ERSAILLES
C’était quelques jours avant Noël. La neige qui tombait depuis des semaines s’était enfin arrêtée, et avait transformé les allées du parc du château de Versailles en un immense terrain de jeu glissant.
« C’est le temps idéal pour une course de traîneaux ! » s’écria joyeusement le roi Louis XV.
Aussitôt, le château fut en effervescence.
Bientôt, de nombreux traîneaux aux couleurs vives filaient sur la neige, tirés par de fougueux chevaux. Des dizaines de grelots d’or et d’argent étaient cousus sur leurs harnais.
Leurs joyeux tintements se mêlaient aux cris de joie des seigneurs et dames, rompant le silence feutré des allées enneigées.
Le roi conduisait son propre traîneau. Il avait installé devant lui deux de ses enfants, le prince Louis et la petite princesse Adélaïde.
« Plus vite Papa-roi ! » criaient-ils joyeusement en battant des mains.
La vitesse leur donnait l’impression d’avoir des ailes.
Depuis la fenêtre de leur chambre dorée, deux jeunes filles de onze ans observaient avec envie les traîneaux descendre et remonter les allées. Elles poussèrent un même soupir, qui vint faire un nuage de buée sur la vitre.
« Comme j’aimerais être avec nos petits frères et sœurs… ces courses en traîneau sont tellement amusantes… » se plaignit Henriette.
« Mais comme nous sommes enrhumées, nous voici condamnées à rester à l’intérieur ! » renchérit Elisabeth, sa sœur jumelle, avant d'éternuer plusieurs fois de suite.
Les deux jeunes princesses se renfoncèrent dans les couvertures de fourrure dont elles avaient été couvertes, et cherchèrent comment occuper leur après-midi. Dormir ? Elles n’en avaient pas envie. Lire ? Elles avaient déjà lu tous les livres qu’elles possédaient. Elles prirent leurs broderies, mais leurs regards se tournaient sans cesse vers la fenêtre, songeant à cette course de traîneaux.
« Allons mes filles, pourquoi ces tristes mines ? » demanda
une voix douce qui leur fit relever la tête. Poussant un cri de joie, elles se précipitèrent dans les bras de leur mère, qui entrait à l’instant dans la chambre.
La reine Marie venait s’enquérir de la santé de ses filles aînées, mais elle comprit tout de suite que les deux princesses souffraient plus de l’ennui que de leur rhume. Elle s’assit entre les jumelles, et commença alors à leur raconter des histoires de son pays natal, la Pologne.
« Vous ne connaissez pas cette tradition car en France cela ne se fait pas, mais dans mon pays, il est de coutume, la veille de Noël, d’aller couper un sapin dans la forêt, et de le dresser au milieu du salon. Nous, les enfants, nous accrochions à ses branches des rubans, de petites bougies, mais aussi des pommes et des biscuits que nous pouvions venir grignoter les jours suivants. Il symbolise ainsi l’arbre du Paradis. »
