Chanel, la beauté mise à nu
Les passions romaines de Babin
Quand les horlogers perdent la maîtrise
Avec la J12 Squelette Tourbillon Volant, la marque propose la quintessence horlogère du style défini par Gabrielle Chanel............................p.11
De l'univers sportif de TAG Heuer au raffinement suprêmement latin de Bulgari, un grand écart parfaitement réussi............................ p.14
Pour des marques en quête quasi obsessionnelle de contrôle, les reventes de montres sur internet constituent un casse-tête............................... p.27
EUROPA STAR PREMIERE LE JOURNAL DE L’ÉCOSYSTÈME HORLOGER SUISSE
NO 1 (Vol.18) | 6.00 CHF / € | GENÈVE, LE 18 JANVIER 2016 | EUROPASTAR.COM
ISSN 297-4008
ÉDITORIAL
SIHH & Satellites
par
Serge Maillard
Est défendu à tous citoyens, bourgeois, habitants et sujets de cette cité, tout usage d’or ou d’argent en broderies, passements, filets, ou autres enrichissements d’habits en quelque sorte et manière que ce soit. Sont interdits tous chapeaux, bonnets, fourreaux d’épées, canons aux chausses, sauf à ceux auxquels, selon leur qualité, il peut être permis. Que nulle fille de quelque qualité qu’elle soit, n’ait à porter aucun anneau avant d’être fiancée, sous peine d’une amende de soixante sols et confiscations desdites bagues. Est interdit aux femmes et filles toute frisure et entortillement de cheveux. Que nul faisant noce, banquets ou festins, ne présente plus de cinq plats, honnêtes et raisonnables. Est défendu de faire aucun festin aux fiançailles et baptisailles, sauf une table de dix personnes au plus pour les gens de qualité. Que les artisans et autres de moindre qualité n’aient à servir pour leurs banquets des dindes, perdrix, venaisons, gibier et pâtisserie, sous peine de vingt-cinq florins d’amende. Tels se présentent quelques-uns des articles des «ordonnances somptuaires», veillant au maintien rigide des bonnes mœurs et des stricts codes vestimentaires dans la Genève de la Réforme du 16ème siècle au 18ème siècle, cités dans l’excellent ouvrage L’Histoire de Genève par Christian Vellas aux éditions Slatkine.
Même Calvin craignait qu’on en fasse trop... Ainsi, ce n’est pas sous son influence que le plus d’ordonnances somptuaires furent édictées. Pour le réformateur austère mais perspicace, si l’on commençait à légiférer dans ce domaine, l’on serait finalement conduit à réglementer chaque détail, apprend-on dans l’édition commentée des Registres de la Compagnie des pasteurs de Genève au temps de Calvin, aux éditions Droz. A l’heure où s’ouvre le SIHH, quatre siècles plus tard dans la même ville de Genève, alors que l’on enfile broderies, passements et filets en or et argent, anneaux hors fiançailles, que l’on s’entortille et se frise les cheveux, que l’on s’apprête à faire banquet de nombreuses dindes, perdrix et pâtisseries sur des tables aux multiples convives (on laissera simplement son fourreau d’épée au vestiaire), il est bon de se replonger dans les sources de l’époque, lorsque le pragmatisme calviniste poussait les joailliers vers des fonctions horaires plus utilitaires. Où plusieurs enseignements peuvent être tirés: que Calvin a été débordé sur sa droite par plus austère que lui; que l’ascèse a encouragé l’horlogerie, usant des compétences des migrants de l’époque; que cette sévère règle de vie a parallèlement de tout temps été contournée; que l’horlogerie genevoise tire fierté de cet esprit à l’ADN épuré; que c’est sans doute dans le paradoxe de la rencontre entre l’esprit genevo-combier et les groupes de luxe globalisés, dans cet inconfort parfois fructueux, souvent hésitant entre paillettes et sévérité, que se joue une partie du futur de l’industrie horlogère...
DR
Le grand paradoxe
La dictature de la nouveauté par
Pierre Maillard
Quand l'horlogerie vantait encore ses produits en affirmant qu'une «montre c'est pour la vie», la notion de nouveauté était toute relative et, stylistiquement, la montre se devait d'être classique, gage de pérennité. L'évolution esthétique et technique se faisait à pas lents. D'une marque à l'autre, les modèles se ressemblaient furieusement, comme nous pouvons le constater en fouillant dans les archives d'Europa Star (qui, rappelons-le, remontent jusqu'à 1927). L'arrivée tumultueuse du quartz a
non seulement bouleversé la donne technique mais aussi esthétique. D'objet intemporel promis pour la vie, la montre est devenue objet de mode, par nature périssable et changeante: à chaque saison sa collection, ses couleurs et ses formes… Comme on le sait, l'horlogerie suisse est parvenue à revenir au centre de la scène très largement grâce à la Swatch qui a poussé cette logique de mode et de renouvellement incessant jusque dans ses derniers retranchements. L'horlogerie mécanique a suivi le mouvement. Mais pour accomplir
son retour en grâce – et quel retour! – elle a dû elle aussi s'adapter à cette nouvelle donne, à cette nouvelle «dictature» de la nouveauté à tout prix. Cette course à la nouveauté a stimulé la créativité tant esthétique que technique. Lancées désormais dans une furieuse compétition, les marques se sont vues obligées d'innover sans cesse, de proposer à chaque saison de nouvelles formes, de nouvelles esthétiques, de nouvelles «complications», de nouvelles performances. L'horlogerie mécanique s'est vue grandement aidée dans cette nou-
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