R e c h e rc h e s
Marco Pecoraro
Devenir Suisse? Les déterminants de la naturalisation ordinaire
R e c h e rc h e s
mente avec l’âge à un rythme décroissant. Ce
sie à la société d’accueil – accroît la propen-
résultat est cohérent avec la théorie du capital
sion à se naturaliser pour les primo-migrants.
humain (Becker,1962) stipulant que les années
En ce qui concerne le statut migratoire des en-
d’expérience accroissent la productivité, opti-
fants de primo-migrants, on constate que les
misant en retour les chances de naturalisation.
étrangers de la génération intermédiaire 8 ont
En ce qui concerne les enfants de primo-
moins de chance de se naturaliser que ceux
migrants 7, la relation inverse prévaut: la pro-
issus de la deuxième génération. Enfin, la
pension à se naturaliser diminue avec l’âge.
maîtrise de la langue locale, qui constitue une
Souvent perçue comme une étape importante
• Droit de séjour illimité en Suisse;
Ceci ne contredit pas l’interprétation en termes
dimension importante de l’intégration à la so-
du processus d’intégration des migrants, la
• Accès aux emplois associés à l’exercice du
de capital humain. Puisque la population étran-
ciété d’accueil, accroît naturellement la pro-
naturalisation se réalise par l’acquisition de la
pouvoir (police, fonctionnaires administra-
gère sous étude est limitée aux individus en
babilité de naturalisation.
nationalité du pays d’accueil. Pour se natura-
tifs, etc.);
âge de travailler dès 15 ans, et que la plupart
liser, les candidats doivent remplir des critères définis par la loi du pays d’accueil, même si les autorités ont un droit d’appréciation pour ce qui est de l’octroi de la naturalisation.
• Droit de conserver la nationalité d’origine selon la loi du pays de provénance 2; • Circulation facilitée dans l’Union européenne pour les ressortissants non-européens.
des enfants de primo-migrants remplissent
Enfin, la nationalité d’origine joue un rôle
d’office les conditions de résidence pour être
essentiel dans la décision de se naturaliser.
naturalisés, la naturalisation aux âges jeunes
Quelle que soit la génération considérée, pres-
s’apparente dès lors à un choix optimal.
que tous les ressortissants de l’UE15 /AELE (excepté les Français) sont moins enclins à
Depuis quelques années, on assiste à un intérêt croissant des milieux de la recherche
Quant aux coûts engendrés par la naturalisa-
Le niveau de formation, qui constitue un autre
se naturaliser que les Italiens (= modalité de
pour les causes et conséquences de la natura-
tion ordinaire, ils comportent:
aspect des ressources individuelles, affecte en
référence), en particulier lorsqu’ils viennent de
lisation. Cette analyse a pour but d’améliorer
• Résidence en Suisse d’au moins 12 ans 3;
général positivement la probabilité de natura-
pays qui interdisent de conserver la nationa-
la compréhension quant aux facteurs inter-
• Taxe de naturalisation;
lisation. Ce résultat, qui confirme les travaux
lité d’origine après acquisition d’une nouvelle
venant dans le choix de se naturaliser, sur la
• Test d’aptitude 4 à réussir;
antérieurs sur la naturalisation en Suisse (Büh-
nationalité (c’est-à-dire l’Allemagne, l’Autriche
base de données inédites, issues d’un appa-
• Obligation de servir dans l’armée (pour tou-
mann, 1993; Fibbi et al., 2007), indique que les
et l’Espagne). En effet, pour les citoyens de ces
riement entre deux sources d’information ex-
te personne de sexe masculin âgée de 18 à
gains de productivité, associés à un niveau de
pays, la perte de la nationalité d’origine les
haustives: les recensements fédéraux de la
25 ans);
formation supérieur, maximisent les chances
prive de l’accès à l’immense marché du travail
population de 1990 et 2000 établis par l’Office
• Taxe d’exemption de l’obligation de servir
de se naturaliser. Une durée de résidence sou-
européen. Alors que la propension à se natu-
fédéral de la statistique et des données longi-
(pour toute personne de sexe masculin âgée
tenue en Suisse – gage d’une adaptation réus-
raliser diminue pour les ressortissants des
tudinales émanant du Registre central des
de 26 ans à 30 ans);
étrangers de 1981 à 2005, représentatives de la
• Perte de la nationalité d’origine (pour toute
population résidante permanente de nationa-
nationalité jusqu’à la fin 19915 puis unique-
lité étrangère.
ment pour les ressortissants des pays interdisant la double nationalité dès 1992).
Approche théorique Cette tentative de prendre en compte les difféL’approche adoptée suppose que la décision
rents bénéfices et coûts de la naturalisation
de se naturaliser est rationnelle dans le sens
permet d’identifier le rôle de divers facteurs
où elle découle de la maximisation de l’utilité
socio-démo-économiques affectant la propen-
individuelle (DeVoretz et Pivnenko, 2005). Le
sion à se naturaliser.
choix de cette démarche revient à considérer que les migrants éligibles à la naturalisationne ne décident de se naturaliser que si les béné-
Résultats principaux pour 2000
fices excèdent les coûts. Dans le contexte helvétique, l’acquisition de la nationalité suisse
Nous examinons ici les facteurs intervenant
comprend les bénéfices suivants:
dans le choix de se naturaliser pour les étran-
• Droit de vote et d’éligibilité aux niveaux fé-
gers éligibles à la naturalisation 6 en âge de
déral, cantonal et communal 1; 36
travailler. La propension à se naturaliser aug37