Revue Vie chrétienne N°53- Mai/Juin 2018

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Billet

Un étrange rendez-vous de mots, de rites et d’amitié : le temps de la messe. Une entrée dans un lieu habité par une présence, oui, mais invisible. Une conscience du sacré, sans doute, mais si peu exprimable. Dans cette église, mon corps, seul, semble dire quelque chose de mon adhésion, de mon désir. J’ai marché jusqu’ici. Je suis là. Tutoyer Dieu, Lui parler ? Une créature s’égalant au Créateur ? Recevoir de Lui, le commandement, le pardon, l’espérance ? Être – simplement – accueilli dans Sa maison ? Je me signe. Cet acte inouï de dire « je crois ». Et juste après, ces mots immenses : « Père tout-puissant », « créateur du ciel », « né avant tous les siècles », « lumière, née de la lumière ». Aussi difficiles que l’affirmation de ma foi sont ces mots de résurrection et de vie éternelle. Plus que le verbe croire, celui d’attendre me semble accessible, à ma portée. Partagée avec l’assemblée, cette attente me paraît plus forte. Je fais chœur et je récite. Consécration ! Ai-je part à ce mystère ? Comment concevoir cette image prodigieuse de Jésus le Nazaréen descendu sur l’autel et fait Pain de Vie ? À cette divinisation d’un repas ? J’incline la tête. Cette prière qu’Il nous a apprise. Conservée et répétée chaque jour depuis 2000 ans par des millions de disciples. Les mots d’un Dieu. Plus jeune, je les disais mécaniquement. Un jour j’ai regardé le geste de ma mère. Un peu de mon cœur a suivi. Comme tu l’as fait, maman, comme eux, j’ouvre les mains. Départ, en défilé, pour un acte qui, cette fois, paraît très humain. Recevoir des morceaux d’un même pain partagé. Simple. Tant que cela ? C’est « le corps du Christ » me dit celui qui le distribue. Je tends le bras. Pas une étape où je ne me sois senti dépassé, souvent indigne, parfois absent ou étranger, voire imposteur. Pas une fois où les paroles et les signes exprimaient totalement ma vérité intérieure. Je sais que ce n’est pas grave. Que je ne suis pas jugé. Que le désir de Le rencontrer L’atteint. Le croyant est comblé et le dit au Père. Je le suis quelquefois. Pour le malcroyant du reste du temps, mes gestes sont aussi ma prière. Jean François mai/juin 2018 39

©Wideonet / iStock

la foi d’un malcroyant


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