans ces photos, tout juste une chronologie dans le cas d’un voyage itinérant. Alors j’ai commencé à regarder ce qui se faisait dans le milieu de LA photographie et j’ai rapidement mis le nez dans le photojournalisme et le reportage. Pour le côté technique, c’est un bon copain photographe qui m’a appris les bases lors de quelques virées dans les rues de Paris, histoire de ne plus appréhender de braquer un 50mm sur une personne toute proche. C’est lui aussi qui a supporté mon air dubitatif lorsqu’il me parlait de couple ouverture/vitesse ! C’est assez drôle de raconter tout ça comme s’il s’agissait d’un historique lointain alors qu’il y a de ça à peine plus d’un an !
« L ’essentiel dans la photographie c’est la rencontre avec des gens tous différents. Le fait de pouvoir entrer dans différents mondes .» Avec quel matériel travaillez-vous ? J’ai un Canon 5D mark II avec objectif 24-70 qui ouvre à 2.8. Le choix du numérique s’est vite imposé. J’ai fait quelques pellicules mais l’appareil argentique en question était un peu fatigué et puis je suis un peu du genre impatient alors le fait de pouvoir visualiser les photos instantanément a été décisif. Pour l’objectif, il me fallait quelque chose qui ouvre grand car je fais beaucoup de photos de concert, en basses lumières. Quant à la focale, cet objectif permet le grand angle mais aussi le 50mm pour le portrait tout en restant de très bonne qualité. Quelques anecdotes sur les étapes de votre apprentissage ? Il est encore en cours ! J’ai fait beaucoup de photos de spectacle pour apprendre à manier le boitier et à photographier en faible lumière. Sauf que ce que je voulais, c’était faire du reportage ! Alors quand je suis ressorti de mes salles obscures après un an à ne faire quasiment que ça, je ne savais plus photographier en lumière naturelle. Pouvez-vous nous dire quelles sont, vos “références” en matière de photographie, de photo reportage ?2 Il y en a beaucoup. Je passe d’ailleurs beaucoup de temps à regarder des photos, ce que font les photojournalistes, leur point de vue, leur approche, leur manière de cadrer, de raconter… Je crois que c’est un complément indispensable à la prise de vue elle-même. En ce moment je me nourris beaucoup du travail de gens comme Cédric Gerbehaye ou Stanley Greene. Sur le thème des roms, il y a aussi Alain Keler et surtout Joakim Eskildsen, dont les couleurs sont tout simplement incroyables. Et puis j’ai découvert par hasard au détour d’un site internet, un photographe nommé Franco Guardascione (agence Nazca Pictures) dont les compositions sont vraiment bien travaillées (en particulier dans son travail sur les asiles psychiatriques italiens). Si vous deviez citer un photographe qui vous inspire particulièrement, qui serait-il ? Un seul ? James Nachtwey peut-être, pour sa capacité à allier information et esthétique sans sombrer dans l’esthétisme, à mon avis bien sûr. 33
Qu’aimez-vous dans la photographie ?
quelques années. C’est pourquoi la région des Balkans et plus particulièrement du jeune Kosovo indépendant se sont avérés un terrain adéquat pour commencer à rencontrer des acteurs de ce que je ne connaissais que sous forme de dates et de personnages célèbres. Une première étape avant d’aller au front en somme, enfin j’espère.
Evidemment l’essentiel dans la photographie c’est la rencontre avec des gens tous différents. Le fait de pouvoir entrer dans différents mondes assez facilement voire rapidement est aussi très grisant, même à mon petit niveau. Un petit plaisir serait peut-être ce moment où je me rends compte que j’ai une bonne photo dans le boitier, une impression que tout ce qui se fera dans le reste de la journée ne sera que du bonus. Je ne sais pas si ça me rassure mais en tous cas ça me détend et appelle d’ailleurs souvent d’autres bonnes images.
A côté de ça, le monde des voyageurs au sens large m’intrigue beaucoup, qu’il s’agisse de manouches, tziganes, gitans, sintis, yénishes ou roms dans le cas présent. Qui sont ces gens ? Que se cache t-il sous le fantasme du nomade ? Sont-ils des voleurs de poule ou des virtuoses du violon en roulotte ? Ou ni l’un ni l’autre ? Ce travail sur les roms de la banlieue de Pristina est donc la convergence de ces deux thèmes qui me turlupinaient, et me turlupinent toujours d’ailleurs.
Pouvez vous nous présenter votre travail sur les Roms du Kosovo ? C’est mon premier travail en tant que tel, mais aussi ma première expérience de terrain. Bref un baptême ! Ce reportage tente de montrer le caractère européen de ces gens que l’on met dans un tiroir et que l’on ne réouvre
Combien de temps vous a t-il pris ? Faites vous des recherches préliminaires ou alors vous allez sur place et vous improvisez ?
jamais. Finalement, l’idée est de montrer en quoi nous sommes proches dans le cadre d’une Europe telle qu’on est en droit de l’imaginer au XXIe siècle.
Alors, pour la version un peu classe et professionnelle, je
Les roms sont ce que nous nous efforçons tous de devenir : de vrais européens. Günther Grass
« A côté de ça, le monde des voyageurs au sens large m’intrigue beaucoup, qu’il s’agisse de manouches, tziganes, gitans, sintis, yénishes ou roms dans le cas présent. Qui sont ces gens ? Que se cache t-il sous le fantasme du nomade ?»
dirais que oui, je fais des recherches, je me documente sur l’histoire et le contexte actuel, à fortiori dans une région complexe comme celle-là. Il y a donc un bon moment de préparation. Le côté officieux, mais non moins nécessaire en ce qui me concerne, c’est une bonne dose de débrouille. Peut-être pas de l’improvisation mais plutôt de la « réactivité » face aux évènements qui se produisent ou que je provoque aussi. Bon d’accord, appelons ça de l’improvisation. Cela veut dire finalement que j’avais deux projets initialement pour ce voyage de trois semaines, à savoir les roms du Kosovo et les élections générales à Sarajevo en Bosnie-Herzegovine. Sauf que, première expérience oblige, j’ai perdu du temps inutilement dans la capitale bosnienne à courir après un non-évènement, les élections ne suscitant pas l’énergie attendue, tant du point de vue des acteurs que du point de vue photogénique. Cela m’a donc laissé une seule semaine à Pristina dans l’emploi du temps que je devais respecter.
Comment et pourquoi avoir choisi ce travail ? Est-ce une raison personnelle ou un travail de mémoire sur la région ? Je me considère comme chanceux de ne pas avoir connu la guerre, si ce n’est dans les livres d’histoire ou les paroles des grands-parents. Ce sentiment se rapproche presque de l’idée de culpabilité, une sorte de profil bas face à des jeunes gens de mon âge qui vivaient un conflit il y a encore
J’avoue que je suis un peu honteux de ce temps ridiculement court et qui ne colle pas du tout avec le temps
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Ulysse © Souvenirs de voyages, nouvelles de la famille. Fushë Kosovë, 2010 Voyager, plaisir ou nécessité... La gare ferroviaire sert de frontière avec le reste de la ville kosovarde. Fushë Kosovë, 2010
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« Parfois j’ai abordé des gens qui m’avaient à peine regardé, d’autres fois j’ai vu des regards sombres devenir amicaux, rarement je n’ai pas reçu d’écho. »
long nécessaire au reportage. Toujours est-il que les images sont là et racontent tout de même, je l’espère, un bout de l’histoire de ces gens. L’importance du temps long en photographie est ce que j’ai appris de plus fondamental pendant ce séjour au Kosovo. Comment se sont passées vos rencontres? Comment abordez vous vos sujets ? Je me suis beaucoup posé la question de la manière
Ulysse © Fushë Kosovë, 2010
d’aborder les gens, de me présenter non plus comme un voyageur de passage mais bien comme quelqu’un travaillant sur un thème et dont la personne en question est l’un des acteurs principaux. Je me suis finalement dit qu’il ne servait à rien de se cacher, du moins de vouloir user d’une discrétion trop intrigante. Alors je suis allé au village rom de Fushë Kosovë appareil photo en bandoulière et je me suis présenté à quasiment tous les gens que je croisais. L’idée était de dire qui j’étais, pourquoi j’étais là et d’assumer pleinement l’encombrant appareil photo que j’avais sur moi. Parfois j’ai abordé des gens qui m’avaient à peine regardé, d’autres fois j’ai vu des regards sombres devenir amicaux, rarement je n’ai pas reçu d’écho. Rapidement, après ces présentations, chacun retournait à ses occupations comme si je n’étais déjà plus là et c’est tant mieux pour le naturel. Encore une fois, mon avis est que les choses doivent être tout à fait claires entre le photographe et le sujet, et si l’idée n’est pas de se taper sur l’épaule au bout d’une journée, une bonne poignée de main chaleureuse est déjà très encourageante. Et puis, comme « la chance n’aime pas ceux qui lui font la gueule » comme dirait l’autre, une bonne humeur constante m’a rapproché avec beaucoup de chance vers des roms qui parlaient italien, allemand, anglais et même français, ce qui m’a permis d’en apprendre beaucoup et en détail sur l’histoire de chacun. En dernière minute, c’est aussi de cette manière que j’ai rencontré mon fixeur en quelque sorte.
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Devant la maison qu’il a construite lui-même, Zarim fait une démonstration de capoeira. Après dix ans d’apprentissage en Allemagne, il y était devenu professeur. Depuis s
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son retour il y a un an, il voit toutes les portes d’écoles de danse se fermer devant lui. Fushë Kosovë, 2010
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Ulysse © Fushë Kosovë, 2010
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Venia a vécu la première partie de sa vie en Italie. Cela fait maintenant vingt ans qu’elle est de retour au Kosovo. Elle a toujours le regard tourné vers l’Allemagne où son frère a eu jusqu’à présent la chance de rester. Camp Primitiv, 2010
Retrouvez Ulysse Lefebvre sur son site Internet : www.ulysselefebvre.com
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Si vous deviez choisir un seul de vos clichés dans cette série, lequel serait-il ? Je garderais celle de ce vieil homme au béret qui montre quelque chose en pointant le doigt. Cette photo n’est pas particulièrement éloquente en ce qui concerne le caractère européen des roms mais, à mon avis, le regard et le geste de cet homme traduisent l’élan nécessaire et permanent de ce peuple sans cesse balloté par l’histoire. Et puis, il est le seul avec qui j’ai discuté sans jamais comprendre un seul mot, lui qui passait en un instant d’un sourire jusqu’aux oreilles à une moue décourageante. C’est surement pour ça que je m’attache encore plus à son expression corporelle. Plus je regarde ses yeux, plus je me perds dans ce qu’ils peuvent bien signifier, entre complainte et mise en garde…
Et la suite ? Préparez-vous une autre série ? J’ai plusieurs projets plus ou moins aboutis. Je termine en ce moment un travail sur l’éducation des jeunes voyageurs en Savoie (les « gens du voyage » en langage politiquement correct). J’essaie de comprendre ce qui fait de ces mômes des enfants à part ou semblables aux petits « gadjé », ainsi que l’importance de l’école dans leur vie présente et future. A suivre…. Pour la suite, je devrais très rapidement retourner voir à l’Est si j’y suis… Un coup de cœur ou une dernière remarque ? A propos de cette interview, je tiens juste à préciser que je l’envisage comme une amorce de discussion avec d’autres copains photographes et surtout pas comme le « témoignage » d’un photographe avec un grand P. Je débute, j’apprends sur le terrain et ne connais rien à la photographie académique donc j’attends surtout d’échanger avec tous ceux qui auront eu le courage de lire ces lignes !
«Je tiens aussi à dire combien je trouve que l’essor des « webzines » est particulièrement adapté au monde de la photo.»
Je tiens aussi à dire combien je trouve que l’essor des « webzines » est particulièrement adapté au monde de la photo. Beaucoup de trucs géniaux sortent sur le web et trouvent une visibilité grâce à ces médias. Je crois vraiment qu’il ne s’agit plus maintenant d’un circuit de « seconde zone » à côté de la presse traditionnelle mais bien d’un espace à occuper, to fill-in ! Tania Koller
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20 ANS D’AVENTURE COLLECTIVE! COUP DE COEUR
Pouvez-vous nous raconter la naissance de Tendance Floue, son identité et ses participants?
1991 : Création du collectif 1999 : «Nous traversons la violence du monde», Parution du livre, éditions Tendance Floue, et réalisation d’un film. 2000 : Reportage collectif sur les mouvements alter mondialistes, projection au festival Visa pour l’image de Perpignan. En 2001, débutent deux travaux collectifs : l’un aux Etats-Unis suite aux attentats du 11 septembre, le second dans les Territoires Palestiniens qui se poursuivra en 2005. 2004 : «0h00 GMT Carrefours du monde» : le 25 mars 2004 à 0h00GMT, tendance floue photographie pendant 24h l’activité de 10 carrefours à travers le monde. Un film suit. 2006-2007 : «Sommes nous ?» Soirée spéciale 15 ans aux Rencontres Internationales de la photographie d’Arles.
La naissance de Tendance Floue c’est la rencontre en 1991 de cinq photographes : Caty Jan, Thierry Ardouin, Denis Bourges, Mat Jacob et Patrick Tourneboeuf, autour d’une idée commune, mettre en commun leurs photographies pour faire naitre une écriture unique et originale, celle de Tendance Floue. En effet plusieurs structures se revendiquent collectives mais en réalité peu travaillent réellement dans une optique de mise en commun des idées et des productions. En ce sens Tendance Floue a eu dès le début une démarche singulière.
Retrouvez TENDANCE FLOUE le blog : www.tendancefloueblog.net le site : www.tendancefloue.net
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Parlez-nous du parcours de Tendance Floue : des beaux projets, des anecdotes, des rencontres ? Après plusieurs années de travaux collectifs, de collaboration avec la presse, de soirées de projections ou d’interventions dans des festivals, Tendance Floue décide de s’ouvrir et choisit de faire rentrer en 1996 six nouveaux photographes. Le collectif s’organise et crée sa propre structure d’archives à Montreuil en banlieue parisienne. En parallèle de l’organisation du travail et de la création d’un bureau pouvant accuellir les professionnels de la photographie, Tendance Floue met en place des projets collectifs et publie plusieurs ouvrages où les images de chacun des photographes se répondent les unes aux autres. On peut noter dans les projets de production La Nationale Zéro, road movie réalisé en Europe à travers les 25 pays de l’Union Européenne de l’époque. Le principe était simple, tous les 15 jours un photographe de Tendance Floue prenait place dans une voiture relais qu’il conduisait à travers une route qu’il traçait à sa guise dans un ou plusieurs pays pré-définis. Ce travail a donné naissance à un livre et une exposition itinérante présentée à Arles à Enghien les Bains et nombre de grandes ville européennes. Pour ce qui concerne les rencontres il y en a énormément, prenons la plus récente, la rencontre avec Robert Delpire. Depuis que Tendance Floue s’est créé Robert Delpire
«TF met en place des projets collectifs et publie plusieurs ouvrages où les images de chacun des photographes se répondent les unes aux autres.» fascine par la qualité et la rigueur de son travail. Nous venons de travailler plusieurs mois avec lui pour réaliser un Photo Poche chez Actes Sud. Et peut être plus encore : les rêves de Tendance Floue, ses dernières lubies, ses espoirs? La dernière lubie de Tendance Floue est de réaliser une revue intitulée NoMad nouvel opus de la série Mad In qui sera publiée fin septembre chez Démocratic Books, nous sommes en production en ce moment un peu partout dans le monde. Pour ce qui est des rêves, nous n’en avons qu’un, continuer ensemble à photographier. Tendance Floue aujourd’hui c’est une vingtaine de personne qui vivent de la photographie. Tania Koller
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PHOTOGRAPHE CANADIEN
NEIL MOTA
Beauty Revisited
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n photographe passionant, que nous espérons rencontrer prochainement pour une interview fill-in.
Il emane de ces images un sens esthétique et une sensibilité exemplaires. Nous sommes ravis de découvrir de tel talent à Montréal. Merci !
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Representation : L’Eloi Direction artistique: Neil Mota Mannequins : Gigi et Dana, Justine Maquillage et coiffure: Paco Puertas
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Tatoo
Retrouvez Neil Mota sur son site Internet : http://www.leloi.ca/ Skulls
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COUPS DE COEUR
LES BEAUX LIVRES COFFRET 20 ANS TENDANCE FLOUE A l’occasion des 20 ans du collectif, Tendance Floue édite en 200 exemplaires, un coffret numéroté et signé, de 12 tirages. Ces coffrets sont disponibles à Tendance Floue auprès de Clementine Jagot : 01 48 58 90 60 ou par email : cjagot@tendancefloue.net. Coffret composé d’un texte de Joaquim Caroça et de 12 tirages de chacun des 12 photographes de Tendance Floue.
Dimensions : 215 x 155 x 20 Prix de vente : 165,00 euros
6 MOIS Entièrement consacrée aux reportages photographiques, cette nouvelle revue française de 353 pages et 500 photos est unique au monde. Un pari ambitieux par l’équipe à l’origine du trimestriel XXI. La sortie, jeudi 24 mars, de « 6 Mois » est un enchantement dans l’univers morose de la presse française. Voici en effet une publication à nulle autre pareille. Un élégant et volumineux pavé de 1,3 kilo pour 25 euros au service d’un projet inédit : raconter deux fois par an, tous les « 6 Mois », le monde en images. Le résultat est décoiffant : 353 pages, 500 photos et zéro publicité.
Éditeur : Les Arènes Pages : 353 Prix de vente : 25 euros
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TAKUMA NAKAHIRA (FOR A LANGUAGE TO COME) Paru en 1970, For a Language to come est avec le Bye Bye Photography de Moriyama le livre emblématique du style «Provoke». Conçu en une série de double pages à fond perdu, l’ouvrage est étouffant. Paysages urbains et naturels alternent. Les noirs sont profonds et les lumières brûlées. La mer revient comme un leitmotiv mais nulle échappée ne semble possible. Là où chez Moriyama on ressent une excitation de la chasse, chez Nakahira transparaît une forme de désespérance. For a Language to come, ouvrage majeur de l’histoire de la photographie est à nouveau disponible, 40 ans après sa première publication !
Éditeur : OSIRIS Pages : 160 Dimensions : 30 x 28.5 cm
BERNARD FAUCON On se demandait ce qu’était devenu Bernard Faucon, le photographe montant des années 80, qui s’était fait connaître par ses installations de mannequins photographiés dans des décors naturels. La Maison Européenne de la Photographie organise une rétrospective géante de cet artiste peu commun, avec une exposition qui occupe la totalité de ses locaux.
Éditeur : Christian Caujolle (Auteur), Marie Darrieussecq Dimensions : 28 x 28 , 352 pages Prix de vente : 65 euros
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LES PHOTOS DES LECTEURS
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Sylvie Guillaume - www.sylvieguillaume.com
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Karl Gillebert - www.delucine.com
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Amo Passicos - http://melle-amo.fr/
Romain Alary - www.alaryromain.com
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Asmaa Betit - Rose
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Asmaa Betit - Zero GravitĂŠ
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CĂŠdric Fayemendy - http://www.flickr.com/gnondpomme
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Frédéric Fougerat
Dans le prochain numéro
BURNING WITH THE MAN BLACK ROCK CITY, NEVADA
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Remerciements : Vincent Goutal & Olivia Leriche : www.vincentgoutal.com Ulysse Lefebvre : www.ulysselefebvre.com Tendance Floue : www.tendancefloue.net Neil Mota : www.leloi.ca
Les photographes sélectionnés Sylvie Guillaume - www.sylvieguillaume.com Karl Gillebert - www.delucine.com Amo Passicos - http://melle-amo.fr/ Romain Alary - www.alaryromain.com Asmaa Betit - Zero Gravité Cédric Fayemendy - http://www.flickr.com/gnondpomme Frédéric Fougerat Un nouveau concours sera organisé pour le numéro de juillet 2011. Surveillez la rubrique magazine !
Rédaction Fill-in : Tania Koller Baptiste Galea Jeremy Barré
Retrouvez les articles et les reportages sur fill-in.fr L’équipe Fill-in recherche des passionnés de photo qui souhaitent rejoindre le projet. Si vous êtes intéressé(e), n’hésitez pas à nous contacter.
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