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les presses du réel
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5 91 éditions TERRACOL �
éditions TERRACOL
les presses du réel
DomenicoMennilloJean-FrançoisBoryCésarEspinosaOlivierDomerg
1 20 euros
6
6
591 # 6 éditions TERRACOL
les presses du réel
1
591 automne 2019
5 nathalie leger-cresson Marianne ebel claire gillie christian desagulier luc champagneur cesar espinosa jean-françois Bory domenico mennillo olivier domerg demostene agrafiotis jacques Sicard
9 1
max bense jean-pierre bobillot asnaqetch werku
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391
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591
nosserc-regel eilahtan lebe ennairaM
:
Alfred
Stieglitz
:
Francis
René
Drouin,
Marcel
Duchamp
(1915)
Picabia
Michel
Jean-François directeur
(1917)
Tapié
Bory
(1949)
(2015)
christian Désagulier rédacteur en chef
eillig erialc reilugased naitsirhc ruengapmahc cul asonipse rasec yroB sioçnarf-naej ollinnem ocinemod
revue internationale / rivista internazionale / revista internacional / international review / internationale zeitschrift / לַאנרושז עלַאנָאיצַאנרעטניא/ ימואלניב תע בתכ/ международный журнал / διεθνές περιοδικό / internationell tidskrift / ةيلودلا ةلجملا/ iwe iroyin agbaye / 国際ジャーナル / / ...
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6 les presses du réel
Nathalie LĂŠger-Cresson
5
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TOUTE LA L
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59 et pourquoi ?
0/ OURS (p. 4)
(p. 180)
Nathalie Léger-Cresson
Max Bense Éléments de ce qui se passe (p. 181) Les plaisirs précis (p. 189)
1/ TOUTE LA L1RE À 591 ET POURQUOI (p. 9)
L'essai de Max Bill : « La pensée mathématique dans l'art de notre temps » (p. 194)
2/ AGGRAVATIONS (p. 12)
Jean-Pierre Bobillot René Ghil, une anté-tradition futuro-lettriste (p. 204)
Claire Gillie Exode, exil, ou transhumance des voix de femme ; la Quête du « Grâave » (p. 13)
7/ RÉSERVOIR DES LIMBES (p. 222)
Marianne Ebel Théorie du récit, introduction aux « Langages totalitaires » (p. 29)
Exposition ISIDORE ISOU au Centre George Pompidou le 5 mars 2019 (p. 223)
christian Désagulier Le désordre est la moitié de la vie (et le désordre
Jean-François Bory Une affreuse intoxication (p. 226)
la seconde) (p. 46)
3/ ALLOPHONHICS (p. 50)
TV Deum (p. 228)
8/ « DES LIVRES ! ON N'EN LYS PAS ! » (p. 240)
Luc Champagneur (première partie, p. 52)
9/ « ET TOUT FINI-IT PAR UNE CHANSON. » (p. 243) 4/ RÉCITATIFS (p. 86) Claire Gillie La petite chaise de Monsieur Seguin (p. 89) Domenico Mennillo La Vita è Altrove (p. 109) Jean-François Bory Main Street (p. 113) César Espinosa ¡May Day! El futuro en retroceso : USA (p. 115) Olivier Domerg RoMANSE sans parlotte (p. 148) Demostene Agrafiotis The importance of the multiplicity of minor events (p. 163)
5/ MACROFILMS (p.171) Jacques Sicard Opus 8 Les saisons de Marcel Hanoun (p. 173, extraits) Opus 10 D comme Deleuze (p. 176, extraits)
Asnaqètch Wèrqu Endè lyèrusalém (p. 244)
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Exode, exil, ou tranhumance des voix de femme ; la Quête du «Grâave » Claire Gillie Un bivouac d’avant l’ombilic La voix grave, c’est celle qui redonne du corps à la voix, creuse un asile dans le bas du corps, jaillit des entrailles, de derrière l’ombilic qui fut notre première blessure à l’entrée dans le monde. Une voix « poitrinée » qui parle de ventre à ventre, d’entrailles à entrailles. Une voix qui, d’un sujet à l’autre, d’une tessiture vocale à l’autre, s’inscrirait dans un mouvement, dans un certain passage. Mais de quelle passe s’agirait-il ?
A G G R AVAT
IO NS
Mue, exode, exil, transhumance, ou bien encore errance ? Marche des femmes vers un devenir autre qui passerait par une voix autre ? Une marche errante, titubant entre grave et aigu, mais mue par une quête dont le sonore ne serait que le masque ? Cette quête serait tournée vers des retrouvailles avec une jouissance et des paroles perdues, sans doute devrons-nous rajouter, avec une voix perdue, si ce n’est un silence perdu… Sans doute un silence structurel qui est celui qui aurait présidé à la Genèse, avant que Dieu - opérant son Tsimtsoum1, se retirant de devant la surdité de l’homme - ne vienne créer un trou dans ce silence. Trou hors-sonore, qui serait venu « tohu-bohuter » le creuset de la parole et le nid du parlêtre, brouillant à jamais les pistes de savoirs pluriels s’acharnant sur la polémique du « son-sens ». En tous les cas, il y aurait là de l’errance, un égarement volontaire, hors des sentiers battus, un chemin vectorisé entre perte et quête. Une transhumance créatrice d’un mouvement, d’un élan : « arsis » auraient dit les chantres du grégorien, qui savaient qu’arsis va de pair avec thesis, à savoir le moment où tout se pause, se pose, se re-pose. A l’arsis du corps pris dans l’élan, à la tension du corps qui aiguise la voix vers l’aigu, répond le thesis d’un corps détumescent, corps qui se grave … voix grave du corps qui reprend son souffle. Bivouac … Voix bivocale qui se découvrirait donc douée de grave et d’aigu, voix bisexuelle qui émargerait à l’ordre fantasmatique de l’androgynat. C’est à la croisée de la musicologie et de la psychanalyse, et à la lumière de l’anthropologie psychanalytique, que nous convoquerons ici les voix graves des femmes. Il s’agira ainsi d’élucider le système symbolique qui donnerait l’équation entre femme, musique et perte, jouissance et interdit, en faisant appel à cette hypothèse de l’inconscient et d’une jouissance autre, tels que Freud et Lacan nous l’ont enseignée. Ce qui amène à questionner le désir qui gronde sous chaque hertz ôté aux derniers barreaux des échelles vocales naturellement et culturellement dévolues aux femmes.
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Envisager un exil vocal vers le grave, ce serait concevoir la voix de femme comme étant en train de s’installer vers une autre contrée qui serait celle des graves ; elle serait en passe de séjourner dans quelque chose qui lui serait étranger. Si nous nous en tenons à l’étymologie du mot exil - du latin ex(s)ilium venant de ex(s)ul, « séjournant à l’étranger, banni » ou de ex(s)ilere, « sauter dehors » - elle serait peut-être étrangère à sa destination première, supposée être celle de l’aigu, dont elle s’échapperait, ou dont elle deviendrait apatride, sorte de « bannie volontaire ». On pourra se référer aux recherches de Frédéric Vinot8, qui a mis en relation la question de la voix avec celle de l’exclusion. Que veut dire ne plus « avoir voix au chapitre » avec toutes les résonances sociales que cela implique11 ? Maintenant, s’il s’agit de transhumance, peut-être que la métaphore serait plus pertinente. La transhumance - du latin trans (de l’autre côté) et humus (la terre, le pays, mais aussi l’homme) - désigne la migration saisonnière des troupeaux d’un pâturage à un autre, en fonction des conditions climatiques, et le déplacement des ruches en fonction des zones de floraison, ou bien encore des insectes. Parler de transhumance vocale poserait la question d’une transformation de la voix dont nous ne savons pas encore - à l’époque où nous en parlons - si elle va s’installer dans un grave ou continuer sa route ailleurs. Valère Novarina dans Devant la parole, et Le théâtre des paroles, s’empare lui aussi de cette oscillation possible quand il évoque la trajectoire d’une parole qui s’aventure hors de ses limites. Il y a un voyage de la chair dehors du corps humain par la voix, un exit, un exil9, un exode et une consumation. Un corps qui s’en va passe par la voix : dans la dépense de la parole, quelque chose de plus vivant que nous se transmet10. […] Quand nous parlons, il y a dans notre parole un exil, […]et quelque chose qui nous sépare de nous. Parler est une scission de soi, un don, un départ. […] Il y a en nous, très au fond […] ce souvenir d’une empreinte laissée, ce vide laissé, qui nous permettent de donner notre parole11.
C’est bien pour cela qu’oser penser ce mouvement de la voix comme transhumance, désignerait un acte d’arrachement pour essayer soit de séparer, diviser, morceler, deux parts de nousmêmes, deux voix en conflit, soit pour essayer de retrouver une part vocale ancienne qui aurait été perdue, égarée. Wo sie war, soll ich gehen, sprechen 16? Où cette voix était, dois-je y aller, parler ?
in Dictionnaire populaire de médecine usuelle de Paul Labarthe, 1887
Qu’est-ce que l’exil ? La notion d’exil est associée à l’épreuve d’un déplacement par rapport à un référent-origine, ainsi qu’au sentiment de perte et de nostalgie lié à cette distance. Un autre élément essentiel de l’exil est la contrainte du départ sous la pression du danger qui génère un lien intrinsèque entre deuil et migration, et laisse sourdre l’imminence du non-sens, du trauma et de la nostalgie des origines. Il laisse lui aussi l’empreinte d’une place vide où s’enkyste la souffrance de l’absence.
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12. Claire GILLIE, « La Voix Unisexe », in Le Féminin, le masculin et la musique populaire d’aujourd’hui, Actes de la journée du 4 mars 2003. Document de recherche O.M.F. (Observatoire Musical Français), Université de Paris-Sorbonne, Paris, 2004. 13. Nous nous opposons là à certains textes qui postulent que la mue féminine aurait lieu vers les 17-18 an 18 Cf. d’autres interventions et débat sur ce sujet, durant ces journées d’Ambronay. 14. Sigmund FREUD, Totem et tabou, trad. de Totem und Tabu, reed. 1965, Paris : Payot, 1913. 15. Sigmund FREUD, « Grande est la Diane des Ephésiens », trad. J. Altounian, A. Bourguignon, P. Cotet, A. Rauzy, in Résultats, idées, problèmes, I, Paris, Presses Universitaires de France, 1984. 16. Paul-Laurent ASSOUN, « Topiques freudiennes du mythe. Thèses sur la Mythenforschunganalytique », Topique 2003/3 – n°84, p.143-184. 17. Nous remercions Bernard Lortat-Jacob, qui fut directeur du laboratoire d’ethnomusicologie du CNRS, d’avoir attiré notre attention sur cette figure. 18. Le lait de la mort. La ballade de l’emmurée et sa fortune littéraire. Études réunies par Véronique Gély-Ghedira, « Cahiers de recherches du CRLMC », Clermont-Ferrand, 1998. 19. Marguerite YOURCENAR reprend cette légende dans Le lait de la mort. 20. Jacques LACAN, Le Séminaire, livre VII, L’éthique de la psychanalyse, 1960, Paris : Le Seuil, 1986. 21. Nous avons puisé pour ce sous-chapitre dans TRAN Quang Haï, ASSELINEAU M., BEREL E., Musiques du Monde, Fuzeau, Courlay, 1993, qui a le mérite de « simplifier » et « résumer » ces techniques sous des formes qui nous ont beaucoup aidée à faire appréhender ces notions auprès des enseignants ; les détails plus précis sont référencés selon les autres sources (cf. plus loin). 22. Emmanuelle OLIVIER, « Nommer, narrer et commenter, manière de dire la musique selon les Bochimans Jul’hoansi » (Namibie), in Paroles de musiciens, Cahiers de Musiques traditionnelles n°11, Georg, 1991, p.14-23. 23. Idée que nous développerons plus loin, en posant l’hypothèse d’une « voix morcelée ». 24. Michel POIZAT, La voix du diable, (La jouissance lyrique sacrée), Paris : Métailié, 1991. 25. Expression que nous avons reprise au titre du livre TH. LAQUEUR, La fabrique du sexe, (essai sur le corps et le genre en occident), Paris : Gallimard, afin de l’appliquer au domaine privilégié de notre recherche concernant la production vocale et sa « couleur sexuelle ». 26. Cf. supra. 27. CICERON n’avait pas d’autres moyens d’action et d’influence que son éloquence. On peut assimiler à un traité politique ses trois livres de dialogues à la manière d’Aristote : De oratore. Mais c’est en fait un ouvrage de rhétorique au même titre que son Brutus (histoire de l’éloquence à Rome) ; puis il produit un Orator qui reprend le De oratore en un seul livre, en insistant particulièrement sur les problèmes esthétiques. Il défend dans cet Orator le droit à la « grandeur d’expression », c’est-à-dire à l’éloquence, que peut revendiquer toute personne qui aurait à traiter un grand sujet ; mais elle doit le réserver à cet usage. 28. Sigmund FREUD, Nouvelles conférences d’introduction à la psychanalyse, trad. de Neue Folge der Vorlesungen zur Einführung in die Psychoanalyse, 4° ed. 1984, Paris : Gallimard Folio, 1933. Dans sa 33° conférence consacrée à la féminité, Freud présente la femme comme une énigme, dont la sexualité prégénitale resterait un « continent noir ». 29. Jean-Michel VIVES, « La place de la voix dans la filiation », Filiation, Cliniques méditerranéennes n°63, Erès, 2000. 30. Référence aux chorals de Bach, dont celui pour orgue intitulé Ich ruf zu dir, et à sa cantate, bâtis sur une traduction de De profundis clama vit ad te Domine, exaudi vocem meam. 31. Michel POIZAT à qui nous faisions découvrir ce texte s’exclama que ces deux vers, à eux seuls, résumaient toute sa recherche. Rajoutant que les poètes avaient le don de dire en quelques mots ce qu’un chercheur passait sa vie à traquer… 32. Pour les transsexuels MTF, acquérir une voix de femmes ce n’est pas acquérir une voix féminine. Malgré l’intérêt de cette demande, il ne s’agit pas pour l’orthophoniste d’y répondre en leur faisant gagner des aigus vers une tessiture haute. Ils recherchent une souplesse au niveau des consonnes une sorte de fluidité plus près de l’articulation labiale que de l’articulation glottique. 33. Jacques LACAN, Le Séminaire, livre IV, La relation d’objet, 1957, Paris : Le Seuil, 1994. 34. Claude MAILLARD, La Grande Révolte, Editions Frénésie, Paris 2009.
Bédouin Homomumi de l'Hadramaout (photo. Hans Helfritz, 1931)
Théorie du récit, introduction aux « Langages totalitaires » Marianne Ebel
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La machine Ă ĂŠcrire de Julius Robert Oppenheimer (Los Alamos, New Mexico, U.S.A., 2018)
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Fiche signalétique de WILLIAM S. BURROUGHS au Los Alamos Ranch School (New Mexico, U.S.A., 2018)
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Le dÊsordre est la première partie de la vie (et l'ordre la seconde..) christian DÊsagulier
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Transcription stiefografique de l'intervention
La petite chaise de Monsieur Seguin Claire Gillie
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RÉCIT
ATIFS
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Main Street Jean-François Bory On m'avait pourtant averti que les Américains sont un peuple extrême et stupéfiant. Je visitai Denver (Colorado) et ses impressionnantes usines d'automobiles. A part la Main Street qui est d'est en ouest et possède, ainsi, quelle que soit la journée, une luminosité merveilleuse, le reste de la ville est vraiment terne : vers le soir, je choisis un petit hôtel tout au bout de cette grand rue qui donne dans le désert. Il y avait un balcon. Il faisait 20° et quand on ouvrait la porte fenêtre la climatisation s'arrêtait automatiquement. Cela m'enchanta parce que dans la pièce il faisait aussi 20°, précisément grâce à la climatisation. Dès le dîner fini, je remontai très vite dans ma chambre pour éviter la mélancolie ; du balcon je me mis à aboyer. Et tout de suite les chiens m’ont répondu d'ici, de là, à travers la nuit du désert qu'une faucille de lune illuminait faiblement. Je fais souvent des choses semblables quand j'arrive dans un endroit nouveau pour tromper mon ennui et pour faire connaissance avec l’environnement. Les premiers jours je n'arrive pas à écrire et je trompe ainsi ma peur du vide. Je ne fais rien de mal. Mais ce matin est venu me trouver le lieutenant de police Smithson pour me prier de ne plus aboyer la nuit. — Vous n’êtes pas un chien, mon cher garçon (phonétiquement : my dear boy !) — J'ai bien aimé aboyer avec les chiens cette nuit. Je n'ai rien fait de mal. — Aux États-Unis on ne fait pas des choses pareilles, mon garçon. Les règlements ne l'interdisent pas ; mais on ne le fait pas, voilà tout ! — Merci lieutenant, je ne le ferai plus. Mais je ne resterai pas aux États-Unis. Je retournerai chez moi. Là, on peut aboyer la nuit tant qu'on veut. — Je regrette mon gars ! Les étrangers et les touristes se plaisent beaucoup aux ÉtatsUnis. Seulement, voilà, ils n'aboient pas la nuit. Vous êtes, je crois, le premier.
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— Je rentrerai chez moi, là les étrangers peuvent aboyer tant qu’ils veulent. — Je n'en doute pas mon gars, l'Europe est un pays de mœurs faciles. Tout le monde sait ça ! — Ce n'est pas avoir des mœurs faciles que d'aboyer la nuit. — On commence par aboyer, garçon, et l'on finit par mordre. Les américains n'aiment pas qu'on les morde. Ce sont eux qui décident quand ils doivent être mordus. Je ne resterai pas aux États-Unis. Je partirai demain. Je n'aime pas les pays où l'on ne peut même pas aboyer la nuit. J'aime les pays libres.
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The importance of the multiplicity of minor events Demostene Agrafiotis 1. Declaration Axiom of departure: a series of minor events may have an impact on the life of poet/artist equivalent of a major event. In this perspective I will select a number of “non-significant” acts and situations from my youth which I consider to be strongly related to my art work and especially to my actions in the field of performance. 2. Preliminary indications The experience of a violent event, a difficult situation, a threatening or exhilarating environment may bring about a sense of the unbearable and / or indecipherable. At a later time, a work of interpretation and understanding could possibly shed light on the complexity of the emotions, feelings and aporias that arise from that experience. So, what are the conditions necessary for the elucidation of this experience ? What are the interpretative possibilities that narratives and discourses it can refer to later ? Psychoanalysis is confronted with this problem both at the theoretical level and at the level of practice. For example, how can a dream experience be transformed into this mixture of speech / narrative / narration / discourse of the patient or “analysant.” An analogy with scientific research can be seen where the "omnipresence" of the discovery and the force of the imagination must be elaborated and finally modeled in a scientific article where rationality, method and coherence predominate: A sort of hyper-rationalization a posteriori. When I look back at my personal history as a poet and performer, I ask myself what experiences of my childhood might enable me to construct a narrative about my performance origins. What importance could be attributed to this narrative in relation to initial “real” experiences ? To what extent do these "traumatic" events determine my artistic journey ? Is there a risk of being seen as an "exhibitionist" by delving into the memories of childhood? 3. Context I was born on 28/12/1946 in a small town in central Greece: Karpenissi, the capital of Eurytania's nome (prefecture), which lies on the slopes of Mount Velouchi in the south of Pindus mountains, the massif which dominates the western Greece. These mountains are known as “Agrafa”, which means “unregistered” in the official books of the Byzantine Empire and later of the Ottoman Empire. There has been a civilizational continuity of ethnic groups and nomads roaming in this
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After two or three weeks of therapy at the thermal springs, my mother felt that she was ready to face the harsh mountain winter. In truth, she had no specific health problem to treat there, but she needed a vacation, a break from the every-day burden of work. Also, I think, she did this to demonstrate to the local community that our family had the financial resources for the luxury of the spa. This way she kept a solid position for our family in the local social order. Impact ? The journey to my youth, as was presented in these paragraphs, can be seen as a first corroboration of my initial hypothesis, which was that many minor events, depending on the context, might play a bigger role in the span of one’s life than one major event. However, it remains an open question as to which the “minor” event is and which the “major,” as well as who decides on it. Another open question is, how might an “a posteriori” approach influence the assessment of the relative importance of certain events in one’s life or the evaluation of the deterministic potential of prior situations.
Jacques Sicard
MACROFILM
Editing: Angelos Sakkis Thanks to Katerina Goulas for her editorial comments.
Opus 8 (extrait)
Les Saisons de Marcel Hanoun
À l’automne, les personnes atteintes du syndrome de la mâchoire blessée de Robespierre, le 24 juillet 1794, c’est-à-dire de mélancolie révolutionnaire, se réfugient dans un interrègne. Dans la tétralogie saisonnière de Marcel Hanoun, à l’Automne, personnages et spectateurs souffrant de cette affection politique se partagent l’interface de l’image – interface construite comme l’intérieur du double vitrage d’une fenêtre : une face donnant sur l’histoire encore en feuille fanée, une face donnant sur le lieu de vision encore sans flambée. Cet intérieur, qui ondoie au rythme d’une musique d’une grande intensité émotionnelle, dépose sur les visages qu’il abrite une manière de transplant - le masque d’une bergamasque. Comme lui, ils brillent d’un beau coloris tout imaginaire, ils luisent de sueur et de sang.
Le cadre du plan est la façade principale du chalet de la Forêt Noire où loge le coucou d’horloge. Ce coucou-là a un air désemparé. S’étant pris en horreur, le temps voulut se fuir – c’est ce que suggère l’agitation de l’oiseau – s’en aller à tire d’aile et néanmoins là à scander l’heure et les demis fixé sur son perchoir mécanique. Le bec dans l’eau… de Bruges, le pont de l’âne aveugle, une barrière de jardin qui s’effondre dans l’eau comme s’il s’agissait d’un tronc, la décomposition infinie du mouvement d’abattage du tronc, l’arbre lent, le reflet de l’arbre, son reflet exposé dans une châsse vitrée, l’image incluse de la vitre peinte par Hans Memling il y a cinq cents ans… À l’enseigne du croissant de lune courroucée, il imprima un baiser blanc sur mes lèvres ; ce jour-là, nul ne vécut plus davantage. Et pourtant, le coucou cuit ressasse ; même si destiné à une seule chose, elle est sans fin ; depuis plus de cinq cents ans le pinceau retouche l’image, c’est l’hiver, l’hiver du marchand des quatre saisons, L’Hiver de Marcel Hanoun.
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On le voit assis dans un fauteuil, chez lui. Les avant-bras pliés et posés sur les cuisses, un peu ramenés vers la base de la poitrine, croisés en X fermé afin que les mains s’agacent, s’amusent, se lient. Les ongles sont très longs. Longueur qui lui impose un doigté, c’est-à-dire un mouvement incessant et rythmé des doigts, auquel il se prête avec plaisir, jouant, tandis qu’il parle, avec la corne unguéale courbe déformée jaunie par la pousse aveugle. Il a la voix altérée par un vieille blessure que le chant du coq aurait réveillée… Gilles Deleuze, c’est Nosferatu. Celui de Murnau, bien sûr. Comme il place ses ongles griffus à hauteur de ses yeux – pour lui aussi, ils ont un rôle écranique ; sur une surface lisse, ils crissent et l’on entend le bruissement des vagues, ils roquent et c’est le galop de la peste, ils claquent et se gonflent les voiles rouges, duvetées et soyeuses qui transportent l’armée des rats. Mais ils sont surtout l’accord discordant d’une immense plainte. La plainte du désir – ce pléonasme. Nosferatu porte un désir – désir qu’il porte comme un vêtement trop grand pour lui et pourtant rien ne peut faire qu’il ne soit à sa taille. – Vous n’avez pas chaud, en Enfer, avec la veste ? – Je ne sors jamais sans veste. Il n’y a pas de devenir. Ou plus justement, il n’est de devenir que du revenir. Le revenir des revenants qui reviennent après avoir accompli un mouvement de révolution. Qui s’annonce à l’humaine engeance avec dans le pas l’espèce singulière de ce retour – est un Nosferatu, autrement dit un révolutionnaire. Ainsi d’ailleurs, dans L’Abécédaire réalisé par Pierre-André Boutang, interview réalisée en 1988, à la condition d’être diffusée après sa mort, se présente, et attaque aussi bien, Gilles Deleuze : anthume il parlera posthume.
La machine anatomique de Raimondo di Sangro, prince de Sansevero (Naples, Italie, 1763-1764
Nosferatu
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Max Bense
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L'essai de Max Bill : « La pensée mathématique dans l'art de notre temps » Max Bense
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Max Bill en 1970
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Jean-Pierre Bobillot
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RenĂŠ Ghil, une antĂŠ-tradition futuro-lettriste ?
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EXPOSITION ISIDORE ISOU, CENTRE GEORGES POMPIDOU le 5 MARS 2019 En vrac : Bernard Blistène, sa fille, Jean-François Bory, Esther Ferrer, Orlan, Eric Fabre, Jacques Donguy, Frédéric Acquaviva
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et moi-même, dans une cour un peu secrète comme il y en avait encore beaucoup dans ce quartier de Paris – c’était une de ces magnifiques matinées exténuées de printemps – nous avait entraînés, vous disais-je, dans une cour un peu secrète pour nous montrer dans une ombre qui sentait la terre mouillée, un superbe magnolia qui, avec ses grosses fleurs blanches, avait l’air fleuri d’œufs à la coque. Ce sont de ces présents secrets qui font sans doute la force de la vie… C’est cela qui importe… Les moments. Moment : le soleil à travers les branches d’arbres qui posait des mailles de lumière sur nos visages. Moment : derrière la maison de la plage les odeurs mêlées de la sueur du bois poncé par la mer, du savon et de l’herbe écrasée. Moment : les cafés littéraires. Moment aussi, l’homme en train de se raser à la fenêtre d’en face et la femme en kimono qui se lavait les cheveux… Ah ! je me souviens enfin du nombre idéal de cannelures pour les colonnes, c’est dix-huit ! Quel étrange calcul mon esprit a-t-il fait pour retrouver ce chiffre maintenant ? Sentant venir la fin de l’émission, il fallait que je le retrouve. Voilà tout ce que nous savons faire dans l’existence, des calculs inutiles, des chimères, des fictions. Et quand nous sommes jeunes, je veux dire quand nous ne sommes pas encore centenaires, comme nous savons nous faire souffrir avec ces leurres, ces rêveries, ces illusions et surtout comme nous savons bien nous angoisser en mélangeant tout cela ! 237
Ah ! autant vous le dire à présent, voyez-vous mon petit Bertrand Pivot-Midy, la vie est un songe alarmé dont on se réveille dans le néant.
« Des livres ! on n'en lys pas ! »
à 591, si ! et même... 239
qu'
n en (re)lit !
ENDÈ LYÈRUSALÉM Asnaqètch Wèrqu
Comme Jérusalem
245
Ethiopiques ]16[ paroles et musique de Asnaqètch Wèrqu (www.budamusique.com) traduction Francis Falceto (reprise dans le CD Ethiopiques ]2[ chantée par Malèfya Tèka).
Crédits poégraphiques : La photographie de couverture Bains & Douches (Marseille, 2019) ainsi que la série accompagnant le texte de Claire Gillie, Keïta, le roi conteur tiraillé (Itato, Sénégal, 2015) ainsi que les deux s'intermissant façon cut-up dans la Lecture Expliquée de Marianne Ebel sont de christian Désagulier tout comme les photographies introduisant le chap. 7 (À L'Ombrière de Norman Foster, Marseille, 2019) et inaugurant le chap. 8, (Grand Central, New York City, U.S.A., 2018). Idem Les tableaux cousus de Manega (Burkina Faso, 2012) et Hip Hop à Wegeltena (Éthiopie, 2011), constituant les photographies de la 1ère partie d'allophonhics de Luc Champagneur dont la 2de et dernière sera au sommaire du prochain opus de 591. Idem La termitière de Sabodala. Des extraits d'allophonhics été publiés dans les revues L’intranquille (n°16) et 591 (n°5). Un opuscule a paru dans la section Les Communs des éditions Fidel Anthelme X sous le titre « allophonhics (extraits) ». Ce texte appartient au cycle « des accordages. Les Pan(o)ptiques de RoMANCE sont signés de leurs plumes par ©Brigitte Palaggi. Les Ours tous droits sortis de l'ouvrage de Nathalie Léger-Cresson sont reproduits avec l'aimable autorisation des Éditions des femmes / Antoinette Fouque. Le texte de Claire Gillie Exil, exode ou transhumance des voix de femmes : la quête du grâave, a paru originalement dans les « Cahiers D'Ambronay n° 6 ; Musique, Femmes Et Interdits, 2008 » (Ambronay Editions, 2013). Les passages tronqués dans le cadre de cette republication ont été indiqués par le sigle [...]). La petite chaise de Monsieur Seguin a été préalablement publié dans la revue éponyme APPROCHES que dirige Guy Samama, dans le numéro intitulé À perte de voix d'octobre 2012. Les paroles d'ENDÈ LYÈRUSALÉM sont extraites d'Ethiopiques ]16[, Asnaqètch Wèrqu (www. budamusique.com), et traduites par Francis Falceto, reproduitent ici avec son autorisation laquelle chanson est autrement interprétée par Malèfya Tèka dans Ethiopiques ]2[. Les chiffres des sections du #6 de la revue reproduisent les fontes des numéros de rues destinées aux poèmes architecturaux habitables d'Hector Guimard. Droits réservés
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591 international revue dirigée par Jean-François Bory
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Il a été tiré de cet ouvrage 3 exemplaires de luxe comportant un collage original, signé et chaque fois différent de Jean-François Bory Éditeur : éditions TERRACOL, 327 route du chalet, Monteille, 14270 Mézidon Vallée d'Auge, www.editions-terracol.fr Conception graphique : Jean-François Bory Composition poégraphique : christian Désagulier Copyright : tous les auteur-e-s conservent leurs droits. www.lespressesdureel.com Dépôt légal : 4ème trimestre 2019 isbn : 978-2-491418-00-7 La termitière de Sabodala (Sénégal, 2015)
.. ce dièse pour que toute la lire à 591 !
Crédits poégraphiques : Les Ours tous droits sortis de l’ouvrage de Nathalie Léger-Cresson sont reproduits avec l’aimable autorisation des Éditions des femmes / Antoinette Fouque. Le texte de Claire Gillie Exil, exode ou transhumance des voix de femmes : la quête du grâave, a paru originalement dans les « Cahiers D’Ambronay n° 6 ; Musique, Femmes Et Interdits, 2008 » (Ambronay Editions, 2013). Les passages tronqués dans le cadre de cette republication ont été indiqués par le sigle [...]). La petite chaise de Monsieur Seguin a été préalablement publié dans la revue éponyme « Approches » que dirige Guy Samama, dans le numéro intitulé À perte de voix d’octobre 2012.
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Des extraits d’allophonhics ont été publiés dans les revues « L’intranquille » (n°16) et « 591#5 ». Un opuscule a paru dans la section « Les Communs » des éditions Fidel Anthelme X sous le titre « allophonhics (extraits) ». Ce texte appartient au cycle « des accordages ». Achouak, Adam, Amadou, Arif, Berna, Christveille, Dani, Emmanuel, Foumba, Jasmine, Juned Abedin, Mamadou, Oumar, Oussama, Santarose, d’autres plus discrètement, ont rendu possible allophonhics. Ces collégiens ont fréquenté l’UPE2A (unité pédagogique pour élèves allophones arrivants) dont s’occupe l’auteur depuis 2014, à l’interface du Jura et des Vosges, là où Alstom, quelques décennies durant, a mis au travail des milliers d’immigrés. Les paroles d’Endè Lyèrusalém sont extraites d’Ethiopiques ]16[, Asnaqètch Wèrqu (www.budamusique.com), traduites par Francis Falceto et reproduitent ici avec son autorisation, laquelle chanson est différemment interprétée par Malèfya Tèka dans Ethiopiques ]2[. Les Pan(o)ptiques de rOmance d’Olivier Domerg sont photographies signées de leurs plumes par ©Brigitte Palaggi. C’est une photographie de christian Désagulier qui ouvre cette livraison de 591#6, Bains & Douches (Marseille, 2019) et la clôt avec La termitière de Sabodala (Sénégal, 2015). Du même photographe sont celles qui accompagnent le texte de Claire Gillie, Keïta, le roi conteur tiraillé (Itato, Sénégal, 2015), ainsi que les deux s’intermissant façon cut-up dans la lecture suivie de Marianne Ebel, tout comme Les tableaux cousus de Manega (Burkina Faso, 2012) et Hip Hop à Wegeltena (Éthiopie, 2011) illustrant la conribution allophonhics de Luc Champagneur. Du même celles introduisant les §7 et §8, L’ottoportrait prise à l’Ombrière de Norman Foster (Marseille, 2019) et Grand Central (New York City, U.S.A., 2018). Les chiffres des sections de la revue reproduisent les fontes des numéros de rues destinées aux poèmes architecturaux habitables d’Hector Guimard. Droits réservés