RIC 392 liv itunes

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Certes, l’utilisation quasi majoritaire du principe homorythmique est une caractéristique des chansons françaises de la Renaissance ; plusieurs chansons d’Arcadelt font partie de cette catégorie. C’est le cas de Franc Berger (1554) avec son sujet de Noël, des pièces sur timbres populaires comme Margot labourez les vignes (1554) ou des deux pièces en réponse (1561), J’ay acquis un serviteur et Celle que j’estime tant. Mais cette écriture verticale est aussi l’identité des frottole italiennes. Or, chez Arcadelt, dans les chansons en français, ce genre apparaît de façon absolument indiscutable : c’est le cas de Les yeux qui me sçeurent prendre (1554) et de La Diane que je sers (1560). Toutes ces pièces de style italien ont la particularité de se développer sur la base de cellules rythmiques de trois mesures. O le grand bien (1559) fait également référence à un style d’écriture italien pratiqué par les musiciens du début du XVIe siècle comme Tromboncino ; le dessus et la basse sont d’une écriture simple et homorythmique alors que les voix internes sont bien plus complexes. L’interprétation vocale des voix extrêmes et instrumentale des voix intérieures met bien en valeur cette écriture. Laissés la verde couleur, pièce qui est également construite sur une cellule rythmique de trois mesures, pourrait être inspirée par une tradition poétique, celle du chant à la lyre, hérité certainement d’une pratique italienne qui remonte à la fin du XVe siècle et qui est liée à l’usage de la lira da braccio, instrument représenté dès cette époque dans les bras d’Orphée ou d’Apollon. C’est l’instrument idéal pour l’accompagnement du chant. Sa présence est attestée à la cour de France à cette époque. Cette récitation chantée est évoquée également par Ronsard, de façon sublimée, dans L’Hymne de Charles, cardinal de Lorraine : Et du geste, et du son, et de la voix ensemble Que ton Ferabosco sur trois lyres assemble Quand les trois Apollons chantant divinement, Et mariant la lyre à la voix doucement Tout d’un coup de la voix et de la main agile Refont mourir Didon par les vers de Virgile. Ce style vertical est aussi certainement annonciateur de la base du futur air de cour, dès lors que la première voix apparaît comme une mélodie principale ; c’est de toute évidence le cas d’Il me prend fantasie (1547). Il est également présent dans Nous boirons du vin clairet (1556), qui peut être considéré comme un


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