Mémoire - L'individu face aux normes

Élodie POIRIER - 2022/2023

Diplôme Architecte d’Intérieur _ ESDAC Aix-en-Provence_Sous le tutorat de Anne-Charlotte VILMUS

L’individu face aux normes

Sommaire

Remerciements Sommaire Avant-propos Introduction

I.

II.

III.

Les normes, des standards établis sur l’humain

I.1

Mise en place et fonction de la norme

I.2

Les normes comme élément d’identification et d’appartenance

Les limites de la norme

II.1

Rejet de l’individu au profit du groupe

II.2

L’individu, unique en tout point

Au-delà de la norme

III.1

La norme comme point de départ d’une évolution

III.2

« Transpasser » la norme

Conclusion

5 9 11 13 15

15 25

31 31 43

53 53 59

69

Nota-Bene

71

Bibliographie

73

Table des matières

77

Avant-propos

« Du berceau à la tombe, on nous mesure à l’aune de cette omniprésente moyenne, et l’on nous juge en fonction de notre proximité avec elle ou de notre capacité à la dépasser. » Todd Rose, La tyrannie de la norme, 2017.

Afin que vous [lecteurs] compreniez ma démarche, je tiens par cet avant-propos à vous communiquer le chemin de penser qui m’a mené jusqu’à ce sujet de mémoire. Entre avril et mai 2022, lorsqu’il fallut s’orienter sur un thème j’ai d’abord divagué entre la thématique viticole de par mes origines Bourguignonnes, et le concept de la lumière en conséquence de mon alternance dans un bureau d’étude d’éclairage.

Le temps passe, et l’école organise une intervention sur le handicap le 21 avril 2022. Cette intervention est menée par l’association Handicap Travail et Solidarité, et a pour but de nous sensibiliser à la différence du handicap, à la nécessité d’inclusion. Ces informations passent par des jeux, le témoignage d’une maman ayant un fils atteint d’un trouble autistique et avant tout par des échanges entre élèves et intervenants.

Ayant moi-même vécu le handicap de très près, par des membres de ma famille, le sujet fait écho à ma vie. Je ressens alors l’envie voire la nécessité, d’inclure ce sujet important à ma vie, dans mon travail de recherche de master. De cette prise de conscience, nait une longue réflexion, au cours de laquelle un mot ressort régulièrement, la notion de « valido-centré ». En d’autres termes, c’est l’idée d’une société uniquement orientée vers les personnes valides et qui omet totalement d’inclure une partie de la population. Je prends des notes et je retiens ceci : « uniformisation de la société alors même que, chaque individu est unique, qu’il possède des besoins propres à lui-même, qu’il est singulier » et je poursuis avec : « la norme « régule » la société, elle crée « le moule », bien qu’essentielle dans une certaine mesure, elle créer des inégalités. ». Ainsi, je m’interroge sur la norme et ce qu’elle nous impose indirectement, à chacun de nous, en tant qu’individus. En ce qui concerne la poursuite de cette réflexion, je vous incite fortement à lire le développement de ce mémoire dans les pages qui suivent.

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Introduction

Notre quotidien est bercé par bon nombre de normes ; hygiène, urbanisme, éthique, diététique, etc. Le constat étant que même ce mémoire que vous êtes en train de lire, se plie à de nombreuses normes d’écriture, de mise en page, de format d’impression, ou autre.

Qu’elles soient établies par conventions ou par législation, elles sont inévitables pour tout citoyen français au XXI° siècle. Pour autant, nous savons que souvent ces normes se voient transgressées et ce malgré un apprentissage dès la petite enfance du respect des règles.

Mais avant tout, qu’est-ce que la norme ? L’étymologie du mot norme d’après le CNRTL, est emprunt du latin norma signifiant « équerre, règle, loi »¹, cela traduit la rigidité à laquelle réfère ce terme. On distingue d’abord normes sociales et normes juridiques. Ce mémoire traitera majoritairement de la norme juridique, bien que des parallèles avec les normes sociales pourront être établis. La norme sociale étant définie par l’UNICEF comme « les règles perçues, informelles, et pour la plupart non-écrites, qui définissent les actions acceptables et appropriées au sein d’un groupe ou d’une communauté donnée, guidant ainsi le comportement humain »². En ce qui concerne la norme juridique, d’après l’organisation ISO, elle « est un document approuvé par un organisme reconnu, qui a été mis au point par voie de consensus entre des experts du domaine, et qui fournit des recommandations sur la conception, l’utilisation ou la performance des produits, processus, services, systèmes ou personnes. »³.

L’organisation ISO fût créée en 1947, suite à la réunion de 25 pays l’année précédente à Londres, afin d’établir la mise en place de la normalisation. Il s’agissait dans un contexte d’après-guerre, d’apporter un outil pour faciliter la reconstruction des différents pays touchés par cette dernière⁴. C’est le début de la normalisation internationale.

¹ ‘NORME : Etymologie de NORME’ <https://www.cnrtl.fr/ etymologie/norme> [accessed 9 October 2022]. ² ‘Social-Norms-DefinitionsFrench.Pdf’ <https://www.unicef. org/media/114436/file/Socialnorms-definitions-French.pdf> [accessed 11 November 2022]. ³ ‘COPOLCO’ <https://www.iso. org/sites/ConsumersStandards/ fr/1_standards.html> [accessed 25 October 2022]. ⁴ ‘L’ISO fête ses 70 ans !’, ISO <https://www.iso.org/cms/render/ live/fr/sites/isoorg/contents/ news/2017/02/Ref2163.html> [accessed 25 October 2022].

Dans cette société normative alors mise en place, nous nous interrogeons sur la place de l’individu. Nul doute que face à l’instauration de tant de carcans, auxquels il nous est enjoint de correspondre, l’individu ne puisse plus s’identifier pleinement, dans la société qu’il habite. Chacun se voit alors comme une personne en marge de la société. Se pose donc la problématique suivante : les normes sont-elles source de divisions au sein de notre société ? Problématique à laquelle nous tenterons de répondre, au travers de trois axes successifs. Pour initier ce mémoire, nous évoquerons le fonctionnement des normes, leurs applications ainsi que la fonction d’identification de cette dernière.

Après avoir identifié les enjeux de la norme, nous nous pencherons sur les limites de cette dernière, notamment face à l’individualité de l’être humain. Pour finir, nous verrons au-delà de la norme. Cette dernière partie est une vision pondérée de la norme, de sa valeur et de la manière de l’appréhender.

⁵ ‘Les normes en une définition’, AFNOR Normalisation <https:// normalisation.afnor.org/normesdefinition/> [accessed 26 September 2022]. ⁶ ‘Les Normes d’application Obligatoire’, France Normalisation <https://www. francenormalisation.fr/lesacteurs-de-la-normalisation/ normes-obligatoires/> [accessed 11 November 2022]. ⁷ Pierre Ailleret, ‘Histoire de la C.E.I., premier organisme de normalisation internationale, de 1906 à 1926’, Bulletin d’histoire de l’électricité, 10.1 (1987), 171–76 <https://doi.org/10.3406/ helec.1987.1030>. ⁸ ‘Notion en débat : mondialisation et globalisation — Géoconfluences’ <http:// geoconfluences.ens-lyon.fr/ informations-scientifiques/ala-une/notion-a-la-une/ mondialisation-globalisation> [accessed 21 November 2022].

I.

Les normes, des standards établis sur l’humain

I.1

Mise en place et fonction de la norme

Comme entendu dans l’introduction de ce mémoire, on note la distinction entre norme sociale et norme juridique. Aussi, à l’intérieur même de la norme juridique se distinguent deux notions. On parle de normes dites volontaires et, de normes d’application obligatoire.

Définissons ces nuances. La norme dite volontaire selon l’organisme AFNOR, « est un cadre de référence qui vise à fournir des lignes directrices, des prescriptions techniques ou qualitatives pour des produits, services ou pratiques au service de l’intérêt général. »⁵.

Quant à elle, l’organisation France normalisation explique que la valeur d’application obligatoire d’une norme, « est caractérisée par la référence à la norme dans un texte réglementaire comme moyen unique de satisfaire aux exigences du texte. »⁶. En d’autres termes, la norme, quel que soit son caractère applicatif, est une définition globale, applicable par tous et en tout contexte, qui régit la juste manière d’agir ou de faire. Par ailleurs, on retrouve dans la formation du mot norme, le même radical que dans le mot normal. On comprend donc bien, que la norme induit une notion de régularité. À présent que la notion de norme a été définie sous tous ses aspects, comprenons comment la norme a été mise en place, et dans quel but demeure-t-elle.

Dans l’introduction, nous avons indiquez que l’organisation ISO créée en 1947 marquait le début de la normalisation internationale.

Pourtant, la première institution de normalisation internationale recensée, date de 1906. En effet, la commission électrotechnique internationale (C.E.I) a été officiellement mise en place à cette date, après une longue préparation, ayant débuté à partir de 1881. Cette préparation consistait en une succession de congrès internationaux.

Ces derniers ayant pour objectif, de pallier aux désordres que créaient l’hétérogénéité des techniques et unités de mesures, employées dans le domaine électrique. De la création de cette commission, est né l’accord sur un système d’unités de mesures électriques mondiale que nous connaissons tous, avec le volt, le watt, l’ampère, l’ohm et le joule⁷.

C’est le début de la normalisation industrielle. Nous pouvons établir le parallèle entre ce dernier et les prémices de la mondialisation, aussi appelés par les économistes Britanniques la « première mondialisation moderne » situé entre 1880 et 1914, d’après l’ENS Lyon⁸.

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En revanche, les dates du début de la mondialisation vues par les économistes anglo-saxons sont contestées. En effet, la fermeture des frontières liées aux deux Guerres Mondiales qui frappent les nations dès 1914, laisse évidemment entendre que la notion de mondialisation ne pouvait être établie. Toutefois, on note la concordance entre la normalisation internationale et l’apparition simultanée des échanges économiques et techniques sur la scène mondiale. Par ailleurs, on peut déduire que la création de l’organisation ISO en 1947, dans un contexte d’après-guerre, a participé en faveur de la mondialisation, établie plus justement dans les années 80. Cette date étant reliée à la politique de libre-échange, initiée par Ronald Reagan et Margaret Thatcher en qualités respectives, de président des États-Unis et de première ministre britannique⁹. Maintenant que nous comprenons le contexte de création du système de normalisation, approfondissons la manière dont est élaborée une norme juridique quel que soit son caractère applicatif.

⁹ (8)‘Notion en débat’.

Aussi appelé agent économique elle désigne, d’après le site gouvernemental Vie publique.fr, fr <https://www. vie-publique.fr/fiches/270200les-principaux-acteurs-deleconomie> [accessed 26 November 2022].

11 HBO (Health Standards Organization) : organisme à but non lucratif, Canadien, spécialisé dans le domaine de la santé, et créé en 2017.

12 (10) bpellerin, ‘Les sept étapes du processus d’élaboration des normes’, L’Organisation de normes en santé (HSO), 2020 <https://healthstandards.org/fr/ mises-a-jour/les-sept-etapesdu-processus-delaborationdes-normes/> [accessed 26 November 2022].

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En premier lieu, il est nécessaire de savoir que tout acteur économique10 en France à le droit de soumettre un projet de normalisation. C’est-à-dire qu’autant un ménage, au sens économique du terme, qu’une administration publique peut établir une proposition de norme, et ce dans la même mesure. Après la détermination, autrement dit la spécification d’un besoin auquel une norme pourrait répondre, se succèdent six étapes dans le processus d’élaboration d’une norme. En définitive, cela n’est pas moins de sept étapes essentielles et immuables, qui précèdent la publication d’une norme en France. Cette organisation implique ainsi une durée moyenne de trois ans entre la proposition d’une nouvelle norme et sa validation officielle. Postérieurement à l’étape de détermination, c’est le comité qui intervient. En effet, une commission de normalisation constituée de membres experts dans le domaine d’activité concerné, établira ou évaluera le projet qui aura été soumis. Vient ensuite l’étape dite d’étude, qui d’après HBO11, consiste après des recherches, en la création provisoire du texte de la nouvelle norme, par un comité technique12.

Ces trois étapes précédemment citées sont menées à distance sans la nécessité d’un entretien physique, ce qui n’est en revanche plus vrai pour la quatrième étape, appelée consensus. Tel qu’il a été mentionné, le consensus consiste en la réunion des membres du comité technique en personne, dans le but de valider l’ébauche de la norme, pour l’étape suivante. Étape qui se veut être l’examen public, soit la consultation libre de la norme par le public.

Pour ce qui est du rôle de cette étape, il consiste à convier les futurs usagers de cette norme à soumettre leur avis, de manière à améliorer la proposition. De la même manière, cette étape permet d’établir si la norme couvre « l’entièreté des aspects et des perspectives qui importent pour le sujet donné. »13. Suite à cela, le comité technique entre de nouveau en jeu dans l’étape de l’approbation. En conséquence de l’examen public, la commission va réévaluer et modifier la norme, pour en écrire une version définitive qui soit la plus juste possible. Dès lors, nous entrons dans la dernière phase du processus, qui n’est autre que la publication officielle de la norme. Compte tenu de ce qui précède, nous comprenons que la normalisation se veut être un outil, qui dans un contexte difficile auquel faisait face la société, a permis de faciliter les relations internationales, mais également les reconstructions locales.

Cependant, dans la mesure où nous connaissons le contexte de mise en place de la normalisation, ainsi que la manière dont est érigée une norme, la question de l’objectif de la reconduite du système normatif en 2022 se pose. En effet, la normalisation étant née dans le cadre d’une reconstruction après-guerre, nous sommes en droit de remettre en cause l’intérêt de ce système étant donné la situation en France, qui se veut stable depuis de nombreuses années. De ce point de vue, il parait alors nécessaire de discerner les fonctions de la norme.

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(10)bpellerin.

Tout d’abord, la norme répond à une fonction économique et d’innovation.

Effectivement, comme vu précédemment la norme est un cadre de référence, qui donne ainsi lieu à une meilleure compréhension entre les différents acteurs. La norme apparait comme langage universel qui sera clair, tant pour le consommateur que pour le producteur.

Cela est d’ailleurs vrai au niveau national mais également au niveau international. Par conséquent si la compréhension est favorisée, il va de soi que les échanges commerciaux eux-mêmes, en tireront des bénéfices. Dans cet ordre d’idée, si le commerce se voit facilité aussi bien à une échelle nationale qu’internationale, l’économie elle aussi sera favorisée. L’un des exemples les plus frappant concernant le profit économique des normes est celui même des échanges de monnaies. En effet, n’êtes-vous jamais allé retirer de l’argent dans un pays étranger et ce, sans aucune difficulté à insérer votre carte bancaire dans le distributeur automatique. Là encore, c’est le fruit de la normalisation. Nous prouvons par ce nouvel exemple, à quel point la norme favorise les échanges économiques internationaux. Enfin, la monnaie elle-même est standardisée, la valeur d’un euro en France est la même valeur que celle d’un euro en Finlande.

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Ensuite, sur le plan technique la norme joue également un rôle. À ce propos, c’est plus précisément le domaine de l’innovation qui va tirer profit du système normatif. Les textes règlementaires s’avèrent être un fondement solide pour mettre en place des processus techniques valides et fonctionnels. Considérons par exemple, le cas d’une entreprise naissante dans le domaine de fabrication de vélos.

Cette dernière pourra se baser sur les normes qui permettent à un vélo d’être fonctionnel et ergonomique. Ainsi n’ayant perdu ni argent ni temps, dans la recherche et le développement des fondamentaux de conception d’un vélo, l’entreprise aura toutes les ressources nécessaires, afin de s’intéresser à l’innovation et au développement de nouvelles techniques, de nouveaux matériaux, etc. Le tout, afin d’améliorer les performances de ce dernier.

(11)Vincent Giard, ‘La normalisation technique’, Revue française de gestion, 147.6 (2003), 49–65 <https://doi. org/10.3166/rfg.147.49-65>.

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La troisième fonction de la norme, c’est la protection des populations. En effet dans un monde de consommation grandissant, nous sommes en tant qu’usagers amenés à acheter de nombreux objets, outils, électroménagers… Or tous ces biens matériels vendus sur le sol européen, se voient contrôlés, afin de s’assurer du respect de certaines normes, dont les biens connues norme française (NF) et norme de conformité européenne (CE). Ces normes sont pour tout individu un gage de qualité et de conformité14. En sommes lorsque nous achetons un produit sur le marché français, nous sommes assurés de la conformité de production et de fabrication de ce dernier. Ainsi lorsque nous branchons la nouvelle télévision achetée en boutique le matin même, nous n’encourons aucun risque d’électrisation. De même que lorsque nous tenons notre smartphone dans les mains, ce dernier ne risque pas de prendre soudainement feu. Dans l’intérêt des utilisateurs, la norme vise à faciliter l’usage des produits et services.

Par conséquent lorsque l’on change de micro-onde, nous sommes quasiment en mesure de l’utiliser instantanément, car il répond aux mêmes normes que celui que nous possédions précédemment. De la même manière, le code la route permet aux usagers français de connaitre le comportement à adopter sur les routes, de façon à rester en sécurité. De plus, que l’usager soit originaire du Nord de la France ou du Sud, il pourra se déplacer dans tout le territoire sans avoir à se poser des questions, quant à la manière dont il doit agir sur la voie publique.

Compte tenu de ce qui précède, nous pouvons affirmer que l’objectif auquel répond le système normatif français à ce jour, est d’améliorer la société par différents biais. Que ce soit au moyen de l’économie, de l’innovation ou de la sécurité, les normes visent à améliorer le niveau et la qualité de vie des français. Bien que le contexte socio-économique ait changé depuis les années cinquante, période de mise en place de la normalisation, l’objectif de ce système est resté le même : une amélioration de la société. Pour se faire, les normes se basent sur les besoins des usagers, afin d’apporter des réponses adaptées aux Hommes.

En définitive, la norme apparaît comme élément de standardisation, cherchant à créer un modèle unique auquel tout un chacun pourra se référer. Le tout dans le but de développer favorablement la vie sur le territoire français. Cependant, à l’échelle de l’individu, à quoi sert également la norme ?

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Figure 1 : Couverture de l’ouvrage Sociologie politique, une anthologie , par Émile Durkheim

I.2

(12) Gustave-Nicolas Fischer, Les concepts fondamentaux de la psychologie sociale - 6e éd (Dunod, 2020).

16 (12)Fischer.

17 (2)‘Social-Norms-DefinitionsFrench.Pdf’.

18 Le génome est défini par le dictionnaire Larousse comme : « Ensemble du matériel génétique, c’est-à-dire des molécules d’A.D.N., d’une cellule. » 19 (13)Gaspard Claude, ‘La pyramide de Maslow’, Scribbr, 2020 <https://www.scribbr.fr/ methodologie/pyramide-demaslow/> [accessed 3 December 2022].

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Les normes comme élément d’identification et d’appartenance

Il a été établi précédemment, que les normes jouaient un rôle majeur dans la protection des individus, à travers les biens matériels qu’ils possèdent. Mais cela n’est pas tout. De tout temps, l’Homme au sens d’individu, cherche à se construire une identité qui lui est propre. Il s’interroge notamment sur la place qu’il souhaite tenir, dans la société qu’il habite. Mais aussi, la personne qu’il souhaite devenir pour lui-même. C’est un long cheminement de pensé qui habite chacun d’entre nous, de la naissance à la mort. Bien qu’évolutif, ce questionnement persiste, de manière consciente ou inconsciente.

Ce courant de pensée découle de la psychologie sociale, qui indique que l’Homme est un être social, c’est-à-dire que son comportement est modifié par la société qu’il intègre15. Le sociologue Emile Durkheim par des analyses sur l’organisation de la société, a établi que les « règles sociales […] introduisent une régulation dans les rapports entre les individus en créant une certaine harmonie entre les fonctions sociales. »16. C’est en d’autres termes, ce que nous appelons normes sociales. Comme vu au cours de l’introduction de ce mémoire, l’UNICEF défini les normes sociales comme « les règles perçues, informelles, et pour la plupart non-écrites, qui définissent les actions acceptables et appropriées au sein d’un groupe ou d’une communauté donnée, guidant ainsi le comportement humain »17. Ces règles informelles sont en fait fortuites. En effet l’Homme, en tant qu’être social, a une tendance naturelle à l’imitation comportemental.

Ainsi, plongé au cœur d’un groupe, l’individu laisse place à l’aspect social. Scientifiquement ce phénomène est l’opposé du comportement inné (qui est défini par notre génome18), il est appelé comportement acquis. Au même titre qu’un oiseau apprend à chanter par imitation de ses congénères, l’Homme copie intuitivement les comportements des gens qui l’entourent, afin de s’intégrer au groupe. Ce comportement par acquis, découle cependant d’un besoin inné, celui de la survie.

L’humain étant comme vu précédemment, un être social, il a besoin des autres pour vivre. L’intégration dans un groupe est donc un facteur essentiel. Cette notion du besoin d’appartenance a été démontrée dans le passé par Abraham Maslow, psychologue renommé, en partie grâce à un outil d’analyse des besoins des individus, qu’il a conçu.

Son outil est la pyramide éponyme, la pyramide de Maslow, aussi nommée pyramide des besoins, qui fût établie en 195019. Il s’agit d’une classification graduelle des besoins d’un individu ou d’un groupe sous forme de pyramide.

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Figure 2 : Image issue d’une affiche produite par Progress et vous, illustrant la pyramide de Maslow

Cette dernière contient six niveaux de besoins qui sont les suivants : les besoins physiologiques (qui pousse l’individu à vivre et à procréer), les besoins de sécurités (dans cette catégorie l’individu se protège des menaces physiques et psychiques), le besoin d’appartenance (ce besoin est celui qui fait écho à notre propos il est causé par la valeur sociale de l’individu), le besoin d’estime (nous cherchons à être valorisé et reconnu pour nos actes) et enfin, le besoin d’accomplissement (dans le cas présent, il s’agit d’atteindre des objectifs personnels, de se sentir évoluer favorablement dans des domaines qui nous sont propres).

Cette pyramide part de la base, avec les besoins physiologiques pour aller au sommet, avec le besoin d’accomplissement. Cette gradation part ainsi du besoin le plus fondamental, au besoin le plus subjectif bien qu’essentiel, pour la stabilité de la vie d’un individu. Dans un même temps cette gradation indique un accroissement de la difficulté à atteindre les besoins de plus en plus élevés. Une fois de plus, nous avons la preuve du besoin fondamental, que représente l’appartenance sociale pour l’Homme. Pour ainsi dire, les normes sociales se révèlent nécessaires pour répondre au besoin d’appartenance à un groupe.

(14)Éditions Larousse, ‘Définitions : anomie Dictionnaire de français Larousse’ <https://www.larousse. fr/dictionnaires/francais/ anomie/3719> [accessed 3 December 2022].

21 / 22 (15)Éditions Larousse, ‘Définitions : société Dictionnaire de français Larousse’ <https://www.larousse. fr/dictionnaires/francais/ soci%C3%A9t%C3%A9/73150> [accessed 3 December 2022].

20

En dépit de la présence de normes sociales, la société serait totalement désorganisée. La nature étant bien faite, nous pouvons comparer une société à un système solaire. Pour que le système solaire dans lequel nous vivons existe, le soleil apparait comme essentiel, il est le centre de gravitation des planètes qui l’entourent.

Il est le lien qui organise la trajectoire de chaque astre. Si ce dernier venait à disparaître, chaque planète de notre système solaire dériverait dans l’univers avant de mourir. La norme sociale comme le soleil est au centre de l’organisation de la société. En l’absence cette dernière, nous parlerions alors d’anomie, définie dans le dictionnaire Larousse comme une « désorganisation sociale résultant de l’absence de normes communes dans une société. »20. Cette notion fût établie par Durkheim dans ces mêmes recherches sur l’organisation de la société et la valeur sociale des êtres humains. Le concept même de société n’existerait pas. Effectivement, la société se défini par un « ensemble d’êtres humains vivant en groupe organisé »21 ou encore comme « tout groupe social formé de personnes qui se réunissent pour une activité ou des intérêts communs. ».22

13

En ce qui concerne ces normes sociales, elles sont propres à un groupe donné. Cela signifie que selon des facteurs ethniques, culturels, financiers ou tout autre facteur pouvant varier d’un groupe de personnes à un autre, les normes sociales ne seront pas les mêmes.

Typiquement, dans la culture occidentale (basée sur le catholicisme) le fait de s’habiller en blanc à un mariage est symbole de pureté. Par contre en Chine, l’habit blanc symbolise le deuil, en opposition à notre culture qui voit le deuil à travers la couleur noire. Nous pouvons donc dire que ces normes participent ainsi, à la diversité des populations dans le monde, ce qui en fait une grande richesse. À présent, rapportons ces informations aux normes juridiques. Si les normes sociales apparaissent comme cadre de référence auquel chaque personne se réfère, il n’en est pas moins le cas pour les normes à caractère juridique. Ces normes participent activement à la création d’un cadre d’identification. Nous pourrions par exemple au cours d’un voyage dans un pays où la culture n’est pas la nôtre, expliquer « dans ma culture, le code de la route implique que nous roulions à droite et que les piétons soient prioritaires ». C’est en ce sens, que la norme répond cette fois-ci à un besoin d’appartenance.

En définitive, le système normatif, notamment français, cherche à répondre à différents besoins humains. Ces besoins sont autant primaires que secondaires. Quoi qu’il en soit, les objectifs de la norme, visent à améliorer la vie des populations. Nous pouvons dire que l’Homme se révèle, comme la source première dans l’élaboration des normes. Tout est conçu et pensé, afin d’optimiser les situations qui entourent un individu dans un contexte privé, public ou professionnel tout au long de sa vie. La conclusion serait, que les normes sont en effet des standards. Il s’agit d’un moyen comme un autre, qui s’est imposé dans notre société, ayant vocation à faciliter et améliorer la vie des populations.

Nous avons précédemment établi le rôle et la manière dont sont mises en place les normes. Cependant, si l’Homme est le centre des préoccupations, n’est-ce pas en vérité la société et non l’individu qui bénéficie de ce système ?

II. Les limites de la norme II.1

Rejet de l’individu au profit du groupe

Dans le cadre de normalisation des espaces, la norme a souvent omis une majeure partie de catégories de personnes. En effet, régulièrement les femmes ou personnes présentant une différence physique notable (enfants ou personnes âgées), voir un handicap se sont vus oubliés au profit d’un modèle masculin, au physique type considéré comme « normal ». De nombreux exemples illustrent ce constat, ils répondent à l’idée de moyenne à valeur universelle. D’après l’INSEE, la moyenne « est l’indicateur le plus simple pour résumer l’information fournie par un ensemble de données statistiques : elle est égale à la somme de ces données divisée par leur nombre. »23.

Lorsque l’on parle de moyenne, il est donc question d’un calcul factuel, réunissant une quantité donnée d’informations. Ce système de quantification semble somme toute peu rationnel, dans le cadre de statistiques sur l’Homme, lorsque l’on sait la diversité infinie de facteurs différenciants chaque individu. L’INSEE lui-même, émet d’ailleurs la nuance suivante : « la moyenne d’une distribution n’est pas toujours le meilleur indicateur »24. Afin de démontrer que la moyenne n’est pas applicable dans tous les domaines, prenons le cas d’une paire de chaussure. Il est aisé de comprendre que définir une taille de chaussure universelle dans le monde est peu judicieux. Peu de gens se retrouveraient conquis, avec une paire adaptée. Pour le démontrer de manière mathématique, nous faisons les statistiques suivantes. Je choisi un panel qui inclus un homme et une femme aux âges respectifs de 5ans,15ans, 30ans et enfin 65ans. Ainsi mon panel tient compte de tous les stades d’une vie autant chez un homme que chez une femme, on peut dire qu’il est représentatif. Nous répertorions leur taille de pied droit dans le tableau suivant : 5 ans

15 ans

30 ans

65 ans

Sexe masculin

18 cm

24.5 cm

28 cm

26 cm

Sexe féminin

16.5 cm

21 cm

25 cm

23 cm

Tableau 1: Référencement des longueurs de pieds droits du panel

15

Figure 3 : Sculpture Norma, par Dickinson et datant de 1950

À présent que les données sont relevées faisons le calcul de la moyenne : Moyenne = addition des données divisé par le nombre de données =(18+16.5+24.5+21+28+25+26+23) / 8 = 182 / 8 = 22.75 Ainsi on obtient pour cette étude statistique une pointure moyenne de chaussure de 22.75cm. Pour autant cette pointure ne correspond à aucune des personnes retenues dans notre panel. À travers cette étude fictive, nous démontrons que l’usage de la moyenne comme donnée de référence afin de définir une norme est absurde. Dans le cas où nous ciblerions seulement une tranche d’âge ou seulement un genre, ou encore si nous choisissions un panel plus large, les résultats seraient tout aussi probants. Des personnes du panel se retrouveraient avec des chaussures trop grandes, d’autre avec des chaussures trop petites, pour autant seul une infime proportion d’individus répondrait au critère de la moyenne. Ce constat avait déjà été établi en 1945 aux États-Unis, lors d’un concours destiné aux femmes. Afin de remporter le concours, il fallait répondre aux dimensions corporelles d’une sculpture appelée « Norma ». Cette sculpture est l’œuvre d’un gynécologue obstétricien, le docteur Dickinson. Souhaitant mêler sa passion pour l’art à son métier dans la médecine, il accumula durant sa carrière des esquisses de corps de femmes accompagnées de leurs mensurations. Il souhaitait mener une étude afin d’établir le lien entre le comportement d’une personne et sa morphologie. C’est donc au moyen d’un recensement des dimensions corporelles de 15 000 femmes qu’il sculpta « Norma ». À cette époque un engouement se créa autour de cette œuvre alors considérée comme de corps idéal, qu’une femme se devait d’avoir. C’est à ce moment précis que le concours fût mis en place. Contre toute attente à l’époque, le nombre de participantes au concours répondant à ce corps moyen était très faible, « sur les 3864 concurrentes, moins de 40 se situaient dans la moyenne pour seulement cinq facteurs de taille, et aucune d’entre elles […] ne s’en approchait pour les neufs. »25. La moyenne est donc bien une donnée inadaptée dans la mise en place d’une norme.

(16)Larousse, ‘Définitions’.

‘Définition - Moyenne | Insee’ <https://www.insee.fr/fr/ 23

17

Parmi les normes se basant sur la moyenne, beaucoup sont présentes en architecture. Le corps humain étant le fondement, dans la considération de la gestion de l’espace, la moyenne a souvent été un recours. Bien des exemples se distinguent à cet égard. Le célèbre « Modulor » dessiné par Le Corbusier. L’objectif de « Modulor », contraction des notions de module et de nombre d’or, vise à déterminer un système de proportion servant à établir par exemple les dimensions d’un mobilier. Cette étude fût établie sur le modèle d’un homme, valide et mesurant 1m83. Autant dire qu’en terme de représentation de la société, bien des individus se voient lésés.

Quant à la notion de moyenne, nous avons établi qu’il s’agissait d’une méthode assez réductrice, mais dans le cas d’un « Modulor » ou le panel se réduit à un seul individu, on imagine aisément le manque d’inclusion que génère ce modèle de proportions. Or, en 2022, le « Modulor » se présente encore comme une référence dans le domaine de l’architecture. Finalement, en termes de représentation du corps, l’homme valide a toujours été la première référence. Nous connaissons tous « L’homme de Vitruve » œuvre de Léonard De Vinci. Ce dessin datant du XV° siècle, inscrit un homme dans un cercle et un carré.

L’autre nom que porte cette œuvre est « Proportions de l’Homme », ce nom semble bien contestable d’après les précédentes conclusions sur la notion de moyenne. Qui plus est, l’usage du terme « Homme », inclut la notion de tout être humain, alors même que l’étude ne tient nullement compte du sexe féminin. Nos connaissances en biologie permettent d’ores et déjà, de réfuter l’idée que le corps d’un homme puisse servir de référence valable pour une société complète, incluant femmes, enfants, hommes, personnes âgées ou encore personnes porteuses d’un handicap.

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Si l’idée de moyenne semble aussi facilement contestable, comment cette notion a-t-elle pu devenir aussi importante dans notre société ? Il faut savoir que la notion de moyenne a été inventée au XVIII° siècle par des astronomes. Il s’agissait de mesurer la vitesse d’un corps céleste. Ces scientifiques constatant que chaque mesure de célérité était différente, ils eurent l‘idée de cumuler des données afin d’obtenir une mesure moyenne, plus juste que chaque mesure prise individuellement. Cette méthode de calcul purement mathématique a été appliquée à l’individu par Adolphe Quetlet, mathématicien de formation. C’est en 1830, durant une révolution en Belgique que Quetlet se pencha sur le comportement social26.

Il a alors réfléchi à une méthode scientifique permettant de réguler les comportements aléatoires de la société. Cet en ce sens qu’il prit la décision, d’appliquer le calcul des moyennes des astronomes à l’individu. Selon Quetlet, l’Homme moyen était le plus proche de l’Homme originel, faisant de tous ceux qui s’en éloignaient des êtres imparfaits. De cette science sociale, naquit le célèbre indice de Quetlet, plus connu de nos jours sous le nom d’indice de masse corporel (IMC).

Ce calcul basé sur une moyenne, indique supposément les risques de maladies encourues par un individu selon son poids par rapport à la moyenne.

Un autre personnage historique a participé à notre construction stéréotypée d’une société moyenne. En effet à l’heure actuelle nous ne considérons plus l’idée de moyenne comme idéale, mais comme un minimum à atteindre. Il s’agit de l’héritage d’un autre mathématicien, Galton. De son point de vue, Galton concevait l’idée de Quetlet, que la moyenne était un outil efficace afin d’étudier les comportements sociaux. En revanche, selon lui la moyenne n’était pas un idéal. Si un Homme se voulait être dans la moyenne, il n’en serait qu’inférieur.

Galton établi la notion de rang, en mettant en place quatorze catégories auxquelles un individu pouvait correspondre. Ces rangs se posant comme échelle de mesure de la qualité d’un individu, la moyenne se trouvant quant à elle au milieu de cette gradation. Encore aujourd’hui l’héritage de cette science régit notre société. Le système scolaire français en constitue le meilleur exemple, dans la mesure ou le système de notation repose précisément sur l’idée de Galton. Effectivement, la note moyenne représente le minimum à obtenir afin d’être considéré comme suffisamment instruit sur un sujet, et la gradation des notes permet d’évaluer les élèves, du moins compétent, au plus compétent dans un domaine. L’être humain possède une tendance forte à la comparaison, et chacun d’entre nous de manière consciente ou inconsciente, stéréotype les individus à travers divers critères. Nous attribuons souvent des traits de personnalité par exemple à des professions. Dans l’inconscient collectif, un instituteur est quelqu’un de patient, un mathématicien est forcément cartésien ou encore, un gendarme est assurément quelqu’un d’ordonné et de droit. Ce genre de stéréotypes fait écho à l’idée d’Homme moyen. Nous retrouvons l’usage de cette méthode au quotidien lorsque par exemple, un individu consulte un conseiller d’orientation, la tendance à indiquer un métier plutôt qu’un autre découle des stéréotypes de l’Homme moyen.

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Figure 6 : Couverture de l’ouvrage La ville des enfants; Pour une [r]évolution urbaine, par Francesco Tonucci

Lors d’un recrutement encore, le recruteur se basera en partie sur ces clichés, afin de déterminer la capacité du candidat à répondre au poste à pourvoir. D’autres prismes plus ou moins rationnels permettent d’évaluer un individu, c’est le cas par exemple de l’astrologie qui attribue des caractères moyens à des catégories de personnes selon les astres au moment de la naissance. C’est aussi le cas à travers les origines géographiques de quelqu’un, il en va de même selon les biens que possède une personne.

Les normes ne sont certes pas toujours basées sur la moyenne et cherchent à répondre à des besoins humains mais, elles se basent essentiellement sur des constats généralistes. Ces généralités ne permettent pas de répondre à des besoins individuels, ou en tout cas, elles ne permettent pas une large inclusion des différences. Dans son livre « La ville des enfants-Pour une [r]évolution urbaine»18, Francesco Tonucci met en lumière le manque d’adaptation des villes à l’échelle d’un enfant. Ce malheureux constat rappel que les villes ont été construites et organisées en faveur d’une population majoritaire, c’est-à-dire des adultes dans la vie active. En effet, pourquoi irions-nous penser à l’accessibilité des supermarchés pour les enfants ou encore celle des transports en communs, dès lors que la société que nous habitons, attribut des rôles et des besoins à ses différentes catégories sociales.

Ainsi nous modelons l’espace et la vie des citoyens, selon des supposés besoins, sans même donner la parole aux groupes concernés. Notre société à des fins sans doute politiques et sociales, juge les enfants comme des êtres dépendants de leurs parents dont les seuls besoins, sont d’aller à l’école ou d’être menés par leurs parents dans les lieux tiers dont ils pourraient nécessiter (médecin, périscolaire, sport, nourrice, parcs, etc.). La ville n’accorde ainsi aucune indépendance à l’enfant. Ce constat affligeant s’applique à d’autres catégories de la population, dont la vie est conditionnée par la ville. C’est le cas par exemple des banlieues auxquelles Francesco Tonucci relie la notion de « cités-dortoirs ». Cette notion évoque l’objectif lors de la création de ces immeubles froids, presque sans vie, de créer des résidences pour répondre au besoin primaire de logement des travailleurs. L’idée étant que les populations adultes actives, nécessitent un point de chute, afin de se reposer après une journée de travail et ce tout au long de l’année. Or nous savons que ces cités abritent toutes catégories de personnes oubliées, comme les enfants mais aussi les personnes âgées.

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En effet ces derniers n’ont pas la chance d’échapper à leur logement, et sont contraints de subir l’ambiance que peut engranger ces immeubles grisâtres, aux commodités sommaires. Au sujet de la construction de grands ensembles, Alain Bourbonnais au cours d’une interview en 1965, estime l’être humain négligé et dit « On ne répond qu’à un besoin tellement primaire et nettement insuffisant »27. Il qualifie ainsi d’hérésie l’accumulation de normes pour répondre au besoin croissant de logements, au détriment des individus.

Une fois encore, la norme répond plus à des besoins socio-politiques qu’à des besoins à l’échelle de l’individu. L’individu ne semble pas avoir sa place dans la ville. L’espace apparaît comme vecteur de besoins et non l’inverse. En sommes l’individu se retrouve forcé d’adapter ses besoins à l’organisation qu’impose la société, en opposition à l’ordre naturel des choses. De plus, cela implique parfois même que l’individu annihile certains de ses besoins au profit d’un besoin primaire.

[accessed 7 December 2022].

24 (16)‘Définition - Moyenne | Insee’.

25 (17)Todd Rose, La tyrannie de la norme (Place des éditeurs, 2017).

26 (17) Rose.

27 (19) Alain Bourbonnais contre les politiques des grands

II.2

ensembles déshumanisés | INA <https://www.ina.fr/inaeclaire-actu/video/i18143700/ alain-bourbonnais-contreles-politiques-des-grandsensembles-deshumanises> [accessed 21 November 2022].

28 (20) Edward Twitchell Hall, La dimension cachée (Éditions Points, 2014).

29 (21) Benjamin Lee Whorf, Language, Thought, and Reality, Second Edition: Selected Writings of Benjamin Lee Whorf (MIT Press, 2012).

L’individu, unique en tout point

Dans notre société pluriculturelle et multiethnique, même si des normes répondaient parfaitement aux besoins individuels d’une catégorie de personne, automatiquement d’autres groupes seraient lésés. Dans l’ensemble, c’est ce qu’expose le sociologue Edouard Twitchell Hall dans son essai La dimension cachée28. La thèse mise en avant dans cet essai, est que l’espace est un produit culturel.

L’espace ne serait en réalité qu’une perception propre à une culture.

De fait, cette perception est qualifiée de variable, et se pose en limite de la norme qui elle, possède une valeur dite absolue. C’est-à-dire que la norme s’applique à tous, de manière universelle. Ce système de pensée dite absolue ou universelle, est particulièrement propre à la culture occidentale. Hall mesure son propos en évoquant que l’Homme est certes un être culturel mais avant tout un être biologique.

L’exemple de la claustrophobie vient appuyer cette précédente idée.

L’Homme perçoit l’espace par sa construction culturel, mais avant tout autre chose par ses ressentis primaires tel que ses peurs par exemple.

Pour illustrer le fait que la perception des espaces est en partie culturelle, prenons l’exemple d’un logement. En France, un logement est vu comme un abri constant, réparti en différents espaces selon des fonctions définies, le tout séparé par des murs. L’appartement français est donc fixe dans la gestion des espaces, si un besoin de changement s’impose, des grands travaux seront nécessaires pour faire évoluer l’espace de vie. Au Japon en revanche, la conception d’un logement est tout autre. L’habitat japonais est basé sur la flexibilité, les pièces y sont neutres et les cloisons flexibles. Ainsi l’habitat traditionnel est évolutif au grès des envies ou des besoins. Si cette gestion et cette conception de l’espace varie selon notre exemple entre la France et le Japon, c’est uniquement dû à la culture qui est propre à chacun de ces deux pays.

Au même titre que la culture impacte notre perception du monde, la langue que nous parlons participe également au jugement que nous émettons sur ce dernier. À travers l’ouvrage Language thought reality29, Benjamin Lee Whorf, linguiste américain, établi l’existence d’un lien entre notre langue et notre façon de penser et d’agir. Il s’agit de l’hypothèse de Sapir-Whorf30, qui soutient que la langue d’un individu conditionne la pensée de ce même locuteur. Le langage demeure subjectif, au même titre que la culture. Il s’agit d’une construction de l’Homme, comme un outil, afin de faciliter les relations et interactions entre personnes de la même espèce.

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Figure 9 : Illustration de Speed Bump

Qui plus est, le langage n’a rien d’universel, il varie selon les pays, les régions et même les capacités physiques d’un individu. De nombreuses formes de langage existe, la langue parlée, la langue écrite, ou encore la langue signée. Ces constructions linguistiques ont été façonnées, selon des besoins et ne cessent d’évoluer. Afin d’illustrer ce propos, prenons le cas des états physiques de l’eau en français. Nous parlons de glace, de neige, d’eau liquide. De plus nous qualifions ces états par des adjectifs se référents à leurs aspects : blanc ; transparent ; translucide ; bleuté ; etc. Si nous communiquons avec une personne française de ce sujet, et que nous tentons de décrire ce que l’on voit, la compréhension se fera aisément. En revanche, si en tant que français nous tentions de décrire la même chose à une personne inuite, l’incompréhension serait de mise. En effet, les peuples inuits, vivants en immersion permanente dans un paysage de neige et de glace, ont développé dans leur langue pas moins de cent termes permettant de qualifier l’état et l’aspect d’une glace ou d’une neige. C’est en ce sens que l’on peut établir que le langage participe à la perception de son environnement. Un français ne connaissant que quelques termes pour définir l’aspect de la neige, ne percevra la neige qu’à travers le prisme de ces termes-ci.

D’autre part, si l’on perçoit le monde à travers notre culture et notre langue, nous le percevons également à travers un prisme personnel, intrinsèque à chaque individu. Parallèlement à l’idée évoquée précédemment d’Homme biologique, c’est-à-dire qui répond à des besoins innés (la claustrophobie par exemple), l’être humain doit être perçu comme individu ne répondant qu’à ses propres limites et capacités. Dans le sens du dépassement du concept d’Homme moyen, bien des preuves ont été démontrées. En sémiologie de l’espace on parle d’espace qualitatif, il s’agit de la manière dont il est perçu, en opposition à l’espace physique qui se qualifie par ses propriétés physiques. Ainsi l’espace qualitatif est une vision personnelle de la relation à l’espace. La différence principale réside dans l’idée qu’un espace quantitatif est le même pour tout le monde (valeur absolue, c’est un fait incontestable, exemple : la pièce mesure 23m²), tandis qu’un espace qualitatif a autant de vérité que d’individu qui le perçoit (valeur subjective, ressentit émotionnel de l’individu exemple : je trouve la pièce oppressante).

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Figure10 : IRM relevant l’activité cérébrale lors de l’usage de l’audition

Nous comprenons que l’être humain a une pensée structurée par le biais de différents facteurs, variables d’un individu à un autre.

Une personne voit sa pensée construite par sa culture, les groupes auxquels elle appartient, la langue qu’elle parle, son éducation, son vécu et bien d’autres causes. Mais ce simple constat ne suffit pas à justifier l’unicité de chaque individu. En effet, si l’on prend le cas d’un frère et d’une sœur ayant connu les mêmes évènements et les mêmes constructions sociales durant l’enfance, ces deux individus n’auront pour autant pas la même structure de pensée, ni le même prisme de perception. Ce qui explique ce constat découle d’un élément tout à fait immensurable et imprévisible, le hasard. Les humains sont avant tout des êtres rationnels, qui cherchent à justifier les évènements qui les entourent. Pour autant la science n’explique pas tout. Par exemple nous ne pouvons agir sur le sexe d’un embryon, ni prédire ce dernier. Il s’agit d’un pur hasard de la nature qui va définir quel génome prendra le dessus. Notre corps lui-même est donc conçu sur le fait d’un simple hasard. Cela est vrai pour tout ce qui nous constitue physiquement, nos os, la couleur de nos yeux, notre morphologie, nos muscles, notre groupe sanguin. C’est aussi le cas de nos organes et par définition notre cerveau est un organe. Il est donc lui aussi touché par ce hasard naturel. Bien que par la science nous ayons cherché à déterminé le cerveau moyen, les études successives, de l’organe qui régit nos pensées, ont montré que ce dernier ne présentait pas de schéma type d’organisation. Si les zones qui composent notre cerveau sont semblables d’un individu à l’autre, leurs usages varient selon les personnes. Prenons le cas simple, d’une personne gauchère. Si cette dernière est prédisposée à utiliser majoritairement sa main gauche, c’est la résultante de l’usage majoritaire de l’hémisphère droit dans son cerveau, et inversement pour une personne droitière. Cela signifie que la manière dont fonctionne naturellement notre cerveau, notre capacité cognitive, va jouer un rôle direct sur nos capacités musculaires. Si l’on ne rejette pas l’idée même de l’existence d’un cerveau moyen, cela implique de considérer entre autres, la capacité d’écrire d’une main ou de l’autre comme une défaillance, un problème cognitif. Or nous savons que la dextérité n’altère en aucun cas la vie d’un individu gaucher, droitier ou ambidextre. De plus, Michael Miller, neuroscientifique de profession, mena en 2002 une étude basée sur le cerveau31. L’objectif était de répertorier les zones cérébrales stimulées, dans l’usage de la mémoire verbale.

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(22) Encyclopædia

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Il mit en place cette expérience sur seize personnes différentes, et publia les résultats basés sur le principe de la moyenne, afin de mettre en avant les liaisons qui se créent, lors de l’usage de la mémoire verbale. À la suite de la publication de ces résultats, il prit le temps d’analyser individuellement les résultats de chaque cerveau recensé.

Or il découvrit que chaque sujet était parfaitement unique. Ils ne correspondaient ni au cerveau moyen, ni à chacun des autres sujets.

Les schémas organisationnels qui régissent la mémoire comme les capacités de contrôle physique présentent donc tous une unicité, dont nous n’expliquons pas l’origine ou la cause. De mêmes études, portées sur divers usages cognitifs comme l’apprentissage ou les émotions, révélaient le même constat final, aucun cerveau ne fonctionnait de manière identique ou similaire. Chaque cerveau présentait un fonctionnement neuronal parfaitement unique, bien que les tâches à réaliser étaient les mêmes. Nous savons que les moyennes établies sur l’humain sont peu fiables. Les traitements pharmaceutiques sont un exemple parfait, de ce que la théorie des moyennes met en place (sur l’aspect physiologique de l’humain), sans aucune certitude quant à leur valeur, leur fiabilité. Si le dosage d’un traitement est basé sur des calculs de moyenne, la réaction à ce dernier est très variable d’un individu à un autre. Nos organismes sont tous uniques physiologiquement, et nous savons qu’il n’existe pas de règles concernant la manière dont interagissent chimiquement nos corps et ces médicaments. Ces interactions varient tant entre les personnes, qu’avec le temps pour une même personne.

Notre cerveau, en grand organisateur de notre corps et de notre esprit est donc parfaitement unique en son fonctionnement. Ainsi nous cumulons tout au long de notre vie de multiples schémas de pensés, influencés par des facteurs aussi bien internes qu’externes, comme notre culture, nos interactions sociales, le système éducatif dans lequel nous grandissons, et bien d’autres. Autant de facteurs variables qui construisent notre esprit. La perception que nous avons du monde et de nous-même est ainsi guidée sur un chemin évolutif. Ces influences aussi variées soient-elles, vont ainsi participer à constituer notre individualité. Malheureusement, le besoin que nous avons d’exister en tant qu’individu est brimé par les normes, qui créent des limites à cette unicité et cette diversité. Le système normatif de notre société apparaît comme inadapté à l’épanouissement et la reconnaissance des personnes en tant qu’individus. Il est évident qu’une norme ne peut de ce fait, difficilement correspondre à une majorité de personnes, le concept de moyenne étant en parfaite inadéquation avec l’existence même de l’être humain. Le constat à ce stade est que le système de normalisation n’est pas établi sur l’humain mais plutôt sur la société.

L’objectif du système normatif vise à créer un groupe stable (la société), afin de contrôler l’organisation et le fonctionnement du système.

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Figure 11 : Plaque photographique révélant la radioactivité de l’uranium

III. Au-delà de la norme III.1 La norme comme point de départ d’une évolution Ce qui fait la complexité de compréhension des normes en France, correspond à ce que nous pourrions appeler, un désordre normatif. Non seulement les citoyens français sont soumis aux règles imposées par l’État, mais ces dernières s’entremêlent aux législations d’autres instances, comme celles de l’Union européenne. La hiérarchie des lois imposées par les différentes institutions est complexe et s’ajoute à une quantité grandissante de sources à l’origine des normes. Nous constatons deux problématiques majeures auxquelles s’expose la normativité. Il s’agit de la prolifération de ses normes et de leur instabilité. Il se trouve qu’au-delà d’une production croissante des normes, c’est en fait l’allongement des normes elles-mêmes qui est responsable de cette dite prolifération. Qui plus est, la mise en place de ces normes est parfaitement instable. Celle-ci se voit évoluer chaque année au profit d’ajustements sans doute nécessaires, qui entraînent néanmoins un désordre administratif et favorisent l’incompréhension des citoyens31.

Universalis, ‘BENJAMIN LEE WHORF’, Encyclopædia Universalis <https://www. universalis.fr/encyclopedie/ benjamin-lee-whorf/> [accessed 11 December 2022].

31 (17) Rose.

Dans le processus de normalisation, la durée de vie d’une norme prévue est de cinq ans. Cinq ans à l’issue desquels, la norme peut subir différentes modifications. Elle peut être révisée, supprimée, reconduite ou encore amendée. Ainsi l’instabilité de ces normes est aussi un moyen d’ouvrir le système à une amélioration. Si nous considérons le problème de manière optimiste, nous pouvons mettre en avant l’erreur comme un point de départ vers une amélioration constante. Nous connaissons l’expression célèbre en France, qui implique d’apprendre de ses erreurs, c’est ce principe là que nous allons considérer dans cette partie. L’erreur est le prétexte idéal pour entreprendre un dépassement, d’autre part cela permet de voir un potentiel d’action. L’exemple le plus significatif est celui de l’enfant.

En effet, tout son apprentissage est basé sur l’erreur, c’est le cas de la marche. L’enfant chute et rechute encore et encore, jusqu’à ce qu’il comprenne, tant musculairement, qu’intellectuellement la manière dont il faut se tenir afin d’être stable. Dans un second temps, prenons le cas de la science par exemple, qui a souvent révélé par des erreurs, de grandes avancées. Ce fût le cas pour la découverte de la radioactivité par exemple. Henri Becquerel (physicien) a par erreur glissé un caillou d’uranium dans un tiroir qui contenait des plaques photographiques (ancêtre de la pellicule)32.

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Ces mêmes plaques lors du tirage photographique ont révélé la silhouette du fragment d’uranium, en l’absence même de lumière. Ce constat permis de déceler la présence d’un rayonnement interne à l’uranium, la radioactivité.

L’erreur se présente comme une source d’innovation et de découverte.

Qui aurait découvert l’Amérique si Christophe Colomb n’avait pas raté ses calculs de trajectoires ? Certains exemples rappellent que l’erreur régis nos vie que la résultante de cette dernière soit immédiatement une grande avancée ou non. Dans tous les cas, il ne faut pas blâmer des inexactitudes de parcours, car c’est un parcours sur une longue distance que nous parcourons. Il est semé d’embuche et évolutif, ce qui était vrai hier ne le sera plus demain et inversement, et c’est pour cela qu’il vaudrait mieux pour nous de se servir des erreurs comme un levier vers une évolution constante.

(23) Le Conseil d’État, ‘La dispersion des normes’, Conseil d’État <https://www.conseiletat.fr/publications-colloques/ discours-et-interventions/ la-dispersion-des-normes> [accessed 12 December 2022].

33 (24) La rédaction d’Allo Docteurs, ‘Histoire de la découverte de la radioactivité’, AlloDocteurs, 2011 <https:// www.allodocteurs.fr/archives32

Aussi, en science psychologique, il existe une approche dite centrée sur la personne. Cette méthode d’analyse psychologie est aussi appelée, approche rogérienne, issue du nom de son fondateur Carl Rogers, psychologue de la seconde partie du XX° siècle33. Le processus utilisé dans cette approche consiste en l’usage d’approximations, afin d’évoluer d’une vérité inexacte vers quelque chose de plus juste. Le concept repose sur l’idée qu’un accompagnement positif et loin de toutes formes de découragement, favorise une correction naturelle et progressive de la perception de la vérité par le patient34. Une fois encore, l’erreur n’est pas réprimable. Elle est perçue positivement, comme un palier franchi vers l’objectif de justesse. Appliquée à notre sujet, cette méthode serait une manière moins radicale d’appréhender l’aspect imparfait de la norme. Nous pouvons entendre que l’erreur est humaine, par cela nous comprenons qu’il est nécessaire d’agir et de penser en acceptant la présence d’erreurs dans notre société et en travaillant de pair avec celle-ci, plutôt qu’en tentant de la réfuter, de la nier. Il parait préférable de considérer l’erreur afin d’évoluer positivement dans une société qui ne peut être qu’imparfaite. Se refuser à l’erreur serait une forme de déni de cette dernière, obstruant quelconques améliorations de notre organisation sociétale.

33

histoire-de-la-decouverte-dela-radioactivite-3709.html> [accessed 12 December 2022].

34 (25) ‘Qui est Carl Rogers ?’, ACP-France <https://www. acpfrance.fr/qui-est-carl-rogers/> [accessed 15 December 2022].

35 (26) André de Peretti, ‘Apprendre par les erreurs, ou le courage de l’approche rogérienne’, Approche Centrée sur la Personne. Pratique et recherche, 10.2 (2009), 29–44 <https://doi.org/10.3917/ acp.010.0029>.

36 (27) ‘L’exception qui confirme la règle’, Dictionnaire Notretemps.com, 2020 <https:// dictionnaire.notretemps.com/

Nous pourrions ainsi envisager la normativité d’une nouvelle manière.

Il faudrait non plus chercher à créer de nouvelles normes, innovantes et faisant échos à l’évolution du monde, mais à constituer une analyse de tout ce qui a pu être mis en place auparavant, pour améliorer l’existant. Il s’agit alors, non pas de rejeter ce qui a pu être érigé par le passé mais au contraire de s’appuyer sur ces anciennes normes, comme un outil d’analyse. Sur le même principe que l’approche centrée sur la personne en psychologie, on se sert de la source de savoir que nous apporte les précédentes erreurs, afin d’améliorer les normes sur la base de ce savoir. Ce savoir représente une forme de vérité car il est basé sur des expériences concrètes. C’est le concept d’apprentissage par l’erreur. À l’heure actuelle, les normes sont toujours construites sur de nouveaux constats en liens avec l’évolution de la société et les dissonances ou problèmes qu’elle implique. Ainsi c’est une manière d’envisager que le problème des normes ne réside pas dans le système normatif lui-même, mais plutôt dans la manière de concevoir les normes.

En somme il faut accepter l’erreur pour la dépasser. Dans le cas présent, nous acceptons que les normes soient imparfaites dans le but de tendre à une amélioration. Nous connaissons plus ou moins tous l’expression, « C’est l’exception qui confirme la règle ! » cette expression est issue d’une règle juridique latine traduite par « L’exception confirme la règle pour les cas non-exclus. ». Cette locution signifie à l’origine que l’exception ne peut être établie si la règle n’existe pas. En ce sens nous comprenons que l’existence d’exceptions appuie la nécessité de la règle35. Afin de clarifier cette analyse, prenons l’exemple d’un constat actuel, le dérèglement climatique. Il peut nous arriver d’exprimer le fait suivant « Cet hiver est particulièrement doux. » la règle induite ici, est que l’hiver doit être froid. Cela appuie la nécessiter d’établir les températures moyennes de l’hiver, afin de pouvoir analyser ceux qui ne répondent pas à ces dernières. Par cela, nous comprenons que la norme bien que contestable est essentielle, et que son aspect contestable découle uniquement du fait de son existence. Si rien n’était mis en place, nous ne pourrions pas contester, ainsi aucune évolution ne serait possible.

La norme par son existence propre est la source d’une amélioration, bien que son existence soit imparfaite. La norme est décrite par Xavier Roth dans La Revue du Financier, comme « équivoque »37. En effet, elle se partage entre ses aspects, à la fois de « conditions et d’obstacle »38. À la fois nécessaire dans l’organisation de la société pour hiérarchiser les droits et les devoirs. Elle apparaît également, comme une contrainte car elle est imposée aux individus tout au long de leur existence, en présentant parfois des incohérences avec la vie de ces derniers.

35

III.2 « Transpasser » la norme Toute loi est perfectible, bien que nous résidions dans un État de droit, ce dernier ne garantit en rien une justice idyllique39. C’est pourquoi le citoyen ne doit pas ignorer sa capacité à faire évoluer les lois. En cela nous pourrions comprendre que se refuser à la loi serait une solution afin de faire avancer le système normatif40. Cependant l’acte de désobéissance, pour qu’il est un impact, se doit d’être motivé par une volonté citoyenne d’induire une amélioration des normes. L’acte de contestation doit donc être fait de manière consciente et responsable.

La désobéissance nécessite ainsi, de tenir compte de deux facteurs.

Les objectifs défendus pour cet acte mais également, la forme que prend la désobéissance. Cela répond donc à deux questions, pourquoi le faisons-nous et comment agissons-nous ?41 Nous parlons de désobéissance civile lorsque la désobéissance est collective, publique et qu’elle n’implique aucune forme de violence. L’idée principale étant de se refuser à une norme sans renoncer à la loi de manière globale.

Ce fonctionnement passif permet de faire acte de légitimité et de sincérité dans l’acte de rébellion. Cependant, la désobéissance n’en est pas moins le dernier recours car des moyens légaux existent afin de faire entendre sa voix. N’oublions pas que la désobéissance civile est un acte qui induit des conséquences juridiques, étant donné que le désobéissant outrepasse une règlementation.

expressions/lexception-quiconfirme-la-regle-398> [accessed 15 December 2022].

37 (28)Xavier Roth, ‘Les cinq dimensions fondamentales de la norme’, p. 5.

38 (28) Roth.

39 (23) d’État.

40 (29) Olivier Babeau and Jean-François Chanlat, ‘La transgression, une dimension oubliée de l’organisation’, Revue française de gestion, 34.183 (2008), 201–19 <https://doi. org/10.3166/rfg.183.201-219>.

41 (30) ‘A quelles conditions

De fait, nous entendons par le terme « transpasser », l’idée d’un dépassement en excluant la notion d’illégalité, comme pourrait laisser entendre le verbe « transgresser ». L’idée première pour l’évolution des normes serait une évolution des consciences. Il s’agirait à une échelle individuelle, de prendre conscience de l’absurdité que tient la place de moyenne dans notre société. Par cet éveil de conscience, chacun à son échelle pourra ainsi faire l’effort de déconstruire sa pensée stéréotypée. Si tout un chacun à son échelle, réussit à travailler sur cet aspect, alors la suite s’enclencherait de manière naturelle à la manière de dominos. Grâce à l’ouverture du dialogue à ce sujet, chaque individu ayant fait le travail de déconstruction pourra à son tour planter une graine de réflexion chez son entourage, et ainsi de suite. Ce processus est certes long et fastidieux, mais il s’agit de la manière la plus pérenne d’instaurer de nouvelles normes en accord avec la société. Au-delà de la simple prise de conscience personnelle et de la communication avec l’entourage, chacun d’entre nous possède la liberté de se joindre, de s’allier à des groupes dont la pensée est commune.

37

Figure 12 : Statistique de l’INSEE relevant l’accès à internet en 2021

Le droit de réunion, d’association et de manifestation, permet ainsi à ces groupes de se faire entendre, et de mener des actions, afin de rallier d’autres personnes à leur cause. Le fait de s’associer permet de donner plus de force aux idées prônées et par conséquent donne un accès à une cible d’autant plus large. De nos jours, la communication est une alliée de taille car de nombreux médias sont accessibles.

Les réseaux sociaux, utilisés à bon escient et de manière pertinente, semblent représenter une grande force afin de faire entendre sa voix.

peut-on ou doit-on désobéir aux lois ? - L’expérience maçonnique en mixité’ <https://www. droithumain-france.org/a-quellesconditions-peut-on-ou-doit-ondesobeir-aux-lois/> [accessed 12 December 2022].

42 (31) Dominique BOULLIER, ‘Le « hard » du « soft » : la matérialité du réseau des réseaux’, , CERISCOPE <http:// ceriscope.sciences-po.fr/ puissance/content/part2/le-harddu-soft-la-materialite-du-reseaudes-reseaux?page=8> [accessed 18 December 2022].

43 (32) ‘Soft power (puissance douce) — Géoconfluences’ <http://geoconfluences.enslyon.fr/glossaire/soft-power>

À l’ère des technologies et du numérique, l’usage d’internet et des médias qui y sont disponibles, apparait comme une force de frappe immense. Grâce à cette toile mondiale interconnectée, un seul article ou publication peut toucher une cible large comme le monde. En effet, hormis l’outil de censure que peuvent mettre différentes institutions sur les propos partagés, les possibilités d’atteindre différentes cibles semblent infinies. Internet se pose en outil comparable à ce que l’on nomme en géopolitique le soft-power42. Le concept de soft-power, ou puissance douce, induit la notion d’influence que peut avoir une puissance (généralement un État) sur une autre (alors vue comme influencée). La culture d’un pays représente par exemple une forme de soft-power, tandis que la puissance militaire d’un pays, serait quant à elle attribuée à la notion de hard-power43. Internet par son potentiel d’exposition est une arme d’information. L’INSEE relevait qu’en 2021, 93% des ménages français avaient accès à internet et estimait l’accès à internet dans l’Unions européenne (avec 27 pays) à 92%44. Ces données statistiques sont évocatrices de la quantité de populations, qu’internet permet d’atteindre.

Par-delà l’éveil des consciences communes et le militantisme par la communication, les groupes citoyens revendiquant un changement dans la société peuvent mener des actions légales, tout en marquant les esprits. Les manifestations peuvent prendre différentes formes des plus « légères » aux plus radicales. La manifestation est en fait le moyen de montrer au monde entier un problème décelé dans un contexte précis et par un groupe d’individus. Lorsque l’on pense manifestation en France, c’est l’idée d’une marche qui fait surface. En effet, de tout temps l’une des formes de manifestation les plus courantes est la déambulation des citoyens dans les rues de sa ville. On appel ce mouvement, manifestation de rue, qui est une forme de prise à parti de l’espace en lui-même. L’État se définit par sa population regroupée sur un territoire délimité, et dans lequel

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Figure 13 : Affiche produite à l’école des Beaux arts de Paris en mai 1968 par des manifestants

une organisation politique est établie. Nous comprenons que si les populations d’un État prennent à parti son territoire, alors deux des trois composantes définissant l’existence même de l’État sont mises à mal. Selon l’ampleur que pourra prendre cette forme de manifestation, l’organisation étatique pourrait être fortement contrainte à une réponse rapide quant aux revendications de ses citoyens. D’autant que la manifestation peut induire une paralysie partielle de la vie dans la zone atteinte, causant un trouble à l’ordre public45. En plus de tenir captif le territoire comme otage, la manifestation expose au grand jour ce qui est vu comme problématique aux yeux d’un groupement de citoyens. Ces manifestations de rues peuvent être statiques ou en mouvements, silencieuses ou bruyantes. Parmi les manifestations marquantes de la France nous pouvons évoquer le mouvement de Mai 68. Ce mouvement de contestation fût mené par des étudiants afin de contester le système universitaire notamment. Bien que ce mouvement fort n’obtint pas de victoire directe, la société française s’est vue évoluée après cela. On note par exemple la mise en place de la loi sur les syndicats d’entreprise46.

(34) Danielle Tartakowsky, ‘Introduction’, in Les Manifestations de Rue En France : 1918-1968, Histoire de La France Aux XIXe et XXe Siècles (Paris: Éditions de la Sorbonne, 2021), pp. 6–22 <http://books.openedition.org/ psorbonne/62332> [accessed 20 December 2022].

46 (35) Éditions Larousse, ‘événements de mai 1968 LAROUSSE’ <https://www. larousse.fr/encyclopedie/ divers/%C3%A9v%C3%A9nements_de_mai_1968/131140> [accessed 20 December 2022].

47 Code Civil ; Article 16-3 45

Si certaines formes de manifestation se veulent oppressantes pour contraindre les hiérarchies supérieures à réagir, d’autre font appel à un registre tout autre que l’oppression. C’est le cas par exemple des grèves de la faim. La grève de la faim constitue un droit civil, en effet l’article 16-3 du code civil indique « Il ne peut être porté atteinte à l’intégrité du corps humain qu’en cas de nécessité médicale pour la personne ou à titre exceptionnel dans l’intérêt thérapeutique d’autrui.

Le consentement de l’intéressé doit être recueilli préalablement or le cas où son état rend nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle il n’est pas à même de consentir. »47. Cette loi met en opposition le devoir d’assistance à personne en danger avec celle du libre choix de l’individu. Ce conflit éthique est le fondement même de l’oppression qu’implique cette forme de manifestation. Quiconque ne peut concevoir qu’un individu sein d’esprit perde la vie au profit d’un combat socio-politique. Mettre sa vie en péril au profit d’une cause que l’on souhaite défendre, cela revient à vouer son action, à persuader le destinataire que la cause en vaut la peine. En effet, le manifestant par son action fait appel aux sentiments de sa cible. En tant qu’humain on ne peut considérer qu’un individu ne puisse mettre sa vie en danger au profit d’une cause qui n’en vaut pas la peine. Il ne s’agit pas d’une forme d’argumentation raisonnée faisant appel à des constats, mais l’objectif n’est pas dans l’immédiat d’obtenir une victoire.

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Figure 14 : Le Mahatma Gandhi en 1945. Rue des Archives-PVDE

Il s’agit plutôt de forcer l’opposant à reconsidérer les décisions qui ont mené à cette action aussi radicale du citoyen. Pour exemple, l’une des figures les plus connues, si ce n’est la figure la plus connue de l’usage de la grève de la faim comme moyen de revendication, est le très célèbre Mohandas Karamchand Gandhi (aussi appelé Mahatma).

Gandhi en grand revendicateur de la non-violence eut, de nombreuses fois au cours de sa vie, recours au jeûne afin de faire valoir ses idées.

Il usa de cette méthode en Inde de 1915 à 1922 par exemple afin de prôner la liberté de l’Inde face au colonialisme48. Avocat de formation Gandhi prônait l’idée que prendre la douleur sur soi était la forme la plus juste pour faire valoir la vérité. L’idée ici n’est pas de prôner le jeûne comme moyen de pression optimal pour obtenir des résultats au près de hautes instances. Cependant, exposer ce type de boycott permet de comprendre que les formes que peuvent prendre des manifestations sont variées. Il n’existe pas en ce monde d’option idéale, permettant de mettre tout le monde d’accord, et de vivre chacun à son échelle de manière parfaitement épanouie. Néanmoins, il existe de nombreuses options pour faire entendre sa voix. L’idée reste toujours que chacun puisse s’exprimer et se battre pour les causes qui lui semblent justes tout en préservant la paix.

48 (36) Éditions Larousse, ‘Mohandas Karamchand Gandhi surnommé le Mahatma la Grande Âme - LAROUSSE’ <https://www. larousse.fr/encyclopedie/personnage/Mohandas_Karamchand_ Gandhi/120779> [accessed 20 December 2022].

49 (37) Gilles Deleuze, Deux régimes de fous : textes et entretiens 1975-1995 (Paris : Éditions de Minuit, 2003) <http:// archive.org/details/deuxregimesdefou0000dele> [accessed 20 December 2022].

Cela nous amène à l’une des formes d’expressions les plus libres et créatives, l’art. Une citation de Gilles Deleuze évoque justement « une affinité fondamentale entre l’œuvre d’art et l’acte de résistance »49.

L’art est une manière de dénoncer et de communiquer, de façon implicite. Le spectateur face à l’œuvre sera libre d’interpréter ce qu’il perçoit, mais l’artiste au travers de cette œuvre aura quoi qu’il arrive, orienté toute sa réflexion autour de son idée. Quel que soit donc le degré dont sera perçue cette idée par le spectateur, la communication aura eu lieu entre l’artiste et le spectateur, au moyen tierce de l’œuvre.

L’art se présente sous plusieurs formes, ces formes sont telles que tout être humain est affecté par au moins un type d’art. Ces éléments font de l’art une belle manière, aussi subtile soit elle, de véhiculer des idées et d’induire des changements dans la société, en suscitant l’éveil des consciences comme vu précédemment. Que ce soit la peinture, la musique, la littérature, ou encore l’architecture, ces formes d’art ne peuvent pas être dénuées de sens et transmettent toujours des points de vue. Quelques exemples semblent requis afin d’illustrer de la manière dont une œuvre peut à elle seule détourner les normes sans pour autant les outrepasser.

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Figure 15 : Le Magasin, Affiche Daniel Buren impression numérique 64x83.7

L’Atelier Construire fût fondé par Patrick Bouchain en 1986, l’atelier prône l’anticonformisme50, à l’image de Bouchain lui-même. Ce dernier a notamment dépassé la norme lorsqu’il fallut, en 1985, créer un centre d’art contemporain à Grenoble, le tout dans un hangar industriel à l’abandon et sans aucune marge budgétaire. Il eut alors l’idée de tout simplement ne rien faire. Son concept résidait en la réhabilitation du bâtiment existant dans le strict respect des normes de sécurité. C’est comme cela que Le Magasin à l’état de friche est devenu centre d’art, au moyen de simples agencements internes dits « boîtes muséales autonomes »51. Dans le cas présent, c’est par l’absence de réponse que l’architecte apporte une réponse. Nous pourrions analyser ce concept, comme un moyen de dénonciation des contraintes budgétaire trop importantes des institutions. Comme la mise en exergue d’une dissonance entre les envies et les capacités de la ville de Grenoble, ou encore, comme le moyen pour l’architecte de montrer le manque de moyens qui lui sont accordés et ainsi son incapacité à créer dans de telles conditions. Nous comprenons qu’autant d’interprétation que d’individus qui analysent ce concept sont possibles. Qui plus est cela nous permet de prendre la mesure de l’impact que peut avoir un concept artistique, de la force de l’art à pousser à la réflexion et de sa capacité, dans une plus large vision, à remettre en perspective les normes qui sont enjointes par notre société.

50 (38) CONSTRUIRE, ‘5/ En résumé’, CONSTRUIRE <http:// construire-architectes.over-blog. com/5-en-resume.html> [accessed 20 December 2022].

51 (39) ‘Frac centre’ <https:// www.frac-centre.fr/collection-art-architecture/ bouchain-patrick/le-magasin-centre-national-art-contemporain-grenoble-64. html?authID=411&ensembleID=1829> [accessed 25 September 2022].

D’autre part, Francesco Tonucci dans son ouvrage La ville des enfants ; Pour une [r]évolution urbaine, suggère de se servir de l’enfant comme référence en urbanisme. L’hypothèse exposée, est que si la ville est adaptée à un enfant alors ont répondra aux besoins d’un maximum d’individus. L’enfance étant la période dans laquelle, tout est un apprentissage et un obstacle, elle semble être le modèle idéal pour concevoir une organisation qui s’adapte au plus grand nombre.

Dans ce cas d’exemple, on garde l’idée d’une base pour la norme, cependant on change de prisme de vision. Plutôt que le modèle établi se base sur les personnes qui conçoivent les normes, c’est-à-dire des adultes actifs en pleine capacité intellectuelles et mentales. On se place à l’échelle de l’individu le plus en difficulté dans notre société dans le but de répondre aux besoins du plus grand nombre.

45

Conclusion

Pour conclure, nous pouvons établir que le système normatif est nuancé, comme beaucoup d’éléments dans notre société. D’une part, la norme répond à de nombreux besoins à l’échelle nationale. Elle permet une organisation socio-politique du territoire. Cette dernière engendre également un développement de l’économie et de l’innovation. Enfin, elle joue un rôle dans la protection des populations sur l’aspect sécuritaire. D’autre part, la normativité présente des limites, comme le rejet de l’individu. En effet, si ses principes sont basés sur des besoins sociaux donc sur l’humain, elle ne tient aucunement compte du besoin d’estime de l’individu, bien qu’en contrepartie, elle réponde à un besoin d’appartenance. L’humain présentant de bien trop nombreux facteurs variables jouant sur son unicité, ne peut donc pas répondre à des normes universelles basées sur un modèle type. Elle se révèle comme élément de ségrégation des individus dans la société selon des critères variés (âge, sexe, capacités physiques et/ou mentales, etc.), auxquels il est difficile de s’identifier. La norme dans sa composition actuelle est donc équivoque et présente autant des fonctions essentielles que des limites inadaptées aux populations.

Par conséquent à la problématique de départ : Les normes sont-elles sources d’inégalités dans notre société ? Nous ne pouvons trancher clairement. Dans un sens le système normatif crée des inégalités, nous l’avons vu notamment au travers de la place de l’enfant dans la ville par exemple. Cependant d’un autre sens, nous sommes tous perçus de manière égale face à la norme, à travers sa valeur universelle.

De manière plus nuancée, nous avons vu que ces dernières, bien qu’imparfaites, par leur existence même sont le point de départ d’une amélioration.

Enfin, il est nécessaire de préciser qu’au-delà de sa nature à évoluer, la norme doit être contestée en temps utiles. Les citoyens chacun à leur échelle ont la responsabilité et le devoir de prendre part à l’organisation de ce monde, et ce au travers de moyens quels qu’ils soient. Une profession, un art, une manifestation, une association sont autant de moyens pour faire entendre sa voix et participer à une amélioration de notre quotidien.

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L’individu face à la norme Élodie POIRIER Mémoire de fin d’étude 2022/2023