Le rôle des pouvoirs publics dans les télécommunications en Belgique (1900-2010)

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Du côté de la radio, l’Etat continue à utiliser les technologies disponibles pour améliorer ses services de communications télégraphiques ou téléphoniques internationales et maritimes, puis aériennes. Une nouvelle station émettrice de grande puissance, la première depuis la destruction de la station de Laeken en 1914, est inaugurée en 1927 à Ruysselede pour le compte de l’administration. Elle est construite par la société de Robert Goldschmidt (voy. supra, titre II), sous le bénéfice de plus en plus précaire de sa concession exclusive en matière de télégraphie sans fil entre la Belgique et le Congo belge, et terminée par la Société Belge Radio-Electrique (SBR). La même année toutes les stations congolaises sont rachetées par l’administration coloniale, mettant fin à « l’immixtion de tout élément étranger dans notre 29 service de T.S.F. », souligne le premier ministre et ministre des colonies Henri Jaspar . La nouvelle installation de Ruysselede permet la mise en place du service Belradio, qui assure les liaisons télégraphiques et téléphoniques sans fil entre la Belgique et le Congo belge, les EtatsUnis puis, rapidement, le reste du monde. Comme le soulignera plus tard le ministre en charge des télégraphes et des téléphones, « ce qui distingue tout spécialement l’exploitation de la voie Belradio des autres exploitations de la régie, comme le télégraphe et le téléphone avec fil, c’est que Belradio est en concurrence avec les services étrangers de communications 30 internationales (…) » . Voilà toute l’originalité d’un monopole national dans pratiquement tous les Etats européens, qui entraîne néanmoins une concurrence entre tous ces monopoles dans leur service international – cas qui demeure unique pour les secteurs étudiés à cette époque. L’Etat maintient cependant fermement, pour protéger ses services radio, l’obligation d’obtenir une autorisation pour installer un poste radio de réception ou, mais à des conditions 31 encore plus strictes, d’émission . Il n’empêche, l’usage des ondes est en pleine effervescence, et suscite un intérêt grandissant parmi les investisseurs privés, mais aussi les inventeurs voire les amateurs de tout genre. Un nombre impressionnant de petites sociétés productrices d’appareils radioélectriques fleurit en 32 Belgique au cours des années 1920 . La plus puissante d’entre elles est la Société Belge RadioElectrique (SBR), fondée en 1922 notamment par Maurice Travailleur (voy. supra, titre II – pour rappel, un ancien membre de la maison du roi, également fondateur en 1920 de l’agence de presse « Agence Télégraphique Belge », en abrégé Belga, promise à un bel avenir), des proches de Goldschmidt et les grands organismes financiers belges de l’époque tels que la Société générale, le banquier Lambert, la Banque de Bruxelles ou la Banque d’Outre-mer. La SBR reprendra, dans les faits, les activités, brevet et autres contrats de la société de Goldschmidt, qui est mise en liquidation en 1931. Raymond Braillard (voy. supra, titre II) y est engagé comme ingénieur en chef. La SBR devient ainsi le principal fournisseur d’équipements radiophoniques en Belgique, tant pour l’Etat (à Ruysselede et, plus tard, pour l’INR) que pour les particuliers ou les sociétés privées de radiodiffusion, notamment grâce à des brevets et des contrats de distribution exclusifs dont elle dispose sur certains accessoires techniques, comme 33 les lampes radio . En novembre 1923, elle fonde la première station de radiodiffusion privée, 29

F. STOCKMANS (1981), art. « Goldschmidt Robert », dans Biographie nationale, t. XLII, col. 326 et 334. Intervention du ministre des Postes, des Télégraphes et des Téléphones, Ann.parl., Sénat, sess. 19361937, 5 mai 1937, p. 1234. 31 Arrêté ministériel du 7 août 1920 – Télégraphes – Conditions d’établissement des postes récepteurs de télégraphie sans fil, M.B., 19 septembre 1920 ; arrêté ministériel du 30 octobre 1926 déterminant les conditions d’établissement et d’usage des installations radioélectriques privées émettrices et émettricesréceptrices, M.B., 20 janvier 1927. 32 Voy. l’aperçu des 58 (!) sociétés de radio-électricité créées entre 1919 et 1929 dans B. BOSTYN (2007), op.cit., pp. 112-210. 33 B. BOSTYN (2007), op.cit., pp. 121-144 ; F. STOCKMANS (1981), op.cit., col. 329-332 ; [R. FLEURUS] (20022008), « SBR Histoire », www.radiopassion.be (consulté le 10 mars 2010) ; et Archives générales du Royaume, Groupe Philips en Belgique, 1919-1996, Filiales de Philips Belgium, n° 97, Société Belge Radio30

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